Vous aurez beau vouloir m’interdire certaines paroles, certaines pensées, vous savez que je n’en ai cure, dit-il en se levant. De toute façon, ce n’est plus qu’une question de temps avant que vous ne passiez de vie à trépas. Lambirja vous accueillera, j’en suis certain, les bras ouverts. Et je la remercie pour ça. Fassis closa eo fillo, Lambirja. Elle vous accueillera, et, moi, je serai libéré du poids que vous représentez. Et je partirai d’ici. Sans aucun remords. Je ne crois pas que vivre dans l’ombre nous a apporté une quelconque protection. Nous aurions pu très bien continuer à exercer notre magie clandestinement, dans les ténèbres, et profiter des quelques joies que le monde extérieur aurait pu nous offrir. J’ai envie de le voir, de le contempler, de regarder enfin le soleil…Plus de quarante ans à rester enfermé ici, à ne voir qu’à de trop rares occasions le monde sous la lumière biaisée de la lune
La mort est autant une mauvaise nouvelle qu’une bonne. C’est la fin du corps physique et l’éveil de l’âme. C’est de toi dont je tiens ces propos. Tu me l’as tant dit, lorsque je n’étais qu’un petit garçon. Mon père se meurt, certains restants seront tristes, mais, moi, j’y vois le signe du destin, de la renaissance aussi. La renaissance de notre communauté. Le roi est mort, vive le roi ! Comme diraient les gens du dehors.
— Se moquer d’un condamné, ce n’est guère…courtois.
— Oui, je me moque d’un futur mort. Ne jouons-nous pas continuellement avec la mort en tant que praticiens de l’Art noir ?
— J’aime ton insolence. Mais, nous ne jouons pas avec la mort, la mort est inéluctable. C’est plutôt cette catin qui joue avec nous. Et, en ce moment, avec mes nerfs.
Elle était là.
Dans l’ombre.
Dame de la Nuit.
Dame de la Mort.
Elle surveillait l’enfant.
Elle le bénissait malgré sa peur.
L’enfant recula devant cette main inconnue.
Mais la peau de la Dame lui parut d’une douceur infinie.
Et il l’accepta comme elle l’avait accepté.
Car le vent de ses gestes était comme une brise.
Ce ne sont que des mots, peut-être, durs à tes petites oreilles, mais qui n’ont guère d’importance. Les mots demeurent des mots. Ce qui importe le plus, c’est la foi profonde qui nous habite. Et, là où elle demeure, elle n’est pas dupe, elle connaît notre fidélité…