Il y a quelque chose de très séduisant dans l'écriture de
Donato Carrisi. A la fois dans la façon de raconter – dans ce livre, en particulier, le premier chapitre happe le lecteur – et l'originalité de ses récits. Mais
le jeu du chuchoteur n'a pas tenu toutes les promesses que j'espérais.
Mila, l'un des personnages récurrents de l'auteur, est maintenant rangée : elle a démissionné de la police et souhaite élever sa fille calmement. C'était sans compter l'imagination cruelle de l'auteur : sa quiétude ne durera pas plus que le temps de quelques pages.
Et nous voici embarqués dans une intrigue complexe et aux multiples rebondissements sur laquelle j'ai quelques réserves.
J'ai ressenti tout au long du récit comme un flottement, un manque d'ancrage, très probablement voulu par l'auteur mais qui laisse l'impression d'être manipulé, comme s'il n'avait pas voulu trop marquer géographiquement son enquête. En lieu et place d'universalité, cela donne un patchwork étrange d'une ville qui évoque à la fois Gottham et une riche ville côtière et portuaire du nord est des Etats Unis (mais sans assurance), à la date incertaine : on y trouve encore des cabines à pièces… Parfois, ne pas donner trop d'information permet à chaque lecteur de se projeter, mais pour moi cela a été une sensation étrange qui surgissait de temps à autre et me faisait « sortir » du récit.
Ensuite, le comportement de Mila m'a plus d'une fois agacée. Elle se lance tête baissée et sans beaucoup réfléchir dans tous les pièges que lui lance un adversaire retors. Les enquêteurs omniscients sont crispants, mais se faire balader à ce point relève de la faute professionnelle !
On la voit avaler allègrement des comprimés de drogue pour faire avancer son enquête, ou encore prendre son vieux collègue pour un sérial killer sous le coup de l'émotion .
L'intrigue est quant à elle alambiquée, reposant sur un double niveau réalité / virtuel, et des manipulations en veux-tu en voilà. le principe d'un Chuchoteur est séduisant et à fort potentiel, car finalement peu présent dans la littérature policière. On trouve quand même de talentueux précédents, Hannibal Lecter ou encore
le chuchoteur, premier du nom. Mais ici, il acquiert une dimension toute puissante, ce qui multiplie les twists et les rend indigestes : trop de twists tue les twists.
Ce chuchoteur réussira à ce que Mila ressente enfin des émotions, son génie consistant à transformer les gens. Et restera finalement libre de toute entrave .
En filigrane, la relation entre Mila et le père de sa fille reste très peu explicite. Je ne sais si cela provient du fait que j'ai oublié les intrigues précédentes ou voulu par l'auteur, mais il en reste comme une sensation de démangeaison que l'on n'arrive pas à calmer : on souhaite en savoir plus, sans jamais y arriver.
Je me demande si je ne vais pas entamer une relecture des ouvrages précédents pour creuser la question…