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EAN : 9782381340296
400 pages
Marchialy (12/10/2022)
4.22/5   18 notes
Résumé :
Comment le Qatar est-il devenu une grande puissance jusqu’à accueillir l’un des plus importants événements sportifs au monde ? Grâce à l’or noir et au gaz naturel, mais aussi en exploitant le travail de millions d’immigrés souvent venus d’Asie et d’Afrique. Une main-d'œuvre prise dans les rouages des réseaux de migration qui soutiennent un vaste système d’esclavage contemporain. La construction des stades de la Coupe du monde n’est que la face visible de l’iceberg ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Sous-titré « Coupe du monde 2022 au Qatar, les coulisses d'un esclavage contemporain », ce document ne se limite cependant pas à une enquête sur le sort des travailleurs migrants exploités, parfois jusqu'à ce que mort s'ensuive, sur les chantiers de construction des stades de foot.
L'enquête est certes centrée sur le Qatar et sa « Zone industrielle » où les travailleurs sont parqués dans des « logements » indécents, mais elle balaie un spectre plus large, qui s'étend à toute la zone du Golfe, et à toutes les catégories de travailleurs (hommes, femmes, secteurs de la construction, de la sécurité, du petit commerce, du travail domestique et même celui de la chair à canon dans des guerres sales, en Lybie par exemple). le livre décrit les conditions de travail épouvantables, les logements insalubres, la nourriture inadaptée, l'eau insuffisante et polluée (au point de provoquer des insuffisances rénales souvent mortelles à terme). Il montre aussi toute la pression qui pèse sur les migrants, dont les salaires sont très souvent le seul moyen de subsistance pour toute leur famille restée au pays, la pression et les (fausses) promesses d'enrichissement facile qui les poussent à quitter leur pays, à enchaîner deux ou trois boulots ou les heures supplémentaires pour gagner un peu plus, qui les empêchent de rentrer chez eux avant d'avoir gagné suffisamment d'argent, sous peine de déshonneur. Cette migration apparaît particulièrement cruelle pour les jeunes femmes, souvent très mal informées, recrutées par des agents véreux, et qui atterrissent, dans le pire des cas, dans des réseaux de prostitution. Et qui, quand elles parviennent à rentrer dans leur pays, enceintes ou avec un enfant né d'un viol, sont abandonnées à leur sort, sans ressources, reniées par leur famille et le poids des traditions.
Accidents, maladies, suicides, maltraitances physiques et mentales, solitude, séparation d'avec la famille pendant des années, humiliation, déshumanisation, telles sont les conséquences de la misère dans les pays d'origine de ces migrants, du sud-est asiatique à l'Afrique de l'ouest.
A cet inventaire, les auteurs ajoutent des témoignages plus ou moins hypocrites de dirigeants et d'entrepreneurs du Golfe ou de diplomates (coincés entre la real politik et les droits humains), et ceux, désabusés et impuissants, de membres d'ONG qui aident les migrants sur place ou une fois rentrés au pays, ou de politiciens des pays d'origine, conscients à la fois des enjeux humains et des retombées économiques positives générées, dans leur propre pays, par l'afflux d'argent des migrants, qui permettent parfois la survie ou le développement de toute une région (cf l'exemple du Kerala).
Pour ce livre, les auteurs ont interrogé une soixantaine de travailleurs et de membres de leurs familles à travers différents pays. Une enquête menée dans des conditions logistiques compliquées et dangereuses, sans compter les risques pris pour leur propre sécurité et surtout celle de leurs fixeurs locaux et des personnes interrogées dans les différents pays du Golfe. « Informer, mais à quel prix ? », se demandent les auteurs. Quoi qu'il en soit, cet ouvrage est un document nécessaire, qui fait prendre conscience que cet esclavagisme moderne va bien au-delà d'une question d'offre et de demande de travail.

En partenariat avec les Editions Marchialy via Netgalley.
#LesEsclavesdelhommepétrole #NetGalleyFrance
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Alors que le Monde de ce dimanche 9 octobre 2022 prétend remettre en cause la réalité du nombre de travailleurs morts au Qatar, en apportant au débat des analyses vétilleuses de l'Organisation Internationale du Travail (on se demande parfois si le rôle de cette dernière est bien de défendre les ouvriers...), alors que dans le même journal, un article suivant, conclut trop rapidement à "l'impossibilité" du vrai boycott du Mondial (la non-participation d'une ou plusieurs des équipes sélectionnées), comme s'il importait à coups d'arguments d'autorité d'en empêcher la seule imagination, le livre de Sebastian Castelier et Quentin Müller rappelle opportunément d'emblée les plus de 6500 morts d'ouvriers, essentiellement asiatiques et africains, sur les chantiers des stades ou des multiples infrastructures nécessaires à la tenue de cette absurde Coupe du Monde dans le désert. Les deux journalistes donnent la parole aux travailleu(r/s)es qu'ils ont rencontré(e)s, quasi clandestinement sur place, mais aussi à leurs familles restées au pays, qui ont vu partir ou envoyer leurs enfants vers le pire des destins, quand elles attendaient de cet exil de travail un supplément vital pour les aider à vivre et à investir localement. le reportage, nourri du regard qu'ils portent, sans complaisance mais sans exagération non plus, sur la réalité des zones industrielles du Qatar, des camps de logements, de la misère et des maladies subies, sur les viols et l'humiliation vécus souvent au retour, sur l'enfermement domestique des femmes, bref sur tout ce qui constitue la figure d'un esclavage moderne, assumé dès lors qu'il permet la poursuite et l'amplification du capitalisme et de la surconsommation de "l'homme-pétrole", l'envers d'un système économique que nous préférons ne pas voir quand nous ne le tolérons pas. Au-delà du seul Qatar et de la perspective proche du Mondial, les journalistes donnent aussi la parole aux opposants politiques des régimes en place dans la péninsule arabique, rappelant aussi bien l'obscurantisme têtu qui régit l'organisation sociale ou familiale que l'absolu manque de liberté sexuelle, évoquant leur combat courageux et sans cesse réprimé. Un livre qui porte une parole essentielle au moment où la résistance au spectacle dramatique d'un Mondial de foot désastreux au vu de ses conditions aussi bien du point de vue des droits de l'homme que de celui de l'écologie, mais une parole importante aussi pour l'après, avec l'espoir qu'un jour puissent évoluer nos consciences et celles des dirigeants de ce coin du globe, même si cela semble assez mal parti, avec l'annonce des Jeux Asiatiques d'Hiver en 2029 en Arabie Saoudite! Et puis, c'est encore l'occasion de saluer l'excellent boulot des Editions Marchialy, poursuivant avec ce vingt-huitième livre la publication de reportages ou récits culturels toujours passionnants sur des sujets politiques, souvent liés aux questions de migrations, ou de mémoire culturelle d'un lieu!
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J'ai découvert l'auteur, Quentin Muller, sur les réseaux sociaux, à travers notamment ses reportages sur le Yémen ; c'est donc avertie et curieuse que j'ai acheté ces esclaves de l'homme pétrole, sorti à point nommé peu avant la coupe du monde de football au Qatar.
Le livre consiste en une grande compilation d'entretiens dévoilant les ramifications qui sous-tendent l'économie des pays du Golfe, dont la population richissime se borne à employer une population immigrée paupérisée, quand elle n'est pas martyrisée. On voit apparaître un réseau où Soudanais, Ethiopiens, Malgaches, Ougandais, Kenyans, Népalais, Philippins et j'en oublie probablement, convergent vers le Golfe volontairement ou non, pour y travailler et soutenir leurs familles restées au pays.

Les raisons et les modalités de départ sont multiples, des départs encouragés par les pays d'origine aux mensonges proférés sur les salaires et les tâches attendues sur place : c'est tout un système mis en place, avec entretien de la pauvreté, agents de migration, échange de devises et endettements des travailleurs pour être acheminés sur place. le Népal et son système féodal d'« Haruwa-Charuwa » en est un exemple ; les terres étant détenues par une minorité qui exploite les paysans endettés envers elle, et dont les recettes envoyées par les travailleurs népalais à l'étranger représentent près d'un quart du PIB…

Parmi les thématiques abordées par les interviewés, on retrouve sans grande surprise l'invisibilisation totale des travailleurs dans le Golfe, les accidents mortels maquillés en problèmes respiratoires, la vulnérabilité extrême des femmes, les viols et agressions, les violences, la prostitution jamais bien loin entretenus par le système de kafala, où les travailleurs étrangers sont mis sous tutelle de leurs employeurs. Un esclavage en bonne et due forme finalement, reconnu à demi-mots par les quelques diplomates qui ont accepté d'avoir été interrogé par les auteurs.

Autres exemples glaçants, celui de Soudanais engagés pour être « agent de sécurité », et qui sont en fait envoyés au choix dans le désert libyen pour soutenir Haftar, ou au Yémen en appui de l'Arabie Saoudite, ou encore celui des femmes violées par leur employeur et tombant enceintes, forcées de retourner dans leur famille où elles perdent tout statut social et considération.

Bref, un livre aux témoignages bien dégueulasses, que j'aurais souhaité un peu plus analytique, mais qui a le mérite de donner la parole et plus de transparence sur des pratiques que l'on s'efforce de ne pas dénoncer, mais aussi sur les conditions dans lesquelles vivent les Qataris eux-mêmes, certes riches de dollars, mais bien peu de liberté. Révoltant.
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Nous sommes à moins d'un mois du début d'un évènement planétaire majeur au niveau sportif; la coupe du monde de football. Sauf que cette fois ci, son lieu d'exécution fait polémique. Elle se déroulera au Qatar, dans des stades climatisés. Au delà des conditions d'attribution de la coupe du monde qui font l'objet d'enquêtes journalistiques comme sur le média en ligne Blast!, c'est aussi la question des conditions de vie de milliers de travailleurs migrants qui ont saigné sang et eau pour bâtir les infrastructures nécessaires. "Les esclaves de l'homme-pétrole", paru aux éditions Marchialy, Sébastian Castelier et Quentin Müller nous éclairent sur ces femmes et hommes de l'ombre, esclaves des temps modernes.

En 50 ans, un pays comme le Qatar a développé son pouvoir économique et construit des infrastructures gigantesques en plein désert. Comment? Grâce à des millions de travailleurs venus d'inde, du Népal, des Philippines ou de pays africains comme le Kenya, le Soudan ou encore l'Ouganda. Grâce à des agences rabatteuses mais aussi ces états comme le Népal, les petites mains bon marché ont accompli de bases besognes au péril de leur santé, voire de leur vie. Près de 10000 morts par an de travailleurs asiatiques. Et que dire de la kafala, ce système issu de l'empire colonial britannique qui empêche la liberté de mouvement des travailleurs, les prive de leur passeport.

Les deux journalistes spécialistes du Moyen-Orient ont recueilli une soixantaine de témoignages de femmes et hommes travaillant ou ayant travaillé au Qatar, Arabie saoudite ou Koweït dans la construction ou au service des familles en tant que domestiques. Ils dépeignent tous la rudesse des rapports, des conditions d'accueil exécrables, dormant dans des hangars en zone industrielle. Il y a une exploitation de la misère humaine avec même une institutionnalisation avec des villages de la province indienne du Karbala qui ne vivent que grâce à cette diaspora. L'exploitation va même jusqu'au viol des femmes et la honte qui pèse sur elles les empêchent de revenir. Bien que la focale se porte dans les médias sur les 6500 morts des stades, les auteurs montrent bien que ce n'est malheureusement qu'un versant d'un système établi depuis des décennies avec des complicités à tous les niveaux. La diversité des témoignages et des situations humanisent ces femmes et hommes qui ne cherchent qu'à survivre, emportés par les rêves d'une vie meilleure qui leur est vendu et qui subissent ou ont subi un système féodal au prix de leur vie.

Lien : http://www.rcv99fm.org
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"Les Esclaves de l'Homme Pétrole" explore de manière saisissante la vie des travailleurs immigrés au Qatar. Les journalistes Quentin Müller et Sebastian Castelier utilisent des témoignages poignants pour dépeindre la réalité de ces travailleurs issus de pays économiquement fragiles, exploités par des nations prospères comme le Qatar.

Ma première lecture de 2024, cet ouvrage se distingue comme une lecture incontournable, rivalisant peut-être avec "JFK" de Jim Garrison, en terme d'écriture. Les auteurs, grâce à leur expérience journalistique, présentent une vision authentique, exposant les côtés sombres du Qatar, autrefois idéalisé.

En interrogeant pourquoi ce pays continue d'attirer malgré ses problèmes, le livre incite à une réflexion approfondie. En résumé, "Les Esclaves de l'Homme Pétrole" offre une critique captivante, invitant à repenser nos perceptions et à approfondir notre compréhension des enjeux mondiaux cruciaux. Ici, la coupe du monde au Qatar.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Le Qatar et d'autres pays du Golfe ont toujours accordé beaucoup d'importance à leur image. Cette grossière tentative d'achat l'illustre. La Coupe du monde au Qatar n'est qu'un exemple de ce désir de rayonnement international. Aux Émirats, il y a eu l'ouverture d'une branche du Louvre en 2017. La même année, l'Arabie saoudite lançait le projet Neom: une ville futuriste 250 fois plus grande que Paris. Mais tous ces projets grandiloquents ne peuvent sortir de terre que si de petites mains se soumettent. Le Qatar, tout comme les pays pétroliers de la péninsule Arabique, profite de cette main-d'oeuvre bon marché pour bâtir son prestige à travers la construction de mégalopoles attractives.
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La communauté internationale a beau s'insurger, elle n'évoque pas le cœur du problème. Vous analysez avec passion les symptômes, mais personne ne s'attaque à l'éléphant dans la pièce: le système politique en place au Qatar. C'est pourtant une évidence pour qui cherche vraiment à comprendre le Qatar: mon pays est une entreprise familiale, une kleptocratie au service de la famille dirigeante actuelle que, d'ailleurs, beaucoup de gens ici méprisent, sous sa forme actuelle du moins.
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La mauvaise réputation du Koweït tient donc à une meilleure couverture de ces drames et du non-respect des droits des travailleurs. C'est mon avis, mais je ne dis pas que les migrants sont bien traités au Koweït, ce n'est pas du tout ce que je veux dire.
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