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Critique de fanfanouche24


Après l'époustouflant cadeau qu'une amie m'a fait dernièrement, avec le tout récent "S'émerveiller" de cette auteure, que je lisais pour la toute première fois... je me suis précipitée sur cet écrit intimiste...

Dans cet essai "S' Emerveiller", des allusions, et extraits de ses textes antérieurs, il était question à plusieurs reprises de ce récit personnel, que je me suis commandé aussitôt...

Un hommage unique et bouleversant d'une fille-écrivain à son père, écorché vif, fantasque, atypique, et même si ce dernier se situe dans une existence "manquée", il aura réussi à transmettre à ses enfants,(dont l'auteure) les valeurs primordiales, fondatrices, aimantes pour grandir de la meilleure façon possible...

Ce texte me "tourneboule" à plus d'un titre car il soulève des questions essentielles ,comme nos fondations, les transmissions multiples, variées
et complexes de nos parents...notre construction d'adulte selon la densité , la qualité, l'authenticité des valeurs, de l'affection... que notre histoire familiale nous a léguées

Nous comprenons à cette lecture combien ce papa, original et fantaisiste,fut un pédagogue extraordinaire qui influencera de façon significative la carrière future de l'auteure, ainsi que son appréhension et sa philosophie de la vie...

La lumière, la force, la faiblesse comme l'énergie de Belinda Cannone lui viennent de ce père décalé, mais hors du commun,autodidacte et profondément humaniste...

"Je crois que j'ai eu envie d'écrire ce livre parce qu'un jour, dans un train,me rendant à un colloque de psychanalystes autour de mon essai -
Le Sentiment d'imposture-, j'ai réalisé à quel point il -savait aimer-. Je lisais le résumé d'une conférence où l'auteur évoquait un épisode de la vie de Freud, un voyage entravé par une loyauté à l'égard de son père, et j'ai pensé combien le mien avait su m'autoriser à grandir, et d'abord en me permettant de m'affranchir de lui. A présent je me dis qu'ici se trouve peut-être le fondement de mon entreprise, dans mon émerveillement devant son étonnante intelligence du coeur, émerveillement assez puissant pour m'avoir incitée à tenter son portrait." (p. 108)

Ce récit personnel offre et engrange d'abondants questionnements: les origines possibles du besoin vital d'écrire, de la vocation d'écrivain, tout l'arc-en-ciel de cette chose extraordinaire : la TRANSMISSION...qui permet aux enfants de se construire de façon plus ou moins satisfaisante...

L'héritage affectif et intellectuel des parents, souvent plus envahi d'affects... d'où la complexité fréquente pour les enfants, à digérer, assimiler, et à en faire du positif !

L'auteure relate à quel point , dans les moindres replis de sa sensibilité, les enseignements les plus modestes de son père sont là , omniprésents...
"Mon père (...)) était pourtant fier de moi- quoique pour rien au monde il n'eût parlé de mes livres à quiconque: il aurait eu l'air de se vanter, disait-il, ou pire, de s'attribuer un mérite alors qu'il n'était "évidemment" pour rien dans mes réussites.
Il avait raison, en ce qu'il ne m'a jamais suggéré de publier des livres, mais il avait tort, puisqu'il m'avait mis la plume à la main, les mots au coeur, et m'avait appris à regarder le monde. Quoi qu'il en ait pensé, je suis depuis longtemps persuadée que je réalise, disons, son voeu inconscient" (p. 133-134)


Nous avons tous un parent plus ou moins proche, qui nous a marqués plus durablement, continuant à nous éclairer et à influencer notre propre chemin, nos manières de vivre, de penser, d'agir: cette lecture
bouleversante m'évoque ma propre petite lumière permanente,qui reste (même après près de 30 ans depuis sa disparition, en 1988) ma grand-mère maternelle, conservant, en dépit une vie des plus modestes et effacées ,tout son rayonnement à mes yeux d'enfant comme à ceux de l'adulte...

J'achève ce ressenti de lecture sur cet extrait qui donne parfaitement le ton de cet hommage: Amour, reconnaissance, joie et grande mélancolie...mélangées !

"Au tout début de -Paris, Texas-, de wim Wenders, on voit un homme marchant le long d'une voie ferrée, seul le visage buté, mal fagoté, obstiné et ayant l'air, je ne sais pourquoi je le crois, de faire un long
voyage bien qu'il ne porte aucun bagage, et d'aller fermement vers nulle part. C'est une de ces images complexes comme le cinéma nous en offre parfois, et qui prennent aussitôt place dans un recueil très
intime et précis. Dans ce marcheur j'ai d'emblée vu mon père -pour l'errance, la solitude et l'ardeur. "
(p. 147)

Un très fort moment de lecture... qui m'a fait songer, en partie, à un autre récit personnel d'un écrivain, J.M. Delacomptée "Ecrire pour quelqu'un" [ Hommage d'un fils à son papa].

Je renouvelle ma reconnaissance à l'amie, qui a enclenché ma découverte de cette romancière et essayiste...Elle se reconnaîtra aisément...

Mon enthousiasme est tel , que j'ai commandé à mon libraire de quartier, " La Chair du temps" et "L'Homme qui jeûne"...; mes deux lectures à venir , pour poursuivre ma connaissance de cette dame,
qui me touche et m'enthousiasme pour sa sensibilité, et ses analysestrès percutantes sur l'écriture, et les merveilles de la transmission...
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