Ma mère me racontait que lorsqu’un paysage se teinte de rose, un nuage, un champ, un arbre, c’est que les fées s’y sont réunies pour danser.
Pourquoi donc l’a-t-elle choisi, lui ?
La réponse est facile. Elle tient au manque d’amour que l’on se porte, aux chances qu’il faut saisir quand on ne croit pas en soi, aux propositions que l’on n’ose pas décliner.
Parfois, j’imagine un monde où nous nous baladerions tous avec notre histoire à la main, qui expliquerait nos choix, nos actes. La vie serait sans doute plus simple si nous comprenions l’autre, car en dépit de nos différences, nous sommes tellement semblables.
Même lorsque la vie nous prive d’une affection vitale, il existe toujours de l’amour quelque part. Parfois, il faut attendre, lutter, chercher encore, mais l’amour est là.
Rêver pour supporter ce réel qui nous maltraitait.
Dans notre monde imaginaire, nous étions des champions. Là, personne ne nous aurait contraint à plier bagage sans même nous autoriser un adieu. Là, nous n’étions pas les fantômes que nos parents fatigués tentaient de dresser. Nous étions nous, enfants flamboyants, éblouissant les habitants de Black de nos gloires !
Certains êtres traversent les épreuves en restant tendres, se laissant heurter plus violemment, quand d'autres se figent pour éluder la peine.
- Charlotte, je ne crois pas qu'il y ait jamais un bon moment pour rompre. Par contre, il est toujours urgent de débuter une histoire d'amour, ne fût-ce qu'avec soi-même.
- S'il fallait tout faire correctement ma chérie, quel ennui ce serait ! Essaie juste pour le plaisir ?
Il n’avait jamais mesuré à quel point l’on peut être multiple, subissant des traits de personnalité insoupçonnés. Face à son premier amour, il avait attribué sa timidité à un manque d’expérience, à son jeune âge mais ce serait son lot face à chaque femme qui lui plairait. Les conquêtes avaient pourtant défilé depuis son divorce. Il pensait maîtriser parfaitement le processus de séduction et ses étapes : engager la conversation, montrer son intérêt, toucher une épaule, un bras, une main, inviter à un prochain rendez-vous et attendre le moment adéquat pour s’approcher encore. Quelques aventures sans lendemain lui avaient même donné une réputation de coureur de jupons qui lui allait désormais aussi bien qu’un costume mal taillé.
Je dois vivre avec cette réalité terrible que tout ce qui se décide entraîne autant d’empreintes, tels des cailloux dans le sillon d’une existence.
Évidemment, je continue à me comporter comme une jeune fille de mon âge. Aucune envie d’attirer l’attention sur moi.
Pourtant, rien n’est plus évident.