L'homme de la Renaissance

"Regarde la lumière et admire sa beauté. Ferme l'oeil et observe, ce que tu as vu n'est plus, et ce que tu verras n'est pas encore."
(Léonard de Vinci)

"L'homme de la Renaissance" fait partie de ces heureuses lectures qui vont satisfaire votre curiosité d'apprendre un peu plus sur l'histoire. Lecture relativement ardue, mais pas au point de laisser votre regard errer distraitement à la recherche d'une pièce de mobilier instable qui aurait vite besoin d'une cale de fortune.

L'éditeur Eugenio Garin explique dans la préface que le but de l'ouvrage n'est pas de décrire chaque passant qui foulait les trottoirs de Florence aux alentours de 1500 AD, mais de saisir des personnages typiques pour l'époque. le résultat du travail de neuf historiens donne alors un aperçu "multifacette" de l'homme de cette période de basculement vers l'ère moderne et de grand élargissement de l'esprit européen. de l'homme qui est enfin devenu le centre de l'intérêt des sciences, des arts et de la philosophie.

En neuf chapitres on va pouvoir comparer le style de chaque historien et les différentes façons de traiter leur sujet. Les amateurs d'essais dans le style de Michel de Montaigne seront enchantés par "L'homme de cour" du toujours élégant Peter Burke, ou par "La femme de la Renaissance" de Margaret King. Les aventuriers apprécieront "Voyageurs et indigènes" de Tzvetan Todorov, particulièrement emblématique de l'époque. Saviez-vous que Christophe Colomb a pris la mer avec une liste de "monstres marins" à observer, et qu'il a dûment coché tous ceux qu'il a réussi à voir ? Que Hernan Cortés avait un faible pour l'architecture des pyramides Maya ? Vous verrez défiler artiste, condottiere et soldat, prince et cardinal, banquier et marchand... et sur la note philosophique jouera E. Garin en personne, dans un chapitre consacré à la pensée de l'époque.

Même si la période de la Renaissance est d'une durée relativement courte comparée au Moyen-âge, elle a réussi à enrichir notre histoire et notre culture au moins autant que ce dernier.
Mais cet ouvrage collectif, malgré ses forces, présente aussi quelques faiblesses. Il manque un peu de cohérence chronologique : de la fin du XIVème siècle jusqu'au XVIIème siècle bien sonné, l'étendue reste assez large, et il est donc difficile de généraliser. Et même si les portraits sont soigneusement choisis pour montrer les changements radicaux dans tel ou tel domaine (notamment chez les banquiers et dans l'armée), cela reste des occupations d'élites. On oublie quelque part les métiers des gens ordinaires, qui n'ont certainement pas échappé aux mutations de l'époque, même si elles n'étaient pas aussi visibles. Et l'ensemble concerne uniquement la Renaissance italienne, sans montrer son impact dans le reste de l'Europe.
Malgré tout, ces essais restent d'une grande richesse, intéressants et très plaisants à lire, et méritent peut-être plus que mes quatre étoiles.
Et si vous en n'avez pas assez, vous pouvez, dans la même veine, trouver "L'homme baroque" de R. Villari, ou "L'homme médiéval", dirigé par J. le Goff.

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