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Albert Camus (Préfacier, etc.)Geneviève Renaux (Auteur du commentaire)
EAN : 9782070373567
448 pages
Gallimard (30/11/-1)
4.21/5   84 notes
Résumé :
Un enfant naturel, admirablement doué, beau comme l'Amour, qui ne fait la conquête de la haute société que pour lui dire son mépris et laisser la plus cruelle peinture des dernières années de l'Ancien Régime. La Révolution survenue, Chamfort s'y jette à corps perdu. Mais ce dernier des justes ne supporte pas ce que Robespierre et Marat imposent de violence et de sang à l'action politique et il tente de se tuer «dans des circonstances si horribles, écrit Albert Camus... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Une redécouverte complète. En général je n'apprécie pas ce type d'ouvrages, qui rassemblent des maximes et les juxtaposent sans queue ni tête. J'avais le souvenir de quelque chose d'assez moraliste et un vieillot. Quelle erreur ! D'abord dans l'ensemble la langue ne paraît pas datée, difficile à lire et comprendre. Ce qui frappe ensuite c'est le nombre élevé de maximes ou pensées qui n'ont pas pris une ride, voire sont encore d'actualités alors qu'elles datent du XVIIIème siècle.
Quelques exemples : « En France, on laisse en repos ceux qui mettent le feu, et on persécute ceux qui sonnent le tocsin. »
"La plupart des livres d'à présent ont l'air d'avoir été faits en un jour avec des livres lus de la veille"
" Presque tous les hommes sont esclaves faute de savoir prononcer la syllabe : non. »
Tous ces textes véhiculent bien sûr des valeurs, on peut appeler cela une morale, mais sans jamais rien de moralisateur ou de sentencieux. Ses réflexions reposent sur l'observation par quelqu'un au caractère fort et affirmé, il était apprécié à la cour pour son esprit mais n'hésitait pas à se montrer quelque peu insolent ou irrévérencieux dans les « Caractères et anecdotes », juste à la limite du politiquement correct de l'époque. Finalement une sorte de précurseur de certains de nos humoristes actuels.
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"La plupart des livres d'à présent ont l'air d'avoir été faits en un jour avec des livres lus de la veille" Voilà une pensée qui pourrait être contemporaine. Comme quoi la littérature médiocre n'a pas d'époque définie. Chamfort est un expert dans l'art de la maxime, cousine française de l'aphorisme. Ah, l'esprit français! Cet art de la conversation, ou du mot qui cloue et qui tue, sous les lambris dorés. Ici nous avons aussi un art de la pensée, ramassée en quelques lignes, ou en un paragraphe. Cet auvergnat de filiation incertaine se fera un nom par son intelligence, sa vivacité, et ses succès mondains, notamment féminins. On dit que, ayant amorcé une fugue qui devait l'emmener au-delà des mers à 17ans, il fit demi tour à Cherbourg, disant à son comparse futur traducteur d'Ossian et de Shakespeare: "Avant de faire le tour du monde, si nous faisions le tour de nous-mêmes!" Son commerce galant et ses succès féminins lui occasionnèrent une maladie vénérienne qui affecta tôt son état de santé. Mais c'est sa fin qui est un roman. Inquiété à deux reprises par les révolutionnaires, il devance la seconde fois l'emprisonnement en se massacrant littéralement au pistolet, puis au rasoir, afin de revendiquer son état d'homme libre. Il mourra d'une infection secondaire à ses blessures, mais ne retournera pas en prison. Pour un homme qui vécut des libéralités que les puissants voulurent bien lui accorder, et qu'à l'occasion il se donnait le luxe de refuser, cela ne manque pas de panache. C'est bien sûr que, comme Sade, ce libertin fut aussi et avant tout peut-être, un moraliste.
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Des perles à l'état pur ! Toutes ne le sont pas, tant s'en faut, mais certaines ressortent avec une pertinence ou une profondeur qui paraissent valoir de tout temps et en tous lieux ; pour tout dire, universelles. Beaucoup concernent le monde et la vie en société. Exemples : « La société, qui rapetisse beaucoup les hommes, réduit les femmes à rien » (Maxime 354) ; « Il faut être juste avant d'être généreux, comme on a des chemises avant d'avoir des dentelles » (Maxime 160) ; « En France, on laisse en repos ceux qui mettent le feu, et on persécute ceux qui sonnent le tocsin » (Maxime 499)… D'autres traitent de la vie, en général : « Il y a deux choses auxquelles il faut se faire, sous peine de trouver la vie insupportable : ce sont les injures du temps et les injures des hommes » (Maxime 115) ; « le plaisir peut s'appuyer sur l'illusion, mais le bonheur repose sur la vérité » (Maxime 153)… La question amoureuse est aussi en bonne place : « L'amour est un sentiment qui, pour paraître honnête, a besoin de n'être composé que de lui-même, de ne vivre et de ne subsister que par lui » (Maxime 345) ; « Les femmes ne donnent à l'amitié que ce qu'elles empruntent à l'amour » (Maxime 403)… J'aurais pu citer bien d'autres illustrations de cette richesse « maximale ». Ces Maximes et Pensées sont typiquement le livre de chevet, dont on lit deux ou trois pages, de temps en temps, juste avant de s'endormir ; on en retranscrit les meilleures formules et on les médite. (La partie intitulée « Caractères et anecdotes » est très directement liée à des personnages contemporains de Chamfort et souvent méconnus de nous ; son intérêt est nettement moindre, d'après moi.)
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Chamfort s'inscrit dans la tradition des moralistes classiques tels que La Rochefoucauld ou La Bruyère pour nous livrer son « Produit de la civilisation perfectionnée ».

n°277 « Un homme d'esprit est perdu s'il ne joint pas à l'esprit l'énergie de caractère. Quand on a la lanterne de Diogène, il faut avoir son bâton. »

L'entrée, très copieuse, se compose des « Maximes et pensées », qui est une collection d'aphorismes sur des sujets divers (La solitude, l'esprit, l'esclavage…). Nous percevons de suite ce qui est touchant avec ce moraliste : nous ressentons une véritable présence à travers ces aphorismes, l'expression d'une âme revêche, orgueilleuse, sans compromis aucun. Un sale caractère qui a des choses à nous dire et qui n'hésite pas à s'impliquer ! C'est finalement tout le contraire des généralités très impersonnelles des Caractères de la Bruyère. En outre, Chamfort plaisait beaucoup à Nietzsche et nous comprenons pourquoi durant cette lecture. D'ailleurs, il nous faudra déjà parler ici des entremets, car comme avec les yaourts, vous pourrez constater que la philosophie du moustachu contient des vrais morceaux de Chamfort !

Mais Il est temps d'attaquer le plat de résistance, les « Caractères et anecdotes », qui se composent d'une collections d'indiscrétions concernant les personnages en vue de l'époque, gens de la cours , nobles, artistes, penseurs et membres du clergé. Ceux-ci relatent certains faits croustillants transmis depuis l'époque de Louis XIV, jusqu'aux faits rapportés par ouï-dire, ou dont Chamfort a été témoin, ayant cours durant le règne de Louis XV et de Louis XVI. Ces savoureuses et -supposément- véridiques histoires s'amassaient sur des petits billets que Chamfort conservait et qui furent publiés par son ami Guinguené. On y découvre un sens miraculeux de la concision et de la chute, et surtout un humour fin et corsé comme du gibier. D'ailleurs, après pourtant plusieurs lectures, ces anecdotes parviennent encore à me faire marrer ! Tout ceci est encore meilleur qu'une farce de Molière

Enfin, Les «Petits dialogues philosophiques » composeront le fromage, mais je pense que vous n'aurez plus assez faim pour apprécier ces derniers traits d'esprit...

L'introduction de Camus présente un peu l'auteur et son oeuvre. le caractère et la vie de Chamfort, misanthrope éminent (un chapitre de ses Caractères ne se nomme pas pour rien « du goût de la retraite et de la dignité du caractère »), sont en eux même des aspects indispensables pour qui veut ressentir tout l'âpreté et l'originalité de cette gastronomie unique, d'un auteur impitoyable aussi bien pour les absurdités de l'absolutisme que pour les débordements de la Révolution française.
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Regards et aphorismes sur une société de cour et de salons.
Toute la force de la langue française mis au service du talent d'un des plus grands esprits français de son temps et de ceux qui vinrent après.
A connaître par plaisir des traits exercés et de ces intelligences qui éclairèrent notre langue des siècles durant.
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Citations et extraits (97) Voir plus Ajouter une citation
Les maximes, les axiomes sont, ainsi que les abrégés, l’ouvrage des gens d’esprit, qui ont travaillé, ce semble, à l’usage des esprits médiocres ou paresseux. Le paresseux s’accommode d’une maxime qui le dispense de faire lui-même les observations qui ont mené l’auteur de la maxime au résultat dont il fait part à son lecteur. Le paresseux et l’homme médiocre se croient dispensés d’aller au-delà, et donnent à la maxime une généralité que l’auteur, à moins qu’il ne soit lui-même médiocre, ce qui arrive quelquefois, n’a pas prétendu lui donner. L’homme supérieur saisit tout d’un coup les ressemblances, les différences qui font que la maxime est plus ou moins applicable à tel ou tel cas, ou ne l’est pas du tout. Il en est de cela, comme de l’histoire naturelle, où le désir de simplifier a imaginé les classes et les divisions. Il a fallu avoir de l’esprit pour les faire ; car il a fallu rapprocher et observer des rapports : mais le grand naturaliste, l’homme de génie, voit que la nature prodigue des êtres individuellement différents, et voit l’insuffisance des divisions et des classes, qui sont d’un si grand usage aux esprits médiocres ou paresseux.
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Il n'y a personne qui n'ait plus d'ennemis dans le monde qu'un homme droit, fier et sensible, disposé à laisser les personnes et les choses pour ce qu'elles sont, plutôt qu'à les prendre pour ce qu'elles ne sont pas.
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La société, ce qu'on appelle le monde, n'est que la lutte de mille petits intérêts opposés, une lutte éternelle de toutes les vanités qui se croisent, se choquent, tour à tour blessées, humiliées l'une par l'autre, qui expient le lendemain, dans le dégoût d'une défaite, le triomphe de la veille. Vivre solitaire, ne point être froissé dans ce choc misérable, où l'on attire un instant les yeux pour être écrasé l'instant d'après, c'est ce qu'on appelle n'être rien, n'avoir pas d'existence. Pauvre humanité!
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La plupart des institutions sociales paraissent avoir pour objet de maintenir l'homme dans une médiocrité d'idées et de sentiments qui le rendent plus propre à gouverner ou à être gouverné
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Le rôle de l’homme prévoyant est assez triste. Il afflige ses amis, en leur annonçant les malheurs auxquels les expose leur imprudence. On ne le croit pas ; et, quand ces malheurs sont arrivés, ces mêmes amis lui savent mauvais gré du mal qu’il a prédit, et leur amour-propre baisse les yeux devant l’ami qui devait être leur consolateur, et qu’ils auraient choisi s’ils n’étaient pas humiliés en sa présence.
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Vidéo de Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort
Nicolas Chamfort, lecteur de La Fontaine (BFM, 2021) Une conférence intitulée « La Relation d’un voyage… peut-elle encore « attirer nos larmes ? » donnée par Eva Avian le 11 décembre 2021 à Bibliothèque francophone multimédia de Limoges.
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