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Critique de fuji


fuji
06 novembre 2019
L'absence de chapitres voulue par l'auteur, donne d'emblée un rythme particulier, ressemblant à l'horizon qui s'étire devant les yeux de Théo.
Le Capitan, ce vent au nom de personnage fanfaron et pleutre des comédies à l'ancienne en est le Maestro et donne une dimension presque mystique à cette histoire.
C'est dans ce décor que Théo a décidé de s'installer :
« Alors cesser de fuir. le Monde est une partie de cache-cache jouée d'avance. le planqué, retranché, encaverné, immobile, tout comme celui qui sort, qui court, s'évertue à se perdre, seront tous les deux bien vite nus, tétanisés sous l'oeil rond de la Terre et des Lunes qui ne nous lâchent pas. »
Il n'a que 27 ans et il s'invente une vie dans une quête de sens, de cohérence.
Mayacumbra c'est où vous avez décidé quand vous le voulez, nous avons tous un Mayacumbra.
S'éloigner du monde c'est souvent mieux le retrouver.
Il s'est construit une cabane très habitable à flanc de volcan. Il a tout fait lui-même, de ses mains, avec pour aide son fidèle compagnon l'âne Ferdinand.
Plus bas se côtoient le peuple de la forêt et un village fait de bric et de broc autour d'une épicerie générale comme cela se faisait au Canada avec les pionniers.
Ces villageois sont bigarrés, ils ont tous un passé, des secrets…
Raymond un curé déjanté, Giacomino l'errant, Cyrus et la mère Talloche les épiciers, Solstice le garagiste et ami de Théo, Balthazar le manchot et Lita femme de Moreno et maîtresse de Théo.
C'est une peinture haute en couleurs bien incarnée, que nous dessine l'auteur.
Portraits où alterne la caricature et la finesse. Souvent drôles mais surtout attachants.
Tous vivent là, dans un paysage de rêve malgré ou grâce à la rudesse des lieux.
C'est un paysage de tous les possibles, c'est un horizon qui s'ouvre…
Il ne faut pas croire que laisser tomber la pelisse du passé se fait avec simplicité et facilité.
Les angoisses sont là ; la proximité du volcan est comme les battements du coeur, un mystère, un essentiel.
Les petites phrases qui lui signifiaient qu'il n'était jamais au bon endroit, au bon moment sont les antiennes du cauchemar.
Il faut se réinventer.
Ici, dire que la nature est un personnage à part entière n'est pas une métaphore.
J'ai aimé ses couleurs, les sautes d'humeur, ses soubresauts, sa beauté comme sa cruauté, car la vie est tout cela.
L'amour omniprésent, prégnant comme une évidence, simple et compliqué.
Une philosophie ?
Et soudain, la nature change avertit celui qui est attentif.
Lita le sent, elle qui vient de la forêt et vit au village.
L'histoire bascule.
Alain Cadéo joue avec ses mots de contrebande pour notre plaisir de lecteurs.
Car tous font sens qu'ils vous invitent à la poésie ou à la philosophie, vous y trouverez la vie, celle où l'humain a de l'importance.
L'auteur est allé encore plus loin dans sa singularité, faisant de son écriture une empreinte, trace profonde et durable dans l'esprit de ses lecteurs.
Lire sa prose c'est voyager dans un ailleurs aussi lointain que proche car c'est en nous que sont les clefs de l'énigme.
Western à la française, la conquête s'ouvre sur de vastes horizons et creuse les profondeurs de l'âme.
De belles observations sur le langage qui est mouvant, sur la littérature et ce qu'elle a à offrir.
C'est dans ces creux que se bâtit la réflexion vagabonde du lecteur.
Un beau roman d'aventure mâtiné de poésie avec pour destrier JJ Rousseau.
Le but ne serait-il pas de nous faire connaître : « La joie, ce n'est pourtant rien d'autre que de suivre, d'accompagner le Monde, ce maître aquarelliste. Ce n'est rien d'autre que, libres et ivres de couleurs, légers, nous laisser imprégner de toute sa palette. Sans l'ombre d'une défense, sans un soupçon d'a priori, sans l'idée même de profit. C'est être au coeur conscient de la lumière, là où vibre, tremble, bouge, danse, oscille, vit , meurt, apparaît, disparaît. »
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 7 novembre 2019.
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