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sur 1955 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Emmanuel Carrère, j'ai adoré le lire dans L'Adversaire, Limonov et même le Royaume. Je l'ai aussi rencontré, écouté présenter le Royaume à Vienne (Isère), en novembre 2014, mais là, avec Yoga, je n'ai pas du tout adhéré à ce qu'il raconte.
C'est, bien sûr, très personnel, souvent intime, mais j'ai dû me forcer à lire, pour aller au bout, poussant un grand ouf à la dernière ligne quand il avoue être « pleinement heureux d'être vivant. »
Yoga parle bien sûr de cette discipline venue d'Asie et apportant beaucoup de bien-être à ses adeptes. J'ai quand même retenu quelques conseils utiles pour la respiration et le contrôle de son corps.
Emmanuel Carrère parle surtout de méditation avec une cascade de définitions toutes très judicieuses et encourageantes pour le commun des mortels mais, en fait, il parle surtout de lui.
Il raconte, romance, invente sûrement, abuse parfois de termes techniques japonais ou autre mais c'est un prétexte pour raconter sa vie, ses joies, ses peines, surtout ses souffrances. Comme il l'avoue, pour un homme qui a tout : l'argent, la réussite, deux enfants beaux et intelligents, voilà qu'il est bipolaire de type 2 !
Régulièrement, il sombre dans la dépression, a besoin d'être soigné, hospitalisé à Sainte-Anne, subit des électrochocs, prend des médicaments. Dans Yoga, j'ai souffert avec lui de tant d'épreuves, de cette détresse morale pour un homme qui connaît tout, fréquente des célébrités, et partage amour et amitié.
Au fil des pages, j'ai fait beaucoup de rencontres dont son éditeur, Paul Otchakovsky-Laurens (P.O.L.), qui a su le motiver, peu de temps avant sa mort, le 2 janvier 2018, pour apprendre à taper avec ses dix doigts.
Au début, il y a ce stage Vipassana, dans le Morvan, stage de yoga haut de gamme avec cent vingt participants mais c'est tellement aride et dépouillé que j'ai été soulagé lorsqu'Emmanuel Carrère a dû quitter les lieux brusquement après la tuerie de Charlie Hebdo. Il connaissait bien Bernard Maris et il a dû prononcer un discours à son enterrement.
Après toute cette dépression qui le met au plus bas, il m'a emmené sur l'île grecque de Léros où il s'occupe d'un atelier d'écriture pour des réfugies avec une certaine Frederica qu'il appelle affectueusement Erica. C'est une bonne respiration, un moyen de sortir de cette introspection maladive dont il m'a trop longtemps gratifié. En bonus, l'auteur m'a donné envie de réécouter la fameuse Polonaise héroïque de Frédéric Chopin et, pour cela, je le remercie.
Parler de soi, les plus grands écrivains l'ont fait et le font. Emmanuel Carrère reconnaît qu'il veut être des leurs mais Yoga ne m'a pas vraiment plu car ressemblant un peu trop à un fouillis de rencontres, d'expériences plus ou moins réelles. Si écrire ce livre lui a fait du bien, tant mieux !

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Janvier 2015, Emmanuel Carrère prend le train en gare de Bercy, destination le Morvan pour y passer dix jours avec une trentaine de participants, pour un stage de méditation. La consigne est stricte : pas de téléphone portable, pas de livre, pas d'ordinateur : on se retrouve face au silence, seul face à soi-même. Il pratique le yoga depuis une trentaine d'années et ce stage, cette retraite en silence lui permettra d'écrire un petit livre sur le yoga. Il se trouve en effet que, sujet à la dépression, pour lui, "c'était un bon moment, un cycle extrêmement favorable qui durait depuis bientôt dix ans". Mais il va traverser alors un grave épisode dépressif qui le conduira quatre mois durant en hôpital psychiatrique à Sainte-Anne. Il sera diagnostiqué bipolaire type II : "quoi qu'on pense, dise et fasse, on ne peut pas se fier à soi-même car on est deux dans le même homme et ces deux-là sont des ennemis".
Ce livre, donc, aurait dû être léger et souriant, il est devenu grave quand l'auteur se croyant guéri a frôlé le désastre.
Dans Yoga, Emmanuel Carrère raconte cette terrible dépression avec franchise et justesse et dépeint magistralement cette détresse psychique qui l'a envahie et l'a plongé dans les ténèbres et la détresse, songeant même à s'autodétruire.
Des événements importants vont jalonner cette terrible période. Sont évoqués avec beaucoup de sensibilité l'attentat contre Charlie Hebdo et l'assassinat de Bernard Maris que son amie Hélène F. avait rencontré après son divorce et dont il dit : "on était tout doucement en train de devenir des amis", la crise des réfugiés et ces moments très beaux passés avec ces jeunes afghans qu'il aide sur l'île grecque de Léros, la mort de Paul Otchakovsky-Laurens en 2018, son éditeur et ami.
Yoga porte tout de même bien son titre car le yoga reste omniprésent tout au long du récit et seul, quelqu'un en ayant une pratique régulière, ancienne et maîtrisant idéalement la langue peut nous faire découvrir aussi bien et de façon aussi simple cette activité à la fois physique, méditative et spirituelle. J'ai ainsi appris multitude de termes rattachés à cette pratique (un peu lassant parfois), à commencer par le zafu, coussin sur lequel s'assoient les pratiquants.
Cependant le combat intérieur que va devoir mener Emmanuel Carrère face à cette maladie qu'il croyait vaincue et qui refait surface sera une véritable mise à nu des souffrances endurées, de sa quête de délivrance qui s'achèvera par cette sublime dernière parole : "je suis pleinement heureux d'être vivant".
Yoga est une autofiction, c'est-à-dire que l'auteur parle de lui, de sa vie et y mêle forcément d'autre vies que la sienne, ce qui explique sans doute le différend avec son ex-épouse Hélène Devynck.
Yoga est certes un superbe bouquin que je ne peux que recommander, mais j'avais néanmoins préféré La moustache, La classe de neige et surtout L'adversaire du même auteur.

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Emmanuel Carrère, qui pratique régulièrement le yoga, décide d'en faire le principal sujet de son prochain livre et s'inscrit à un stage. Mais les événements ne se passent pas comme prévu…

Comme à son habitude, Emmanuel Carrère prend prétexte d'un événement pour nous raconter sa vie. Il l'avoue d'ailleurs sans ambage, c'est ce qu'il sait le mieux faire. Il mélange son autobiographie à des faits romancés. le temps ici est en permanence élastique, nous ne savons jamais vraiment combien de temps cela a pu durer. Par exemple son séjour à Sainte-Anne qu'il décrit sans s'apesantir, comme dans un demi-cauchemar éveillé. La dernière partie de l'ouvrage m'a le plus gênée. Nous y retrouvons un bobo parisien mal dans sa peau qui croit faire sa BA en partant pour Leros à la rencontre d'immigrés. Il aligne toute une série de rencontres, mais surtout des poncifs qui n'intéressent que lui.

Cet ouvrage lui fut très certainement bénéfique, mais aurait-il été édité en inscrivant un autre nom moins célèbre sur la couverture, je n'en suis pas sûre.
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Je reconnais avoir abordé Yoga avec une certaine réticence. D'abord en raison d'une méfiance instinctive à l'égard des livres encensés par la critique dès leur parution (le sieur Beigbeder excepté), ensuite en raison du thème abordé. Cette réserve a d'ailleurs eu tendance à se confirmer à la lecture de la première partie (sans doute un peu longuette...) consacrée à une retraite "méditative" de l'auteur dans un corps de ferme en province. Et puis on se prend au jeu: certes, Carrère ne nous épargne rien des différentes facettes de la méditation, du tai chi et du yoga, mais il le fait avec souvent une certaine distance qui met du lien à la narration.
Les pages suivantes, consacrées à son internement à St Anne, sont souvent sidérantes. le meilleur du livre à mon sens se trouve dans le récit de son séjour sur l'île grecque de Léros auprès des migrants, et tant pis (ou tant mieux ?) que la fiction se soit invitée avec la réalité (je renvoie là à une polémique récente partie de son ex femme, j'avoue à ce sujet ne pas avoir bien compris ce que celle-ci reproche à son ancien conjoint...), après tout, n'est-ce pas la liberté de l'écrivain ?
Je souligne aussi les belles pages consacrées à Bernard Marris (l'attentat de Charlie Hebdo) et à son éditeur, Paul Otchakovsky-Laurens, disparu avant la fin de l'écriture du livre.
Au final, c'est un livre souvent cruel, assez vertigineux. Auto-centré ? Bien sûr. Comme l'a bien formulé le critique Grégoire Leménager, Yoga est peut-être "le livre d'un grand malade, mais c'est un grand livre quand même, sur le métier de vivre, qui est parfois si épouvantablement douloureux". Un dernier mot sur le style, d'une exemplaire fluidité, qui place sans aucun doute Carrère parmi les meilleurs.
Il serait dommage que Didier Decoin et ses petits camarades du salon Goncourt passe à côté de ce livre cette année...
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Ce livre qui mêle des réflexions sur le yoga, la méditation et la dépression semble susciter des avis bien tranchés. Pour ma part, je le trouve juste moyen. Certains passages éveillent l'intérêt, d'autres paraissent longuets. L'essentiel, pour moi, c'est qu'il y manque une vraie trame narrative susceptible d'en dramatiser la lecture. ● Mais j'ai noté certaines phrases qui ont trouvé en moi une résonance, par exemple : « [Q]uand ça va bien, je m'attends à ce qu'à un moment ou à un autre ça aille mal – en quoi j'ai raison –, alors que quand ça va mal je n'arrive pas à croire qu'à un moment ou à un autre ça va aller bien – en quoi j'ai tort. » Ou encore : « Sans me vanter, je suis exceptionnellement doué pour faire d'une vie qui aurait tout pour être heureuse un véritable enfer […]. » (Au sujet de cette phrase, je ne comprends pas certaines critiques qui affirment qu'en tant que « nanti », Emmanuel Carrère ferait preuve d'indécence à étaler son mal de vivre. Les « nantis » n'auraient pas le droit de faire une dépression sévère ? n'auraient pas le droit à notre compassion dans cette circonstance ?) Ou enfin : « C'est peut-être ce qu'il y a de plus intéressant dans la vie, de chercher à savoir ça : ce que c'est d'être un autre que soi. C'est une des raisons qui font écrire des livres, une autre étant de découvrir ce que c'est d'être soi. »
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Je fais du yoga, et j'aime bien méditer, oui, je l'avoue. Je suis même allée suivre des séances hebdomadaires de méditation dans un centre bouddhiste pas loin de chez moi ; mais je n'ai jamais osé me lancer dans un stage de 10 jours ! Il faut dire qu'on ne mange presque pas…on ne parle pas, on ne peut pas lire… ! Ne pas parler, à la limite, ça irait, mais ne pas lire, non, non, non.

Alors quand je suis tombée sur ce livre à la bibliothèque, je me suis empressée de l'emprunter. C'est vrai que ça commence bien, vraiment bien ! Qu'est-ce que la méditation, à quoi sert-elle, comment la pratique-t-on notamment dans un stage : tout cela me parle, me renvoie à quelque chose que j'aime. D'ailleurs, j'ai pris une foule de notes, je suis allée sur youtube écouter un maitre indien parler en …indien de sa « voix caverneuse ».
J'ai même mangé et pris une douche « en pleine conscience » avant d'aller travailler.
Bref. C'était mon trip, d'autant plus qu'Emmanuel Carrère raconte son expérience avec beaucoup d'humour et de franchise. Expérience qu'il a dû interrompre après 4 jours, rappelé par le fracas de la vie, en l'occurrence l'attentat chez Charlie Hebdo.

Et à partir de là, bof bof bof ! La vie de l'auteur part en cacahouète, il nous parle de ses troubles bipolaires, de ses très graves dépressions, de son départ dans une île grecque où il s'occupe de jeunes migrants. Et ce n'est pas gai. Pas du tout. Pas serein, pas zen, pas du tout dans le ton du début. Mais franc, oui, comme toujours.

Donc je vais refaire une petite séance de yoga ou de méditation pour m'ôter cette déception de la tête. J'inspire, j'expire…
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Au départ, le projet d'Emmanuel Carrère est celui d'un petit livre léger sur le Yoga, une sorte de reportage sur le vécu concret d'un pratiquant – pratiquant qui s'avoue modeste et pas toujours exemplaire, néanmoins assidu depuis de nombreuses années… Mais les choses prennent, à l'épreuve de la vie, une toute autre tournure : d'abord il en vient à douter de l'intérêt réel du yoga, puis il connaît un épisode de dépression aigue qui le mène vers une toute autre expérience…
Au final, on trouve beaucoup de choses intéressantes dans ce roman : une quinzaine de définitions très concrètes de la méditation, un témoignage de première main sur une dépression lourde (4 mois passés à Sainte Anne et un traitement d'électrochocs) et sur la bipolarité (quand les fluctuations de la conscience, dites vritti dans le vocabulaire de la méditation, deviennent des montagnes russes) et puis aussi toutes sortes de considérations générales sur la vie, les amitiés (notamment celle avec Bernard Maris, brisée par son assassinat en janvier 2015), les amours aussi – encore qu'elles aient manifestement pour bonne partie été « coupées au montage » du fait du droit de refus de l'intéressée.
Une sorte de balancement conquiert progressivement le livre, qui permet, en les entrechoquant les unes contre les autres, d'approfondir ces différentes expériences de l'auteur, et d'accéder à des questions plus profondes… Mais ce même balancement, revendiqué « bipolaire », conduit aussi à une réflexion un peu manichéenne… Ainsi quand Emmanuel Carrère est taraudé par cette question : quelle est l'Expérience fondamentale de l'homme : douleur infinie ou joie infinie ? – ou comme il le résume : Dostoievski ou Dalaï Lama ? Il y a dans ce côté binaire quelque chose qui nuit à l'« enquête existentielle » dans laquelle Emmanuel Carrère arrive par ailleurs, de manière plaisante, à nous entraîner… Un côté trop « philo de comptoir », au risque de se perdre dans de « fausses questions » – ou de perdre de vue d'autres interrogations, plus intéressantes : par exemple ce moment où, jouant Orwell contre Ram Dass, Carrère se demande ce qui, en définitive, fait la vérité d'une expérience, sa consistance… sans approfondir.
En définitive, le livre, tout intéressant et plaisant qu'il soit, peine à décoller et à vraiment embarquer son lecteur... Il lui manque un petit supplément d'âme – supplément qu'il y avait notamment dans Un roman russe, que l'on ne trouve pas ici… Est-ce à dire que ce sont les passages qui ont dû être retranchés du livre à la demande de l'ex-compagne d'Emmanuel Carrère, qui lui ont enlevé son « sel » ? Que ce seraient donc les passages les plus « exhibitionnistes » (et flattant des pulsions voyeuristes du lecteur) qui feraient prendre la mayonnaise dans les romans de Carrère ? Peut-être… Mais en raisonnant par différence avec Un roman russe, il semble que ce roman avait également autre chose, qui manque à Yoga : le comique.
Dans Un roman russe, le narrateur entreprenait de faire une grande blague à sa compagne et à l'ensemble du pays, en publiant dans le journal le monde une nouvelle érotique… Or cette grande blague, non seulement faisait un flop, mais de surcroît se retournait contre lui… Un comique digne de la plaisanterie, de Kundera, qui repose sur ce malentendu dont l'homme est structurellement la dupe : d'un côté il y a les histoires qu'il se raconte sur lui-même et les autres, ses fantasmes, son « effort pour donner une forme narrativement satisfaisante à son existence », et d'un autre côté, il y a les « vicissitudes existentielles qui en résultent », les événements immaîtrisables qui contrecarrent son aspiration à la maîtrise et qui, revenant en boomerang, le conduisent à la débâcle…
Il y a bien de la débâcle dans Yoga, mais sans comique – tout juste cet humour léger dont Carrère sait égrener son propos…
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Au vu des très nombreuses critiques de ce livre, la mienne sera brève et n'apportera pas grand-chose de plus. D'un côté, on a envie de dire à Carrère qu'il n'est pas le nombril du monde et qu'il y a de merveilleux sujets à traiter pour un écrivain, autre que lui-même. Comme il le fait d'ailleurs partiellement pour son « Royaume ». Puis on se dit que ses expériences, à un niveau différent, propre à chacun, peuvent être intéressantes pour réfléchir à sa propre vie. Sachant, comme il le dit à la fin, que certains personnages et situations ont été « retouchés ». Donc, je ne peux pas dire que j'ai vraiment aimé, ni rejeté. Il a un réel talent de narration et se pose les bonnes questions existentielles.
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Je suis toujours un peu gênée dans des romans autobiographiques surtout quand il s'agit de faits personnels, voire très personnels,  mais ayant pratiqué yoga (un peu) et méditation (un peu également), comme tout humain à la recherche de sérénité et d'équilibre, connu des périodes de hauts et de bas, j'avais envie d'écouter l'expérience d'Emmanuel Carrère dont j'avais beaucoup aimé D'autres vies que la mienne, et partager, en quelque sorte, nos expériences...

Je suis très partagée concernant mon ressenti.... Il ne s'agit pas ici uniquement d'un récit sur le yoga et la méditation mais c'est surtout le parcours, je devrai presque dire, le chemin de croix, d'un homme hanté par la dépression avec des troubles importants (il se dit souffrant de bipolarité), ayant demandé à être interné à Ste Anne, à subir des traitements violents et parfois même à vouloir que tout s'arrête définitivement. Il y ajoute ses histoires d'amour, ses deuils, son travail d'écrivain, ses rencontres au fil des dernières années que ce soit dans une île grecque avec des immigrés, la perte d'amis (Bernard Maris dans l'attentat de Charlie Hebdo et  Paul Otchakovsky-Laurens, son éditeur-mentor-ami depuis ses débuts).

Pas de complaisance ni d'apitoiement, même ici ou là de la dérision et de l'humour, il est très lucide sur son état mental et psychologique. En revenant sur les rencontres, les événements parfois tragiques qu'il a traversés, c'est l'expérience d'un homme hanté par un mécanisme intérieur qui "mouline" continuellement, qui s'autodétruit à petites doses (voire parfois à violentes doses), ne trouvant jamais totalement ce qu'il recherche désespérément : le bonheur, la sérénité et l'optimisme.

J'ai trouvé cette mise à nu très émouvante par la fragilité qui se cache derrière le masque de l'écrivain, derrière ses romans, lui qui ne sait écrire que sur du "vrai" du "réel" du "vécu" et quoi de plus vrai que d'écrire sur soi-même. Des variations de tons selon qu'il analyse ses états d'âme dépressifs, son stage de yoga et ses rites, ses amours ou amitiés, des variations qui ne sont pas sans faire penser à ses humeurs changeantes et difficiles à gérer.

Alors ai-je aimé ? Oui mais et le "mais" je n'arrive pas à vraiment l'expliquer. Peut-être parce qu'il se livre trop, que ce n'est pas seulement un regard sur ce que traverse un être souffrant de troubles psychologiques mais également sur ce qu'il a de plus intime, parce qu'il montre un visage, des tourments, un rapport à la vie qui doivent, pour moi, parfois rester personnels mais qui peuvent également aider d'autres, même si à travers sa plume un écrivain laisse souvent transparaître ses états d'âme, il nous place ici en tant que témoin voyeur de son mal-être. 

S'agit-il de courage ou de thérapie, une de plus pour tenter de s'en sortir ? Peut-être mais les conséquences de ce témoignage peuvent être lourdes et lui coller à la peau pendant longtemps, mais c'est un risque qu'il a dû peser, assumer. S'agit-il d'un roman ou d'un témoignage autobiographique ? Pour moi un témoignage, car qui dit roman dit invention, imagination, création et cela voudrait dire que tout n'est pas vrai ?

J'ai retrouvé la fluidité de son écriture et la construction de son récit montrant, comment tous ces petits cailloux sur son chemin lui ont permis de tenir, de croire, d'espérer, ses rencontres riches parfois d'enseignements à des moments ou dans des lieux improbables, sa simplicité parfois émouvante pour raconter la détresse, le mal-être dans lequel il se débat.

Alors est-ce que l'écriture de Yoga lui aura permis à lui de surmonter ses angoisses ? Peut-être mais il peut aider ou permettre à certains de comprendre ou se retrouver dans les propos tenus (et c'est d'ailleurs ce qu'il espère en fin de récit). 
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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Il y a des auteurs chéris, que l'on suit, que l'on lit, malgré tout, quoiqu'ils produisent. Avec d'heureuses surprises et d'immenses déceptions selon les livraisons.
Emmanuel Carrère fait partie de cette catégorie. Il me séduit autant qu'il m'agace. « Yoga » illustre bien cette situation.
On l'a lu à longueur de chroniques littéraire, Emmanuel Carrère a connu un épisode de profonde dépression alors que sa vie n'était qu'océan de sérénité et pratique intensive de yoga. Après une hospitalisation d'office, il se rend en Grèce auprès de jeunes exilés venus d'Afrique ou du Moyen-Orient. le malheur des autres relative ses propres tourments. Cela est bien connu.
Ce qui devait être un opuscule sur la pratique yogiste s'est transformé en une briquette d'autofiction bien sentie. On retrouve tous les tics littéraires de Carrère, son égo boursoufflé mais aussi son côté Droopy touchant et drôle, associés à une foultitude d'informations parfois intéressantes, parfois futiles. Au final, j'ai surtout l'impression d'un grand n'importe quoi, pas complétement désagréable, mais fouillis et brindezingue.
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