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EAN : 9782228905671
429 pages
Payot et Rivages (15/09/2010)
4.44/5   8 notes
Résumé :
Personnage de légende, Romulus ne nous est connu que par des écrits bien postérieurs au VIIIe siècle av. J.-C. où il vécut. Objet de fascination, il reste pour les historiens une véritable énigme. Des découvertes archéologiques récentes, prétendant avoir retrouvé le palais royal de Romulus ou la grotte du Lupercal, permettent cependant d'éclairer d'un jour nouveau la figure du fondateur de Rome.
En réalité, Romulus condense plusieurs personnages : l'homme des... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Les biographies sur ce personnage, à cause de son caractère plus qu'ancien, sont particulièrement rares. Et de fait, Thierry Camous, spécialiste des premiers temps de Rome, la Ville éternelle, l'Urbs, s'est lancée ici davantage dans une histoire de la naissance de Rome que dans une biographie méticuleuse du personnage, tant celui-ci est multiforme et composite. L'auteur, dès l'ordonnancement de son plan général, développe la thèse selon laquelle il y eut incontestablement plusieurs Romulus, plusieurs fondateurs successifs, réunis plus tard (dans la droite lignée des traditions antiques) en une même figure légendaire.
Ainsi, nous suivons tout d'abord Romulus l'homme des bois, figure albaine, fruit du Latium et de ses contrées verdoyantes. Puis, se cristallise un Romulus fondateur concentrant les symboles forts que son le fratricide de Rémus, l'installation du pomérium et l'épisode de l'enlèvement des Sabines. Enfin, le Romulus roi et sa légende postérieure jusqu'aux derniers temps de l'Empire romain apparaissent comme une phase plus nébuleuse, mais pas moins symbolique, loin de là, au sein de la culture romaine.
Thierry Camous mène parfaitement sa barque pour nous emmener au VIIIe siècle au coeur de l'Italie centrale alors que le sel et les cochons sont les denrées capitales du commerce local et que les tribus indigènes s'affrontent et s'entraident au gré des alliances et des razzias intestines. Il réussit à mêler habilement sources écrites, sources archéologiques et réflexions personnelles sans paraître trop scolaires et en racontant une histoire proprement et simplement. Car finalement, l'Histoire reste une histoire à raconter.

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Rome a-t-elle inventé Romulus ? Ou Romulus a-t-il vraiment existé ?

Dans cet essai dense et bien argumenté, Thierry Camous tente de répondre à cette question. Son propos s'articule autour de quatre axes, et il déconstruit avec intelligence le mythe de Romulus en expliquant le pourquoi de chaque élément de la légende. Il utilise pleinement la pluridisciplinarité : archéologie, analyse des sources, mais pas que, mythographie, ethnologie, anthropologie, psychologie, même.

- le Romulus allaité par la louve, celui qui naît de la vestale violée par Mars et adopté avec son jumeau Rémus par le berger Faustulus. C'est le Romulus incarnant les temps les plus anciens, primitifs ? d'une époque où Rome n'est qu'un amas de villages latins et sabins rassemblés sur les collines. On part d'un état archaïque et sauvage pour se diriger vers un début de civilisation agraire, représentée par la louve, qu'on s'approprie pour se protéger, justement, du prédateur qui menace cette société naissante.

- le Romulus fondateur de Rome ! C'est celui qui trace le sillon, tue son frère et enlève les Sabines. Les bergers, après avoir réglé les querelles de famille à Albe, descendent vers le lieu mythique. L'auteur y voit le ver sacrum, ce phénomène des jeunes chassés à cause de leur turbulence pour fonder leur destin ailleurs. Et ailleurs, c'est sur le site de la future Rome, où Latins et Sabins vivent en petites communautés. Là, Romulus va mener une forme de guerre rituelle, qui sera moins un enlèvement qu'un échange de femmes.

- le Romulus roi, le plus tangible, peut-être ? celui qui laisse un corpus de lois fondant la Cité, qui guerroie contre ses ennemis (cette fois plus du tout métaphoriquement) et dont l'archéologie a trouvé, peut-être, le "palais", au pied du Palatin. Avant d'être Rome, déjà, le site accueillait un commerce intense, international. Il convenait que la Cité drainât toute cette activité pour s'enrichir et permettre l'émergence d'une aristocratie, le futur patriciat.

- Et Romulus, le mythe, qui inspire Camille lorsqu'il affronte les Etrusques puis les Gaulois. Celui qui est pris à parti lors des guerres civiles du 1er siècle avant, comme tyran, selon les uns, comme fondateur et modèle, selon d'autres, jusqu'à Auguste qui rétablit dans les faits la monarchie. Celui qui hante Rome jusqu'à la fin. le prénom était toujours en vogue, en 476 : Romulus Augustule, le dernier empereur, le tenait de son oncle, qui s'appelait Romulus. Folle coïncidence !

Un traité absolument passionnant, qui éclaire les débuts de la civilisation qui a fondé la nôtre !
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"Romulus a-t-il réellement existé? [...] Comment peut-on être en même temps chef de clan primitif, pour ainsi dire paléolithique, roi d'une cité-Etat concurrente de la puissante Véies étrusque? Curieuse conclusion pour un biographe!"
Histoire, archéologie, psychanalyse, ethnographie, mythographie, anthropologie, philologie et linguistique: avec toutes les précautions de rigueur, Thierry Camous convoque ces disciplines pour démêler avec une magistrale habileté le vrai du faux, la certitude du doute, la vérité du fantasme à propos de Romulus. Une biographie stricto sensu n'aurait pas grand intérêt, voire serait absurde dans le cas du légendaire roi fondateur. C'est pourquoi T. Camous étudie scientifiquement comment la figure de Romulus illustre le passage d'une humanité préhistorique, celle de l'homme des bois qui a pour totem le Pic dans les monts albains, au pastoralisme fondateur de cités sous l'égide d'un nouveau totem, la Louve. Pour Thierry Camous c'est Rome, nom qu'il fait dériver de "ruma", la mamelle, celle de la louve, qui donne son nom à Romulus, lequel incarne dans la psyché romaine tout à la fois l'homme "primitif" ( c'est-à-dire avant l'émergence de l'Etat), le fondateur, le roi, le guerrier et le mythe des origines enjolivées.
Des origines, vraiment? Dans une brillante démonstration, Camous explique pourquoi et comment les Romains qui n'avaient pas ou très peu de cosmologie, ont éprouvé le besoin de se chercher des racines troyennes, allant jusqu'à placer les Pénates de Rome, non pas à Rome (dès l'origine donc, Rome n'est pas dans Rome, suis-je tenté de dire), mais à Lavinium, la cité fondée par Enée, des générations avant l'entrée en scène de Rémus et Romulus (c'est dans cet ordre que les Anciens citaient les jumeaux).
La grande érudition de son auteur, sa finesse d'écriture et de raisonnement, la pertinence de ses analyses et son sens de la mesure font obligatoirement de ce livre une référence majeure. Certes, il y a bien une ou deux pages de détails qu'on peut juger superflus -qui s'inquiète aujourd'hui des limites précises du tout premier pomérium? J'ai aussi repéré une erreur surprenante de la part d'un tel érudit: page 338, confusion entre Flaminus, vaincu au lac Trasimène par Hannibal, et Flamininus, vainqueur de Philippe V de Macédoine à Cynocéphale. Mais cela n'atténue pas la haute considération en laquelle je tiens cet ouvrage d'excellence.
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Livre passionnant qui ancre la mythologie dans l'histoire
En plus livre facile à lire
Un bijou d'érudition non pontifiante
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
En effet, la femme est le bien d'échange par excellence, permettant d'établir des relations avec les communautés voisines. On ne peut se passer d'épouse. Pas pour des raisons sexuelles, tant il est vrai que les sociétés primitives sont souvent très libres dans les relations hors mariage, mais pour des raisons économiques et sociales. [...] Aussi la femme est-elle un "bien" trop précieux, comme la nourriture, pour ne pas être échangée. [..] Ce qui est trivial est destiné à être consommé, ce qui est précieux, à être échangé, et l'on distingue les biens de consommation des biens d'échange.
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(Sur l'enlèvement des Sabines)
Aussi la femme est-elle un "bien" trop précieux, comme la nourriture, pour ne pas être échangée. En effet, comme la sociologie du don, dont nous n'allons pas refaire ici l'historique depuis Marcel Mauss, l'a bien montré, ce qui est trivial est destiné à être consommé, ce qui est précieux, à être échangé, et l'on distingue le bien de consommation du bien d'échange.

p. 189
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En d'autres termes, ce qui dépassait l'entendement des Anciens, comme celui des savants de l'âge du romantisme, fut qu'Albe la Longue ne fut peut-être jamais une ville, ni même une cité politiquement unifiée. Elle fut, à l'image de ce que les archéologues ont pu observer dans le Latium ou en Etrurie méridionale, un ensemble de petits groupes humains... L'Albe qui abrita la naissance de Romulus et de Rémus, où fut conçu le rêve de Rome, n'était qu'un saupoudrage de micro-communautés des hauteurs dont la situation géographique, la richesse agricole et pastorale, ainsi que l'ancienneté immémoriale, concouraient à faire le coeur spirituel et politique du plus ancien Latium.

p. 60
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La piste psychanalytique revient à postuler que les Romains ont projeté sur leur légende leur propre connaissance empirique des mécanismes de la psyché, bien avant qu'ils ne soient théorisés par Freud. Qui pourrait, en effet, sérieusement contester le fait que les mythes antiques constituent des outils d'analyse de la psychologie humaine particulièrement fins ?

p. 156
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Chez les Romains, sinister (gauche) provient de sinere (permettre) et désignait l'espace favorable, qui "rendait possible". Sinister donnera pourtant "sinistre" et finira par prendre son sens actuel, car, chez les Grecs, au contraire, et c'est cette version qui s'imposera, c'est de la gauche du templum augural que provenaient les "oiseaux de mauvais augure".

p. 142
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