En 1938, aux États-Unis, l'inquisiteur de la Nouvelle Angleterre laisse derrière lui un chemin de victimes torturées, au corps scarifié de runes nordiques. le FBI mène l'enquête et tous ceux qui gravitent autour de l'affaire sont emportés dans un tourbillon de violence et de peur…
Les Runes de feu est un thriller mené tambour battant, un piège pour les lecteurs sensibles aux ambiances noires, aux plongées dans l'enfer intérieur des tueurs, car chaque fin de chapitre appelle à se jeter sur le suivant. C'est donc un livre qu'il vaut mieux débuter un soir de week-end sinon gare à la nuit blanche ! Quand on débute le récit, on prend l'affaire en route, l'auteur n'a pas finassé, de suite, il nous parle de l'autopsie d'une victime, interroge des témoins… on est plongé dans l'atmosphère du crime. Et déjà le danger, la folie, la noirceur s'invitent dans les pages. Très visuelles, violentes, ces premières scènes nous accrochent d'emblée. On est dedans. le style, aussi, efficace, évocateur, nous réserve aussi des pépites de sensualité, des phrases aussi bien tournées que porteuses de sens.
Je ne suis pas très souvent happée par ce type d'ouvrage à suspens, parfois les ressorts de l'action y sont trop factices. Dans ce roman, rien de tel, il fait partie des criantes exceptions. le procédé littéraire largement utilisé se laisse complétement oublié derrière la densité de l'histoire racontée. Elle est originale, très bien documentée, et portée par une intrigue rebondissante, mais aussi des personnages très attachants. Les protagonistes sont une force de ce roman. On ne suit pas seulement les enquêteurs du FBI, les archéologues consultés dans le cadre de l'enquête, mais la famille, les amis de ceux-ci, des suspects, des témoins, des journalistes. Tout un petit monde qui gravite autour des crimes, qui racontent son lot d'histoires parallèles… ou sécantes à l'intrigue principale, là où les destins se croisent dans le sang. Des personnages « vrais », complexes, intéressants, certains nous lancent sur des fausses pistes, d'autres provoquent l'émotion. Et on frémit pour eux, car le roman est habilement construit, parvient vraiment à nous faire peur, nous faire sentir le bord du précipice, nous bluffer : nous faire croire à certaines données de l'intrigue policière avant de lever un autre pan du mystère.
En effet, l'intrigue n'est pas simpliste, ni clichée, et elle est encore enrichie par le cadre historique très recherché, référencé, de cette fin des années 30 : souvenirs guerriers, histoire du FBI, du journalisme et du crime organisé à New York, histoire de l'immigration, de certaines institutions, événements météorologique, culturel, apport de la science, de la mythologie… L'auteur est parvenu à recréer avec justesse une époque, une ambiance, une cité en distillant, de plus en plus nettement quand on se rapproche de la fin, des touches de fantastique. Car oui, si on aborde
Les Runes de feu comme un thriller historique, l'atrocité, l'impossibilité des crime, nous font peu à peu entrevoir la participation du surnaturel dans l'exécution et les mobiles du crime… Les révélations finales, les derniers chapitres, encore plus fous, plus profondément ancrés dans la folie, la violence, la dramaturgie des destinées des héros nous entraînent très loin de là où on était en se saisissant de l'affaire de l'inquisiteur en compagnie des enquêteurs. Un roman mémorable, si riche qu'il semble en contenir plusieurs.
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