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Critique de Presence


Ce tome regroupe les 6 épisodes de la minisérie parue en 2009/2010.

Il y a plusieurs années, Phil Sheldon (photo-reporteur) était lassé de la vie et considérait une réorientation professionnelle : travailler pour la presse à sensation, quitter la sphère du pur journalisme. Toutefois, une information inopinée l'amène à couvrir la présentation à la presse de Reed Richards, Susan Storm, Johnny Storm et Benjamin Grimm, juste après leur célèbre voyage à bord d'une fusée insuffisamment protégée contre les rayons cosmiques. Il a alors l'intuition que sa vie sera indissolublement liée à celles de ces merveilles (marvels). Entre les premières apparitions de Thor, Spider-Man, Ant-Man et des angoissants X-Men, il découvre que sa plus jeune fille à besoin de lunettes. À la fin du premier épisode, une visite chez le médecin lui apprend un diagnostic peu encourageant. La suite raconte au lecteur la vie de Phil jusqu'à une période qui correspond à la mort des X-Men à Dallas pendant The Fall of the Mutants (en VO, initialement publié en 1988).

Kurt Busiek ne s'en cache pas dans la postface : au vu du succès de la série initiale Marvels (1994), il était commercialement logique de lui donner une suite (envisagée pour une trentaine de pages avec Alex Ross dans un premier temps). Finalement, c'est Jay Anacleto qui réalise les illustrations, Brian Haberlin s'occupe de la mise en couleurs. Au générique, Roger Stern est crédité au même niveau que Kurt Busiek pour le scénario. Ce n'est pas la première fois qu'ils collaborent ensemble ; ils l'avaient déjà fait pour Avengers Forever. Dans la préface, Roger Stern explique qu'il a surtout servi d'aide à Busiek pour alimenter l'histoire en références sur les événements se déroulant dans l'univers partagé Marvel au moment des faits du récit. Ce tome comprend d'ailleurs 2 pages qui listent les références en question : titre de la série concernée + numéro de l'épisode.

Donc Busiek reprend le personnage de Phil Sheldon et décrit la suite de son histoire. le premier épisode déconcerte un instant car Busiek revient sur des périodes déjà évoquées dans l'histoire originelle Marvels. Il est vraisemblable que Busiek tenait à faire de L'oeil de l'objectif une histoire complète par elle-même. du coup, le scénariste semble exploiter le même filon jusqu'à l'épuisement. La vie de Phil Sheldon est révolutionnée par le retour des superhéros au début des années 1960 (comprendre que le lecteur des comics de ces années là voit son ordinaire révolutionné par les premiers comics Marvel). La populace se méfie des X-Men qui semble une menace plus qu'autre chose, comprendre que dès le départ les héros Marvel ont un coté obscur que n'avaient pas leurs homologues de la concurrence (Superman en tête). Puis Sheldon semble lui-même perdre la fois dans ces merveilles avec l'apparition d'anti(super)héros comme Ghost Rider (Johnny Blaze), Werewolf (Jack Russell), Son of Satan (Daimon Hellstrom), Morbius (Michael Morbius), Dracula et Man-Thing (Ted Sallis). Son désenchantement atteint son paroxysme lors des Les guerres secrètes : les superhéros ont disparu et finalement Phil Sheldon constate amèrement que le monde ne s'en porte pas plus mal (une constatation brutalement et honnêtement cynique). Cette prise de conscience constitue le moment le plus fort du récit : toi aussi lecteur, tu peux vivre sans lire des comics de superhéros ! Sinon les frasques des superhéros n'ont de cesse, et Phil Sheldon vieillit. Les références aux années 1980 abondent et permettront aux lecteurs de cette époque de se dire alternativement "Ah oui, je m'en souviens", ou "Ah je ne me souvenais plus que ça s'était passé dans cet ordre là". Busiek et Stern évoquent dans l'ordre chronologique : la première apparition publique des FF, le retour de Captain America à l'ère moderne, la Spider-mobile, la première apparition de Nomad (Steve Rogers), la première apparition de Wolverine, le début des Champions, la mort d'Elektra, la première apparition du Punisher, l'arrivée du Beyonder, etc.

Jay Anacleto n'est pas Alex Ross, mais cela n'a rien d'une surprise, ni même d'une critique. Il a un style très réaliste, beaucoup plus que celui d'Alex Ross, beaucoup plus descriptif, beaucoup plus terre à terre et plus minutieux. Globalement Anacleto préfère renforcer la sensation de quotidien, d'ordinaire. Il a dû effectuer de sérieuses recherches car les détails vestimentaires ou technologiques (la forme des postes de télévision par exemple) ne présentent aucune erreur par rapport aux décennies visitées (1960, 1970 et 1980). Il est possible de suivre scène par scène l'évolution de la mode et des appareils électroménagers, impressionnant. Les visages présentent tous une forte personnalité, sans être décalqués sur des photos. Chaque séquence est mise en scène de façon prosaïque, insistant sur le caractère banal de la vie de Sheldon, tant qu'il n'y a pas de superhéros à l'horizon. C'est un peu ce qui dessert la narration dans laquelle le lecteur finit par se demander si la vie de Sheldon l'intéresse tant que ça dans ce qu'elle a de commun. La mise en couleur repose surtout sur des teintes neutres habilement juxtaposées pour que les différents éléments ressortent les uns à coté des autres, mais là encore très quotidiennes.

Finalement ce tome se laisse lire gentiment, la fibre nostalgique est fortement sollicitée et certaines références feront plus mouche que d'autres (j'ai en particulier apprécié les réminiscences du Punisher tirant sur les passants qui n'empruntent pas les passages piétons). Mais Busiek n'a rien à dire de nouveau par rapport à Marvels, et réussit moins bien le point de vue humain qu'il sait si bien magnifier dans sa série Astro City.
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