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EAN : 9782246314325
208 pages
Grasset (18/09/2002)
4.07/5   420 notes
Résumé :
Ca a commencé par erreur.
C'était les fêtes de Noël et le pochard en haut de la côte m'avait dit qu'ils embaucheraient carrément n'importe qui. Alors j'y suis allé et je me suis retrouvé avec cette sacoche de cuir sur le dos. Parler d'un boulot, je pensais. Peinard!
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Critiques, Analyses et Avis (43) Voir plus Ajouter une critique
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C'était dans un bar miteux de L.A. comme on en fait plus. Maintenant, il faut que tout soit propre et aseptisé, même les chiottes et les caniveaux. Je ne sais plus à quelle tournée j'en étais arrivé, les verres vides s'entassaient sur le comptoir. Il devait être minuit, lorsque que le pochtron d'à-côté me sort « tu devrais aller à la Poste, ils embauchent n'importe qui ! ». Me voilà donc à cinq heures du mat', L.A. s'éveille, un sac en bandoulière, prêt à embarquer pour une nouvelle tournée. Postier suppléant. En-dessous, il n'y a rien. Je suis le dernier maillon de la chaîne de distribution. Si les facteurs se portent pales, parce qu'ils ont trop bu la vieille ou qu'il pleut à averses, je deviens le seul, avec mes chaussures trouées, à affronter les éléments de la nature, les vieilles rombières aux bigoudis et les grosses rombières en peignoir ouvert, l'unique même pour acheminer la dernière étape du courrier.

Premier roman de Bukowski. A l'époque, il n'était pas encore tout à fait écrivain mais déjà pochtron convaincu. Il est ce facteur, toujours en retard sur sa tournée mais qui ne faiblit pas, qui ne faillit pas même lorsque des trombes d'eau s'abattent sur sa camionnette, sur ses mocassins, sur sa sacoche. Étonnamment, il met du coeur à l'ouvrage et de l'humanité à cette tâche ingrate. Des rapports pleuvent sur le bureau de son supérieur, malgré tout il garde son humeur et continue sa besogne coûte que coûte, comme un sacerdoce. C'est comme baiser une grosse au foyer des vieilles rombières, genre qui n'arrive plus à jouir. Il la besogne, la besogne, jusqu'à plus soif, jusqu'à ce qu'elle le supplie d'arrêter.

Et pour un premier roman, je découvre déjà toutes les facettes du bonhomme partagé entre les femmes, les courses et la boisson. Je le découvre, homme amoureux, homme besogneux, qui met du coeur à l'ouvrage, autant pour distribuer le courrier que pour s'assoir au comptoir ou baiser une pimbêche. Il est unique et empli de bonté et d'humanité dans ce livre, le seul à distribuer avec autant de fidélité le courrier de gens qui l'indiffèrent et le méprisent totalement. Mais, je sens aussi que ce boulot le ronge de l'intérieur, une douleur dans la poitrine qui le comprime et c'est pour cette raison qu'il file au bar et se pinter la gueule. Je lui trouve des excuses à cet homme, ce grand pochtron de la littérature ; parce qu'il sait m'émouvoir...

Un grand roman autobiographique, des vies comme ça couchées sur papier, j'en demande encore et encore. de toute façon, des putains de vie font forcément des putains de livres avec ou sans putain, d'ailleurs. Pas qu'il ne fréquente pas les putains, mais quand t'as arpenté les rues dans tous les sens sous des trombes d'eau ou en plein cagnard, quand t'as besogné grosse, rombière et pimbêche, le soir t'as plus le coeur à l'ouvrage pour arpenter de nouveau les trottoirs nocturnes des putains bandantes sous tout temps. Tu préfères avoir la queue en berne, te poser sur un tabouret et t'enfiler quelques verres sans rien penser. Et peut-être que là, sans rien demander, une femme genre magnifique même à la troisième pinte viendra s'asseoir à côté de ton tabouret, commandera un whisky et une bière, et te proposera de faire l'amour comme une putain. C'est à ce moment-là que tu te dis, putain j'aurais dû être écrivain, et que tu sais que tu tiens une bonne histoire à écrire, si tu trouves un éditeur qui a les couilles de te publier.
Lien : https://memoiresdebison.blog..
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Drôlement noir

Je me souviens ne pas avoir été tellement emballé autrefois par Les Contes de la folie ordinaire. Pour quelles raisons ? Je ne m'en souviens pas. Toujours est-il que j'ai laissé tombé Bukowski, rangé dans les rayons de ma mémoire quelque part entre John Fante et Hubert Selby JR.

Ce doit être encore un coup de Babelio, un commentaire, une recension qui l'a remis sur ma route.
Tant mieux.

Premier roman inspiré de ses expériences de postier et de sa vie de pochtron, Charles Bukowski se dédouble en Henry Chinanski, le narrateur, qui porte pendant onze ans la croix de son boulot.

La poste, l'US Postal, tel un enfer, une géhenne à laquelle le personnage paraît condamné, par facilité, par habitude, jamais viré malgré les rapports des surveillants. Condamné à ce boulot parce que la Poste est un exemple, une métaphore du monde du travail et du monde social en général.

« Onze ans de foutus, tués d'une balle dans la tête. J'avais vu le job bouffer les mecs. On aurait dit qu'ils fondaient. […] Ils fondaient ou alors ils prenaient du lard et devenaient énormes, surtout le cul et le ventre. […] Je dormais toute la journée pour pouvoir aller au boulot. le week-end fallait que je boive pour oublier tout ça. »

En réalité, Henry n'a pas besoin de la Poste pour boire. Il a besoin de boire pour vivre. Dans ce monde insupportable, il a deux réconforts, tous deux comme des formes d'abrutissement, de régression foetale : la bibine et la baise, rarement par plaisir, plutôt pour tuer le temps et dormir d'un sommeil sans rêve.

« Désolé, baby, j'ai fait. Après ça j'ai roulé sur le côté. Et j'ai roupillé. »

Le rapprochement physique, régressif, est cependant un refuge dans une sorte de tendresse primitive. « Je me suis collé tout contre sa croupe chaude et je me suis endormi en quarante-cinq secondes. »
Henry Chinanski n'a rien d'une brute, c'est plutôt un tendre, un généreux dans ce contexte où on ne peut rien espérer de mieux d'une relation interpersonnelle, la rencontre avec autrui étant impossible.

« Il a une grosse bite, a dit Fay. Il était ici l'autre soir et il m'a demandé : "Ça te plairait de te faire tringler par une grosse bite ?" et je lui ai dit : "J'aimerais mieux me faire tringler avec amour !"
- Ça a l'air d'être un homme du monde, je lui ai dit comme ça. »

Comme la vie, le roman n'a pas de sens, c'est une errance immobile, un effondrement, jusqu'à la porte ouverte par l'excipit qui, à défaut de sens, donne au moins une forme à la valeur du néant : « Le matin on était le matin et j'étais toujours vivant. Peut-être que je vais écrire un roman, j'ai pensé. Et c'est ce que j'ai fait. »

Il a bien fait, je trouve. C'est très facile à lire, plaisant — oserais-je dire. C'est cru, c'est dur, mais raconté avec finesse et humour, avec la distance, le détachement éprouvé devant l'absurde, l'absurdité de la bureaucratie postale comme de la succession des jours.
Et somme toute, la vie est tellement absurde qu'elle ne saurait être tout à fait désespérée.
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Fidèle à lui-même. Bukowski nous offre un bon moment de lecture. La description de sa vie quotidienne de postier. Avec beaucoup d'humour. Je crois que je n'ai jamais autant ri en lisant les aventures de Hank Chinaski. Il porte toujours le même regard désabusé sur lui-même, sur tout le monde, sur le fonctionnement de la société. Pour palier au manque de sens de sa vie quotidienne, il se réfugie dans les femmes, l'alcool et les courses. le trio salvateur, qui l'aide à vivre. Pour son premier roman, peu de temps après « Mémoires d'un vieux dégueulasse » publié par Ferlinghetti, c'est gagné. Peut-être pas aussi incisif que ses livres ultérieurs mais on a là tous les ingrédients qui feront sa renommée.
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Bukowski fait partie des écrivains que je préfère. J'apprécie sa façon de dire les choses sans détour et j'avoue que j'aime beaucoup lire ses récits autobiographiques (comme Factotum). J'ai d'ailleurs une préférence pour les récits où il parle de sa vie à ses chroniques fictives publiées dans des journaux. le Postier fait partie de ses récits autobiographiques puisqu'il y raconte sa propre expérience d'employé des services postaux des Etats-Unis.

Evidemment, connaissant un peu le personnage de Henry – Hank – Chinaski (son alter ego), je m'attendais à quelques frasques de sa part, notamment au niveau du boulot, à beaucoup d'alcool et de gueules de bois, à des courses de chevaux et à quelques amours tumultueuses. Je n'ai pas été déçue. Bukowski se raconte toujours de la même façon : il n'est pas assez conformiste pour avoir une vie « normale » et passer pour un employé exemplaire. Il est souvent en retard ou absent et a parfois des altercations avec d'autres employés ou des chefs alors que les services postaux ont un « code de moralité » et insistent sur le fait que les employés sont censés se « conduire d'une manière qui se reflète favorablement sur le service postal ». C'est d'ailleurs pour cette raison qu'un court chapitre est consacré aux chefs d'accusation et sanctions disciplinaires dont il a pu faire l'objet en tant que postier. Mais Bukowski/Chinaski raconte aussi les délires des « petits chefs » et de certains usagers, ainsi que l'absurdité d'un système qui détruit ses employés en exigeant toujours plus d'eux : ils doivent, par exemple, trier plus de courrier qu'ils ne le peuvent et n'ont même pas le temps de prendre une pause ou de déjeuner. A côté de ça, Henry Chinaski a des relations amoureuses, ce qui n'est pas non plus de tout repos (certains passages sont assez drôles), il boit beaucoup et il joue aux courses. C'est certainement ce qui l'a aidé à tenir pendant ces onze longues années passées à trier et à distribuer le courrier.

Même si j'ai préféré Factotum, j'ai beaucoup aimé le Postier. C'est toujours un plaisir de retrouver un personnage comme Henry Chinaski et sa vision très particulière du monde du travail, des relations humaines et de la vie en général.
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Bukowski a une façon d'écrire à l'image de sa vie : décousue et au ras de la moquette. Il ne s'embarrasse pas d'un surcroît de vocabulaire, il va à l'essentiel pour parler des femmes et de l'alcool qui lui servent à oublier son métier de postier. Onze années de sa vie défilent avec quelques jolies fulgurances céliniennes et il ne fait pas dans la dentelle pour son premier livre.
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Citations et extraits (44) Voir plus Ajouter une citation
« Méchant méchant méchant homme ! Vous êtes venu pour me violer ! »
« Ecoutez la daronne, laissez-moi passer. »
« LE MAL EST ECRIT PARTOUT SUR VOTRE FIGURE »
« Vous croyez que je ne le sais pas ? Allez, laissez-moi sortir d'ici ! »
D'une main j'ai tenté de l'écarter. Elle m'a griffé tout un côté de la figure, et pas qu'un peu. J'ai lâché la sacoche, ma casquette est tombée, et comme j'épongeais le sang avec mon mouchoir elle s'est amenée et m'a ratissé l'autre côté.
« SALE CONNASSE ! NON MAIS CA VA PAS, LA TETE? »
« Vous voyez ? Vous voyez ? Vous ête mauvais ! »
Elle était tout contre moi. Je l'ai empoignée par le cul et j'ai mis ma bouche contre la sienne. Ses seins étaient tout contre moi, tout son corps était collé contre moi. Elle a écarté la tête en me repoussant.
« Violeur ! Violeur ! Sale violeur ! »
Je lui ai happé un nichon avec ma bouche, puis je suis passé à l'autre.
« Au viol ! Au viol ! On me viole ! »
Elle disait vrai. Je lui ai baissé sa culotte, j'ai ouvert ma braguette, la lui ai mise, et je l'ai fait reculer jusqu'au divan. On s'est écroulés dessus.
Elle levait les jambes haut.
« AU VIOL ! » qu'elle beuglait.
Je l'ai finie, j'ai refermée ma braguette, empoigné ma sacoche et je suis sorti en la laissant contempler le plafond, calmée...
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Je me suis mis au lit et j’ai essayé de dormir. Comment qu’elles jactaient [les perruches] ! Chaque muscle de mon corps me faisait mal. J’avais beau me coucher sur ce côté-ci, sur ce côté-là, sur le dos, j’avais mal. J’ai trouvé que le mieux c’était encore sur l’estomac, mais je m’en suis vite fatigué. Ça prenait deux ou trois bonnes minutes pour me tourner d’une position à l’autre.
Je me tournais et me retournais, pestant, criant un peu, et rigolant un peu également à cause du ridicule de la chose. Elles continuaient à papoter. Ça commençait à bien faire. Qu’est-ce qu’elles savaient de la douleur, dans leur petite cage ? Pipelettes à têtes d’œuf ! Rien que des plumes ; une cervelle grosse comme une tête d’épingle.
J’ai réussi à m’extraire du lit, passer à la cuisine, remplir une tasse d’eau, et puis je me suis approché de la cage et j’ai jeté de la flotte en plein sur elles.
« Enfoirées ! » je les ai agonies.
Elles m’ont regardé d’un air sinistre sous leurs plumes mouillées. Elles avaient fermé leur clapet ! Rien de tel que le vieux traitement à la flotte. J’avais emprunté une page aux psychiatres.
Et puis la verte à gorge jaune a rentré la tête et s’est mordu la gorge. Ensuite elle a regardé en l’air et s’est mise à bavacher avec la rouge à gorge verte, et c’est reparti.
[…] C’en était trop. J’ai porté la cage dehors. […] 10 000 mouches se sont élevées dans les airs. J’ai posé la cage par terre, ouvert la porte de la cage et me suis assis sur les marches.
Les deux piafs ont regardé la porte. Elles (ou ils) comprenaient pas, et pourtant… Je sentais leur cervelle de minus essayer de fonctionner. Elles avaient leur nourriture et leur flotte juste ici, mais c’était quoi, cet espace grand ouvert ?
La verte à gorge jaune y a été la première. Elle a sauté de son perchoir jusqu’à l’ouverture. Elle est restée à agripper le fil de fer. Elle regardait les mouches autour d’elle (ou lui). Elle est restée là 15 secondes, à se décider. Et puis quelque chose s’est déclenché dans sa petite tête. Elle (ou il) ne s’est pas envolé à proprement parler. Elle a foncé tout droit dans le ciel. Plus haut, toujours plus haut. Droit en l’air ! Droit comme une flèche ! […] La saloperie de bestiole était partie.
Ensuite ça a été le tour du rouge à gorge verte.
Le rouge hésitait beaucoup plus. Il tournait sur le fond de la cage, nerveux. C’était pas une mince de décision. Les humains, les oiseaux, tout le monde doit prendre ce genre de décision. C’était pas facile.
Alors ce vieux rouge tournait en rond, à réfléchir. Soleil jaune. Mouches qui bourdonnaient. Homme et chien qui observaient. Tout ce ciel, tout ce ciel.
C’était trop. Vieux rouge a sauté sur le fil de fer. 3 secondes.
ZOOP !
Plus de piaf.
Picasso et moi on a ramassé la cage vide et on est rentrés dans la maison.
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Un jour j’étais au bar entre deux courses et j’ai vu cette femme. Dieu ou quelqu’un d’autre n’arrête pas de créer des bonnes femmes et de les jeter dans les rues, et celle-là a le cul trop gros et celle-ci a les nibards trop petits et cette autre est cinglée et cette autre a de la religion et celle-là encore lit dans les feuilles de thé et celle-là arrête pas de péter et celle-ci a ce gros tarin, et cette autre a les jambes cagneuses…
Mais de temps en temps une femme s’amène, en pleine fleur, une femme qui fait carrément péter sa robe… une créature sexuelle, une calamité, la fin de tout. J’ai levé les yeux et elle était là, tout au bout du bar.
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J’ai regardé à travers la vitre. L’infirmière a montré mon enfant du doigt. La figure de l’enfant était très rouge et il hurlait plus fort que tous les autres enfants. La pièce était pleine de bébés hurleurs. Toutes ces naissances ! L’infirmière avait l’air très fière de mon bébé. Enfin, j’espérais que c’était bien le mien. Elle a pris la fillette pour que je puisse mieux la voir. Je souriais à travers la vitre. Je savais pas quoi faire. La môme arrêtait pas de hurler dans ma direction. Pauvre morpionne, je pensais, pauvre satanée petite morpionne. A l’époque je ne me doutais pas qu’elle serait un jour une belle fille, mon portrait tout craché, hahaha.
J’ai fait signe à l’infirmière de reposer l’enfant, puis je leur ai fait au revoir à toutes les deux. C’était une chouette infirmière. Belles jambes, pareil pour les hanches. Seins passables.
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La sécurité? La sécurité on pouvait la trouver en prison. Trois mètres carrés et pas de loyer, pas de charges, pas d'impôt sur le revenu, pas de pension alimentaire. Pas de carte grise. Pas de contravention. Pas de conduite en état d'ivresse. Pas d'argent perdu aux courses. Service médical à l'oeil. Camaraderie avec ceux qui ont les mêmes aspirations. Messe. Troufignons pour tirer sa crampe. Enterrement gratuit.
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