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Critique de nadejda


« Voilà bien longtemps, à Coldhaven, petit port de pêche sur la côte est de l'Ecosse, les gens s'éveillèrent un matin dans l'obscurité de la mi-décembre pour découvrir non seulement que leurs maisons étaient ensevelies sous une couche de neige épaisse et irréelle comme il ne s'en voit qu'une ou deux fois par génération, mais aussi qu'une chose étrange s'était produite pendant leur sommeil, une chose dont ils ne purent rendre compte qu'au moyen de rumeurs et d'histoires qu'en honnêtes croyants, ils avaient honte de colporter, des histoires évoquant le diable, ou les esprits, des histoires reconnaissant à contre-coeur la présence dans le monde d'une puissance cachée que, la plupart du temps, ils préféraient ignorer. »

C'est ainsi que commence «Les empreintes du diable», par une légende inquiétante qui s'insinue et pervertit la réalité d'un petit village côtier écossais, Coldhaven le bien nommé, pris dans un tourbillon d'embruns, plein de mystère, de folie, de vent et de solitude, où règne la méfiance vis-à-vis de l'étranger et la peur. Ce diable qui est venu et a laissé des traces de son passage autour et sur les maisons n'a-t-il pas pu pénétrer et marquer le coeur des habitants au cours de cette nuit où la neige l'a rendu silencieux ?
Il semble bien qu'il mène effectivement la danse dans ce récit envoûté et envoûtant de John Burnside où, bien des années après l'apparition de ces mystérieuses empreintes, tous les protagonistes sont habités au tréfonds d'eux-même par un côté diabolique qui les domine parfois et donne naissance à des événements tragiques. Nul n'est épargné même ceux qui se réfugient dans une solitude qui ne peut les protéger.

«J'appréciais les commérages de Mrs K : ils aidaient à passer le temps, ils étaient inoffensifs et, d'une certaine façon, ils me préservaient, dans mon isolement, du monde qu'elle apportait, par petits bouts dans ma maison solitaire. Je ne me doutais absolument pas que, par contagion, elle me transmettait une idée qui me pousserait à agir. J'aurais dû comprendre.» p 41

Victimes un jour, bourreaux le lendemain, dans un engrenage dont nul n'est innocent.

«C'est une erreur d'étudier trop attentivement le point de départ de tel ou tel événement. Les choses prennent naissance bien en deçà de la surface ; le temps d'émerger, elles ont acquis une existence et une direction qui leur sont propres. On ne perçoit pas ce phénomène, aussi parle-t-on de destin, de sort ou de hasard quand un événement inattendu se produit ; on se prépare pourtant depuis le début, en secret, à prendre part au moment qu'en surface nous avons trouvé si surprenant.» p 139


Tout s'insinue et s'imbrique doucement dans ce récit où la violence couve et se développe sans nous heurter de front, où le suspense ne suscite pas une attente insoutenable mais nous enrobe, nous englue dans les soupçons et les insinuations, les fautes et les non-dits qui empoisonnent les vies. Pourtant la lumière n'est pas absente. La beauté poétique et la douceur de l'écriture de Burnside fait que l'on se laisse enfouir dans l'ombre de ces vies simples, rudes, malmenées où les démons de chacun peuvent aussi devenir les nôtres.
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