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EAN : 9782020291545
373 pages
Seuil (01/01/1997)
3.89/5   289 notes
Résumé :
(Points)
Tout commence avec le souvenir d'un cordon de lampe qui n'existe pas. La plupart des gens se disent « c’est bizarre » et passent outre. Pas Philip K. Dick. Pour lui, c'est le début d'un doute incessant : sommes-nous vraiment réels ? Vivants ou bien morts ? L'existence de l'écrivain sera guidée par ces retournements, tour à tour époux modèle, grand psychotique, fervent catholique, junkie...

« Il faudrait un jour, pensa-t-il, écrire un l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (40) Voir plus Ajouter une critique
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« Et, de fil en aiguille, on en vient facilement à l'idée que le vrai monde se trouve de l'autre côté du miroir et que nous sommes, nous, les habitants du reflet. Phil le savait depuis sa petite enfance, et il en savait même un peu plus que les autres : car il savait, lui, qui vivait de l'autre côté du miroir. de ce côté-ci, qu'on lui disait être le réel, Jane était morte et pas lui. Mais de l'autre, c'était le contraire. Il était mort et Jane se penchait anxieusement sur le miroir où habitait son pauvre petit frère. »

On a beau dire, tout spécialement depuis cette rentrée littéraire et la parution de « Yoga » qui a reçu des critiques mitigées, et que je n'ai pas encore lu, Emmanuel Carrère reste pour moi source d'étonnement par la grande cohérence de ses obsessions. Dans cette biographie de Philip K. Dick, parue en 1993, il parvient déjà à tirer la couverture à lui et dévoile beaucoup de ce qui se trouvera dans « le Royaume », par exemple.

Il s'agit indubitablement d'une biographie de ce célèbre auteur de SF qu'était Philip K. Dick dans la mesure où les faits sont bien là, appuyés par des sources vérifiées. Rapidement on sent que le biographe a pris l'option de renoncer à tout recul sur son sujet. Il se produit même une sorte de prise de possession de l'esprit de Dick par Carrère, qui revit à travers lui.

Les deux premiers tiers du livre évoquent précisément les livres écrits dans les années 1950 et 1960, au risque de les divulgâcher, il faut le savoir. Et ils contiennent aussi bien des détails sur la vie privée chaotique de Dick.

J'ai trouvé le dernier tiers plus difficile à supporter, alors que l'osmose entre Carrère et Dick atteint son apogée. Dick n'écrit plus, prend énormément de médicaments mais, si l'on en croit les témoignages et son livre « Substance mort », peu de drogues. Sa paranoïa s'est considérablement aggravée, ce qui se traduit dans ce livre par une multiplication des interrogations théologiques et cauchemardesques autour de sa vie, ses croyances et son oeuvre.

Je n'ai jamais oublié la sensation de grand malaise éprouvé, alors que j'étais jeune ado, à la lecture de « Ubik » et de « le Dieu venu du Centaure », qui remettent en cause l'existence de ce qu'on appelle communément la réalité. Je pensais que cette bio allait me servir de tremplin pour retourner à cet auteur, au moment ou une intégrale de ses nouvelles vient de paraître en Quarto. Ce sera pour plus tard : je ne suis plus si désireux de retourner dans les enfers privés de Monsieur Philip Kindred Dick
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Ce qui au début me paraissait un atout à ma lecture - ne presque rien connaître de l'oeuvre de Philip K Dick - s'est peu à peu révélé, finalement, comme un handicap à ma lecture.
Je me suis engagée dans cette lecture un peu par hasard, et non par intérêt à la base pour l'auteur de science-fiction même s'il fait partie de ces noms archi-connus qu'on voudrait un jour connaître un peu mieux. La manière dont Emmanuel Carrère a envisagé cette biographie, bien différente de celles que j'ai lues jusqu'ici, m'a interpellée, car il se plonge à corps perdu dans le monde onirique et spirituel de l'auteur, nous entraînant avec lui au coeur de ses romans ou du moins de son inspiration. J'ai trouvé ça très intéressant, et ça m'a fait penser à la manière dont Richard Powers s'intéresse lui-même à ses personnages de roman, avec une grande complexité et profondeur.
Puis je me suis perdue, peu à peu, dans ces méandres... et j'ai fini par couler. Terminer le roman a été laborieux et j'ai sauté quelques pages pour arriver au bout de la vie de K. Dick, mais je suis certaine que la faute en revient de mon inculture de l'auteur et de ses romans plus que du talent d'Emmanuel Carrère. D'ailleurs, si j'imagine qu'il aurait appliqué ce procédé d'écriture avec un auteur que j'aime, j'aurais sans doute plongé avec intérêt et curiosité dans cette biographie...
En tout cas, il a attisé ma curiosité, et me donne envie de me lancer dans la découverte de son oeuvre.
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Quand la vie d'un écrivain ressemble à un roman passionnant , est-ce le mérite de l'architecte de l'Univers ou celui de son biographe ? Après avoir lu un nombre considérable de biographies peu passionnantes, je peux dire en toute vérité que la bonne réponse est la seconde. Il faut avouer que dans le cas de Philip K. Dick, le créateur a clairement fait de son mieux. Tout d'abord, il l'a placé dans une époque intéressante : l'apogée des pouvoirs créatifs de l'écrivain a eu lieu dans les années 1960 et 1970. Deuxièmement, il l'a doté d'une vie personnelle instable. Les romans et les relations avec les femmes dans la vie de Philip K. Dick étaient extrêmement fréquents et variés. Troisièmement, il n'a envoyé sur Dick ni plus ni moins qu'une révélation divine ! En général, vous voyez, Dick est une figure culte, parfois un peu ridicule, mais plutôt mystérieuse.

J'ai été frappée par la virtuosité avec laquelle Carrère décrit ce qui se passe dans l'âme de l'écrivain fétiche de science-fiction, comme s'il avait l'occasion de lire dans ses pensées. Cependant le lecteur n'a pas le sentiment désagréable que l'on attribue des émotions exagérées inappropriées à son idole. Heureusement nous sommes confrontés au cas où le biographe est aussi grand que le héros de la biographie. Intellectuellement et en termes de degré de talent littéraire, Emmanuel Carrère n'est pas inférieur à son sujet de biographie ? Si hypothétiquement oui, alors pas de beaucoup.

Quelques mots sur la période de la vie de Dick où il a connu la révélation divine et a été emporté par des idées quasi-chrétiennes : l'église officielle, bien sûr, n'a pas reconnu en ce monsieur bizarre, ni un ancien amphétiste pas plus qu'un prophète. le pauvre monsieur Dick s'est avéré incompris aussi bien par ses fans que par ses amis.

Peu importe à quel point les théories de Philip K. Dick peuvent paraître ridicules. Une conviction sincère émane d'elles, telles qu'elles empêchent l'argument avancé tel que : « Ça s'explique par ses expériences de drogue ». Personnellement, je ressens un grand respect pour cet auteur qui, ayant vécu une expérience qui l'a éloigné des gens, a su rester fidèle à lui-même et n'a pas perdu une goutte de son talent.
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C'est une biographie comme Emmanuel Carrère les écrit, c'est-à-dire sans grand souci d'objectivité. On voit poindre à tout instant la pensée de l'auteur quand ce n'est pas son jugement. La lectrice que je suis a vite porté le sien propre sur l'individu et a eu du mal à se passionner pour le personnage. Il est certes hors du commun et doté d'un intelligence indéniable et ce sont, sans doute, des aspects qui ont conduit Emmanuel Carrère à s'y intéresser. Les démons de Dick qui l'ont amené à la drogue et au mysticisme, ainsi que son questionnement sur la conscience humaine, sont aussi d'autres ingrédients qui en font un sujet intéressant, du moins pour Emmanuel Carrère. Je conçois donc la fascination de ce dernier a pu avoir pour Dick et l'inspiration que le personnage et la littérature de Dick ont pu être pour lui (je pense en particulier à La moustache). Je dois cependant avouer que la biographie de Dick ne m'a pas intéressée autant que celles de Limonov et Romand, deux autres de ses sujets d'étude tout aussi extraordinaires.
N'était-ce le talent de l'auteur, sa prose limpide et ses aptitudes d'analyse, le livre me serait sans doute tombé des mains tant l'issue de la vie de Dick est prévisible. Je ne regrette cependant pas ma lecture, ce survol me donnant une idée de la production de Dick sans avoir à la lire, une sorte de culture générale acquise à bon compte.
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En repensant avec le recul à ma lecture de "Je suis vivant et vous êtes morts", un doute s'impose : ai-je bien compris ce dont il était question ?, une réponse affirmative à cette première interrogation en amenant une seconde, autrement plus perturbante (même si le terme est je l'admets un peu fort) : faut-il y croire ?
Bon, je m'explique.

Ce titre d'Emmanuel Carrère est une biographie du célèbre écrivain Philip K. Dick, auteur s'il en est prolifique, à l'origine de quelques titres devenus des incontournables de la SF, mais qui doit aussi en partie sa renommée à une personnalité atypique et ambiguë.

L'auteur a fait le choix d'une narration chronologique.

Il évoque ainsi, mais sans s'appesantir, une enfance de petit garçon grassouillet et maussade, de "ceux dont on fait des champions d'échecs ou de pianistes prodiges". Philip était un enfant calme, dont le plus grand plaisir était de se cacher pendant des heures dans le silence de vieux cartons. A cinq ans, ses parents divorcent, et Philip reste vivre avec sa mère Dorothy. le père, découragé par la froideur avec laquelle sont accueillies ses premières visites, finit par couper les ponts. Il devient un adolescent un peu trop gros, qui s'essouffle vite. Les sujets de conversation avec sa mère, hypocondriaque, tournent autour des livres, des maladies et des médicaments censés les soulager. La pharmacie maternelle abrite des piles de boîtes de tranquillisants.

Il aime par-dessus tout écouter de la musique, lire et taper à la machine, activité qu'il exerce très vite en virtuose. Il collectionne les articles de vulgarisation scientifique de magazines illustrés, se passionnant pour les mystères de la science. Il découvre Poe et Lovecraft et déjà, commence à écrire de manière quasi compulsive. A treize ans, déjà, il qualifie de "véridiques" les aventures intergalactiques qu'il déploie dans ses textes.

A quatorze ans, son caractère introverti, son apathie scolaire et ses crises d'anxiété décident sa mère à l'envoyer chez son premier psy. C'est le premier d'une longue série quasi ininterrompue jusqu'à sa mort. Philip se passionne aussitôt pour les névroses, les complexes, les phobies… et fait tourner son thérapeute en bourrique en s'emparant de méthodes et de concepts psychiatriques qu'il adapte selon son bon vouloir, faisant croire tantôt qu'il est normal, tantôt qu'il est anormal, et jouant de toutes les nuances possibles entre les deux. Si le garçon souffre effectivement de troubles -vertiges, agoraphobie, crises de panique…-, il révèle ainsi, en même temps, une intelligence diabolique, et un plaisir à jouer avec les apparences d'une réalité qu'il sait déjà fluctuante… Il n'est pourtant pas attiré par le savoir universitaire ou intellectuel, interrompant très vite des études entamées à Bekerley. Son milieu, c'est "celui de la petite entreprise, de la petite boutique dont on balaie devant la porte le matin". Il travaille quelque temps comme vendeur dans un magasin de disques, où il rencontre sa première épouse, dont il divorce au bout de quelques semaines, marquant le début d'une longue carrière de monogame compulsif.

Lorsqu'à vingt-quatre ans il vend une première nouvelle, il décide de s'établir comme écrivain à plein temps, conscient que ses phobies l'empêchent d'exercer la plupart des professions « normales ». Puisqu'il s'est vu refuser tous ses textes "littéraires", il se consacre à la science-fiction, alors en pleine expansion, bien que considérée comme un "sous-genre".

Je m'arrête là concernant la partie proprement biographique. Retenons que l'existence de Philip K. Dick a été indissociable de l'écriture qu'il a pratiqué à un rythme effréné, entre autres grâce aux amphétamines et autres substances chimiques dont il se dopait au prix de dépressions atroces, qu'elle a été ponctuée d'unions plus ou moins orageuses avec ses compagnes successives, lui-même, excessif en tout, capable d'être le plus transi des romantiques comme le pire des goujats. L'adolescent timide a fait place à un petit-bourgeois mal dans sa peau, que terrorisait la solitude. Aussi, lors de ses périodes de célibat, il invitait des amis à vivre chez lui -la plupart ne tenaient pas longtemps-, et a connu des époques -notamment celle de l'avènement du LSD et du mysticisme californien- de dissolution collective, marquées par les beuveries, la défonce, le sexe, parfois aussi par les lésions cérébrales, les internements en hôpital psychiatrique, les suicides… Il a peu à peu acquis une petite légende, aimant cabotiner parmi son cercle de fans. Lorsqu'en 1973, de nouveau marié et père d'un petit garçon -il a eu précédemment deux filles, de mères différentes- il finit par obtenir les premiers signes de reconnaissance littéraire, c'est, pour lui, la fin. Pendant ses huit dernières années, il écrit sans s'arrêter huit-mille pages (sans compter celles qu'il a détruites) de notes, de ruminations et d'hypothèses improbables, dont des extraits seront publiés à titre posthume.



Ce qui rend l'ouvrage d'Emmanuel Carrère particulièrement intéressant, c'est qu'il focalise son propos sur l'obsession qui a orienté une grande partie de l'oeuvre de Philip K. Dick, et qui aurait aussi hanté sa vie : celle de la subjectivité du réel, et de la possibilité qu'il soit manipulé.
K. Dick était de ceux qui, quand les autres passent outre à "c'est bizarre", cherchait une signification à ce qui n'en a pas, une réponse à ce qu'il est déjà hasardeux de considérer comme une question. Dans plusieurs de ses textes, on retrouve le même principe : un individu, à partir d'un détail infime, s'aperçoit que quelque chose ne va pas, impression peu à peu confirmée par des phénomènes d'une étrangeté croissante, aboutissant au constat que la réalité dans laquelle il pensait évoluer n'était qu'une fumisterie.

Philip K. Dick ne se contentait pas d'avoir l'intuition que le réel, puisque filtré par la subjectivité de chacun, est impossible à appréhender directement. Il partait du principe que le consensus général à son sujet résultait d'une tromperie, que la réalité était une illusion, un simulacre ourdi par une minorité pour abuser la majorité ou par une puissance extérieure pour abuser le monde… Et le climat de guerre froide dans lequel il a vécu a sans doute alimenté son propre délire. Lorsqu'il fait l'objet d'un contrôle fiscal ou est victime d'un cambriolage qui le traumatise profondément, il est persuadé d'être dans le viseur du FBI ou de la CIA.

Il se torturait l'esprit en supposant des mises en abyme vertigineuses de l'idée de sa propre réalité : était-il bien lui-même, ou avait-t-il été remplacé par un androïde ? Ces angoisses mêmes ne faisaient-elles pas partie du simulacre, pour le rendre crédible ? Ces divagations étaient-elles le fruit de sa paranoïa ? Ou tout cela n'était-il qu'un jeu dont il était finalement l'unique maître, se réduisant à imaginer la possibilité de passer de l'autre côté du miroir, là où Jane -sa soeur jumelle décédée à quelques semaines- était vivante et lui mort, là où les Allemands et les Japonais avaient gagné la Seconde Guerre mondiale*… ?

En d'autres termes, y croyait-il vraiment ?

Car on ne savait jamais s'il blaguait ou s'il était sérieux, s'il croyait ce qu'il disait ou testait sur ses interlocuteurs une théorie saugrenue. Une conversation avec Philip K. Dick n'obéissait pas aux mêmes règles qu'une conversation normale. Jamais rien n'était définitif, acquis. Cet homme qui « charmait les idées », leur faisait dire ce qu'il voulait, pouvait tour à tour défendre deux opinions contraires, désireux d'être à la fois crédible et seul détenteur d'une vérité mystérieuse qu'il aurait été le seul à percevoir. Tel un Don Quichotte prenant très mal le fait qu'on le contredise sur la nature des moulins à vent, mais pour lequel il aurait été encore plus terrible que tout le monde lui donne raison.

Je ne sais pas si c'était le but d'Emmanuel Carrère, mais c'est ce qui m'a fascinée dans son récit : jouer avec l'idée qu'une théorie développée par un auteur dans son oeuvre, aussi folle soit-elle, ait aussi été celle qui a hanté sa vie… et nous en faire douter, s'inspirant ainsi de la capacité de son sujet à s'approprier des arguments contradictoires, pour faire fusionner forme et propos.

Mais je crois que je m'embrouille un peu. Je m'en vais lire Philip K. Dick, même si je ne suis pas vraiment sûre que cela remettra mes idées en place.

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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critiques presse (1)
LeFigaro
23 mai 2012
L'écriture d'Emmanuel Carrère est extraordinairement hypnotique tout en paraissant simple.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (36) Voir plus Ajouter une citation
Aussi loin qu'il remontât, il avait toujours, de tout son être, repoussé l'idée que ce qui lui arrivait pouvait être le fruit du hasard, d'une danse d'électrons privée de chorégraphe, de combinaisons aléatoires. Pour lui, tout devait avoir un sens et il avait vécu, scruté sa propre vie en fonction de ce postulat. Or de l'idée d'une signification cachée derrière tout ce qui advient on glisse fatalement à celle d'une intention. Lorsqu'on cherche à voir sa vie comme un dessin, on ne tarde pas à y voir aussi l'exécution d'un dessein et à se demander qui l'a ourdi. Cette intuition que nous éprouvons tous, plus ou moins honteusement, donne sa pleine mesure dans les deux systèmes de pensée : le premier est la foi religieuse, le second la paranoïa, et, pour les avoir expérimentés, il doutait de plus en plus qu'il y ait une différence entre les deux.
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Interrogé par un journaliste sur son enfance, Mark Twain lui avait parlé de son frère jumeau, Bill. Bill et lui, bébés, se ressemblaient à tel point que pour les distinguer on leur nouait au poignet des rubans de couleurs différentes. Un jour, on les laissa sans surveillance dans la baignoire et l'un des deux se noya. Les rubans s'étaient dénoués. "En sorte, concluait Mark Twain, qu'on n'a jamais su qui était mort, Bill ou moi".
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Le pouvoir, bien qu'il refusât de le reconnaître, l'attirait, mais certainement pas celui qu'exerce un cadre supérieur sur des cadres moyens. Quant au mode de vie des cols blancs, tel que la publicité le proposait en modèle à un pays depuis peu ahuri par sa prospérité, un habitant de Berkeley ne pouvait que juger grotesque le mouvement brownien de ces souriants robots encravatés, qui tôt le matin embaumaient du même after-shave leur train de banlieue et le soir, après s'être vainement agités, retrouvaient leurs maisons de banlieue, leurs épouses blondes et souriantes qui en leur tendant un Martini demandaient d'une même voix : "Alors, chéri, tu as eu une bonne journée ?"
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Ce qu'il faut dans la vie, répétait Dick, c'est savoir réparer sa voiture. Pas n'importe quelle voiture, pas les voitures en général car rien n'existe en général. Il n'existe que des choses particulières, et celles qui se trouvent sur notre chemin devraient largement suffire à nous occuper. Tout le reste est dangereux. On commence par noter des répétitions saugrenue, imaginer des connexions rigolotes, et on se retrouve à croire qu'un dessein global régit tout, à vouloir le percer, bref on est devenu paranoïaque. Méfiez-vous, jeunes gens, il suffit de mettre un doigt dans l'engrenage. Et je sais de quoi je parle : c'est mon histoire.
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Ils aimaient bien qu’il leur passe de ces disques bizarres dont il avait une incroyable collection, et j’aime, pour ma part, imaginer qu’une de ces filles paumées de 18 ans, qui en a maintenant 40, deux divorces derrière elle, un brushing comme dans Santa Barbara, et travaille dans un gros cabinet d’avocats à Boice, Idaho, écoute quelquefois, le soir, en descendant son deuxième Tom Collins, un disque d’airs pour luth de John Dowland, qui est toute de même une petite phrase de Vinteuil plus privée que Jefferson Airplane et lui rappelle des épisodes confus, violents, de sa jeunesse et lui donne envie de pleurer.
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Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/


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