Un magnifique roman qui nous plonge dans les coutumes et traditions bretonnes au XIXe siècle à partir de la ville de Locronan où chacun connait tout le monde! Mais quand arrive et meurt Celide de louarn, le mystère autour de son identité ou de son passé n'empêche pas aux habitants de décider sur le sort de son fils Jacquot de Louarn! Par le truchement du maire de la ville, le jeune orphélin sera adopté par Jacob Kemener, le couturier du coin qui, à la connaissance de tous ne peut plus exercer son métier à cause de la baisse de sa vue…mais les deux, se sont déjà connus en foret quand Jacob avait libéré Jacquot du piège du garde de foret... une occasion pour les deux de se trouver un centre d'intérêt à travers l'autre! Si pour Jacob Kemener le brodeur, Jacquot va lui servir d'yeux pour reprendre son métier pour impacter à nouveau son monde, mais pour Jacquot, il s'agira de prendre appui et de se forger un destin au delà de toute attente....
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Une belle histoire émouvante et pleine de sensibilité qui se passe au coeur du Finistère.
Elle nous fait découvrir le métier de brodeur qui se perd, donc c'est un retour au source bienvenue pour les bretons avec ses traditions et ses coutumes et sans oublier la langue bretonne.
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… Jacob tressailli de sa rêverie…
- Oui, je dois être fatigué… bredouilla-t-il enfin. Mais je suis si content d'être revenu.
- C'est vrai ? s'exclama Jacquot, inquiet de ne découvrir chez son vieux compagnon guéri aucun signe de l'enthousiasme espéré.
- Pourquoi veux-tu que ce ne soit pas vrai ? Tu m'as redonné des yeux pour te voir enfin. J'avais oublié comme tu étais beau. Viens près de moi, j'ai besoin de toi.
Jacquot s'assit sur le banc à côté du tailleur ; celui-ci le contemplait, comme si toutes ces dernières semaines, il n'avait vu grandir qu'une silhouette sans visage.
De son index noueux, il effleura la petite cicatrice sur la tempe.
- Je me demande comment tu t'es fait cela.
- Je ne sais pas ; ma mère me disait qu'elle avait oublié, mais je crois qu'elle ne voulait pas me le dire.
- On dirait que cette cicatrice est la braise ou naît la flamme rousse qui t'orne la tête.
- Peut-être qu'il y a du brasier au fond de ma mémoire…
- J'ai le pressentiment qu'un jour tu sauras tout ça.
- Te voilà donc devenu devin ! se moqua gentiment Jacquot. Comment veux-tu que je découvre des choses si anciennes, maintenant que ma mère est morte.
- Le passé n'a pas toujours besoin de la mémoire des hommes pour remonter à la surface. (p 365)
… Depuis le début du siècle, les gens réclamaient leur tombeau familial. Amené à gérer avec l'église et la mairie cette délicate répartition, le fossoyeur était devenu un personnage important. Celui de Locronan, Donatien Lagadu, était de surcroit hors du commun. L'image habituelle du cantonnier de la mort est un être au visage blême, voûté et maigre, et les doigts crochus, celle d'un croque-mort du temps ou les croyances populaires alléguaient qu'il mordait l'orteil des trépassés pour voir s'ils l'étaient vraiment.
Donatien était tout le contraire : de taille moyenne, il affichait une bouille rigolarde, avec des sourcils jaune orangé, et un gros nez épaté. Par-dessus la ceinture de cuir usée, une bedaine replète lui tendait le gilet, et il avait du mal à supporter les trois épaisseurs de drap de ses chupennoù. Son brazoù ridet semblait cousu de deux sacs énormes sur ses cuisses courtes. Toujours un mouchoir à portée de main, il suait du matin au soir, même par les plus frisquettes gelées. Ne pas parler de sa voix serait oublier le plus pittoresque d'un tel personnage : il développait une puissance vocale sans égale, qui tenait des roulements du tonnerre dans le ciel fissuré d'éclairs, et du fracas des vagues sur les rochers de la baie de Douarnenez par grande tempête.
Sa plaisanterie préférée était d'affirmer qu'il avait une voie d'outre-tombe, en roulant des yeux effrayants qu'il resculsait à souhait, ce qui terrorisait les gamins à venir rôder entre les croix de ses résidents. … (p. 169)
- Tire tes loques, et plus vite que ça, ou on te tanne le cul !
Le malheureux allait s'exécuter quand tonitrua une voix gutturale derrière le cercle d'enfants. C'était le fossoyeur.
- Qu'est-ce que vous fichez là, à jouer dans mon cimetière ? Vous n'avez pas assez de place devant l'église ?
Ecartant les miséreux, il découvrit alors leur proie.
- Et toi, qu'est-ce que tu fais là habillé en dimanche ? On n'a personne à enterrer aujourd'hui ! (p 169)
... je te confie mon garçon, mignonne. Tu as du caractère et tu es plus jolie que les fées qui m'ont consolé lorsque j'étais trop malheureux. Prend soin de mon petit renard ; dans les dédales de l'existence sont tendus des pièges plus sournois que ceux de la forêt.
Jacon se rassit, le visage grave ; il venait d'officialiser la passation de son activité à son fils adoptif, une décision désormais irrévocable. (p. 374)
Maurice Bert affichait une profonde jubilation, et Jacquot su que cet homme là n'était venu au monde que pour faire le mal. Les mors de métal avaient capturé l'animal à l'encolure et l'ornaient d'un cruel collier. (p 68)
Daniel Cario nous propose un nouveau thriller qui peut résonner avec l'actualité récente. Il nous dit quelques mots de son propos et de ce nouveau roman au suspense absolument terrible.