Oui, elle l’aimait, comme une femme aime un homme, passionnément, profondément, depuis l'instant où elle avait fait sa connaissance, le jour où il l’avait arrachée à lord Wroxham. " Comme j’ai été aveugle! pensait—elle. Comme j’ai été stupide et puérile! Maintenant, je comprends pourquoi j’ai été si malheureuse chaque fois qu’il m’a témoigné de l’hostilité. Je comprends aussi pourquoi je me sens transportée chaque fois que je me trouve en sa présence... Et il s’apprête à épouser une autre femme!..."
Mais pourquoi le trouvent—elles charmant? Pourquoi l’aiment—elles? Certes, il est grand et beau. Il a de larges épaules. Cependant, ce n’est pas sa perfection physique qui exerce sur elles la plus forte attraction. C’est plutôt son cynisme naturel et sa nonchalance, qui lui donnent l’air de trouver amers tous les fruits de la vie. Et c’est aussi son arrogance et sa fierté qui exigent et obtiennent des femmes fascinées une sorte d’obéissance servile...
Orielle, petite et gracieuse, n’avait pas encore acquis ce vernis d’audace et de séduction que possédaient presque toutes les danseuses du corps de ballet. Avec sa peau douce comme un pétale de fleur et ses yeux légèrement bridés, elle était d’une beauté très originale. Mince et frêle, elle faisait penser, lorsqu’elle se déplaçait, à une plume emportée par la brise.
Je ne veux épouser personne. Je déteste les jeunes gens. Je l’ai déjà dit cent fois, mais vous n’avez pas voulu me croire, ni vous ni mon tuteur! A franchement parler, les jeunes gens ne me font pas peur. Ils m’assomment, voilà tout! De plus, ils me paraissent ridicules avec leur affectation et leur dandysme.
Jadis, elle avait possédé une beauté pâle et aristocratique. Mais, maintenant, aux environs de la quarantaine, il ne lui restait presque rien de son charme et son visage n’exprimait plus que la fatigue et une certaine tristesse.