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Rien à cirer !
Une formule mal venue pour la petite Marie Grosholz, future madame Tussaud. Et oui, c'est elle qui est à l'origine du musée de cire à Londres, cette attraction touristique que je trouve bien ringarde et qui permet au commun des mortels de se prendre en photo devant des répliques de célébrités, dont le regard est parfois plus vif que celui du modèle.
Edward Carey, passionné par le personnage, a mis près de 15 ans à écrire cette biographie romancée, et il est est vrai que sans être passionné par le monde de la bougie, j'ai trouvé le destin de cette femme aussi exceptionnel que passionnant.
Née en 1761, la petite Marie (m'entends-tu Francis ?) grandit façon Cosette mais profite de l'apprentissage de Curtius, un sculpteur sur cire pas très loquace qui la recueille. Après avoir reproduit dans l'anonymat des organes pour les médecins à court de produits frais (Picard n'existait pas à l'époque), Paris va offrir la célébrité au duo. Il est de bon ton d'avoir son masque de cire parmi les notables, si possible de son vivant. L'équivalent à l'époque du Cayenne, du Chihuahua, de la lampe design Pipistrello (palmier qui pousse de façon endémique dans tous les salons) et des enfants aux prénoms de vieux.
Bien que maltraitée par un clone de la Thénardier, Marie va croiser et tirer le portrait De Voltaire, Rousseau, Franklin sans mesurer l'immensité des personnages, ne voyant en eux que des modèles aux physiques plus ou moins disgracieux.
Comme le public a davantage le goût du sang que de celui l'histoire ou de la philosophie, la reproduction d'assassins dont les visages sont moulés avant ou après exécutions vont faire la fortune de la petite entreprise.
Prise d'affection par une petite soeur du roi qui lui trouve un visage encore plus ingrat que le sien, Marie se retrouve à Versailles pour dormir dans un placard et partager sa science.
Vînt ensuite la Révolution et son lot de têtes à couper et à immortaliser. Marie réalisera les masques mortuaires du Sire dans la cire, alias Louis XVI, de Marat dans son bain sans son canard jaune et celui de Robespierre, incorruptible qui fit de sa mort un dernier salut public.
Malgré les dénégations d'Edward Carey, l'histoire est un peu trop belle pour être vraie, mais la lecture est plaisante et les illustrations de l'auteur qui imagent le récit aère sa noirceur.
Si j'ai un vrai reproche à faire à ce pavé de 565 pages, c'est la fadeur de la prose. A vouloir émouvoir un public de 7 à 77 ans (expression je sais à bannir car jugée discriminante par nos congénères des maternelles et des maisons de retraite, dont les meneurs appellent au boycott des jeux de société, à changer le titre « Jeux Interdits » et à des manifs contre cette inégalité qui les privent de cette liberté fondamentale de tricher au scrabble), le roman a le goût d'un steak à point qui aurait mérité d'être dégusté saignant. Trop gentillet donc à mon goût mais sans être une pépite, « Petite » mérite quand même qu'on lui cire les pompes.
Et Grévin, me direz-vous ? Et bien pas une ligne sur ce pauvre Alfred. Pas davantage sur la poupée de cire poupée de son… Il reste des histoires à raconter.
Je souffle sur la bougie.
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La biographie romancée de Madame Tussaud nous révèle le destin extraordinaire de ce petit bout de femme.

Une femme que le destin n'a pas épargné, sans oublier que cette femme vécu a Paris lors de la révolution française.

Un roman qui se lit très bien, malgré quelques passages un peu longues.
J'ai trouvé l'atmosphère du roman assez étrange, un peu atypique également, mais qui correspond parfaitement à l'histoire de Petite.

L'auteur est sans concession avec ses personnages, on a parfois envie d'en frapper certains, les insulter, ou encore de les secouer.. enfin moi c'est ce que j'ai ressenti.

Une très belle découverte que ce roman, qui attire l'oeil déjà grâce a sa couverture. et qui réjouit le lecteur quand a son contenu
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Après avoir dévoré les 3 tomes des Ferrailleurs, j'ai décidé de partir à la rencontre de Petite, intriguée par ce changement de cap d'Edward CAREY. Les Ferrailleurs sont plutôt dans l'esprit Stream punk et famille Adams. Je voyais mal comment un tel style pouvait s'adapter au récit de la vie de Madame Tussaud, célèbre artiste française qui fonda le musée de cire à Londres.
Et bien c'est étonnant, surprenant, décalé et addictif !

J'ai retrouvé cette ambiance inimitable de conte gothique qui est à la fois terriblement séduisante et pleine de surprises. J'ai retrouvé ce rapport aux lieux qui sont de véritables êtres vivants modelés par leurs habitants et pétris du vécu de générations entières. de vielles bicoques, des grandes baraques, des palais, des bâtisses, grandes, petites, sales, étroites, spacieuses, grinçantes, mordantes, vivantes ! Des personnages à part entière de même que les objets doués d'influence, d'un caractère propre, d'une âme. « J'ai étudié la pièce, située au rez-de-chaussée, pleine d'objets coûteux, précieux et courroucés. Jamais je n'aurais cru inspirer le reproche à une pendulette ; je n'aurai pas imaginé non plus qu'un candélabre répugnât à m'éclairer. Je n'avais jamais foulé un tapis que ma présence gênait, ni essuyé l'animosité d'un manteau de cheminée. Et ce tabouret de pied doré, là… ses grosses pattes semblaient vouloir mordre mes chevilles. »

J'ai retrouvé aussi cette capacité à extraire la beauté de tout ce qui ne semble au premier abord n'être rien d'autre que laideur et désespoir. Partout en toutes circonstances il y a de petits bonheurs que peu de personnes savent trouver. Petite est de celles-là. C'est une battante. Malmenée par la vie depuis sa naissance, affublée d'un physique ingrat, elle n'a pas une once de rancoeur et fait preuve d'une capacité à s'adapter et à aimer qui semble être illimitée.
Petite aime sans réserve et particulièrement les êtres que rien ne prédisposent à être aimés. Elle est entière, loyale, d'une patience et d'une naïveté peu communes. Pourtant elle évolue dans un monde d'apparence, de carcan et de conventions. Elle côtoie Versailles et son roi en sursis mais surtout Elisabeth... Un monde en plein bouleversement. le peuple gronde, la révolution française se profile, éclate, et Paris devient un lieu de terreur où Robespierre et Marat officient.

Pourtant les amoureux de roman historiques risquent d'être décontenancés par les grandes libertés prises par l'auteur. Si les faits historiques sont justes dans les grandes lignes, tout est dans les détails et les zones d'ombres. Par exemple, si Mercier a bien existé et écrit l'An 2440 je doute qu'il ait eu la relation qu'on lui prête avec …ses chaussures. Pourtant c'est tout un symbole et cela dévoile une certaine vérité sur ce personnage, tout est dans l'interprétation. Tout comme je ne pense pas que les barons de Bavière suspendaient réellement leurs domestiques sur des porte-manteaux ou que George III de Bretagne entassait les siens dans une commode. Pourtant la symbolique est là et elle en dit long « … la duchesse De Blois aurait hébergé, pendant quarante ans, sa servante bien-aimée dans un cabinet de toilette. »

Autre chose dont Edward CAREY parle avec justesse de cette passion dévorante pour la cire ; pour cette matière qui ne ment pas, ne triche pas, cette matière vivante. Et quand il n'y a pas de cire que la passion devient frustration, il y a les dessins, les croquis, qui parsèment les pages de Petite.

Evidemment il y a aussi la vie de tous les jours avec Curtius, son maître d'apprentissage, la veuve Picot (bouuuuu elle est méchante !), Edmond, Jacques Beauvisage, et tous les autres. Et puis il y a Versailles, les assassins, les âmes perdues, les révolutionnaires, la guillotine, Napoléon,… une galerie de personnages incroyables dont les plus savoureux sont les illustres inconnus selon moi. Des personnages qui offrent une réflexion sur la nature humaine, l'humanité et ses dérives, l'amour ; oui oui il y a même des histoires d'amour et je n'ai pas fui en courant ! Et tout ça sans se prendre au sérieux ! Quelle aventure.

J'avoue aussi que j'ai craqué pour l'écriture d'Edward CAREY qui a un petit côté vieillot et classe à la fois. C'est une écriture avec un rythme particulier et très poétique qui entraine le lecteur dans un ailleurs dont seul Edward Carey semble détenir les clefs.
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"Petite" , la biographie romancée de Madame Tussaud est écrite et illustrée par Edward Carey qui avoue en fin de livre avoir mis 15 ans pour l'écrire tout en prenant quelques libertés car il a manqué de documents écrits, les faits étant assez éloignés. Son imagination, son style d'écriture et ses illustrations ont fait le reste.
"Petite" est née Anne-Marie Grosholtz dans un village d'Alsace.
Marie est orpheline de père, sa mère devient la servante du docteur Curtius à Berne. Celui-ci modèle des pièces d'anatomie du corps humains en cire, d'après des vrais déchets humains.
Bientôt orpheline de mère également, Marie reste au service du docteur. Ruiné, il décide de partir à Paris emmenant Marie avec lui. Très observatrice, pas du tout effrayée par son travail, elle l'aide.
À Paris, ils vont continuer ce qu'ils avaient commencé : sculpter et modeler des têtes. Ils font la connaissance de personnages très célèbres dans le contexte historique très mouvementé de l'avant et après révolution.
Marie, la narratrice du début à la fin raconte les évènements sur un ton noir, surprenant comme si elle survolait ou dépassait les faits tout en les observant à fond.
À travers la plume de l'auteur, l'ambiance de Paris , boueuse, puante est décrite à merveille. le début de la vie de Marie ne manque pas de détails réalistes. Ce n'est pas de l'humour noir mais c'est tellement décrit de manière forte que les mots y font penser. Je prends ces deux moments au hasard car tout le livre est raconté sur ce ton. Très étonnant. du jamais lu pour moi.
Le récit est présenté en sept parties appelées livres s'étalant sur toute la vie de Marie devenue Madame Tussaud par le mariage . Elles portent chacune un titre chargé de mystère. La 8ème partie se passe à Londres où Marie a ouvert son célèbre musée. Elle a 89 ans et s'apprête à quitter ce monde.

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Fin décembre 2021- Découverte à la Bibliothèque Buffon [Paris ]

Petit trésor jubilatoire et insolite à ne pas manquer !

Après mes heures studieuses de recherche à la Bibliothèque Buffon, je me réserve toujours un moment à fureter dans les rayonnages. Bien m'en a pris, car j'ai déniché cet ouvrage aussi vivant que singulier, qui m'a fait passer un moment captivant et fort instructif.

Etant aussi "fan" que l'auteur de ce personnage féminin, Madame Tussaud, dont j'ai découvert, toute jeune, le Musée de Cire , à Londres, bien avant de mettre les pieds au Musée Grévin... , j'ai été ravie de me plonger dans sa vie des plus tumultueuses, qui a épousé les soubresauts de l'Histoire, dont la période sanguinaire de la Révolution Française...

Tout en faisant la connaissance d'une existence hors du commun, j'ai révisé mon "Histoire de France", de manière fort distrayante, car entre le style très coloré de l'auteur , ses nombreux dessins, ne manquant pas non plus de malice et d'humour....je me suis "régalé" !!!

je rejoins totalement la phrase du critique,Nick Hornby : " -Petite- est le roman que Dickens aurait sans doute écrit s'il avait vu les films de Tim Burton" !!!

Née à Strasbourg en 1761, la jeune Marie Grosholz, future madame Tussaud, est employée dès son plus jeune âge comme apprentie par un sculpteur sur cire. Lorsque le duo devient célèbre à Paris pour ses réalisations, Marie a pour modèles les plus grandes personnalités de l'époque : Voltaire, Rousseau, Benjamin Franklin, etc.
Toutefois, avant d connaître la célébrité et la reconnaissance, l lui en faudra traverser, subir des épreuves, des humiliations, des maltraitances; principalement d'une veuve, devenue la compagne et l'associée de son maître-sculpteur, une cupide mégère possédant un sens redoutable des affaires !

Nous croisons tout le beau mond du XVIIIe siècle, les grands de cette société, politiques, gouvernants, révolutionnaires, artistes, philosophes ou écrivains dont le célèbre J.L. Mercier le célèbr auteur des "Tableaux de Paris"

Un véritable OVNI littéraire...qui nous immerge également dans L Histoire, comme dans l'histoire de l'Art, dont des descriptions tout à fait étonnantes touchant le travail délicat et complexe de la "Cire" :
"-Le plâtre ignore tout de la vie, lui dit-il. C'est une matière inerte, stérile, sur laquelle, contrairement aux plantes, la lumière n'a pas d'effet. Il s'en tient aux faits, il copie les pores, les rides, mais ne se préoccupe pas de la personnalité qu'ils incarnent. Une fois mêlé à l'eau, il forme une pâte qui provisoirement, produit de la chaleur, mais une chaleur dénuée de sentiment, de chair. Elle brûle, oui, mais c'est une brûlure vide de sens. C'est la cire qui apporte la chair, la cire qui donne la peau"(p.220)

Il est certain, qu'en plus des multiples détails sur la vie incroyable de cette femme de talent, je ne regarderai plus de la même manière un visage ou un moulage en cire, quel qu'il soit !...
Un livre captivant couvrant une période historique terrifiante, mais où le talent d'illustrateur comme l'ironie fréquente d'Edward Carey, nous fait souvent sourire et rire ! ...
Je trouve totalement "juste" cette comparaison et réunion, pour qualifier au plus près le travail singulier d'Edward Carey : Dickens et Tim Burton, réunis en un seul !!
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Tout se bouscule dans ma tête ! J'ai tellement de choses à vous dire au sujet de ce roman que je ne sais par où commencer ni comment m'organiser…

Déjà, je n'ai pas vu le temps passer : dès que j'ouvrais ce livre, le monde autour de moi se figeait et plus rien n'existait ! J'ai embarqué pour un long périple avec comme point de départ Strasbourg et comme destination finale Londres. Je n'ai pas vu les pages filer et lorsque j'ai refermé le livre, je me suis dit « c'est déjà fini ! ». C'est sans nul doute un énorme coup de coeur.

Cette revisite d'une histoire finalement peu connue que nous propose Edward Carey me laisse sans voix. Je suis entièrement d'accord pour dire que ce que l'auteur nous livre ici est un roman que Dickens aurait pu écrire et que Tim Burton aurait pu adapter à l'écran. Peut-être est-ce parce que deux grands noms qui m'impressionnent ressortent suite à cette lecture que ce livre est un coup de coeur ? A méditer !

Quoiqu'il en soit, vous vous demandez peut-être pourquoi la maison d'édition a fait un choix si particulier pour la cover. Pourquoi ce rouge ? Eh bien en fait, cette couleur rouge vif est probablement un clin d'oeil au sang car, dans cette histoire, on a droit à notre lot de cadavres et de morts assez glauques ! Mais le rouge c'est également la couleur de la Révolution et l'histoire de Marie se déroule durant cette sombre période ! Et puis que l'on soit bon ou mauvais, on partage tous une chose, cette couleur rouge qui coule dans nos veines. Oui, je sais, c'est plus le contenu qui vous intéresse mais ici croyez-moi tout est pesé, pensé !

Petite, c'est un tourbillon d'émotion, on balance sans cesse entre espoir et désespoir, entre les moments où l'on respire à plein poumons et ceux où l'on sent que l'on frôle l'asphyxie. C'est un roman qui ne laisse pas indemne, c'est un roman qui parle de la condition féminine et de la rudesse de la vie des petites gens à cette époque.

Mais Petite, c'est également un cours d'art, une mise en avant de la sculpture et de la complexité de cette discipline, autant qu'une belle ouverture sur le monde des artistes. Une partie de l'histoire gravite autour des masques de cire, l'auteur nous décrit un monde inconnu, et qui devrait, comme cela a été le cas pour moi, étonner et fasciner la plupart d'entre vous.

Enfin, Petite, c'est une histoire qui se vit autant qu'elle se lit… C'est une histoire pleine de choses étranges et même un peu magiques. Des personnages atypiques que l'on ne croisera pas dans tous les livres, une écriture un peu noire voire un brin gothique qui ne laisse pas son lectorat indifférent, bref un livre majestueux que je ne peux que vous conseiller.

De la Suisse à la France, de l'ascension vers les plus hautes sphères jusqu'à la descente aux enfers dans une prison crasseuse, c'est une histoire qui nous fait découvrir Madame Tussaud et pas simplement le nom d'un musée… Je suis encore sous le coup de cette lecture, qui m'a valu des moments de rires mais également quelques larmes.
Lien : https://ogrimoire.com/2021/0..
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S'instruire en se faisant plaisir, voilà ce qui arrive en lisant ""Petite". J'ai appris un tas de choses même si l'auteur précise à la fin qu'il apris quelques libertés pour combler certains flous dans l'histoire des personnes.
Ce roman est raconté par Marie Grosholz alias Petite et future Madame Tussaud, ce qui nous donne une impression d'être sa confidente mais aussi nous la rend particulièrement sympathique.
Nous traversons avec elle son enfance, son adolescence et sa vie de femme mais nous traversons également la vie parisienne et son Histoire. N'oublions pas que Marie est née en 1761 et décédée en 1850. L'Histoire est donc très riche ! L'auteur Edward Carey nous en fait profiter avec beaucoup d'habileté. Les dessins qui jalonnent le roman agrémentent la lecture qui est déjà passionnante.
C'est un livre prenant sur un petit bout de femme qui a su montrer son talent par sa force, son courage, sa détermination et sa persévérance. Je suis admirative devant tant de force et d'abnégation. Il me reste maintenant à aller voir un de ses musées, celui de Londres me tente particulièrement .
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Madame Tussaud est née Anne-Marie Grosholz en 1761. Avant de connaître le succès à Londres, elle vécut dans la France pré-révolutionnaire, et c'est cette partie-là de l'histoire qui intéresse Edward Carey. Carey est romancier, scénographe, dramaturge et dessinateur ; Anne-Marie Grosholtz fut orpheline, servante, assistante d'un médecin organolâtre, créatrice de mannequins de cire, amie d'Elisabeth (soeur du roi) et, seul point raisonnablement fixe de son existence mouvementée, petite.
Carey et Grosholtz sont donc deux créateurs multiformes, un pied dans l'art, un autre dans l'artisanat, qui tous deux jouent avec l'apparence, à la recherche d'une vérité insaisissable.
Carey s'inspire des Mémoires de Madame Tussaud en les respectant scrupuleusement tout en imaginant de quoi remplir les interstices de l'histoire. Mais les Mémoires elles-mêmes étaient sans doute largement romancées et la vie de Petite emprunte à l'histoire, à la fiction, au Grand Guignol, au roman picaresque et au conte horrifique.
D'ailleurs, est-il un conte qui ne soit pas horrifique ? Petite a les attributs de Poucette et du petit Poucet: l'intelligence et la débrouillardise, d'autant plus nécessaires que les parents sont défaillants. Petite n'est pas abandonnée dans les bois par ses parents, mais tout comme. Elle ne rencontre pas Pinocchio, mais peu s'en faut. La marâtre est odieuse, le prince charmant peu dégourdi et la bonne fée ne l'emmène dans son palais que pour la cacher dans un placard.
La bonne idée de ce roman, c'est que le conte de fée est percuté par l'Histoire avec sa grande hache. Quand le cabinet du docteur Curtius fabrique des corps pour la plus grande joie des badauds, la Terreur de Robespierre en déconstruit d'autres pour l'immense plaisir des mêmes.
En transformant les corps en objets à contempler, en starifiant des meurtriers devenus pièces de collection, les inventeurs du musée de cire n'ont-ils pas permis à la fureur populaire d'éclater en toute inhumanité ?
L'histoire de Marie Grosholtz me fait terriblement penser aux médias modernes avec leurs vitrines pleines d'individus ripolinés qu'on adore ou qu'on hait, réceptacles de la colère qui vient.
Mais, comme Marie dépassée par ses créatures, Carey est un poil trop petit pour son sujet. le lecteur est amusé, intéressé, parfois inquiet ou désolé, mais rarement empoigné. Marie et ses Mémoires ne resteront pas dans la mienne
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« La nouvelle s'était répandue que nous avions reproduit les têtes de Flesselles et De Launay. Lorsque, à présent, quelque individu subissait le même sort qu'eux, à savoir qu'on les découpait en proportions inégales, on s'adressait à nous pour en obtenir une réplique valable, afin que, par la suite, une fois les passions apaisées et le soleil levé, l'on pût apprécier les faits d'un oeil plus rationnel. »

Et reproduire en cire diverses parties du corps humain, en privilégiant tout de même les têtes plutôt que les bas morceaux, Petite sait faire. Née Marie Grosholtz, à Strasbourg, en 1761, la future Madame Tussaud part à l'âge de six ans avec sa mère à Berne. Celle-ci a trouvé un emploi de bonne à tout faire qui leur permettra de fuir la misère qui les a toujours accompagnées.

Leur employeur est une figure étrange, un certain Docteur Curtius, qui vit des moulages de diverses pièces et organes du corps humain qu'il réalise pour un hôpital bernois. Il vit seul, est quelque peu maniaque et ne communique guère avec qui que ce soit jusqu'à leur arrivée. Bien vite la mère de Petite disparaît du tableau de ce théâtre de marionnettes qu'est la vie. Curtius prend Petite sous son aile. Elle a alors seulement six ou sept ans. Elle devient son employée et il lui apprend beaucoup de ce qu'il sait de son métier particulier. Curtius décide de partir pour Paris. Il l'emmène avec lui.

Ce sont leurs aventures, souvent cruelles et légèrement horrifiques, que nous conte Edward Carey dans ce roman savoureux, qui a pour scène principale le Paris (et Versailles) de la fin du règne de Louis XVI à la Terreur. Puis du Premier Empire.

Beaucoup de références viennent en mémoire à la lecture de ce roman très réussi : Sterne pour l'humour pince-sans-rire, Dickens pour l'étrangeté de certains de ses personnages. Celui de Marie est évidemment au centre puis qu'elle en est la narratrice. Pour avoir ensuite cherché des éléments biographiques de la vraie Madame Tussaud, je peux dire que, même si on a parfois du mal à le croire, Edward Carey en a presque toujours respecté les grandes lignes. Mais bien sûr, beaucoup de scènes étranges et grandguignolesques sont uniquement le fruit de son imagination !

Je remercie les éditions du Cherche-Midi et NetGalley pour m'avoir donné accès à l'édition numérique de ce livre.
#Petite #NetGalleyFrance
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Ce livre est carrément génial!
Edward Carey, l'auteur, britannique, est romancier, dramaturge et illustrateur.
Nick Hornby a parfaitement résumé ce livre : «Petite est le roman que Dickens aurait sans doute écrit s'il avait vu les films de Tim Burton ».

Ce passionnant conte gothique retrace la vie de la française Marie Grosholtz (future Mme Tussaud) et nous fait traverser l'histoire, le temps et les pays.
Elle rencontre à Berne son maître, le docteur Philippe Curtius, un sculpteur sur cire, qu'elle suivra jusqu'à Paris, où elle fréquentera la cour de Louis XVI.
Elle traversera la Manche, où elle fondera un musée de cire en 1835, le célèbre musée Tussaud.

L'auteur réussit à nous captiver dès les premières pages, le récit est palpitant.
Les dessins de l'auteur agrémentent magnifiquement le récit.
J'ai adoré cet univers à la Dickens.

Un immense coup de ♥
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