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sur 223 notes
J'ai trouvé un jour dans ma boite à lettres, un pavé de 980 pages. Et dès l'ouverture, j'ai trouvé des dessins et des symboles de type zodiacal !
N'étant pas fan d'astrologie je me suis posé quelques questions.
Cependant, ayant obtenu ce livre suite à une proposition de Babelio et des Editions Buchet-Chastel et n'ayant jamais été déçu par les découvertes faites dans les opérations « masse critique » j'ai décidé de me lancer immédiatement dans l'aventure.

Le premier chapitre est un peu lent et tout à coup le rythme s'installe et on entre dans l'histoire d'une façon plus passionnée, sans ne plus lâcher l'ouvrage.

En 1866, en pleine ruée vers l'or dans l'ouest de la Nouvelle Zélande, un certain nombre d'ethnies (Maories, asiatiques, européens) cohabitent avec leur culture et leurs intérêts propres.
Walter Moody, un Anglais qui cherche fortune, arrive en ville et tombe au milieu d'une réunion de notables ce qui le conduit à découvrir une histoire qui occupe l'ensemble de la population :
Crosby Wells a été trouvé mort chez lui, et on y a découvert un trésor en pépites d'or.
Anna Wetherell, une prostituée est trouvée inanimée dans la rue comme si elle s'était suicidée à l'opium. En fait on soupçonne que l'opium aurait pu être empoisonné.
Lydia Wells débarque en ville et prétend qu'elle est mariée à Crosby Wells et réclame l'héritage, et l'annulation de la vente des biens déjà réalisée.
Charlie Frost, courtier, a touché une commission sur la vente qu'il a déjà dépensée.
Anna, avant de se réveiller, en prison, avec une robe « farcie » de pépites avait passé la nuit avec E. Staines, un riche prospecteur, disparu depuis.
Monsieur Souk, le marchand d'opium a reconnu en Francis Carver, capitaine d'un bateau échoué, quelqu'un qu'il s'était juré d'éliminer par vengeance.

L'énigme est posée.
On se trouve entre le polar, le roman historique, le récit d'aventure XIXème siècle et une sorte d'exercice de type oulipo.
L'auteur s'est imposé des contraintes comme une structure en spirale et la taille décroissante des chapitres, les interactions des personnages influencées par les planètes, le zodiaque, voire une sorte de destin.
De plus l'espace temps est sérieusement bousculé.

Ce livre est bien plus complexe qu'il n'y parait, il demande beaucoup de concentration, ne serait-ce que pour bien suivre l'histoire. Il est bâti comme une sorte de scenario, une suite de scènes plutôt visuelles avec des indications de jeux, partant du général et se recentrant vers la vérité.
En fait, on peut passer à côté de bien des choses.
On croit lire une histoire, découvrir une société et on est face à une interrogation philosophique sur les situations de déracinement, l'influence d'un sujet sur un autre, des planètes, du zodiaque sur les humains.
L'auteur a fait tout un travail de recherche sur la position des planètes associées à chacun de ses personnages au moment des faits, autant que sur des conditions de vie, dans ces contrées, à cette époque, sans toutefois se laisser enfermer par un purisme historique.

« Les Luminaires » est un livre fleuve extrêmement documenté même si l'auteur avoue quelques libertés prises avec l'histoire, très bien écrit, passionnant à lire, et dans lequel, l'auteur a voulu, selon elle, se prouver qu'elle pouvait dépasser ses talents reconnus d'écrivain tout en offrant à ses lecteurs une oeuvre consistante.
Qu'elle soit rassurée -s'il en était besoin- Elle nous offre un livre original, étonnant, travaillé, très nouveau, à découvrir impérativement.
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Merci à Babelio et aux éditions Buchet-Chastel d'avoir pu me faire bénéficier avec d'autres heureux élus de cette lecture en avant-première et de la rencontre avec Eleanor Catton à l'ambassade de Nouvelle-Zélande.
Je partage entièrement les critiques élogieuses qui on été écrites par de brillants Babeliotes sur «Les Luminaires» avant moi sur cet honorable site et serai donc succincte sur le pitch que d'autres ont très bien fait avant moi.
Nous voilà donc en 1866, sur cette belle terre de Nouvelle-Zélande et l'on débute nos aventures par la réunion de douze hommes bientôt rejoint par un treizième au fumoir d'un hôtel suite à une succession d'événements étranges survenus récemment dans leur petite ville d'Hokitika...
Alors oui, je partage l'avis général, c'est, en effet, une prouesse que d'avoir produit cet original opus littéraire placé sous un angle astrologique (dont je ne suis cependant pas vraiment certaine d'avoir pu cerner tout les tenants et aboutissants), dont chaque chapitre décroit de moitié par rapport au précédent (comme si ils suivaient une suite mathématique géométrique). Cela n'est donc pas sans nous donner un premier chapitre très long mais qui permet au rythme de vraiment s'accélérer dans le dernier tiers de nos aventures. Vers la page 400, le héros, Walter Moody fait une sorte de point sur ce qu'il a appris depuis son arrivée à Hokitika et cela nous apparait comme un résumé bienvenu car il est vrai que tant de témoignages, d'hypothèses, de sauts dans le temps, de points de vues différents en fonction des narrateurs peuvent parfois avoir dérouté le lecteur dans le premiers tiers du livre (en tout cas, ce fut mon cas). Tout cela est très bien rendu et certainement volontaire car ce grand tableau un peu flou au départ finit par devenir tout à fait net et l'on tourne les pages de plus en plus vite...
Oui, c'est également un grand roman d'aventures sur fond de ruée vers l'or, de disparitions mystérieuses (d'un homme comme d'une malle), de cupidité, de navires, de fumerie d'opium, de paysages magnifiques, de prostitution et, bien entendu de divers personnages, principalement des hommes.
Nous avons certainement un bon échantillon de l'humanité masculine de l'époque, l'aventurier venu chercher fortune bien sûr mais aussi l'homme de loi, le journaliste, le courtier, le trafiquant, le banquier, l'agent maritime, le proxénète, l'hôtelier, l'homme d'église, l'apothicaire, le maori dont on pille les terres, deux chinois improbables (à propos desquels Eleanor Catton nous a dit avoir pris un peu de liberté romanesque -et tant mieux- car ils n'étaient pas encore vraiment arrivés en Nouvelle-Zélande à ce moment là)...
Les personnages féminins sont en minorité comme cela a du être le cas à ce moment là de l'histoire de la Nouvelle-Zélande.
Il a été dit pendant notre entrevue à l'ambassade que ces femmes -elles sont deux- certes minoritaires, étaient des personnages cependant très forts.
Oui, ce sont des personnages forts dans l'intrigue car leur rôle est fondamental mais je dois dire que j'ai été un peu déçue par leur personnalité.
Eleanor Catton nous a confié qu'elle avait souhaité sortir des rôles classiquement attribués aux femmes dans les romans écrits surtout par les hommes au XIX eme siècle, à savoir des prostitués ou de pauvres femmes qui finissent par se suicider.
Ici, nous avons d'une part Lydia Wells Carver, belle, machiavélique et donc effectivement loin d'être effacée et d'autre part, Anna Wetherell, une prostituée, plutôt victime pour laquelle mon opinion a évolué favorablement vers la fin de l'ouvrage mais qui, à mon humble avis, n'est pas un personnage au caractère affirmé.
C'est mon (tout) petit bémol sur le livre et j'ai conscience de pouvoir apparaitre comme la féministe grincheuse de base en écrivant ces quelques lignes mais j'assume :-) Une héroïne plus conquérante et avec un peu plus d'épaisseur aurait été la bienvenue (Fiona Kidman, une compatriote d'Eleanor Catton a fait vivre un très beau personnage de femme à la même époque dans son «livre des secrets»).

Cette réserve mise à part, le roman reste remarquable et l'on se demande comment une si jeune femme (née en 1985) a pu construire un tel objet littéraire à qui l'on souhaite, bien évidemment, un beau succès de librairie.

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Tout d'abord, je veux remercier Babelio (et plus particulièrement Pierre Krause), les éditions Buchet/Chastel (et plus particulièrement Juliette Ponce) et l'Ambassade de Nouvelle-Zélande pour m'avoir permis de découvrir « Les Luminaires » et de rencontrer Eleanor Catton, son auteure. La liste des critiques et commentaires postés sur Babelio commençant sérieusement à s'allonger, je vais essayer d'être bref s'agissant d'un ouvrage de plus de 900 pages qui a obtenu le Man Booker Prize for Fiction 2013 et qui est aujourd'hui traduit dans une quinzaine de langues, dont le français.

Véritable tour de force par sa taille, ce roman raconte les aventures de Walter Moody, jeune britannique ruiné, décidé à faire fortune comme chercheur d'or en Nouvelle-Zélande au milieu du 19ème siècle. Walter accoste à Hokitika (un port que connait bien l'auteure puisque c'est là que s'est mariée sa soeur) après un voyage éprouvant, mais une étrange assemblée l'attend dans le petit hôtel où il trouve à se loger. Là, dans une atmosphère enfumée et tendue, douze hommes tiennent une réunion secrète pour tenter d'élucider des faits étranges qui agitent la communauté depuis plusieurs semaines : un riche notable a disparu, une prostituée a tenté de mettre fin à ses jours, et on a découvert dans la maison d'un pauvre ivrogne, mort lui aussi, une immense fortune ainsi qu'un testament partiellement signé et à moitié consumé. Walter est bien vite plongé dans un entrelacs d'intrigues et de destins vertigineux, et tente -comme vous- de débrouiller le vrai du faux.

Si vous aimez les structures complexes, vous serez servis : le livre est une suite ininterrompue de strates imbriquées, de rebondissements multiples, d'extorsions, d'usurpations d'identités, d'impostures, de fraudes, de contrebande, de coups et blessures, de complicités, de secrets liant femmes, maitresses, vrais et faux maris, de revirements de situations, de duplicités, de falsifications et de pistes qui aboutissent assez souvent à des impasses. Vous rencontrerez un fantôme sanglant logeant dans la cale d'un trois-mats et vous partirez à la recherche d'une malle contenant des robes dont la doublure contiendrait plusieurs centaines d'onces d'or natif, progressant dans votre enquête grâce à des indices glanés dans ce fumoir, au milieu d'une compagnie individus hétéroclites. Je vous souhaite bon courage car l'histoire est racontée et corrigée au fil des évènements par chacun des protagonistes !

Intrigue dense au rythme insistant, « Les Luminaires » c'est aussi une véritable histoire d'amitiés et d'amour, pleine d'émotions et de poésie (« l'âme après la mort ... » page 467), ainsi qu'à une richesse de détails de toutes sortes (sociaux, géographiques, techniques …), le tout sur fond de réalité historique et de fiction. Les personnages sont riches en couleur, mais, très humains, ils en viennent à douter parfois d'eux-mêmes ; les femmes tiennent une place de choix, l'auteure ayant pris le contre-pied des description traditionnelles de la femme du 19ème siècle. L'auteure fait preuve d'une grande maitrise de la narration et nous livre un écrit de poids, palpitant qui tient le lecteur en haleine jusqu'à la fin, jusqu'à un dénouement formidable d'invention, de calme et de grâce, surtout après le tumulte occasionné par cet amas inextricable d'embrouilles (« ça sent l'embrouille à plein nez » page 714). Trouvailles de l'auteure : Eleanor donne son point de vue, parfois avec malice, faisant faussement l'étonnée ou nous conduit sur une piste incertaine ; Eleanor fait des résumés introductifs à chaque chapitre, chapitres de longueur inégale dans le but de coller à la progression en spirale du récit ; Eleanor utilise des cartes astrologiques construites sous logiciel à partir des dates et lieux de naissance des protagonistes, ce qui confère un destin astral à chacun d'entre eux, à mi-chemin entre le déterminisme total et le libre arbitre ; Eleanor intègre dans son récit la traduction de propos tenus en Cantonnais et en langue Maori.

De ce monde en construction où tout est possible et où la nature est omniprésente (avec souvent les quatre saisons en une seule journée), de ce microcosme où l'homme, livré à lui-même doit rester humble et se lier avec autrui s'il veut survivre et être plus fort, l'auteure extirpe les constats qui suivent : nous sommes tous des êtres en relation les uns avec les autres, et cette relation aide chacun à se construire ; l'argent est une chimère qui empoisonne et emprisonne, la source de notre propre misère (cf. le cas de Mme Wells) ; chacun, quels que soient son parcours et les incidents éventuels qui l'auraient émaillé, a le droit à un (ou des) recommencement(s). Eleanor Catton, née en 1985, surtout connue pour son premier roman (2007) « La Répétition », signe avec « Les Luminaires » un conte merveilleux. Je mets 4 étoiles, et je recommande. Entre parenthèses, vous avez probablement entre les mains le scénario d'un film qui ne manquera pas de sortir dans les salles.
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Hokitika, nouvelle Zélande, 1866, une ville de chercheurs d'or, un climat désastreux, de la pluie et de la boue, une ville de tentes et de cabanes, du trafic d'or et d'opium, des aventuriers, des Maoris, des Asiatiques, une population mélangée, des luttes de pouvoir, de la convoitise et une énigme le 14 janvier : la mort de Crosbie Wells, la disparition d'Emery Staine, Anna retrouvée droguée et blessée sur la route de Christchurch, dans une robe cousue d'or, un bateau racheté dans des conditions louches, une veuve qui fait surface… Hasard, coïncidences, ou bien évènements liés entre eux par on ne sait quoi, de la conjonction des planètes, à des mobiles beaucoup plus terre à terre. L'auteur nous promène un peu dans les aventures et relations de nos personnages avec malice, en intervenant, en prenant le lecteur à témoin, en dilatant le temps : 400 pages de huis clos dans le fumoir d'un hôtel, ou en l'accélérant, en faisant des ellipses, des retours en arrière sur l'année qui précède, en raccourcissant les chapitres, en allongeant les titres.
Le choix d'Eleanor Catton, d'écrire comme un auteur du 19ème siècle, une très belle langue au demeurant, déclenche en nous le réflexe de nous intéresser à la résolution de l'intrigue, d'échafauder nos hypothèses de lecture, dans un récit que l'on suppose construit et linéaire, comme un roman de Jane Austen. Or plus celui-ci se développe dans la précision et les détails, plus il y a de digressions, plus les choses deviennent lointaines et compliquées. Ce qui est sûr, c'est le présent du moment de l'échange et de l'énonciation. C'est de relativité dont il s'agit, alors même que l'auteur joue sur le déterminisme du destin des hommes avec leur thème astral. On pourrait presque y voir aussi une réflexion sur le déracinement, lorsque Walter Moody contemple les cieux à la recherche de repères, car il ne voit pas l'étoile polaire.
Un roman complexe, presque crispant dont l'interprétation est très ouverte, une métaphore en presque mille pages sur l'impossibilité d'accéder à la vérité de ce qui est ou a été, une méditation presque métaphysique sur le sens de la vie, et le temps qui passe. Un roman qui interroge, et qui me laisse totalement pensive à l'heure où j'écris ces lignes. C'est gagné, elle ne m'a pas laissée indifférente, je suis déroutée et bousculée dans mes habitudes de lecture, c'est ce que j'attends d'un bon texte, une belle langue mais aussi un objet littéraire non encore identifié, de l'innovation et de la créativité....

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Surtout, lorsque vous serez face à ce pavé sur les tables des libraires, ne vous laissez pas décourager par son épaisseur, ce serait vraiment dommage. Dommage de passer à côté d'un véritable tour de force dont les pages transpirent le plaisir pris par l'auteure en l'écrivant. Plaisir qui se transmet progressivement au lecteur, de plus en plus heureux au gré de sa progression, alors que l'ingéniosité de la construction narrative provoque une connivence jouissive entre l'auteure et son lecteur.

J'ai eu la chance de découvrir ce livre en avant-première, grâce à une opération menée conjointement par le site Babelio, les éditions Buchet Chastel et l'ambassade de Nouvelle Zélande qui célèbrera en 2015, soixante-dix ans de relations culturelles avec la France. Chance également de rencontrer l'auteure, une jeune femme de 29 ans dont c'est déjà le second roman, couronné par le Man Booker Prize en 2013. La sortie officielle de la version française est prévue le 1er janvier 2015 et sa promotion bat son plein. Et croyez-moi, ce bouquin mérite vraiment de rencontrer un large public.

L'histoire prend place en 1866, en Nouvelle-Zélande, dans la ville de Hokitika, un port en plein développement grâce notamment à la ruée vers l'or. Douze hommes sont réunis au bar d'un hôtel dans lequel vient d'arriver Walter Moody, un jeune britannique venu comme la plupart des habitants de la ville chercher fortune, changer de vie et laisser son passé derrière lui. Ces hommes ne sont pas là par hasard. Deux semaines auparavant, plusieurs événements mystérieux se sont produits - Emery Staines, l'un des prospecteurs les plus chanceux a disparu et Anna Wetherell, une prostituée a été retrouvée inconsciente au beau milieu d'une route - et ils veulent mettre en commun les fragments d'informations détenus par chacun d'entre eux dans le but d'élucider ces mystères. Dans un pays encore neuf où se côtoient des émigrants de tous continents (chinois, français, anglo-saxons...), où chacun a ses secrets, son passé et pas mal de choses à cacher, mettre au jour la vérité ne va pas s'avérer très aisé.

"Messieurs - (le titre rendait, certes, un son étrange, appliqué à la compagnie hétéroclite réunie dans la salle) - j'affirme qu'il n'y a pas de vérité entière, il n'y a que des vérités pertinentes... Or la pertinence, vous en conviendrez, est toujours une affaire de perspective."

Il y a donc ces mystères à élucider, des disparitions en pagaille, de l'or qui se balade entre malles et coutures de robes, une usurpation d'identité, des "retours gagnants", des mensonges, des naufrages, des faux en écriture... Et voilà le lecteur embarqué dans ce qui tient autant de la chasse au trésor que du Cluedo, mâtiné d'astrologie. Chacun des personnages correspond à un élément astral, chacune des parties du livre à une date à laquelle est associée la carte des planètes dans les différents signes. Et l'intrigue avance en fonction des mouvements des planètes... Une façon originale et romantique de parler de destin ou de pré-destination.

Le roman est construit comme une spirale, un tourbillon qui s'affine au fur et à mesure des tours qu'il réalise sur lui-même. Chaque partie a un nombre de pages inférieur de moitié à celui de la précédente pour arriver à la dernière où, sur une simple page, l'ordre des événements de ce fameux 14 janvier 1866 est enfin reconstitué. D'où une impression d'accélération de l'intrigue après les deux-tiers du livre. A ce moment, le lecteur est déjà ferré, avide de connaître le fin mot de l'histoire, totalement accro à ces personnages dont la personnalité évolue sans cesse en fonction de la perspective depuis laquelle on les observe. Tout ceci servi par une belle écriture, dans la veine de celle des romanciers du 19ème siècle, ronde, précise, descriptive.

Plusieurs jours après avoir refermé ce livre, je suis encore sous le charme. Je parlais de tour de force en commençant cette chronique et c'est vraiment l'impression que laisse cette lecture. On est stupéfait autant que conquis par la dextérité de l'auteure. Heureux aussi d'avoir été jugé assez intelligent pour être invité à partager son jeu. Eleanor Catton aime créer. Et visiblement, elle aime ses lecteurs.

Un grand merci à Babelio et aux Editions Buchet Chastel pour cette magnifique découverte et à l'ambassade de Nouvelle Zélande qui nous a accueilli avec beaucoup de chaleur à l'occasion de la rencontre avec l'auteure.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Une brique de 980 pages en grand format, une montagne pour le lecteur… mais quand on songe à l'auteure, « respect » pour cet Himalaya d'écriture… Un défi qui nous amène dans la ruée vers l'or en Nouvelle-Zélande vers 1865-70.

Un jeune homme débarque au pays et est par hasard témoin d'une réunion secrète d'une douzaine d'hommes qui cherchent à élucider ce qui pourrait être un complot. Peu à peu, ils racontent l'affaire : un homme est mort dans sa cahute dans la campagne, un chercheur d'or a disparu, une femme a été trouvée inconsciente sur la route, des papiers compromettants auraient été échangés, des soupçons de trafic d'or et d'opium sont évoqués.

Un roman à l'intrigue complexe dans un décor dépaysant, mais le talent de l'auteure se trouve dans la qualité des personnages décrits avec beaucoup de précision. Les protagonistes sont nombreux et variés. Des hommes et des femmes, de provenances diverses, avec un passé et une psychologie qui explique leurs réactions.

L'auteure introduit des cartes du ciel qui montrent l'alignement des astres aux différents moments du roman. Personnellement, je n'ai pas accroché à cet aspect, j'ai trouvé cela décoratif, sans plus.

Une bien belle lecture, qui demande cependant un petit effort, pour entreprendre le voyage. Ensuite les pages se tournent sans effort autre que celui de manipuler le gros bouquin…
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La rencontre avec l'auteur des Luminaires, organisée par Babelio, l'éditeur et l'ambassade de Nouvelle-Zélande (que je remercie) a bien sûr changé la perception et la compréhension que j'avais de ce roman, mais pas seulement.

Bercé par la voix envoûtante d'Eleanor Catton, on découvre que l'histoire des chercheurs d'or néo-zélandais du XIXème siècle est, pour l'auteur, l'occasion de parler du pays où elle se sent un peu étrangère pour l'avoir quitté dans son enfance. Dans son récit, elle s'est volontairement détachée de la réalité factuelle et légale et dit privilégier son instinct, ses émotions et la beauté d'une nature où toutes les saisons peuvent émerger en un jour.

Comme un jeu intellectuel, Eleanor Catton s'est imposé une construction inventive et élaborée reposant sur l'astrologie. Et c'est en évoquant le déterminisme astral du caractère de ses personnages, qu'elle nous livre sa conception de la liberté et du libre arbitre : ceux qui pensent ne devoir leur réussite qu'à eux-mêmes, ignorent la part du hasard ou de la chance. le champ des mines n'est-il pas le meilleur endroit pour réfléchir à ce concept ?

Avec Les luminaires, Eleanor Catton est le plus jeune auteur à avoir reçu l'illustre Man Booker Prize. Les jurés ont récompensé une oeuvre originale, brillante et addictive.

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Si un livre de 500/600 pages mérite déjà le titre de roman fleuve, que dire d'un ouvrage comme Les luminaires qui frise le millier de pages ? Bouquin océan ? Un vrai tour de force en tous cas pour maintenir éveillé l'intérêt du lecteur, à l'instar d'un Vikram Seth (ce n'est qu'un exemple parmi d'autres) dans l'extraordinaire Un garçon convenable. Mais Eleanor Catton, après un premier livre déjà remarquable (La répétition), notamment de par son architecture, a les moyens de son ambition : la trame des Luminaires (Le soleil ou la lune en astrologie) est complexe, bâtie avec une maîtrise du rythme confondante. Lent au début, pour s'accélérer progressivement jusqu'à atteindre des vitesses affolantes dans ses toutes dernières pages. Qu'elle place son récit sous le(s) signe(s) du zodiac n'a qu'une importance relative et le lecteur réfractaire à l'astrologie peut laisser de côté cet habillage du roman quoiqu'on peut y trouver de quoi nourrir ses interrogations sur le poids du destin, des hasards et des coïncidences. On sera plus sensible au style, victorien, admirablement traduit, soit dit en passant. Une très belle langue qui chatoie et ruisselle dans une intrigue de roman feuilleton à rallonge tout à fait captivant, tableau vivant d'une micro-société (très intéressants sont les portraits des minorités étrangères à ce petit monde, chinois, maori, femmes, à contre-courant des clichés habituels). Un livre à intrigues multiples et à très nombreux personnages, lesquels se trouvent comme satellisés dans la petite ville néo-zélandaise de Hokitika, au temps de la ruée vers l'or. D'or et d'opium, Les luminaires tournent autour de ces deux ingrédients symboliques de la cupidité, de la faiblesse et de la bassesse, n'ayons pas peur des mots, de l'homme. Eleanor Catton s'amuse à jouer et faire rejouer des scènes, en variant les points de vue, comme le génial Kurosawa dans Rashomon, en distillant de nouvelles informations au compte-goutte. Il peut arriver de perdre le fil, d'autant que la romancière refuse toute linéarité, et de s'emmêler les pinceaux entre les personnages à la fois comploteurs, escrocs, fraudeurs, menteurs et ... victimes. Mais contre les vagues de cet océan, il est inutile de lutter. Eleanor Catton sait parfaitement où elle nous entraîne et le plaisir que l'on prend à la lecture n'est que plus grand si on se laisse emporter vers le large. Confiance en la romancière qui saura nous ramener sur la grève, trempé mais heureux après une telle aventure. Quelle équipée, mes aïeux !
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
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Avis mitigé.
Excellent ouvrage, captivant, dépaysant, complexe, foisonnant. A la fois roman victorien, récit d'aventure, chasse au trésor, polar et page d'histoire d'une contrée assez méconnue (ruée vers l'or en Nouvelle-Zélande à la fin du XIXe siècle).
Construit sous forme de récits multiples, l'intrigue se dessine patiemment au fil des pages comme un puzzle : les personnages décrits l'un après l'autre dévoilent leur personnalité et leurs secrets, les témoignages se succèdent, les points de vue se recoupent ou se confrontent et le passé remonte lentement à la surface.
Les Luminaires est un texte maîtrisé jusqu'à la moindre virgule. Et justement. C'est là que le bât blesse. La structure est tellement sophistiquée (chacun des personnages est associé à un élément astral qui influence sa nature et son comportement, chacune des parties du livre correspond à une date, l'intrigue avance en fonction des mouvements des planètes... et oui, Eleanor Catton a étudié de près le ciel néo-zélandais tel qu'il était en 1868 !), le rythme est tellement mathématique (chacune des parties du roman est deux fois plus courte que la précédente afin de donner une impression d'accélération et de spirale…), le style est tellement bien calqué sur le « roman victorien » qu'au final, l'ensemble perd toute son âme et ne suscite aucune émotion.
Je suis restée au bord du roman, sans jamais me faire véritablement happer. J'ai eu l'impression d'assister à un véritable tour de force qui, s'il ne peut que susciter l'admiration, provoque aussi l'agacement. C'est une performance, un défi, un calcul savant, mais l'ensemble reste très artificiel. Cela relève trop de l'excellent produit issu des cours de « creative writting » tels qu'on les donne dans les universités anglo-saxonnes : un récit bien écrit mais aux intrigues forcées dans une construction originale à tout prix.
Il lui manque quoi à Eleonor Catton ? Ce truc qui fait céder les digues et toucher l'essentiel. Une compassion pour ses personnages qu'elle n'arrive pas à transmettre. On a envie de lui dire de se lâcher un peu. Une pensée pour la traductrice Erika Abrams qui a du s'arracher les cheveux plus d'une fois sur ce texte….

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Merci Babelio, vous, Pierre Krause, merci les Editiions Buchet-Chastel pour cette rencontre ovnienne du nom de "Les Luminaires" !
Malgré l'épaisseur et la densité de l'ouvrage, son titre et sa couverture m'ont tapé dans le coeur.
Restait à voir si ce joli contenant allait m'offrir un contenu aussi savoureux...
Et la réponse est "oui", un grand "oui" !!!

Un style magnifique, à la fois littéraire, classique, riche, original, une construction élaborée, sensée, parfaitement adaptée à l'histoire elle-même, et enfin, l'histoire... pourtant tellement tellement difficile à gérer, "sur le papier", une thématique si emmêlée, de nombreux personnages qui s'entrecroisent, des allers-retours sur la ligne temporelle... le tout, dans les faits, parfaitement maîtrisés, sans incohérences, sans ajouts inutiles...
Je m'incline, devant tant de talent !!!

Qu'une si jeune femme puisse écrire un tel roman, si documenté, si mature dans l'écriture, sur un thème a priori plutôt masculin (la ruée vers l'or, et son milieu fortement tourné vers la gente "virile", ou prétendue telle), c'est juste très impressionnant !

J'ai appris une page d'Histoire, de l'intérieur, avec ses descriptions sur la vie, les lieux, les caractères de ce milieu du XIXème siècle néo-zélandais, dont j'ignorais tout, j'ai été intriguée, par ce suspens entretenu de bout en bout, j'ai été émue, par ses effluves romantiques, dispersées ça et là, j'ai été fascinée par l'écriture et la construction du texte, ...
Bref, un grand (et long !) moment de lecture, unique ne son genre, qui nous fait veiller tard...
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