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3.92/5   6 notes
Résumé :

Né en Franche-Comté en 1909, ordonné prêtre en 1933, le Père Roger Bulliard a passé quinze ans de son sacerdoce comme missionnaire dans l'Arctique et douze ans comme aumônier militaire dans l'armée canadienne en Corée, au Japon, au Canada et en Allemagne.

Avec Inuk, l'auteur nous présente l'Esquimau, l'homme de l'Arctique, prisonnier des glaces du Pôle et des steppes de la terre stérile... prisonniers surtout d'esprits malveillants, de traditi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
J'ai déniché ce livre, qui a rudement vécu, dans une boite à livres. Ce qui a aiguisé ma curiosité en feuilletant l'introduction, c'est qu'il a été écrit par un missionnaire catholique. Je ne savais pas que les populations de l'Arctique avait également fait l'objet de tentatives d'évangélisation et encore moins qu'une compétition avait existé entre missionnaires catholiques et anglicans. Tentatives, car convertir un Inuit est loin de signifier le faire adhérer. Et l'auteur, le Père Buliard, l'a bien compris.

Le père Buliard, que les Inuits surnomment le Falla (le Père), ou plus communément Longue-Robe, appartient à la congrégation des Oblats de Marie-Immaculée (OMI). Il a vécu parmi et comme les Esquimaux du Cuivre de 1934 à 1948. (Depuis, ils ont été rebaptisés Inuits du Cuivre, le terme d'Esquimaux étant jugé péjoratif ; c'était celui utilisé par leurs ennemis les amérindiens pour les désigner et qui signifie « mangeurs de viande crue »). Son "terrain de jeux" se situe aux alentours de la Terre de Victoria au nord du Canada.

La première partie décrit sans complaisance et avec moult anecdotes (plus ou moins dramatiques d'ailleurs) le mode de vie particulier de ce peuple nomade, ses croyances et coutumes, leur rapport à la mort, les techniques de chasse. Ah ! la chasse au nathek (au phoque) : tout un art de patience et de mine ! Ce n'est cependant pas le club Med. Certaines pratiques sont cruelles. le sort de la femme n'est franchement pas enviable par exemple. Mais c'est vraiment intéressant et fascinant. J'avais déjà lu des ouvrages, principalement sur Groenland, et j'ai encore découvert plein de trucs. La seconde partie en revanche est nettement moins palpitante car majoritairement dédiée aux missionnaires qui l'ont précédé et ceux qu'il a côtoyé.

Le Père Buliard a réellement cherché à comprendre les Inuits. Il est conscient que les "civiliser" trop brusquement et n'importe comment pourrait s'avérer plus néfaste que bénéfique. Il met aussi en garde contre les besoins et servitudes que génèrent les Grands-Sourcils (les Blancs).

Mais, mais... on le sent aussi tiraillé entre sa sympathie et son admiration pour ce peuple qui a su s'adapter à des conditions de vie extrême et « ses tares et ses défauts » si contraires à ses convictions. S'il est plus pondéré dans la première partie, plus compréhensif, et tente de rester objectif, dans la deuxième partie en revanche, le jugement moral prend de plus en plus le dessus. Ce qui est le plus dérangeant à mes yeux c'est cette supériorité morale qu'il affiche, parfois j'en suis sure, sans en avoir conscience.

Un exemple parmi d'autres de la manière dont il considère les Inuits : « Ce sont des primitifs, à l'intelligence brute, non développée, incapable de comprendre nos concepts abstraits, surtout religieux. Quant à les voir accepter notre morale, il ne faut tout de même pas oublier que ces pauvres gens ont derrière des siècles de paganisme, d'amoralité, d'animalité même, si j'ose dire. »

Ce genre de propos me hérisse toujours le poil. Je relativise malgré tout car il s'est aussi efforcé à d'autres reprises de mettre en avant les mérites de ce peuple quand bien même cela heurtait ses convictions.

En conclusion, une lecture plaisante et instructive d'autant plus intéressante qu'elle est abordée sous un angle de vue moins fréquent : celui d'un missionnaire catholique. Si l'écriture a un peu vieilli et use un peu trop à mon goût de points d'exclamation et de suspension, elle est aussi parsemée de mots et expressions inuits qui la rendent vivante. Quelques photos d'époque viennent également agrémenter ce récit et, très utile pour suivre les déplacements, une carte du Grand Nord Canadien a été ajoutée …

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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Lui, le chasseur, dégénère en commerçant ; lui, l’indépendant, il est presque toujours en dette avec les Blancs qui se chargent bien parfois de ne jamais le libérer ; lui, qui méprisaient les Grands-Sourcils, est obligé d’admettre qu’il vit comme eux désormais, il accepte de croire à l’importance de toutes ces bagatelles dont nous encombrons nos existences ; lui dont la vie était si variée, si fantaisiste, si dilettante – un jour aux phoques, un jour à l’ours, un jour à la pêche selon son humeur – il asservit ses journées, ses semaines, ses mois, son année, toute son existence à la poursuite de cette petite bête [le renard blanc] dont il n’avait cure naguère. A ces maudites fourrures, il sacrifie tout aujourd’hui : sa liberté, sa santé, ses instincts de vagabondage et, tout compte fait, son réel bonheur.

Première partie : INUK-L’HOMME, Chapitre VI : … Notre « gibier » quotidien.
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Hypocrite et sournois, voilà bien la première caractéristique de l’Esquimau. Pour nous, c’est un vilain vice, pour lui, un chasseur ! c’est bonne guerre, intelligente du moins.
Les trois quarts de ceux qui ont été assassinés par lui ont reçu la mort des mains de ceux qu’ils croyaient leurs amis, après une démonstration récente de belles manières, après un large sourire, traitreusement et par derrière : c’est la mode par ici ! […] En frappant juste et à l’improviste sans que sa victime ne s’en soit doutée, n’a-t-il pas fait montre de la suprême habileté ?

Première partie : INUK-L’HOMME, Chapitre III : « Mangeur de cru »
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Dès qu’elle a tendu à son mari son morceau préféré, tout en se léchant goulument les mains, toutes les paumes malpropres s’avancent comme des pinces vers le plat qui déborde, saisissant chacune leur portion. On y mord à pleine bouche, coupant au ras des lèvres tout ce qui ne veut pas rentrer d’un geste sûr du couteau toujours affuté ou de l’ulu, cette large lame en demi-lune. (Depuis quinze ans que je les observe, j’attends toujours de voir un bout de piton nasal tomber sur le parquet ; j’ai perdu cet espoir, mais n’en reste pas moins éberlué chaque fois que je regarde ces virtuoses se rogner un bouchon de viande à fleur de babines !) … Arêtes et os qui ne peuvent se croquer, bouts de peaux indigestes sont recrachées dans le plat communautaire par-dessus les morceaux, dont chacun tout à l’heure se resservira ;

Première partie : INUK-L’HOMME, Chapitre IV : Comme une horde de loups.
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Sans forfanterie, ils se présentent au visiteur : Inuoyugut ! (Nous sommes les hommes, les hommes par excellence !) (Inuk : un homme ; inuit : des hommes.)
Les indiens, par eux, sont vite et dédaigneusement classés : « Irkrelret ! (Les Poux !) »
Les Blancs, eux aussi, dès le premier coup d’œil, se trouvent étiquetés : «krablunain ! (Les Grands-Sourcils !) »
Eux, ils étaient et restent après comparaison Inuit, les hommes, les seuls vrais.
Chez leurs voisins cependant, et partout où une frayeur, faite d’étonnement et de mépris, a pu apporter leur renommée, ils ont un autre nom qui nous est plus connu : c’est le cri des premiers Indiens qui les rencontrèrent : «Esquimeow ! (Les mangeurs de chair crue !) ».

Première partie : INUK-L’HOMME, Chapitre I : « Inuoyugut ! » Nous sommes les hommes.
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Les esquimaux se sont rendus les esclaves de denrées et d’objets qu’ils ignoraient et dont ils se passaient avantageusement, que ce soit en matière de nourriture que d’habillement : toutes choses qu’ils achètent aujourd’hui en prenant des habitudes nouvelles et en concentrant leur vie de chasseur sur un nouveau gibier : le renard, qui est devenu leur seul pouvoir d’achat, leur seule monnaie d’échange. […] A ces maudites fourrures, il sacrifie tout aujourd’hui : sa liberté, sa santé, ses instincts de vagabondage et, tout compte fait, son réel bonheur.

Première partie : INUK-L’HOMME, Chapitre VI : … Notre « gibier » quotidien
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