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Michel-P Schmitt (Autre)Henri Calet (Autre)
EAN : 9782729712327
260 pages
Presses universitaires de Lyon (11/03/2021)
4.5/5   4 notes
Résumé :
Dans le tourbillon des années 1935 à 1955, Henri Calet compose une somme impressionnante de textes : chroniques, romans, nouvelles, critiques littéraires ou artistiques, pièces radiophoniques, scénarios, reportages... Il trace ainsi son sillon d'écrivain à la fois faussement léger et légèrement désespéré, adepte de l'utilisation du " je " et de " l'humour gris ". A travers des entretiens accordés aux radios et journaux entre 1935 et 1955 et réunis ici pour la premiè... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Un jour de 2020, j'ai appris que Joseph Ponthus allait préfacer un ouvrage sur Henri Calet avec des textes et entretiens inédits rassemblés et présentés par Michel P. Schmitt.

J'étais contente, impatiente, et surprise un peu (Ponthus ne parle pas de Calet dans À la ligne).
Un peu plus tard, c'était dans l'été je crois, j'ai compris que Joseph était soigné pour un cancer (il parlait chimio sur facebook, il faisait des photos amusantes de ses plateaux repas à l'hôpital, du goéland qui venait toquer à sa fenêtre et qu'il semblait avoir apprivoisé, ses amis lui envoyaient des coeurs et des encouragements...).

La terrible nouvelle est tombée le 24 février 2021. Je n'aurai jamais l'occasion de parler d'Henri Calet avec lui, comme je l'ai fait un jour à La Maison de la Poésie avec Jean-Luc A. d'Asciano.

" On n'est pas gentil pour moi. " disait souvent Calet. Je ne sais pas qui n'a pas été gentil pour Joseph, ni pour Henri, mais l'issue a été dramatiquement la même pour les deux, encore plus précocement pour Joseph Ponthus.
Je ne peux m'empêcher de penser bêtement que d'ici 70 ans Ponthus aurait été sauvé, tout comme aujourd'hui la maladie cardiaque de Calet serait améliorée par la pose de stents qui ne se faisait pas en 1956


* Ponthus comme Calet
extraits de la préface de Joseph Ponthus “ Aux flâneurs des deux rives ”

"Comme lui, je suis du peuple et n'ai jamais été que ça : chômeur, travailleur social, ouvrier dans l'agroalimentaire. Comme lui, je crois n'avoir jamais su écrire que moi et les petites vies qui m'entourent. Comme lui, il se trouve aujourd'hui par bonheur que je fais le métier d'écrivain."

"Par la grâce d'un livre bien reçu par la critique, la profession et le public, me voici, comme Calet, rendu à exercer “ le métier d'écrivain ”, ainsi qu'il le définit à de nombreuses reprises dans cet ouvrage. Drôle de métier, en vérité, et Calet montre l'ombre du décor : les traites, charges et loyers à payer ; devoir accepter d'écrire articles, chroniques pour quelques salaires ; rêver du prochain grand roman mais avoir besoin de vacances ; se foutre un peu des confrères et envoyer en l'air certaines questions des journalistes ; être dans son coin du 14e arrondissement avec le Lion de Belfort pour boussole. La reconnaissance qui ne vient pas toujours à sa juste valeur."

* C'est quoi ce livre ?

Joseph Ponthus en donne la plus exacte des descriptions, autant la recopier !

"Outre la recension exhaustive des oeuvres, des articles, des entretiens donnés par Calet — ce qui constitue déjà en soi un apport majeur —, l'ouvrage conçu de manière chronologique, entremêle finement le contexte historique et littéraire de l'époque, la biographie de Calet et les textes rassemblés par Michel P. Schmitt.
Il en apprendra autant au néophyte afin de lui permettre d'aimer sans détour l'oeuvre, le personnage et l'écrivain qu'au passionné, assuré de trouver dans ces pages nombre d'inédits. Il m'en a appris aussi, à moi, qui ne suis ni néophyte ni expert mais jusqu'alors un simple amoureux des quelques livres de Calet que j'avais lus."

Oui, c'est un livre de spécialiste, mais non, ce n'est pas un livre pour spécialistes.
C'est vrai, il a les attributs d'un travail universitaire, d'un ouvrage de référence : les notes en bas de page, les annexes bibliographiques, les indexes, l'explicitation des sources.
Pourtant, la forme savante du recueil (l'austérité va bien à Calet) procure paradoxalement une lecture passionnante, très vivante, presque un suspense : on suit pas à pas (surtout à partir de 1945) l'écrivain dans ses projets d'écriture successifs et rapprochés pour pouvoir en vivre, son opiniâtreté à justifier la forme de son travail et sa conception personnelle du métier d'écrivain.

Bon, il y a des redites, mais c'est normal : quand Calet s'exprime sur son dernier livre publié et qu'il en parle successivement pour deux ou trois revues et radios, il réutilise ses propres mots, on ferait pareil.
De plus, je ne pense pas qu'il ait été un foudre de l'auto-promotion... plutôt du genre à faire enrager les médias. Quand il en rencontre de temps en temps des pas (ou moins) formatés, cela donne de savoureux échanges, comme avec Pierre Bergé (18 ans !), Paul Guth, Jean Duché, et d'autres.

Mais il lui faut aussi répondre à des questions bateau (ce que les journaux appellent des enquêtes, lancées auprès de plusieurs auteurs à la fois) comme : “avec quel héros de roman passeriez-vous vos vacances ?”, “tenez-vous un journal ?”, “de qui les écrivains tombent-ils amoureux ? ”, “l'oeuvre de Victor Hugo vous a-t-elle influencé ?”, “y-a-t-il une crise du roman français ?”, “quel cadeau de Nouvel An souhaiteriez-vous recevoir ?”, etc.
Une dernière : “quel cadeau de Noël feriez-vous à un enfant célèbre de la littérature ?”. Calet choisi Poil de Carotte, pour lui offrir “une bonne maladie” qui contaminerait tous les Lepic et ferait de lui un orphelin !
Je me disais mais je me trompe peut-être, que de nos jours les chroniqueurs littéraires ne posent plus de telles questions aux écrivains...
Calet, lui, s'en tirait avec des pirouettes délectables ou des aphorismes à l'humour “gris”.

* Prérequis

Je recommande quand même de lire un ou deux Calet non commentés avant d'entamer celui-ci, pour se mettre dans l'ambiance.

On m'a déjà demandé lesquels pour commencer... le genre de question qui me paralyse... alors presque au hasard : le Tout sur le tout, L'Italie à la paresseuse (ce sont les premiers que j'avais lu je crois, quand Alain Bonnand me l'avait fait découvrir en 2013, m'écrivant : “ Allez-y en confiance, il vous plaira beaucoup : c'est mon grand frère, je viens de le vérifier de nouveau et il habitait pas loin de chez vous... ”).

Mais c'est seulement pour commencer !
Lien : https://tillybayardrichard.t..
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Le lecteur qui s'intéresse à Henri Calet (né Raymond Barthelmess) ou qui a l'intention de le découvrir dispose aujourd'hui d'un instrument de travail fondamental élaboré par Michel P. Schmitt et édité par les Presses Universitaires de Lyon.
Dans ce « Je ne sais écrire que ma vie » sont en effet répertoriés, analysés et placés dans leur contexte historique et politique des dizaines d'articles et interviews radiophoniques offerts par Henri Calet entre 1935 et 1955, accompagnés d'un index des noms de personnes, d'un inventaire alphabétique et de deux inventaires chronologiques (anthume et posthume).

C'est une somme. Impressionnante de rigueur.

On y découvre un écrivain peu préoccupé de fiction et qui s'est senti incapable d'écrire des romans. le domaine de Calet c'est Paris, le quatorzième arrondissement, les « petites gens » comme il le dit. Il faut vivre. Il faut manger. Placer des chroniques ici et là. Dédicacer des livres dans un grand magasin et répondre aux clients qui cherchent le rayon literie.
Se battre avec les mots. Pratiquer une « écriture du désespoir » non dénuée de l'humour qui en est sa politesse.
Ce que le lecteur découvre n'est rien d'autre que la poétique d'Henri Calet, au sens grec, c'est-à-dire le « faire », la manière dont les mots sont triturés comme de l'argile, le métier artisanal qui est celui d'un écrivain très éloigné des cercles littéraires, du « grand monde » et de la notion d'inspiration.
« Un atelier où je travaille avec les doigts. »
Calet est écrivain humble, qui se « voit partout dans son oeuvre », occupé à tracer de lui un autoportrait jamais achevé. A découvrir dans « le tout sur le tout » notamment.

La magnifique préface de Joseph Ponthus récemment disparu vaut à elle seule la lecture de ce beau volume. Il y parle de « son » Calet.
« Comme lui je suis du peuple et n'ai jamais été que ça… Comme lui, je crois n'avoir su écrire que moi et les petites vies qui m'entourent. Comme lui, il se trouve aujourd'hui par bonheur que je fais le métier d'écrivain. »





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Je ne me souviens pas avoir entendu parler de Henri Calet (1904 -1956) avant de faire la connaissance de Joseph Ponthus qui disait toute son admiration pour lui. Aussi, lors de la dernière masse critique, "Je ne sais écrire que ma vie" faisait partie de la liste de mes envies de découverte. Je dois dire qu'après avoir lu cette somme sur l'oeuvre de Calet, la liste de mes envies s'allonge. Michel P Schmitt a fait un travail très rigoureux. Outre le côté biographie, il nous fait découvrir la grande diversité des écrits de Calet, presse écrite, chaînes de radio, recueil de nouvelles, romans. Calet nous dévoile sa singularité, sa volonté d'écrire pour les petits, ceux dont on ne parle jamais, "les invisibles", loin de la littérature bourgeoise et la plupart du temps élitiste. On ressort de cette lecture avec juste l'envie de continuer la découverte, de foncer dans la librairie la plus proche pour se procurer une des rééditions disponibles grâce au travail de ses admirateurs. Alors à bientôt pour une prochaine présentation d'un ouvrage de Calet.
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Magnifique travail de Michel P.Schmitt sur l'oeuvre d'Henri Calet et sur l'homme, les deux se confondant, s'enrichissant, se faisant vie.
La Belle Lurette étant probablement le roman le plus connu de cet auteur.
Je l'ai entendu nommer comme un maître d'écriture deux fois ces dernières années. La première fois par Eric Holder et en novembre 2019 lors d'une rencontre avec Joseph Ponthus pour son merveilleux ouvrage A la ligne.
Sa préface est sublime car elle dit ce que la littérature peut apporter à chacun : culture, découverte, terreau pour l'écriture ou simplement pour la lecture, ce matériau indispensable à chacun pour cheminer dans sa vie.
C'est beau l'écriture, l'univers d'un écrivain.
Michel P. Schmitt a fait un travail de fourmi pour nous offrir cet univers de Calet.
Calet c'est l'écriture du je, et sa vie qui n'entre dans aucune case.
Joseph Ponthus écrit : « Pour toucher, pour voler un peu de vérité humaine, il faut approcher la rue. L'homme se fait par l'homme. »
C'est ce que cet essai réussi, il ne s'épuise pas à la première lecture, mais se lit à l'envi, en picorant, en s'arrêtant sur ce qui a été saisi, là, à l'instant.
Dans cet ouvrage il y a à la fin une centaine de pages citant les sources, indexant les noms, inventoriant les oeuvres etc.
Un indispensable ouvrage dans votre bibliothèque et lire et relire Henri Calet.
Merci à Masse Critique Babelio et aux Presses Universitaires de Lyon.
© Chantal Lafon
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critiques presse (1)
Actualitte
02 mars 2021
Grâce à ce travail d’archives rigoureux, nous pouvons reconstituer le puzzle de la poétique de Calet.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Mieux que n'importe quelle étude sociologique classique, les deux enquêtes montrent comment les déshérités, les anonymes, les hommes et les femmes quelconques travaillent dur, subissent l'injustice sociale et connaissent des fins de mois difficiles, mais aussi comment ils savent aménager avec poésie leur univers personnel. Calet rapporte leurs paroles gentiment, simplement, sans mépris d'intellectuel ou ricanement d'affranchi. On mesure le fossé entre les préoccupations des gens ordinaires et celles des couches sociales supérieures qui façonnent pour elles-mêmes la doxa intellectuelle, politique ou artistique dans une société inégalitaire. Finalement, ces enquêtes en disent plus long sur lui qu'un journalde diariste ordinaire, mais elles exigent un travail considérable, et Calet se trouve parfois un peu dépassé.
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Nous avons commencé par la rue du Commerce. Notre attirail retenait l'attention et nous a valu quelque succès auprès des ménagères et des marchandes des quatre-saisons.
Aux environ de midi, la rue du Commerce est très animée. Ce jour-là, il s'y trouvait plusieurs aveugles : un, de grande taille, assisté d'une petite femme, vendait tristement des lacets de souliers noirs ; un autre, convenablement vêtu, débitait le Chant des partisans devant la vitrine de l'Uniprix. Une vieille à cheveux blancs lui servait de chien, elle lui a apporté un quart d'eau minérale qu'il a bu. Là-dessus, il s'est mis à chanter Boire un petit coup, c'est agréable... Mais il n'était pas drôle du tout. Une béguine à bicyclette a filé sur la chaussée.
Il nous fallait marcher beaucoup en quête d'angles de vue. À force de cheminer ainsi, j'ai perdu une de mes semelles dans la rue du Théâtre.
C'est en l'église Saint-Jean-Baptiste de Grenelle que j'ai été baptisé, un peu par raccroc. J'avais précédemment été ondoyé à Saint-Pierre du Petit-Montrouge. Et, pour en finir avec les questions religieuses, j'ajoute que j'ai fait ma première communion en état de péché mortel à Etterbeeck, près de Bruxelles. Je ne compte aucune autre cérémonie catholique à mon actif.
Il est possible que ce paragraphe n'intéresse personne.
Revenons à la télévision...
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Je voudrais dire que mon personnage principal est comme doué pour le malheur, ce sera sa particularité.
Non, je ne crois pas qu'il faille aller en Uruguay ou plus loin encore pour connaître l'évasion...La prison est ici et partout. Pour ma part, j'ai renoncé à ce genre de dépaysement. Il me semble inutile d'aller loin. Le dépaysement, je le trouverai au coin de la rue.
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Videos de Henri Calet (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Henri Calet

Chronique de Laurence Goullieux : Henri Calet
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