1972,
Jean Carrière connait la gloire avec "
l'épervier de Maheux", il a 40 ans et c'est le prix Goncourt, la course aux salons littéraires, aux plateaux de télévisions et à la violence d'une société parisienne en mal de nouveauté vite oubliée.Les critiques toujours empressés de mettre les gens dans de vilaines petites cases le déclarent "écrivain régionaliste" ce qui est faux et malheureusement occultera toute son oeuvre future.
Il lui faudra plusieurs décennies pour s'en remettre, cloîtré chez lui dans son cher pays cévenol, entouré de souvenirs d'enfances illuminés par la musique et le parfum de la garrigue. Après sa traversée du désert ,
Jean Carrière écrit avec une sérénité retrouvée "
Les années sauvages". Ces années avant l'âge adulte celles qui nous font un trou au coeur lorsqu'on y pense, celles ou l'on est pas tout à fait adulte, encore enfant.
Et c'est bien d'enfance dont nous parle cet écrivain merveilleux, à la plume si fragile, délicate, qui nous raconte les premières fois "tout n'existe qu'une seule fois, la première.Tout est brûlé par l'émerveillement que j'ai connu autrefois, dans ce paradis, avant mes dix-sept ans. Depuis c'est l'enfer."
Le héros, éternel "adulescent", va raconter au seuil de ses 50 années bien entamées, les chemins empruntés, perdus, ratés, oubliés entre deux dates :ses 15 ans en 1944 et sa rencontre avec une très jeune femme en 1980, qui servira de catalyseur aux souvenirs perdus et regrettés.
L'écrivain répétait souvent ce vers de
René Char: "Vivre, c'est s'obstiner à achever un souvenir "
Et c'est exactement à cela que s'acharne le personnage (auto-biographique) "des années sauvages".