Ce qui m'attiré vers cette série, c'est la couverture du deuxième tome. Celle du premier est moins voyante et plus artisanale, mais la curiosité m'a poussée à tenter l'aventure.
J'ai un avis mitigé sur ce premier volume. Il y a de bonnes bases d'un côté (un bon sens de l'écriture, un univers assez original, des rebondissements), mais quelques lacunes de l'autre (l'exagération de la passion amoureuse, le manichéisme, l'infantilité des personnages, mais aussi de nombreuses répétitions dans les formulations).
L'histoire se passe dans un monde parallèle au nôtre. Les Kreattures (Sorcières, Sorciers, Loups-Garous et ainsi de suite) se sont coupés du monde des hommes et ont créé leurs propres royaumes : Atlantide, Xovara (anciennement, le royaume d'Halloween), et Aguilleone. Zarina Grawell, Princesse Impériale, est l'héritière du plus puissant des clans de Sorcières. Sa vie se déroule sans accroc jusqu'à son quarante-huitième anniversaire, où elle fait la connaissance de Kordillius Xomiraz – lui-même héritier du clan ennemi des Grawell.
Les événements tournent autour de la relation de ces deux-là, et l'histoire fait un peu penser à Roméo et Juliette : deux familles qui se détestent, mais deux enfants qui s'aiment, un amour impossible, des trahisons, des complots… L'intrigue est banale, et finalement, un peu creuse. Certaines choses m'ont même parues dénuées de sens, comme la rencontre entre Kordi et Zarina. Comment le premier a-t-il pu entrer sur les terres des Grawell sans problème ? Et surtout sans craindre leur courroux ? Je n'ai pas très bien compris comment c'était possible.
Mais si l'intrigue est le point faible de ce livre, son point fort, c'est l'univers. L'auteure a vraiment cherché à creuser les détails. La magie est omniprésente, mais ne se manifeste pas de la même manière pour tous. Toute Sorcière possède un pentacle sur sa peau dès la naissance, et ce dernier brille quand elle se sert de la magie ou qu'elle a une forte émotion. Chacun d'entre elles possède donc une couleur qui est propre à son âme. Les variétés de Kreattures sont complexes et parfois, la limite est un peu floue. Je n'ai pas bien saisi ce qu'est un Fann Tasia (terme qui regroupe plusieurs types de Kreattures), ni en quoi consiste la différence entre un Sorcier et un Magicien. le second n'a pas de pentacle et est obligatoirement partisan de la magie blanc, mais sinon, je vois pas.
En revanche, c'est vraiment dommage qu'il n'y ait pas de carte, car je n'ai pas su situer les royaumes les uns par rapport aux autres. Visiblement, ils sont tous séparés par la mer, mais où sont-ils par rapport aux humains ? Dans un autre univers accessible uniquement par magie ? Sur une autre planète ? Tout ce qu'on sait, c'est qu'ils ont « quitté la planète Terre le 31 octobre de l'an 152 ». Cela peut vouloir dire beaucoup de choses…
Les personnages sont très nombreux (il n'y a qu'à voir les généalogies des deux familles principales, très complexes), et on s'y perd un peu. Au début, je les trouvais très manichéens (il n'y a qu'à voir la réaction des Grawell pour l'anniversaire de Zarina), mais plus on avance dans l'histoire, moins ils le sont. de la même manière, j'ai trouvé que le style s'améliorait au fur et à mesure de la lecture (je viens de relire les premiers chapitres, et j'ai l'impression que l'écriture est plus enfantine).
D'ailleurs, j'ai été déçue par les personnages. Zarina est dépourvue de défauts. Son corps est parfait, son visage est parfait, ses cheveux sont parfaits, ses yeux sont parfaits, et c'est la plus puissante Sorcière qui ait jamais existé. Elle rencontre l'amour parfait en la personne parfaite de Kordillius. C'est vraiment dommage qu'il n'y ait pas un seul petit défaut dans ce tableau. Je crois que le passage qui m'a le plus marqué, c'est celui-ci : « La robe de la Sorcière était froissée, et des taches, dont la provenance était incertaine, souillaient la dentelle. Quant à sa chevelure, elle méritait un bon brossage. Mais sa beauté n'en avait pas le moins du monde souffert. Elle pouvait être à moitié défigurée, qu'elle aurait toujours autant d'effet auprès des hommes. » À moitié défigurée, ça me paraît un peu fort, quand même…
La symétrie parfaite entre Kordi et Zarina est assez énervante : tous les deux seuls héritiers de puissantes familles Sorcières, tous deux beaux comme des dieux grecs, tous deux très forts, tous deux le même âge, tous deux peu intéressés par la puissance de leur titre… C'est merveilleux comme le destin fait bien les choses ! L'histoire le rationalise par le fait que ce soient des âmes-soeurs, mais bon… Je n'ai pas accroché à leur romance parce que je n'ai pas éprouvé de sympathie pour eux et que je trouve que ça va trop vite. On arrive à la moitié du livre qu'ils ont déjà couché ensemble alors qu'un deuxième tome attend ! Si leur relation n'était pas un point très important de l'histoire, ce ne serait pas grave, mais ce n'est pas le cas et c'est dommage. En revanche, un rebondissement inattendu m'a vraiment prise de cours, et je salue l'auteure pour avoir osé.
À treize ans, on n'envisage pas souvent de tuer un protagoniste de cette importance.
Par rapport aux personnages secondaires, j'ai été presque choquée quand j'ai vu que les grands-mères et arrière-grands-mères de Zarina sont moins matures que leur petite-fille. J'ai essayé d'imaginer mon quarante-huitième anniversaire en compagnie de mes grands-mères éternellement jeunes, et ça ne ressemblerait pas du tout à ça. Étonnant, pour des dames de plus de 500 ans… Par ailleurs, je suis d'accord avec Asuna : il y a les filles Grawell d'un côté, et les garçons Xomiraz de l'autre et c'est un peu étrange. Pourquoi n'y-a-t-il pas un seul garçon chez les Grawell alors qu'elles sont aussi nombreuses ? Mais peut-être qu'on en saura plus dans le deuxième tome…
L'écriture m'a laissé sur ma faim. Il y a beaucoup de répétitions et de tournures de phrase inadaptées (trop exagérées ou pas assez). Les prénoms sont dits redits et répétés trop souvent, et à de nombreuses reprises, j'ai eu envie de les remplacer par « il », « elle », « la jeune fille », « celui-ci ». La ponctuation m'a agacée plusieurs fois car, la plupart du temps, j'avais envie de rajouter des virgules, parfois des points, et de temps en temps, de corriger les erreurs (comme cette phrase de Théodore : « Zarina, tu n'as pas une chose appartenant à tes amis. » de base, c'est une question : « Tu n'aurais pas… ? »). Mais bref, je chipote.
Pourtant, malgré ces quelques défauts, cette lecture fut agréable. Les pages se tournent facilement, on se laisse un peu bercer par l'histoire – et les chapitres sont courts, qu'est-ce que j'aime ça ! C'est une lecture assez « mignonne », au final.
Mais quoi de plus normal pour un livre publié dans le cadre d'un concours par une auteure de treize ans ? J'ai tout d'abord pensé qu'elle avait remanié son histoire à seize à cause de la date de parution, mais ne n'était qu'une réédition – la première étant dotée de plusieurs fautes d'orthographe, d'après les internautes (d'ailleurs, il en reste encore beaucoup). Pour une auteure de cet âge, le talent est là, c'est indéniable – je pense que je n'avais pas la moitié de ses capacités à son âge… Toutefois, cela explique une certaine immaturité des personnages. Tous sont très âgés (Zarina est une des plus jeunes et a 48 ans), et pourtant, tous se comportent très innocemment.
Sauf quand Zarina retrouve Kordi mourant chez les Xomiraz et qu'elle coupe les doigts d'une Nécromancienne avant de l'immobiliser et de jeter un tissu en flamme sur ses vêtements… Après l'avoir vue aussi innocente, c'est réellement choquant de la voir faire ça, d'autant plus qu'elle aurait pu la tuer d'un coup, ç'aurait été bien moins cruel. le plus étrange, c'est qu'on ne ressent aucune méchanceté dans ce qu'elle fait, juste une espèce de panique due à l'urgence de la situation. Par la suite, par de remords.
Heureusement, plus on avance et moins l'histoire est manichéenne.
Une chose est sûre, je lirai la suite avec intérêt. Si
Marjorie Burbaud a été capable d'écrire comme ça à l'âge de treize ans, il me tarde de voir ce qu'elle est capable de faire aujourd'hui !