Citations sur Les autodafeurs, tome 2 : Ma soeur est une artiste de.. (31)
J'ai demandé ce qu'il y avait derrière cette porte, mais le prof a dit que c'était son "espace personnel" et que je n'étais pas autorisé à y aller. Pendant un moment j'ai eu peur, parce que ça m'a fait penser au conte de Barbe-Bleue. Puis j'ai réfléchi et je me suis dit comme on était pas mariés, je ne risquais rien...mais j'ai tout de même choisi la chambre la plus près de la sortie, au cas où.
Pour nous, le peuple incompris des ados, les négociations avec les adultes sont toutes du même type : une lutte pour la liberté.
Quelque part, j'étais quand même assez chanceux, car ma promesse à moi était contresignée par un avocat, ce qui signifiait que, si je respectais ma part du contrat, le juge était obligé de tenir sa promesse...alors qu'avec les parents on n'est jamais vraiment sûr.
Comme je ne savais pas quoi lui répondre, j'ai décidé de compter les armes exposées sur les murs. Ça ne m'a pas pris très longtemps, car il n'y en avait que vingt deux.
Ça m'a un peu embêtée, parce que je n'aime pas ce chiffre et j'allais devoir quitter le dojo. Alors, pour être sûre, je lui ai demandé s'il n'y en avait pas d'autres. [...]
Et là, il m'a regardée et il m'a dit une chose étrange : " Si, Césarine. Dans cette salle il y a une arme exceptionnelle qui ne demande qu'à être exploitée."
J'ai demandé : "Laquelle ?"
Il a dit : "Toi."
- Tu crois qu'il avait déjà des tatouages quand il était bébé ? chuchota Néné avec un sourire jusqu'aux oreilles. Ça se trouve il était adepte des décalcos qu'on trouve dans les paquets de petits-suisses.
L'image d'un De Vergy potelé avec des tattoos de Scooby-Doo sur ses petits bras dodus s'imposa à moi et je pense que Néné visualisait le même type d'image que moi parce que nous avons éclaté de rire en même temps.
Être proche des gens n'a rien à voir avec la distance.
Sans déconner, à chaque fois que je lis les commentaires sur les bulletins de notes je suis mort de rire. Quand je pense que ce sont les mêmes profs qui nous rabâchent à longueur d'année qu'il faut être "plus précis" ! Eux, pourtant, ils ne se gênent pas pour les platitudes. En même temps j'imagine qu'ils ne sont pas autorisés à écrire ce qu'ils pensent vraiment, parce qu'autrement ça taillerait grave sur les bulletins. Imaginez la gueule du truc si les profs étaient plus honnêtes et nous balançaient des réflexions du genre :
Médical : "Doit envisager d'urgence la greffe d'un cerveau."
Admiratif : "A élevé la paresse au rang d'art. Bravo."
Curieux : "Avec vous la connerie devient conceptuelle...avez-vous breveté le procédé ?"
Soulagé : "La seule bonne nouvelle de ce trimestre...c'est que c'est le dernier."
Ironique : "A pour seule ambition d'être une vedette de télé-réalité"... Félicitations, côté langue française vous êtes prêt."
Réaliste : "Constant dans le n'importe quoi."
Philosophe : "Donne un sens nouveau à la notion de vacuité."
Méditatif : "Si Pascal vous avait connu, jamais il n'aurait pu envisager une seule seconde l'existence de Dieu comme possible."
Ce serait tout de même plus fun, non ? p.42-43
Avant, je regardais mon reflet, mon apparence, sans chercher à voir plus loin. Je ne m'intéressais qu'à l'image que je renvoyais aux autres. [...]
Bref, je restais en surface de moi-même.
Mais aujourd'hui tout a changé.
Quand je me regarde dans la glace, je me fiche de mon apparence, je me regarde dans les yeux car je cherche à savoir qui je suis vraiment à l'intérieur... parce que je ne me reconnais plus.
Sara fredonne souvent, parce qu'elle est presque tout le temps heureuse. Même que parfois, rien que de l'écouter moi aussi ça me donne une idée de ce que c'est que "d'être heureux" : c'est se sentir plus léger alors que tu ne pèses pas moins lourd.
Bref, pour citer Jean-Claude Van Damme, le grand philosophe belge des arts martiaux: j'étais aware.
Moi je ne parlais pas parce que j'avais compris que c'était un piège : les adultes te font envie avec des cadeaux ridicules, tu te mets à parler pour les obtenir et, quand ils voient que tu maîtrises suffisamment de vocabulaire, ils t'obligent à les écouter ... et à obéir.
C'est ce que les adultes nomment la communication.
Moi j'appelle ça le dressage.
Comme quoi tout est bien une question de vocabulaire.