Le titre et la couverture du livre portent à confusion. L'histoire commence avec intérêt, promettant de belles batailles et aventures sur mer au temps de Guillaume d'Orange et de Jacques II. Ce temps est animé par des guerres entre français, anglais et hollandais avec un foisonnement d'espions. La naissance de l'héroïne Mary promet aussi bien des imbroglios avec son changement de personnalité, de femme en homme selon le contexte. Dommage que l'histoire, par la libido marquée de Mary se transforme en roman d'amour "soft érotique" sous-entendant des ébats charnels sans vraiment aller au bout et en détails. La partie aventure est délaissée pour des amours bien changeants au fil d'un nouvel intérêt, ce qui amène de plus en plus à une histoire décousue. Bien déçu par cette histoire qui a pourtant de bons passages.
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Mary Read est une jeune femme très particulière ; c'est que sa mère la fait passer pour garçon, afin de la faire passer pour son fils mort auprès de la famille de son défunt mari. En faisant ça, elle lui donne l'opportunité d'une bonne éducation, d'une bonne vie. Mais les choses ne seront pas aussi simples. Lorsque l'oncle de Mary revient, ce dernier en a après elle, et ne veut en aucun cas qu'elle ait accès aux richesses de la famille. L'animosité entre les deux sera le moteur de ce roman d'aventures. Parce que dans chacune des situations dans lesquelles se retrouvent Mary, l'ombre de l'oncle plane. Un roman qui nous amène dans la seconde moitié du 17e siècle, ou les corsaires écument les mers pour le compte de Louis XIV pour piler les flottes commerciales. Un roman qui sent bon le large. Un roman plein de rebondissements, plein de rencontres qui marquent, plein d'enjeux stratégiques et commerciaux, plein de trahisons et de complots. Chaque page nous amène vraiment ailleurs, nous capte et nous fait tourner les pages rapidement. Et le personnage de Mary est attachant ; pleine de fougue, intelligente, maligne. Un premier tome qui passe vite, et qui nous donne bien envie de se plonger direct dans le second… Surtout avec cette finale !!!!
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- Qui suis-je, mère ?
- Tu es un ange, répondit Cécily en laçant avec application les chaussures cirées de Mary.
Ce 8 avril 1686, du haut de ses sept ans, la fillette reçut cette affirmation d'un air dubitatif. Plantée devant un miroir en psyché, piqueté de rouille et d'usure, examinant sa mise sous tous les angles par un mouvement souple de ses hanches fines, elle ne parvenait à se plaire.
Le miroir lui révélait un être au sexe indéfini. Les cheveux roux bouclés avaient été si mal coupés que certaines mèches retombaient sur la nuque, ou se dressaient en pique sur le crâne, tandis que d'autres venaient balayer les joues creuses, constellés de taches de rousseur, jusqu'au nez aquilin. La bouche avait encore la pulpe de l'enfance et le regard sombre en rehaussait la fragilité.
Dans ses robes élimées de jouvencelle que sa mère lui taillait dans ses propres vêtements trop usés, Mary était quelquefois parvenue à se trouver mignonnette. Dans cet accoutrement que sa mère la forçait à porter depuis quelques mois, c'était moins évident.
- Mais suis-je une fille ou un garçon ? demanda-t-elle encore.
- Les anges n'ont pas de sexe, ma chérie ! Tu es une petite fille dans l'habit d'un garçon, Mary. Cependant, cela doit rester notre secret. Tu ne voudrais pas que ta pauvre maman soit une fois encore rejetée du grand monde où nous allons ?
J'aime l'intrigue. C'est sans doute un défaut, mais il me plaît de penser qu'une femme ne serait pas complète sans son goût pour les mystères. Ils lui permettent souvent de s'élever dans une société où, hélas, on ne lui prête qu'une place relative. En clair, mon cher, j'aime écouter, surprendre et vibrer de détenir certains secrets qui m'assurent une respectabilité et une impunité totales. Souvenez-vous-en, mon garçon. La liberté des êtres est à ce prix. Car on ne respecte en ce bas monde que ce que l'on craint.
Niklaus lui sourit et écarta une mèche rousse qui s'entêtait à venir balayer le nez de Mary. Il aimait le soyeux de ses cheveux, il ne se lassait pas de ses taches de rousseur sur le nez, ni du noisette de ses yeux ni du rosé de ses lèvres. Il ne se lassait pas de son souffle, de ses gémissements au plus fort de leurs étreintes, de sa manière d'en réclamer encore en pressant plus fort ses doigts au creux de ses reins. Il ne se lassait pas du parfum qu'elle portait, ce parfum de sensualité et de maternité mêlées. De ces manières de femme où perçait souvent la rudesse de ses habitudes de soldat, de ses habits de garçon qu'elle adorait porter contre toute bienséance pour s'activer à la basse-cour où à l'écurie à ses côtés, de son espièglerie lorsqu'ils bouchonnaient les chevaux ou trayaient leurs deux vaches, s'amusent à s'arroser de lait en penchant le pis de côté.
De sa façon de l'entraîner dans le foin d'un mouvement d'index assorti d'un regard coquin, tandis qu'au-dehors, sous la surveillance de Milia, les enfants chahutaient. Il aimait son rire, ses colères, ses entêtements aussi stupides que les siens pour des broutilles, leurs réconciliations, leur tendresse.
- En ta qualité de garçon, lady Read te donne ce qu'une fille ne peut avoir en ce monde ! Tu reçois les leçons des meilleurs maîtres, tu apprends à te battre aussi. Si j'avais su tout cela Mary, si les femmes de ce temps avaient accès à cette connaissance, je serais libre. Nous serions toutes libres. Ne laisse pas passer cette chance, lui assura Cecily le soir-même comme Mary lui racontait l'objet de son courroux. Prends ce que l'on t'offre. Et nul, jamais, ne deviendra ton maître.
_ Je ne m'imagine pas mourir dans ce lit, Niklaus, peu importe la manière. Je veux regarder la mort en face et me battre contre elle pour la braver.
Il passa son bras musclé autour de ses épaules et les caressa.
_ C'est aussi la réflexion que je me suis faite, admit-il. Quand tu as failli passer à la naissance d'Ann Mary, j'ai compris que tu n'étais pas faite pour la vieillesse et l'apathie.
Le Templier de l'ombre - Mireille Calmel