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Michel Breitman (Autre)
EAN : 9782264004758
141 pages
10-18 (12/09/1999)
3.67/5   56 notes
Résumé :
Lorsque le physicien Ermanno Ismani, professeur d'électronique à l'Université de X., reçoit du ministère de la Défense la proposition de se rendre en grand secret dans une région montagneuse où il devra passer deux ans isolé du reste du monde, il n'en sait pas plus que nous, lecteurs. C'est en commun et pas à pas que nous découvrirons le mystère que cache cette mission digne des Drogo et Barnabo chers aux lecteurs de l'auteur du "Désert des Tartares".

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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Cette chronique-ci, plus que les précédentes, fera le récit d'une expérience de lecture toute personnelle.
J'ai découvert Buzzati alors que j'étais lycéen (ce qui, déjà, nous renvoie à un passé lointain). J'avais dans ma classe un copain dont la famille était d'origine italienne. Par une sorte de loyauté culturelle qui pouvait parfois confiner au chauvinisme, il ne jurait que par la littérature transalpine et n'avait de cesse de faire des convertis autour de lui. C'est à lui que je dois d'avoir découvert Buzzati, mais aussi Calvino ou Moravia.
Pour être exact, je n'ai pas découvert Buzzati : je l'ai dévoré.
D'un point de vue littéraire, mon année de Première se résuma ainsi à trois faits marquants : premièrement, notre prof de lettres disparut un beau jour de l'établissement. Nous apprîmes peu de temps après qu'il était accusé de coller les jeunes filles de beaucoup trop près (ce qui était pour nous de notoriété publique), et surtout qu'il s'était fait prendre en flagrant délit de tripotage dans un couloir. Deuxièmement, il fut remplacé au pied levé par une jeune prof pleine d'allant, dont la garde-robe comprenait une incroyable combinaison moulante en skaï qui nous causait beaucoup d'émotion (en skaï, absolument : c'était le début des années 80, et l'on s'autorisait déjà à porter des choses très improbables).
Et donc, troisièmement, Buzzati, dont j'ai lu alors fiévreusement tout ce qui me tombait sous la main.
Les années lycées se sont achevées, le moment où l'on passe facilement à autre chose, sur de nombreux plans. J'ai cessé de lire Buzzati, pensant en avoir fait le tour.

Pourtant, voici deux ou trois mois, tandis que je flâne dans mon Emmaüs préféré de Bretagne, je tombe sur cette édition poche de L'Image de pierre. Certain de ne pas l'avoir dans ma bibliothèque, et tout aussi certain de ne l'avoir jamais lu, je l'achète en me demandant s'il n'est pas dangereux de replonger ainsi dans mes lectures de jeunesse.
De fait, j'ai différé le moment de le lire pendant plusieurs semaines, sentant se préciser toujours davantage cette appréhension à l'idée de retrouver (ou pas) mes émotions de l'époque.
Enfin je m'y mets, et mes craintes se confirment page après page : je trouve le style sans relief (il faut dire que je sors d'une cure de Giono, ce qui déforme peut-être mon regard), les procédés romanesques sont terriblement datés, les personnages transparents, l'action se languit soixante pages en atermoiements, etc. Arrivé à mi-parcours, je ne suis pas loin de la consternation, voire de l'abandon, quand enfin le livre commence.
Et là, je retrouve « mon » Buzzati.
Le récit relève de la science-fiction, mais le discours scientifique y est expédié sans ménagements (quelques noms à la technicité ronflante pour faire bonne mesure, et surtout du mystère pour le reste). L'important, c'est l'atmosphère, faite de réalisme décalé, métaphorique, à la limite parfois de l'absurde, et où affleure toujours la promesse du fantastique. Difficile de lâcher cette seconde moitié du livre, avec ce délicieux malaise que je (re)connais bien et qui m'avait subjugué par exemple dans les nouvelles du K, ou bien cette mélancolie qui donnait ses couleurs à L'Écroulement de la Baliverna. La fin de L'Image de pierre est terrible de désespoir et de pessimisme. C'est difficile à dire, mais je m'y suis senti comme chez moi : j'avais l'impression de retrouver un vieil ami perdu de vue (et du coup, je me demande s'il est vraiment bien raisonnable de laisser des adolescents lire Buzzati ; je ne me distingue pas vraiment pour mon optimisme sur la nature humaine, et ce diable de Dino y est peut-être pour quelque chose...).
Mais il y a pire : il y a le sujet du livre.
Ici, je ne puis faire autrement que de me livrer à un spoiler. On n'est donc pas obligé de poursuivre.
Le sujet du livre (publié en 1961) est la création d'une intelligence artificielle à partir de « calculateurs électroniques ». Son inventeur a conçu le projet de lui donner la personnalité d'une femme, et toute la seconde partie du livre fait le récit de ce drame : un être qui se croit femme, et souffre de ne pas en avoir le corps ni les sensations.
Poser en ces termes la question de la sensibilité possible d'une conscience artificielle est une démarche plutôt moderne en 1961, mais je ne voudrais pas m'engager dans une histoire des thématiques de la science-fiction.
Ce que j'en retiens – et c'est plus personnel que jamais – c'est ceci : en ouvrant ce livre, j'étais convaincu de ne l'avoir encore jamais lu. Je comprends en le terminant que je me suis trompé : je l'ai forcément lu, à l'époque, en même temps que mes autres Buzzati.
Lu, digéré, oublié en apparence... mais en apparence seulement car tout cela continuait à cheminer secrètement dans mon inconscient. Et cette idée, pour finir, m'est revenue sous une autre forme dans le premier de mes romans à avoir été publié : une intelligence artificielle qui joue de sa féminité et souffre de ne pouvoir posséder un vrai corps de femme... Ceux qui ont lu La Parallèle Vertov comprendront de quoi je parle.
Mon roman transforme suffisamment l'idée pour que je me sente à l'abri de toute incrimination de plagiat (aucun de mes lecteurs n'a d'ailleurs jamais relevé cette étrange concordance). Il n'empêche que la découverte est pour moi très déstabilisante.
On se demande souvent de quoi se nourrit l'imagination d'un écrivain. Hé bien, j'ai un début de réponse : dans mon modeste cas, elle se nourrit de l'oubli.
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Une fable lorgnant vers la SF de la part d'un auteur qui est peu connu pour s'adonner à ce genre. L'écriture de ce court roman est incisive. Pas de dilution, pas de longues descriptions. On est dans le vif du sujet en permanence.

Buzzati crée une tension dès le départ. Un scientifique est appelé en urgence par le haut commandement militaire. La Grande Muette (quel que soit le pays) ne dévoilera rien du projet auquel le scientifique, expert en électronique, devra s'atteler. Cela donne des dialogues déconnectés, hautement comiques où les interlocuteurs parlent à mots couverts au scientifique qui ne comprend rien. Cela m'a fait penser à des dialogues chez Molière.

La deuxième partie se déroule dans le lieu tenu secret où quelques scientifiques sont rassemblés pour un projet militaire. L'idée est de créer un super ordinateur. Mais le directeur du projet n'en est pas resté à cette mission...

A l'heure où on parle d'I.A., d'algoritmes intelligents, de la duplication ou du remplacement de l'humain par des machines... ce petit roman prend une dimension intéressante. Evidemment, vu qu'il a été écrit au début des années 60, il date pas mal, et -surtout- il n'inclut pas les principes de la robotique énoncés par Asimov. Au final, lecture agréable, mais un peu dépassée, qui aurait bénéficié d'un format "nouvelle", dans lequel le style de Buzzati me semble s'exprimer particulièrement bien.
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Un universitaire, professeur d'électronique, est sollicité par le ministère de la défense pour participer avec d'autres scientifiques, à une mission de deux ans au fin fond d'une base militaire perdue dans les montagnes. Cette mission est d'un « intérêt vital pour la nation » et bien évidemment classée secret défense. le secret est tellement bien gardé, que nous nous embarquons avec le professeur vers la fameuse « zone 36 » sans en savoir plus sur ce qui l'attend. Et donc il y a du suspens, du surnaturel, de l'étrange, de l'insolite...

Je n'en dirai pas plus si ce n'est que ce court roman chevauche plusieurs genres : science-fiction, fantastique, et même roman d'amour, de l'amour qui rend fou, genre Amok si vous voyez ce que je veux dire.
J'adore cette faculté qu'à Buzzati de nous entraîner dans des univers multiples, de brouiller les cartes : un régal.
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Un roman court dont l'attrait réside dans un résumé simple et efficace: Ermanno Ismani physicien et professeur d'université est au convoqué ministère de la Défense et se voit confié une mission aussi importante qu'entourée de mystères. Hormis le fait que cela implique de s'y consacrer entierement durant deux ans, dans un lieu éloigné et tenu secret, aucun indice n'est donné au lecteur qui partage les interogations, les suppositions et la perplexité mélée d'inquietude du Dr Ismani.
Le livre aborde la question des possibilités de la technologie et de ce qui fait l'essence de l'être humain. Ce n'est pas un livre drôle mais on y trouve tout de même quelques jolis traits d'humour dù à l'absurde du secret gardé à l'excès. Si je n'ai pas vraiment accroché j'ai trouvé ce livre bien écrit et j'ai envie de creuser un peu la blibliographie de l'auteur.
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Magnifique roman de science-fiction de la part d'un auteur qui n'est pas coutumier du fait, relu en italien, avec un oeil nouveau à l'heure où l'intelligence artificielle et la robotique humanoïde font de plus en plus parler d'elles. Je retiens en particulier la réflexion très intéressante sur la dualité corps-âme.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Immobile, le couple contemplait tout cela dans l'immense silence de la nuit. Mais ce n'était pas vraiment le silence. [...] De fait, en prêtant davantage attention, on pouvait entendre, venu de l'autre côté du mur blanc, une sorte de brouhaha ample et profond bien qu'à peine perceptible, semblable à la rumeur intactile des fourmis quand, leur habitation découverte et détruite, elles en sortent par milliers et s'enfuient comme des folles dans les décombres.[...] Une sorte de vie bouillonnait donc à l'intérieur de ces pierres secrètes et d'apparence endormies.
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Le femme remit de l'ordre à sa chevelure. Elle souriait, blême cependant.
Alors, couvrant le le murmure qui continuait à flotter partout, la voix se fit entendre de nouveau, cette voix mélancolique de tout à l'heure. Elle enfla, décrivit une sorte de courbe, atteignit des résonances aiguës, s'arrêta soudain, se rompit en une brève salve de sanglots, puis reprit sa chute, et s'éteignit. Grincements de machines ? Frottements ? Vibrations ?
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Mais l'homme est condamné à se tourmenter soi-même. Il ne sait voir les consolations qui s'offrent, là, à portée de sa main. Il a besoin de toujours se créer de nouvelles angoisses. Moi, tout au moins.
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Avez-vous déjà eu l'impression que votre vie se passait à attendre ? Attendre l'amour fou, attendre le poste de vos rêves, attendre le prochain voyage, attendre, au fond, que la vraie vie commence enfin ?
« le désert des Tartares » de Dino Buzzati est publié en poche chez Pavillons Robert Laffont.
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