Citations sur L'exilée (35)
Plus tard, lorsque ses enfants écoutaient le récit de cet incident, ils s'écriaient : « Maman, l'as-tu vraiment retrouvée à cause des prières de papa? »
Un éclair de malice passait dans les yeux vifs de Carie tandis qu'elle répondait : « Peut-être, mais on ne l'aurait pas vue si je n'étais pas retournée. C'est très bien de prier, naturellement
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mais il vaut toujours mieux essayer aussi soi-même, une fois de plus! ”
Une partie de sa gaieté lui venait de son âme débordante de vie, mais il y avait aussi, chez elle, une volonté réfléchie de protéger ses enfants de la vie orientale qui les entourait, car elle la trouvait trop belle et trop triste pour ces cœurs d'enfants. Elle s'est toujours sentie oppressée par le trop d'humanité de l'Orient ; l'acceptation de la souffrance humaine. Elle ne voulait pas que ses enfants apprissent cela trop tôt, cependant elle leur montrait les beautés à leur portée. Elle soulevait son bébé à la fenêtre pour lui faire entendre le joli tintement argenté des clochettes de la pagode, mais elle avait garni la vitre du bas d'un rideau plissé afin de cacher à Edwin la vue du mendiant assis tout le jour en dessous, le nez et les joues rongés de lèpre.
« Dès l'instant où je vis Carie vaincue, je me mis à haïr saint Paul, de tout coeur, et il me semble que toute femme doit le haïr comme moi, à cause de ce qu'il a fait dans le passé à des femmes comme Carie, des femmes nées libres et fières, et néanmoins d'avance condamnées en raison même de leur féminité. »
C’est ce qu’elle avait désiré ; il fallait rire pour nous empêcher de pleurer.
Cet amour de la beauté, l'immédiate réaction qu'elle provoquait chez Carie, faisait partie de sa chair et de son sang ; l'émotion, l'abandon de son être, en face de ce qu'elle admirait, étaient dans sa nature. Elle se sentait grisée au milieu d'une prairie ensoleillée, au printemps ; elle riait, pétillante de joie, sur le point de danser ; cependant elle aimait au même degré les choses calmes, simples et propres. Elle ne voyait pas seulement la beauté dans un étang de montagne au clair de lune, mais aussi dans une pièce tranquille, fraiche et propre, dans de la vaisselle bien lavée et brillante.
Je ne serais pas étonnée si Andrew s’était trompé au sujet du Bon Dieu. Je crois qu’on devrait choisir toutes les choses heureuses et brillantes de la vie: la danse, les rires et la beauté.
Carie était très indulgente, lorsqu'elle ne sentait aucune intention de malice sous les paroles prononcées. Je me souviens qu'une Américaine lui dit un jour avec impatience: "Cela me déplaît beaucoup d'entendre les indigènes nous traiter de démons étrangers, ils doivent tout de même se rendre compte que nous leur rendons parfois service".
Carie sourit doucement et répondit: "Ils ignorent peut-être comment nous appeler. Un jour, une vieille femme malade est venue me demander du secours. Elle s'est inclinée devant moi si bas que son front touchait à terre, et elle m'a dit humblement: "Je vous en supplie, très honorable démon étranger, venez à mon aide". Tout dépend de la façon dont c'est dit", ajouta Carie.
Elle finit par se dire,presque désespérée,que seule la beauté pourrait la guérir;la splendeur tranquille des brumes au-dessus des vallées dont elle gardait le souvenir,les cimes des monts,les petites rangées de fleurs,qu’elle avait cultuvees dans chacun de ses demeures;la musique et la poésie,car elles aussi procurent une sorte de paix.Cependant elle redoutait cette paix qui,peut-être,ne lui venait pas de dieu,mais simplement d’un assouvissement de cette partie d’elle-même qui avait soif de bonheur et qu’elle avait cherché toute sa vie à comprimer.Le Dieu qu’elle connaissait était un dieu austère,et l’austérité ne pouvait pas lui venir en aide,car elle était contraire à sa nature.
IL avait une femme. Mais il ne parvint jamais à s'en souvenir complètement.
Dans toute ma vie je n’ai jamais rencontré personne qui prêtât attention à une seule de mes paroles ou de mes larmes. Mon père ne m’aimait pas car j’étais une fille ; mon mari ne tenait pas à moi ; mon fils me méprise. On m’a toujours dédaignée parce que je suis une femme laide et ignorante. Cependant, vous vous êtes intéressée à moi, bien que vous soyez une étrangère, une Américaine, aussi votre foi sera la mienne. Vous devez avoir la vraie religion puisqu’elle vous rend bonne – même envers moi.