Pour un premier roman, c'est du lourd. du très lourd. Et dans tous les sens du terme !
Sur fond d'après-guerre de 14/18, dans un village paumé dans les Causses, déjà bien amoché par ses morts à la guerre, les meurtres se succèdent. Camille, la jeune maîtresse d'école, a un ami enquêteur qu'elle appelle à la rescousse, Martial. Lui est amoureux d'elle depuis toujours, et elle le fut de lui, mais, parti à la guerre puis faire des études au loin, celle-ci s'est fiancée à Edouard, lasse de l'attendre.
Voilà à peu près la trame, plutôt simple, de l'histoire. Mais ici, ce n'est pas tant l'histoire, ni l'intrigue policière qui est au centre de ce livre, c'est le village. Son atmosphère, ses habitants. Et c'est là que Christian Carayon fait preuve d'une puissance évocatrice peu commune.
Par ses descriptions, sa capacité à nous dépeindre des personnages vivants, forts, psychologiquement très aboutis, physiquement remarquables, j'ai été totalement immergée dans l'ambiance très glauque de ce roman. La lourdeur des relations humaines dans un petit village, des rancoeurs, les secrets inavouables, les gros et petits "péchés" des uns et des autres, plus ou moins connus de tous mais que l'omerta protège, très franchement, on s'y croirait !
Alors oui, il est vrai que j'ai su assez tôt "qui" était le meurtrier. Mais ce n'est pas cela l'important dans ce livre. L'important c'est la justesse de l'évocation d'ensemble de tous ces gens, précise, sans fard, sans illusions. Personne n'est tout blanc, personne n'est tout noir (à part les Gresse, et surtout la vieille Henriette, rapace et mauvaise, qui contamine toute sa famille, forcément), tout est dans les nuances de gris chez les autres. Tout est dans le dit ou le non-dit, les blessures cachées et les apparences, les clair-obscurs de cette vie de village "autarcique". Cette ambiance m'a rappelé le film "la maison assassinée", si d'aucuns s'en souviennent, car c'est également ce qui m'en a marquée...
Bref, un vrai tour de force, pour un premier roman, c'est tout à fait exceptionnel. L'auteur vient d'en sortir un second, je guette (le poche, lol, puisque mon homme a adoré et qu'il n'a pas de liseuse, lui... (pas encore, on va dire...)).
Je me dois d'ajouter que, si ce livre m'a autant touchée, c'est aussi que je connais un épisode de mon histoire familiale pas très reluisant du même acabit que ce que qui arrive aux deux frères Pujol dans ce livre... qui date à peu près de la même époque et qui concerne ma grand-mère et une sienne nièce (qui en plus porte le nom de famille d'un des personnages du livre). C'est fou comme les orphelins de l'époque servaient d'esclaves à la famille qui leur restait... Une honte...
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Martial de la Boissière n'est pas policier. Il est criminologue. Il appartient à une organisation, le Cercle Cardan, s'apparentant à un club de détectives. Camille, son amie d'enfance devenue institutrice dans un village du Tarn, fait appel à lui lorsque des crimes sanglants sont commis à l'encontre des membres de la famille de paysans la plus riche de la commune.
Au lendemain de la première guerre mondiale le village a comme tous ceux de notre pays payé son écot à la folie humaine. En atteste la liste des noms que le maire a dû faire graver sur le monument aux morts. Ses habitants sont à la fois endurcis par les années de cauchemar et inquiets de voir des troubles graves endeuiller à nouveau leur village. Les superstitions vont bon train et attisent les rumeurs les plus folles. C'est dans ce contexte que Martial de la Boissière va mener son enquête, sous le regard méfiant d'habitants sceptiques. Il doit en outre se garder de perturber l'action d'une police qui semble pourtant plus pressée d'abandonner ces derniers à leur mystère que de dénicher le coupable.
Les rancoeurs ont la vie dure dans les campagnes reculées. Grisaille dans les esprits, jalousie sont la toile de fonds de cette sombre histoire qui empoisonne un village de la campagne tarnaise. Martial de la Boissière va se confronter à une énigme qui comme souvent en fera ressurgir d'autres. Notamment celle de ce jeune garçon d'une fratrie adoptée par la grande famille du village et qui aurait disparu. Alors que son aîné est lui aussi porté disparu. Sans doute englué dans les tranchées de 14 comme tant d'autres.
Le point faible de ce roman est à mon sens son dénouement assez prévisible. Et la façon il est introduit. Une confession en forme de déballage spontané assez peu crédible. Son point fort se trouve dans la restitution de l'atmosphère d'un village au lendemain de celle qui restera dans les esprits comme la grande guerre, à défaut de se confirmer comme la der-des-der. Atmosphère alourdie par l'exode rural qui vide les campagnes. L'intrigue est prenante si on ne s'attache pas à la crédibilité de ce détective qui vient crotter ses souliers dans une campagne endolorie. Un gars de la ville qui vient forcer le mutisme et la méfiance paysanne à l'égard de l'étranger. Intrigue qui se rehausse de l'histoire d'amour impossible mais touchante Martial et son amie d'enfance. Un roman d'atmosphère plus que de suspense.
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Le diable sur les épaules Christian Carayon 2012 autoédition.
Un immense merci à celle qui m'a pioché ce roman , je l'ai littéralement dévoré.
1923, Cantal, La Vitarelle du Théron, une bourgade un peu délaissée qui vivote vaille que vaille. La guerre a laissé des traces, et quand Louis Bascoul le commis de la ferme des Gresse est retrouvé mort au Pas-du-Diable le village est en émoi. Camille, la jeune institutrice de l'école des filles, mène l'enquête et est troublée. Elle fait appel à son ami de toujours Martial de la Boissière, enquêteur amateur du Cercle Cardan . Une deuxième mort survient , Michel Gresse, le fils ainé de la ferme et cette fois-ci pas le moindre doute il s'agit bien d'un meurtre. Mais un homme est-il capable de tant de cruauté? n'est-ce pas plutôt l'oeuvre du Diable? et si les fantômes revenaient hanter ceux qui leur ont fait du mal? et si ?
Christian Carayon réussit l'exploit d'accrocher son lecteur de la première à la dernière page, c'est un tour de force pour un premier roman. Tout y est le décor, cette campagne semi-rurale en petite altitude, ces habitants plus taiseux les uns que les autres séparés en deux clans que tout opposent ou presque , et bien sûr Camille la lumineuse, l'amour sans partage de Martial et Edouard son fiancé.
Voilà vous l'avez compris j'ai adoré ce roman policier historique où la narration ne laisse rien au hasard, où hommes et paysages sont criants de vérité et puis il y a cette fichue guerre et ces séquelles irréversibles...
Un très grand moment de lecture je me promets cela va sans dire d'aller découvrir les autres romans de Christian Carayon. Ah j'allais oublier chapeau bas à l'auto-édition quand elle vous propose des pépites de cette espèce.
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Et bien me voilà une fois encore à lire un policer bien que ce n'est point ma tasse de thé, j'avoue que j'ai aimé suivre cette enquête , et j'avoue aussi avoir suspecté le ou la coupable je ne vais pas vous donner des indices. Mes suspicions étaient bien fondées et rien que pour cela je suis contente d'avoir su m'impliquer dans cette lecture comme si j'y étais.
J'ai bien aimé, le style, l'époque, certains personnages, et la façon de mener l'enquête.
J'ai langui sur la fin ayant comme dit plus haut deviné le pot aux roses, j'ai donc lu vite vite pour en avoir la confirmation, et avoir le fin mot de l'histoire.
Un très bon polar, très bien écrit, qui nous tient en haleine.
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