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EAN : 9782213654188
312 pages
Fayard (06/03/2013)
3.17/5   3 notes
Résumé :

Dans ce récit mêlant plaisirs et destinées tragiques, François Buot bouscule l’idée d’un « gay Paris » dominé de 1900 à 1940 par une communauté discrète, repliée sur elle-même – hormis quelques vedettes sur le devant de la scène.

Pendant quarante ans, profitant d’une législation particulièrement tolérante, le « gay Paris » s’affiche jour et nuit. Invertis, lesbiennes ou travestis investissent les music-halls et les dancings, racolent dans les... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
L'auteur annonce d'emblée vouloir ne parler que de ceux qui n'ont pas eu la parole, les non érudits, les non bourgeois, les gens communs ; mais, pour les atteindre, ou pour brosser l'état d'esprit de la société, passe souvent les témoignages des autres. La présentation est plus ou moins chronologique, découpée en thèmes (lieux, types de personnages par exemple).

Pour aller vite, il semble que les moeurs se soient légèrement déliées à la fin du XIXème et jusqu'aux années trente, entre autre sous l'influence de quelques intellectuels audacieux (Genet, Gide, Cocteau, Proust, Colette), de célébrités mondaines et de la diminution des tensions répressives. Cette diminution des tensions n'aurait cependant permis qu'une plus grande affirmation des individus dans leurs comportements, mais non un affaiblissement de la pression du qu'en-dira-t-on : en gros, faites ce que vous voulez mais tâchez de ne pas vous faire une réputation - quelques personnalités échappent cependant à cette règle. Ainsi, sauf gros scandale, le système judiciaire est plus que tolérant : les personnes arrêtées, y compris en flagrant délit, sous la pression d'une dénonciation soutenue, sont relâchées sans être inquiétées. le reste du temps, les relations gays, sauf si l'un des partenaires est mineur, échappent à la loi. Il semblerait que le lesbianisme soit moins toléré, au prétexte d'une accusation d' incitation à la débauche plus marquée : le lesbianisme est perçue comme une distraction pour vieux messieurs voyeurs. En outre, la masculinisation crée des tensions au sein même du monde lesbien - Colette y voyant par exemple une continuation d'une inféodation au principe patriarcal par la prise du rôle dominant par la « garçonne » plutôt qu'un cheminement émancipatoire féministe auquel elle aspire vers les comportements voluptueux qu'autorise la pratique de l'amour sans les hommes.

De l'autre côté, sans qu'elle élève pour autant la dignité de ceux qui s'en réclament, la féminisation des comportements masculins chez les gays (folles, tantes et travestis) paraît provoquer davantage l'adhésion des opinions pour l'amusement qu'elle provoque. L'auteur souligne aussi avec insistance que la dichotomie hétéro-homo est bien pâle durant les années folles ; ces termes scientifiques n'ayant pas cours au sein d'une population peu encline à suivre les cloisonnements qu'imposent les connaissances et à se laisser guider par elles : on vit, tout simplement, sans se laisser inquiéter par un qualificatif ou un autre, et tel homme et telle femme couche avec qui lui plaît comme cela vient au gré des circonstances et selon son désir.

Il ressort une impression que la médiatisation à grande échelle des mêmes principes théoriques auraient, sous l'influence entre autre de la culture américaine et de l'héritage de l'intransigeance des pensées d'extrême-droite, à partir de la fin des années quarante, figé en principe régulateur des passions qui s'exprimaient plus librement au plus fort de la troisième république. Car cette période libérée que connaît aussi Berlin, et peut-être même à une échelle plus élevée encore, s'achève brutalement par les descentes de police, les réductions des lieux de rencontres dans toute l'Europe dès le début des années trente jusqu'aux fermetures d'établissement avec la mobilisation générale et, à Paris, la débâcle de quarante.

Guidé par des personnages transgressifs mais affirmés tout au long de l'ouvrage dans des récits ou descriptions qui rapportent continûment des situations où la sexualité s'exprime de manière débridée avec la satisfaction du désir pour seul motto, on se plaît à croire à une société contemporaine moins stigmatisante et plus relâchée sur les questions sexuelles et identitaires - avec l'impression que si la tolérance judiciaire s'est évanouie dans une reconnaissance juridique des modes de vie gays et lesbiens aujourd'hui, la morale, elle, autrefois regardante sur les réputation seulement, semble avoir suivi le chemin inverse et s'être durcie par l'insinuation de la censure jusque dans les esprits. Un ouvrage enthousiasmants donc par ce goût de l'auteur qu'il parvient à nous faire partager de la liberté individuelle conçue comme la séduisante expression spontanée du désir plutôt qu'une lutte brutale menées par des scansions de pénibles revendications identitaires.

Il ressort de ces description des lieux de rencontres, des comportements, des soirées, une
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Un livre bien documenté et très bien écrit, présentant le Paris interlope du début du 20ème siècle, avec un approfondissement sur les années 20-30, mon époque préférée !!!!!! Une plongée passionnante dans le Paris des années folles.
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J'ai trouvé ce livre intéressant, même s'il ne donne pas une bonne image de l'homosexualité. En effet, il semblerait qu'aux époques concernées, comme de nos jours, l'assouvissement des sens était une priorité et ce peut importe l'endroit ou l'on se trouvait (trouve) et avec qui on se trouvait (trouve). le Dieu Phallus et sa Sainte Semence...

J'ai toujours eu du mal, et encore aujourd'hui,à comprendre que"certains d'entre nous" soient prêts à s'avilir, ravaler toute fierté, toute dignité, au point de fréquenter des back rooms, hanter les urinoirs, rechercher les humiliations et les coups pour quelques instants de plaisir qualifiés par eux d'intenses. (et s'ils ne l'étaient pas ?)

Mouais chacun ses goûts, mais difficile après cela de combattre l'homophobie et de passer pour sain d'esprit.
Lien : http://chezvolodia.canalblog..
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Citations et extraits (55) Voir plus Ajouter une citation
La grande crise économique de 1929 est un tournant décisif […] les mouvements d’extrême-droite recrutent […] En 1933, pour la première fois, des incidents éclatent aux portes du Magic City […] la police cible les bars, les bains vapeurs, les bals et les garnis. Les rapports se multiplient à partir de 1935, et ils se terminent tous par le compte-rendu de la rafle [..] la mesure la plus spectaculaire concerne les promenoirs. Les directeurs de théâtre et de music-halls reçoivent l’ordre d’éclairer tous les coins sombres. […] En Angleterre, les propriétaires de pubs n’ont plus le droit de servir les homosexuels, les vals travestis sont interdits […] En Allemagne […] quand René Crevel arrive à Munich en août [1933], il comprend assez vite que la situation est devenue dramatique. […] À Paris, si la fête continue, elle est en sursis. [..] Cette embellie de Juin 36 est une formidable victoire mais aussi une grande illusion […] L’effondrement de Juin 40 et l’effroyable exode marqueront définitivement la fin d’une époque et d’un style. […] En 2013 […] Paris […] cultive son âge d’or pour attirer les visiteurs du monde entier […]l a réalité est que le pays a subi, pendant de longues années, un lavage de cerveau suivi d’une répression sans limite pour se prolonger par l’épuration morale des années d’après-guerre.
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Pour certaines « stars » de la haute société parisienne, il est inutile de prendre la moindre précaution. Leur préférence pour les femmes n’est plus un secret pour personne. Les interdits de la société bourgeoise ne les concernent plus. Elles sont ailleurs. Le lesbianisme n’est pas une simple mode, mais un véritable phénomène de société. Dans le microcosme parisien qui bruisse de rumeurs, et qui raffole de provocation délicatement sulfureuses, le saphisme est un atout. La jolie « courtisane » Liane de Pougy, l’extravagante, Sarah Bernhardt, la scandaleuse, marquise de Belbeuf ou la précieuse duchesse de Clermont-Tonnerre, en savent quelque chose.
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[Francis] Carco n’invente rien. […] Ses premiers romans d’apache, ont tous les ingrédients du genre : la nuit, la fête triste, la fatalité du destin, les filles de joie, le crime sordide. Le style classique, rapide et direct relève du grand reportage. Le regard est lucide, presque détaché. Carco compatit mais ne juge pas. Le sexe est suggéré, jamais montré, restant un ingrédient efficace pour corser le récit et exciter la curiosité du lecteur. Le succès populaire est donc au rendez-vous. […] Ses livres se vendent à des dizaines de milliers d’exemplaires.
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Au milieu, d’un tel tohu-bohu, le rappel à l’ordre des hommes de science, l’analyse des médecins qui ont, dès le XIXe siècle, inventé, le personnage de l’homosexuel tombe à plat. Le pouvoir médical ne veut pas en démordre. Il a bien l’inverti et l’homme normal, le malade et le bien portant, le pervers opposé à l’homme saint. Ces déclarations assommantes, ces livres prétentieux, indiffèrent l’homme de la rue. Cela peut même faire sourire. Cette enquête révèle de manière éclatante que le peuple n’obéit pas aux injonctions d’une élite, fût-elle scientifique. À la fin des années 30, c’est la bourgeoisie française qui va récupérer ce discours pour imposer l’idée d’un partage entre hétéro et homosexuels. Pour éviter tout retour en arrière, on rappelle les normes de la masculinité pour ressortir l’attirail répressif : censure, menace et sanction. Toute personne normale se doit d’avoir un comportement acceptable ! Les gens infréquentables sont rejetés aux marges. Cette reprise en main coïncide avec la montée en puissance de l’extrême-droite, et l’effondrement de la IIIe République.
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Les femmes des classes populaires étant toujours les plus vulnérables, elles se cachent. Dans la société des salons, les riches et les aristocrates s’adonnent plus facilement aux plaisirs saphiques. Dans les hôtels particuliers des beaux quartiers, à l’abri des regards indiscrets, on profite de ces « plaisirs nouveaux ». Certaines « hôtesses », connues du tout-Paris qui s’amuse, organisent des soirées ultra privées, du côté des Champs-Élysées. ou de l’Opéra. Il existe également quelques maisons de rendez-vous très discrets dans les environs de la Madeleine de la Chaussée-d’Antin pour des relations tarifées. Il s’agit généralement des femmes mariées largement protégées par leur statut social (et par la complicité de maris volages…). Le poids des convenances et les traditions repose quand même une prudence. Pour provoquer la réputation de toute la famille. Les liaisons et les intrigues abondent, mais la vie conjugale en public est normale.
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