Ils sont cinq.
Cinq à prendre la parole successivement, comme au théâtre, qui vont prendre la parole tour à tour pour nous conter une belle histoire.
Par ordre d'apparition il y a Mr Pierre, alias «le Vieux », alias
Pierre Corneille en personne.
Et puis il y a « la Désirée », alias la fameuse Armande
Béjart, dont on va raconter le parcours
Vient ensuite « l'Intouchable », alias « le Farceur », alias « Baptiste » qui, est, vous l'aurez deviné, plus connu pour nous sous le nom de
Molière.
Nous aurons aussi « l'Accoucheuse », autrement appelée « Madeleine », qui est Madeleine
Béjart, l'épouse de
Molière au commencement de cette histoire.
Et puis il y a un personnage moins illustre, baptisé « le Petit », de son vrai nom
Michel Baron ou Boyron, un comédien de la troupe, très aimé de
Molière
On verra aussi passer Marie, la femme de
Corneille.
Tour à tour, chacun exposant son point de vue, on va découvrir les aventures de celui dont le nom passé à la postérité restera
Molière, et de
Corneille son meilleur ami de plume ou son pire ennemi – c'est selon.
Le récit débute alors que le 21 février 1673, on enterre le célèbre « Farceur » qui a conquis du peuple jusqu'au roi Louis XIV en personne. Il revient d'outre-tombe pour nous raconter les dessous de son aventure, qui comporte beaucoup d'intrigues, de manipulations et autres arrangements pour survivre au 17ème siècle.
Si l'histoire de « L'Illustre Théâtre » (et de sa faillite rapide) et bien connue, on va apprendre comment s'est écrit « L'Ecole des femmes », « le Bourgeois Gentilhomme », mais aussi ses démêlées avec l'Eglise à propos de « Tartuffe » ou bien encore à la fin « Dom Juan ou le Festin de Pierre ».
Tout cela fait partie de notre patrimoine commun, et on en connaît plus ou moins la légende.
La thèse que défend
Eve de Castro, et qu'on ne dévoilera pas ici pour ne pas divulgâcher le plaisir des futurs lecteurs, est osée mais crédible.
Elle permettra de dépeindre les caractères de ceux qui en entouré Jean-Baptiste Poquelin, sa femme Madeleine qui l'a « accouché » de lui-même, ce Michel dit « le Petit » qu'il aime beaucoup, mais surtout il décrit une Armande plus rusée qu'il n'y paraît, élevée au couvent comme l'héroïne de « l'Ecole des femmes » et prête à tout ensuite pour parvenir à ses fins, guidée dans ses desseins par un mystérieux adorateur qui la manipule, à moins que ce ne soit elle qui manipule tout le monde …
D'une écriture très agréable et fluide et d'un rythme enlevé, l'histoire de déroule en une sorte de flash-back de la vie du grand homme, et c'est très bien construit.
Bien documenté, « l'autre
Molière » a le mérite de nous faire revivre les vicissitudes d'une troupe de théâtre qui cherche à plaire à tous mais qui en fâche beaucoup, qui vit du succès populaire mais doit faire face à la censure et à une Eglise redoutable, nous rappelant l'importance de la culture et de la liberté d'expression sur une planète qui ne le garantit pas partout, loin de là : n'oublions pas l'importance de nos artistes et de ceux qui ont fait la richesse de notre patrimoine théâtral, en ces périodes de remise en question généralisée.