Je ne fume pas ; je voudrais fumer... Je trouve que la cigarette complète, en quelque sorte, la créature humaine. Non par le goût qu'elle doit avoir - mais par les méandres légers qui s'en exhalent... Fumée bleue, bleue, si délicate, un peu brouillée, indécise, qui s'élève, lente, moelleuse, et titube, et s'entortille et se dissipe. Image vivante de l'esprit, hein ?... D'ailleurs qui me prouvera que l'esprit est quelque chose de plus qu'une fumée de cigarette ? Qui me prouvera aussi qu'une fumée de cigarette ne contient pas de quoi subsidier plusieurs cervelles ?... Et puis, question de goût : j'adore une main d'où s'échappe la fumée jolie et vaporeuse ; j'aime moins la cigarette aux lèvres.
"Non, tu ne peux pas lire ça, Nafalia... C'est dégoûtant : aujourd'hui, on n'écrit plus que des livres ignobles... Si c'est permis de laisser ça à la portée des jeunes filles !... Les gens qui osent publier de telles choses mériteraient le bagne... Il y en a au bagne qui ont fait, certes, bien moins de mal... Non, Nafalia, tu ne peux pas lire ces livres-là, maintenant. Ni maintenant, ni jamais. Laisse-les aux goujats... à ceux qui n'ont pas d'âme et qui cherchent de vilains plaisirs..."
Il ne faudrait pas beaucoup de minutes comme celles-ci pour éteindre la vie d'un homme. Elles sont faites de cauchemars et de morts amalgamées, ces minutes. - Le doigt tout chaud encore, crasseux, onglé démesurément d'un démon qui vous gratterait l'intérieur du crâne ferait des minutes pareilles.
Apparence menteuse. Combien menteuse ! Elle était le mâle. Il était la femelle. C'est-à-dire - Jamais explication ne fut plus nécessaire que celle-ci - qu'elle était, en dépit de son extérieure délicatesse, la superbe au geste lourd, l'émancipée au frémissement altier ; - et qu'il était, sous sa nerveuse et arrogante carcasse, le faible qui a le rêve et qui a la bonté.