La France des patriotes est le cinquième tome de l'Histoire de France des origines au XXème siècle supervisée par
Jean Favier.
François Caron y met au service d'une lecture avant tout politique de la période 1851 à 1918 ses connaissances plus spécifiques de l'Histoire économique et des techniques.
La France libérale et prospère du second Empire, celle d'Haussmann et de
Claude Bernard, celle de
Labiche et d'
Offenbach, n'aura pas pleuré très longtemps la II République, chaque tendance de la classe bourgeoise dominante se ralliant par défaut au régime, chargé d'assurer le contrôle des masses laborieuses. L'idée de progrès et de modernité est déjà portée dans les campagnes par ceux qu'on appellera bientôt les hussards noirs.
En dépit des vifs débats sur la laïcité, ce ne sont pas les hésitations du régime sur la liberté de la presse et de l'opinion qui l'ont fait tomber, mais bien les vieux rêves de puissance, qui ciment l'unité du pays : après les guerres de Crimée, d'Italie et d'Afrique du nord, la rude défaite de Sedan vient révéler à la France qu'elle a pris, prisonnière de ses archaïsmes séculaires, du retard, par rapport à des puissances montantes comme les Etats-Unis ou l'Allemagne, sans parler de la domination mondiale britannique.
Née de cette défaite, la IIIème république reste pourtant à ce jour le régime républicain le plus stable de l'Histoire de France. Les tentatives de restauration monarchique ayant échoué, les lois constitutionnelles de 1875 vont permettre à une république bourgeoise, opportuniste, d'installer durablement un système parlementaire qui encourage l'éducation, en même temps que l'exploitation coloniale, et consacre les libertés fondamentales. mais aussi un patriotisme national exacerbé.
Pour autant, les oppositions ne sont pas mortes, comme le révèle la crise boulangiste en 1885, où la poussée des radicaux et socialistes après l'affaire Dreyfus de 1898. L'arrivée au pouvoir du bloc des gauches va aboutir en 1905 à la séparation des églises et de l'Etat. Après la grande exposition universelle de 1900 et le premier tour de France, des lois sociales sur le repos dominical et les accidents du travail semblent annoncer un progrès social plus partagé, mais Il faudra néanmoins toute la fermeté de Clémenceau et la diplomatie de Briand pour que la république du centre se maintienne l'unité du pays face à l'agitation socialiste et aux grèves ouvrières. Les dernières années d'avant 1914 sont bien sûr dominées par la tension montante avec l'Allemagne et dans les Balkans.
Au-delà de ce portrait,
François Caron révèle aussi les bouleversements plus profonds, ignorés des contemporains : le repli de la société paysanne, au profit de celle de la ville ; au-delà du paternalisme, le recul de la rente et la montée des profits et de corporatismes. Au-delà des différences, de Sedan à Verdun, il nous fait toucher du doigt le creuset dans lequel s'est construite cette France des patriotes.