Mère toxique

Ces jours emblent irréels. J'ai l'impression de voyager dans mon sommeil. Quand je me réveille, je suis ailleurs mais toujours en voiture.
J'adore la voiture. C'est là que sont tous mes jouets.

Cela dit, je ne suis pas sûre qu'il comprenne réellement. Bobby est né et a grandi ici. Les arbres auxquels il a grimpé, la maison où il a vécu, tout est là. Sa vie est un livre ouvert, alors que la mienne est une chambre forte dont ma mère détient la clé.

Sur le mur qui sépare les toilettes, je vois une affiche avec des photos d'enfants de tous âges, accompagnées de la phrase : " Chaque seconde compte".(…) Je fais le calcul. Quatre- vingt quatre pages en tout. Chacune d'entre d'elles porte la photo d'un enfant, avec nom, sexe, taille, poids, couleur des yeux et des cheveux. " Cet enfant a été vu pour la dernière fois le" suivi d'une date, parfois une description des circonstances ("disparu alors qu'il rentrait chez lui après l'école" ou " n'est pas revenu de chez son copain") et pour certains, une image supplémentaire vieillie par ordinateur. En regardant les dates des disparitions, je m'aperçois que certaines ont plus de dix ans. Seules quelques -unes de ces photos sont barrées par un bandeau "Retrouvé".

Ce secret est dans le souffle de ma mère, dans ses os. Dans les miens.
Quelque chose ne tourne pas rond.

Chronologiquement, mes premiers souvenirs sont le vent et la poussière. Juste ça, de la poussière et du vent. J'ai envie de vous dire qu'on était sans abri, mais ce n'est pas un souvenir en soi, je revois seulement la poussière. Le genre de poussière qui se soulève quand vous courez et qui forme un nuage derrière vous. des tornades, des tourbillons, des nuées, peut importe le nom qu'on leur donne. Ça dépend d'où on vient.

Certaines femmes voulaient retenir leurs maris pour toujours, sans penser qu’un jour elles voudraient s’en débarrasser et qu’alors ça leur coûterait trois fois plus cher. Des mères venaient pour leurs enfants ; un bec-de-lièvre, un tremblement de la tête qui faisaient fuir leurs

Le restaurant était extravagant et tout le monde la regardait parce qu'elle était l'unique femme à dîner seule. LE soir, la salle de restaurant était peuplée d'hommes en costumes et de femmes qui semblaient avoir été habillées par des professionnels.

Les souvenirs engloutissent tout, avec une clarté sans pitié.

Elle voulait être puissante, à l’image de Sigrid, comme si ce monde était un instrument dont on devait jouer. Elle voulait être puissante, et pourtant il y avait aussi en elle cette vulnérabilité qui semblait trop ancrée pour qu’elle puisse s’en défaire. Et ça la terrifiait.

Le chien n’existe pas. C’est ce qui arrive quand on conduit trop longtemps, on a des visions. Ça veut dire qu’il est temps de s’arrêter et de dormir. C’est tout.
Je sais ce que ça fait d’avoir des visions. Je vais ouvrir l’œil quand même, au cas où je voie ce chien. Juste pour être sûre.