On
a reposé le galet.
C’est
un regret.
Il avait
une forme de cœur imparfait,
mais,
après tout, comme tous les cœurs.
Marcher en ville, c’est aller d’îles en îles.
Il y en a de plus en plus. Singulières ou
regroupées en archipel, au relief visible
de loin ou fondu dans un halo d’ensemble,
elles ont fini par faire partie du paysage.
Petites terres le plus souvent tassées ou
allongées, toujours entourées de la même
eau de solitude : ce sont les sans-abri.
Marcher en ville, c’est naviguer d’îles en
îles, des îles adultes, des îles enfants.
On accoste un moment, les petites vagues
de la main tendue battent contre la coque
du cœur, elles s’avancent, se retirent.
Ou on double le cap, on évite les récifs,
Charybde et Scylla entre lesquels sombre
d’un coup ce qui parle en nous d’humanité.
D’îles sans nom en îles sans nom, carte muette
de la ville, et nos itinéraires de cabotage,
ou de grand large.
Il existe des matins de phrases toutes faites…
Il existe des matins de phrases toutes faites, allez savoir pourquoi.
On se lève avec elles.
Par exemple une phrase comme celle-ci :
les oiseaux décident de la couleur du ciel.
Ou celle-là :
la nuit est ronde dans l’œil du cheval.
Elles franchiront la journée,
dans la tête, sans que l’on ne sache qu’en faire.
Elles seront là au coucher.
On n’en aura rien fait.
Surtout pas le poème que pourtant elles annonçaient.