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Gene Morgan a grandi sans véritable famille - sa mère, une prostituée qui voulait s'en débarrasser à sa naissance et son père inconnu, un client de passage - est un jeune homme paumé. Sachant à peine lire, amoral, il s'est battu avec le souteneur de sa mère, l'éliminant sans état d'âme, froidement. Il traîne de ville en ville effectuant des petits boulots, s'acoquinant avec d'autres gars de la même espèce. De retour à Lewisville, il travaille d'abord dans une huilerie puis une scierie où il fait la connaissance de John, du même âge avec lequel il partage le même désœuvrement et les mêmes perversions. Quand il rencontre Myra, la fille d'un riche homme d'affaires, il décide de changer et de partir avec elle à Philadelphie pour construire enfin une nouvelle vie, mais les évènements vont contrecarrer son destin et lui refuser toute rédemption.
Le bâtard est un roman bien sombre qui relate les errements de ce jeune homme sans structure, sans conscience du mal, primitif, qui agit et réagit animalement se contentant de manger boire dormir et forniquer, sans passé et sans avenir et quand, saisissant enfin sa chance lors d'évènements plus favorables s'offrent à lui, joue toujours de malchance...C'est un portait dur que propose Erskine Caldwell , dans un style très distancié, presque chirurgical qui renforce l'absence de sentiments ou d'empathie de tous les protagonistes et qui n'offre au final aucune rédemption possible à ce héros malheureux, un héros qui aurait pu être un des personnages étudiés par Truman Capote dans "de sang froid".
Un roman sombre écrit en 1929 qui a fait scandale tant il dépeint une Amérique sordide et sans fard.
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« Ça n'a jamais été pour mon plaisir que j'ai pu voir des hommes, des femmes et des enfants naître, vivre et mourir dans la misère, l'ignorance et la dégradation. J'ai récolté le coton avec eux ; j'ai partagé leur pain ; j'ai creusé avec eux la tombe de leurs morts. Personne ne peut se considérer comme l'un d'eux à plus juste titre que moi. Mais je n'ai pas aimé du tout voir l'un de ces hommes attaché, fouetté par son propriétaire jusqu'à en perdre connaissance. Je n'ai pas aimé voir un politicard minable qui se faisait passer pour un homme d'affaires dépouiller l'un de ces hommes de son année de travail. Il ne m'a pas plu de voir un contremaître abattre de sang-froid un père de famille qui avait eu le tort de protester contre le viol de sa fille, commis sous ses propres yeux. C'est parce que je n'ai pas aimé toutes ces choses que j'ai voulu montrer que le Sud, non content d'avoir engendré une race d'esclaves, a soudain, ce qui est pire, fait volte-face pour lui lancer une ruade en plein visage. »

Ces quelques lignes de Caldwell furent publiées dans le New York Times en 1936 en réponse aux attaques d'un député de Géorgie. Caldwell a été l'écrivain le plus censuré des États-Unis. le bâtard est son premier roman. Il a été interdit et saisi dès sa parution en 1929. Si vous ne supportez pas la littérature américaine pleine de violence et de sexualité, vous devez quand même lire Caldwell. Au moins pour comprendre d'où vient cette sauvagerie si typique de nombre de romans nord-américains. Je pensais que cela remontait à la fin des années 30, notamment avec Fante. Mais si Fante a mis un coup de pied dans la fourmilière, Caldwell y avait carrément foutu le feu dix ans plus tôt. L'héritage de Caldwell se retrouve chez D. Ray Pollock, chez Bruce Benderson, Joel Williams, Richard Price, Selby, E.M Williamson, Larry Fondation, Frank Bill, Benjamin Whitmer et tant d'autres. Tous ces gars-là ont lu Caldwell, pas possible autrement. Contemporain de Faulkner et Steinbeck, il ne joue, contrairement à eux, sur aucune intensité dramatique. Il ne cherche pas non plus à transformer le monde à travers la rhétorique. Son propos est celui d'un naturaliste. Des faits, uniquement des faits, sans aucune forme de jugement. le discours devient forcément dérangeant car lorsque l'inhumanité côtoie le grotesque avec un tel réalisme, le lecteur ne peut qu'être mal à l'aise.

Le bâtard, c'est Gene, né de mère prostituée et de père inconnu. Après avoir pas mal bourlingué, il revient où il a grandi, à Lewisville, bled paumé de Géorgie. Il trouve un boulot à l'usine du coin, séduit quelques filles, s'installe chez un copain, rencontre celle qu'il pense être la femme de sa vie, part avec elle à Philadelphie. Ils ont un enfant, bébé monstrueux couvert de poils aux retards psychomoteurs irrécupérables. Gene finira par le noyer dans une rivière. Entre temps il aura violé une gamine en prison et il aura vu son ami John, patron d'une scierie, couper un ouvrier noir en deux sans motif véritable. Tous les personnages ont des conduites amorales, le bien et le mal semblent ne pas exister. Les choses adviennent, un point c'est tout. Forcément dérangeant…

Soyons honnêtes, l'écriture, sèche comme un coup de trique, n'a rien de transcendant. L'histoire elle-même ne casse pas trois pattes à un canard. Une succession de scénettes sans véritable lien pour lesquelles il est difficile de se passionner. Mais peu importe, l'intérêt est ailleurs. Il faut prendre le bâtard pour ce qu'il est, à savoir un des romans fondateurs de la littérature américaine pleine de bruit et de fureur qui a caractérisé la seconde partie du 20ème siècle et qui est aujourd'hui encore une marque de fabrique pour nombre d'écrivains US. Pas certain que cela suffise à convaincre beaucoup de lecteurs mais je tenais quand même à vous en parler…
Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Gene Morgan a un sacré pedigree. Il est né d'un père inconnu et d'une maman péripatéticienne à Lewisville. Il vivote grâce à des arnaques montées dans des salles de jeux quand il décide brusquement de revenir dans sa ville natale. Cette ville cotonnière est typique du sud profond des Etats-Unis au temps de la prohibition. La chaleur y est étouffante, la violence est sans limite et la haine raciale est ordinaire.

Gene Morgan travaille dans un premier temps comme manoeuvre dans une huilerie. Mais très vite ses instincts reprennent le dessus. Car Gene est un être primitif, dépourvu de tout sens moral. Il est prêt à tuer quiconque se met en travers de son chemin ou à prendre par la force une femme qui se refuse à lui. Il mène une vie dissolue et fréquente des prostituées. Un soir, il rencontre une jeune femme. Alors qu'il projette de la violer, il est séduit et promet de l'épouser et d'être un bon mari. Mais on n'échappe pas à la malédiction de son sang.

Le texte est court, concis et brut de décoffrage. Les récits d'un meurtre raciste ou d'un viol sont laconiques. La violence est gratuite et n'est jamais condamnée. le roman souffre d'une construction chaotique. Je me suis demandé où l'auteur souhaitait en venir dans le récit de la vie erratique de Gene Morgan. Mais la partie qui se déroule à Philadelphie offre un final percutant au roman. Si ce n'est pas un grand roman noir, il n'en reste pas moins un roman précurseur du genre publié en 1929. Cette lecture m'a donné envie de découvrir des oeuvres de la maturité de Caldwell. Pour finir, je remercie les éditeurs qui prennent le soin de publier à nouveau ces textes clefs sous une nouvelle traduction.
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Cet été, en prenant le temps de fouiner dans ma médiathèque, je suis tombée sur un roman de Erskine Caldwell. le nom me disait vaguement quelque chose, mais sans certitude. Je lis beaucoup de roman noir, et j'ai du croiser ce nom lors d'une de ces occasions. Toujours est-il que la maison Belfond réédite quelques vieux textes, dans une nouvelle collection, intitulée Vintage. Je me suis empressée d'emprunter ce livre, car le roman noir c'est vraiment mon truc : de Charles Willeford à Jim Thomson en passant par Ellroy, je dévore tout ce qui peut apparaître un minimum sombre et désespérant, sinueux et violent. Je préfère le roman noir au simple roman policier, car dans le roman noir on ne privilégie pas la résolution d'une énigme, d'un crime ; non, il s'agit de suivre les méandres psychologiques des protagonistes, de s'intéresser au passage à l'acte, aux conséquences, sans que la résolution de l'enquête soit primordiale.

À cet égard, le roman de Caldwell dont je vous parle aujourd'hui, le Bâtard, remplit toutes ses promesses et mieux encore. En effet, le lecteur fait la connaissance d'un héros, plus ou moins orphelin : sa mère, un peu danseuse, un peu pute, exerçait ses charmes on ne sait où, pendant que son fils grandissait avec aussi peu de repères que d'inhibition. le jeune homme va donc de ville en ville, dans un sud prolétaire et raciste, prenant un travail quand il en a besoin. Entre deux, il use de ses poings et du couteau, quand il en a besoin également : sans interrogation morale, sans autre réflexe que celui de son intérêt propre.

Tout le roman tient sur ce personnage et son absence totale de morale sociale. Et c'est important pour la suite. En effet, Il va rencontrer une jeune femme. Habituellement, quand il en désire une, il la prend, de gré ou de force. Mais là on observe chez lui un comportement différent, et le héros opère en quelque sorte une mise en retrait de ses instincts, pour l'amour de cette femme. Jusqu'à former un couple, puis une famille, avec la naissance de leur enfant.

Cette naissance sera un autre point de basculement. Je n'ose en dire plus, mais le lecteur sera fasciné par la manière dont une certaine forme de morale, guidée par l'amour, conduira notre héros à ce qu'on ne pouvait imaginer.

Récit court et dense, le Bâtard se lit vraiment comme on prend une paire de claque. Violent, sans concessions, avec un personnage central hautement antipathique, ce roman de 1929 est une vraie pépite vintage, avec une approche naturaliste très intéressante. Je n'ai qu'une hâte, c'est de découvrir les autres romans d'Erskine Caldwell.
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Voici le premier roman dur et sombre d'Erskine Caldwell. Comme il le dit lui-même dans la postface de l'édition du Livre de poche, «Le Bâtard » « est tout simplement l'exercice littéraire d'un débutant, inspiré par ses errances et ses observations dans une région qui lui est familière, entre Baltimore et Philadelphie ». Nous y reconnaissons bien des traits de l'auteur de « La route du tabac » : réalisme brutal, érotisme cru et attention portée à la condition sociale et à la misère. Les personnages sont dévorés par une animalité sauvage. Hommes et femmes sont affamés et suivent leurs instincts dans une moralité absente. Meurtres, viols, vols : la décadence des bas-fonds de l'humanité. La particularité de ce premier roman c'est le manque de gaité, de burlesque et de tendresse, caractéristiques qui font tout le charme des autres romans de Caldwell. Indéniablement, le grotesque y est présent, mais un grotesque ténébreux, vaseux. Avant de lire « le Bâtard », je considérais Erskine Caldwell comme un fervent adepte de la « littérature de la célébration de la vie » et non de la « littérature haineuse », pour reprendre la terminologie de Michel Tournier. Sans vouloir dévaloriser l'oeuvre, loin de là, ce roman manque particulièrement d'amour (sauf peut-être vers la fin), et on le ressent à la lecture qui, par moments, nous afflige tant la cruauté est insoutenable, tant la violence est âpre et digne d'un émule de Sade. À ne pas lire en état de lassitude !
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Dérangeant sûrement.Caldwell n'épargne rien au lecteur.La vie de Gene Morgan commencée dans la misère, se poursuit dans la violence et quant on croit à une embellie, une catastrophe arrive. Rien pour nous faire aimer la société américaine.
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Un roman étrange parce que déroutant, à mi-chemin entre le roman noir à la Jim Thomson, et le style "Faulknerien".
Une manière de récit brut, un univers comme à peine surgi du ventre d'un créateur fécond, encore tout englué de liquide amniotique, qui suscite à la fois admiration et dégoût, sans savoir pour lequel pencher.
Je n'y ai décelé ni pathos, ni empathie pour les personnages, ce qui confère au récit une distanciation malaisante tant sur le fond des faits narrés, que sur la forme ; c'est une écriture impitoyable qui exclut toute forme de maniérisme, tranchante comme un couteau.
Un objet littéraire que le lecteur qui découvre Caldwell se prend en plein visage, dont on ne sait que faire après avoir refermé le livre.
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Précurseur du roman noir américain, le bâtard narre l'errance de Gene, fils d'une prostituée et d'un client de passage, qui va tomber amoureux et voir sa vie bouleversée à jamais. On pense à Faulkner ou Steinbeck dans une version plus réaliste. A lire pour commencer avec Caldwell.
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En lisant le bâtard, on constate qu'Erskine Caldwell vient de trouver la voie qui le mènera à ses chefs-d'oeuvre ultérieurs. Mais il n'a pas encore osé approfondir le naturalisme animalier qui caractérisera peu après ses personnages les plus truculents.

Et pourtant, le bâtard offre une palette d'hommes et de femmes mus par leurs pulsions et leurs préjugés auxquels ils donnent libre cours. Les noirs sont exploités et mis à mort, sciés en deux sans aucune mauvaise conscience. Les femmes n'y sont que des « fumelles » aux moeurs libres, jeunes filles encore adolescentes, épouses adultères ou prostituées avec lesquelles on fornique quand on ne les viole pas. Les hommes y agissent en fonction de leurs instincts ou de leurs coups de sang et l'on s'y tue à bout portant.

Ces êtres primaires voire primitifs s'expriment en un style qui fait fi de toute bienséance, disloque la syntaxe, déforme les mots et recourt à un langage expressif plein de verdeur. Et l'on dirait que le roman ne procède que par scènes très fortes où les personnages, saouls ou drogués, se contentent de paraître sur scène et d'y parler, sans projet autre que de vivre dans le présent.

Malheureusement, le ton change dans le dernier tiers du roman. L'oralité cède la place à un récit traditionnel, et donc la crudité à un style plus classique. Curieusement Caldwell verse alors dans le genre de la romance, substituant le sentimentalisme au primitivisme. le bâtard laisse ainsi comme un arrière-goût d'inabouti et l'on en achève la lecture sur un sentiment de frustration.

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C'est l'histoire d'un homme paumé, fils d'un prostitué, bâtard violent qui va rencontrer la femme de sa vie. Et là on pourrait s'attendre à un happy end, mais Erskine Caldwell est plus enclin à creuser encore plus dans la misère et la cruauté, alors qu'on pense avoir déjà touché le fond. Une oeuvre violente donc, mais nécessaire.
Lien : http://therewillbebooks.word..
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