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Critique de Fleitour


Je pense à Neal Cassady, je pense même au bon vieux Neal Cassady, le père que nous n'avons jamais trouvé, je pense à Neal Cassady, je pense à Neal Cassady. ( Sur la Route Kerouac p 505)
Ainsi finit le long roman Sur la Route de Jack Kerouac.
En retour dans une lettre adressée à Jack Kerouac, par Neal Cassady, "j'avoue putain Jack , comme je suis heureux, je suis heureux, ton livre est édité".

Neal Cassady, intimement lié à l'itinéraire de Jack Kerouac. est le personnage central ou le héros de Sur la Route. Kerouac s'est très largement inspiré de son copain Neal Cassady, utilisant ses lettres, classant toutes les anecdotes et les querelles nées sur les routes entre New-York et Denver.


Neal Cassady entreprendra sa propre biographie, et tracera la route chaotique de son enfance. Parler de Neal c'est s'aventurer sur des terres, hostiles et se frotter à des personnages douteux violents incapables souvent de vivre seuls, des êtres à la marge des personnages à la Dostoïevski.
" Perdu au milieu de tant de morts vivants qui ne se laissaient guider, chacun pour une bonne raison, que par le désir de finir leur existence dans le ruisseau,
j'étais bien le seul à pouvoir, jour après jour,leur évoquer une enfance à jamais révolue".P 56.

À l'âge de six ans, il rejoint son père, soulagé, il ne verra plus la gueule fracassée de son père, la gueule ensanglantée par les demi-frères de Neal, sa mère impuissante à les arrêter. À l'âge de six ans, il ne sera plus harcelé par Jimmy, pour se battre avec les gosses de mexicains, ces frayeurs d'enfants, son ordinaire, cesseront.

C'est dans ce vent de liberté, qu'il va pouvoir enfin tracer sa vie, malgré son nouvel entourage, des plus extravagants, d'où il observera "depuis le fond des poubelles les rebuts de l'humanité."

Bénédiction pour lui, il ira à l'école, où son intelligence, pourra enfin trouver à s'exprimer sans violence, c'est l'école qui lui apprendra à goûter les textes, à s'enivrer de lecture. Auprès de lui son père, lui, continue à s'enivrer, état dans lequel il le retrouve, souvent ivre mort à la sortie l'école. Il vivra sa descente dans l'enfer de l'alcool; "il me déclara qu'il ne renoncerait jamais à la bouteille "p78.

Le goût de l'aventure, viendra très vite, pour aller à l'école il expérimentera tous les chemins possibles les plus longs comme les plus courts, bientôt Denver n'aura plus aucun secret pour lui ; hélas combien de fois il est allé à la recherche de son père, pour enfin le trouver dans un fossé ou au fond d'une ruelle.

Mais c'est la littérature qui une fois encore va l'instruire, sur les délices des voyages. Le Comte de Monte-Cristo n'aura plus de secret pour Neal, » chacune des scènes du film me submergea, je me souviens de mon excitation proche de l'ivresse, de mon hébétude et de ma rage de devoir attendre avant que je ne puisse emprunter à la bibliothèque le roman dont s'était inspiré le film ».p 80

Neal Cassady ne pouvait que subjuguer le romancier, Jack Kerouac , meurtri par la mort de son père, et douloureusement orphelin de son frère mort à l'âge de cinq ans, Jack Kerouac s'est pris d'amitié pour ce fou, au visage d'ange, qui lui parlait de philosophie, aussi simplement que de sa façon de démarrer toutes les cadillacs.

Première Jeunesse m'a envahit, je me suis englué dans ce destin, sombre et tragique, où les quelques éclaircies sont trop éphémères, comme ce bon allemand Schwartz, qui offrit son salon de coiffure, au père de Neal, mais celui-ci allait s'engager en 1917.

Les premières pages vous saisissent quand le grand père de Neal se bat en duel avec son frère à coups de fourches, son frère Ned est touché à mort.

L'écriture de Neal Cassani est incandescente, chaque phrase imprime une émotion nouvelle, ricoche sur un événement inattendu, et s'en va vers des digressions surprenantes, ou la mort n'est jamais oubliée, elle rôde, se dissimule à peine, comme autour des voies de chemin de fer, et de ce métier diabolique, « serre frein ».

Devenir l'Icône de la Beat Génération, n'était pas un souhait de Neal, ce qu'il voulait, c'était devenir un écrivain.

Ce texte montre au combien sa plume est singulière et porte une force incroyable, sans aucune retenue, sauvage, débridée, charnelle. Il montre aussi qu'il savait évaluer son travail goûter celui des autres et qu'il n'hésitait pas à raturer ou corriger. Il n'y a pas dans ses textes les fulgurances de Kerouac, cette capacité à débiter un texte en trois semaines, mais les mots de Neal sont à vif, proches de la douleur.


L'exemplaire de Première Jeunesse que j'ai lu est l'édition dirigée par Jean-Claude Zilberstein : les Belles Lettres.
Cette édition date de 2015,, elle se termine par un certain nombre de lettres adressées par Neal Cassady à Jack Kerouac, ces lettres sont passionnantes, émouvantes, l'expression de l'amitié de coeur qui unissait ces deux hommes.
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