Merci à Babelio de m'avoir choisi dans le cadre de l'Operation Masse Critique et aux Éditions Préludes de leur envoi de ce livre de
Jillian Cantor.
Une biographie de Marie Curie confrontée à celle qu'elle aurait pu avoir en se mariant en Pologne, et en restant Marya, voilà une idée étrange qui avait de quoi éveiller ma curiosité.
La vie de Marie Curie est en elle même une vie exceptionnelle que beaucoup d'entre nous connaissent. Comment cette jeune femme venue de Pologne allait très vite se révéler une immense scientifique, et, avec
Pierre Curie, qui deviendrait son mari, se lancer dans l'entreprise titanesque qui allait aboutir à la découverte du radium et du polonium et les deux chercheurs obtenir le
Prix Nobel de Physique avec Henri Becquerel en 1905, tout cela est déjà une aventure scientifique et féministe incroyable. Et puis que cette femme, brisée par la mort tragique de son mari, se relève pour obtenir un deuxième prix Nobel, de chimie cette fois, en 1911, puis s'engage durant la guerre 1914-1918 pour concevoir des petites voitures équipées de matériel de radiologie ( « les petites curies ») et se rendre près des champs de bataille avec sa fille Irène pour radiographier les blessés de guerre, voilà une aventure humaine exemplaire. Et puis essayer d'utiliser les aiguilles de radium pour traiter les cancers de l'utérus, et puis refuser la Légion d'Honneur et puis voir sa fille Irène recevoir le
Prix Nobel avec son mari Frédéric Joliot, et puis….
Oui, une personnalité hors-normes, d'une grande énergie et d'une grande humanité, parfois perçue aussi par ses contemporains comme une femme d'une grande froideur, donc une personnalité complexe comme le sont tous les génies.
Malheureusement pour moi, et je suis bien désolé pour l'autrice qui commente à la fin son enthousiasme d'avoir écrit ce double récit, j'ai trouvé que celle-ci a transformé la vie de Marie Curie en une sorte de roman-feuilleton sentimental, une romance sur fond de bien-pensance que je n'ai pas aimée du tout.
Et puis le récit de cette vie alternative dont le but semble être de montrer que la Marya restée en Pologne deviendra, elle aussi, une scientifique, ne m'a pas du tout convaincu, tant toute cette histoire m'a paru artificielle, et beaucoup trop romancée. Et même, le fait de considérer
Pierre Curie comme une sorte de raté, d'ombre de son frère Jacques (qui lui, aura le
Prix Nobel avec son épouse Helena, la soeur de Marya !), et de lui attribuer une sorte de liaison platonique avec Marya, cela m'a paru tellement grotesque que je me suis senti vraiment mal à l'aise.
Et de traiter ces deux récits parallèles à la première personne, et ansi attribuer à
Marie Curie ces sentiments où la vie de famille, la vie amoureuse sont mises, le plus souvent, devant les préoccupations scientifiques, je ne crois pas que cela corresponde à la vraie
Marie Curie, d'ailleurs qui peut savoir ce qu'elle pensait.
Et enfin désolé aussi de dire que je n'ai pas aimé cette écriture sans relief, sans nuances, avec de nombreux « clichés » tels ces « creux au ventre » qui apparaissent toutes les deux ou trois pages, ou encore ces joues qui sont toujours rosies, etc…
Peut-être suis-je mauvais juge, et sans doute ne suis-je pas fait pour ce genre de lectures, car je sais que beaucoup de lectrices et lecteurs ont apprécié cette double biographie romancée.
Peut-être est ce aussi en raison de ma propre formation et mon parcours professionnel de scientifique.
En tous les cas, je n'ai pas apprécié ce traitement romanesque de la vie de Marie Curie et encore moins celui, imaginaire en tous points, de Marya Sklodowska restée en Pologne
Pour moi, les actes de la vie de scientifique, de femme et de mère engagées, de Marie Curie me suffisent.