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Manuel Tuñón de Lara (Éditeur scientifique)
EAN : 9782226000156
480 pages
Albin Michel (06/02/1974)
4.04/5   14 notes
Résumé :
La fête de San Camillo, patron de l'auteur et "des hôpitaux", tombe le 18 juillet, date à laquelle éclata, en 1936, la guerre civile espagnole. Se plaçant sous ce double signe, Camillo José Cela entreprend aujourd'hui d'écrire le roman des événements tragiques qui traumatisèrent à jamais ses contemporains. L'atmosphère des journées qui précédèrent la guerre d'Espagne, celle de la première semaine qui l'illustra, sont recréées ici par un témoin qui est aussi le plus ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« Como estas usted ? Moyen, pas fort, doucement ? » Je vous déconseille d'ouvrir ce livre.
« Au fond du trou ? » Alors foncez, vous verrez que votre situation pourrait être pire et ça vous aidera…peut-être. Engageant, n'est-ce-pas ?
Bien sûr, j'aurais pu vous « faire l'article » en vous rappelant que José Camilo Cela fut nobelisé en 1989, ou en vous disant qu'il raconte Madrid à cette période de sa vie où il eut vingt ans, ou bien que le 18 juillet 1936, première journée de la guerre, c'était aussi la fête de son saint patron Camilo qui est aussi celui des hôpitaux. Je devrais vous dire également que vous avez là une occasion de faire connaissance avec le tremendisme et le monologue intérieur.
Mais je me méfie. Des esprits chagrin pourraient relever qu'un Prix Nobel de littérature avec 28 livres à son actif et qui ne comptabilise que 28 critiques sur Babelio, c'est suspect, très suspect. Ca pourrait, comme en 1936, valoir condamnation sans autre forme de procès.
Alors soyons optimistes. Disons que vous avez répondu, comme moi (menteur !), « très bien, merci » à ma question inaugurale et nous voici partis : « on se regarde dans la glace et l'on tutoie son image avec un brin de familiarité.»
Un début difficile, déroutant, marqué par la vie ordinaire de gens ordinaires à travers le prisme du sexe, la plupart du temps tarifé, la pauvreté, la misère du quotidien et des sentiments.
Vous avez plusieurs fois envie de reposer ce livre, trop dur, trop lourd, trop indigeste, avec ses phrases interminables, longues comme un jour sans pain, et ses personnages abîmés, estropiés, résignés à une vie misérable. Des mouches, des cafards, des vers, puis des cadavres, ceux du lieutenant José Castillo et du député Calvo Sotelo d'abord puis les autres… Les enterrements, les discours, les cris, les représailles. Vous tournez encore quelques pages, vous persévérez sans trop savoir pourquoi, et puis enfin vous comprenez, à mi-parcours environ, que c'est le meilleur récit que vous ayez pu découvrir sur la guerre d'Espagne et au-delà sur une guerre civile. Vous voyez réellement comment cela se passe « sur le terrain » comme on dit ou au raz des pâquerettes comme on disait. Comment ça se passe quand on est dedans, qu'on est englué dans ses habitudes, son inertie et ses contraintes et qu'on ne peut y échapper. Un des personnages le dit : « Ma qualité de député me donne l'immunité parlementaire, et ensuite pourquoi fuir si je n'ai rien à me reprocher ? Non, je ne me cacherai pas car je ne suis pas un délinquant, je peux avoir mes idées mais je ne suis pas un délinquant.»
La guerre civile sans envolées lyriques, sans slogans, sans fanfares, l'absurdité, le hasard, la peur, les nouvelles contradictoires, les rumeurs, la vie qui continue (ou essaie), l'espoir d'être épargné car on n'a jamais pris parti. On a beau vouloir se tenir à l'écart des « événements », rien n'y fait, dans une guerre civile, personne n'est neutre. Vous êtes d'un camp ou de l'autre même si vous ne le savez pas, ne le croyez pas ou ne le voulez pas. Et si, par malheur, votre femme a la mauvaise idée de vouloir accoucher au-milieu de cette nuit tragique de la San Camilo 1936, ne foncez pas tête baissée dans la rue pour quérir la sage femme qui vit à trois rues de là. Vous n'y arriverez jamais, car un homme qui court dans la rue pendant une guerre civile a forcément quelque chose à se reprocher. Il ne verra jamais sa fille. A Madrid en 1936, cet homme en pyjama est forcément un fasciste qui mérite les deux balles qu'il a reçues dans le dos. A Burgos, ça devait être un bolchevique.
Dieu nous préserve d'une guerre civile !
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
L'oncle Jérôme a la mine soucieuse, nous sommes perdus mon garçon, on voit surgir, un peu partout de la graine de héros et c'est mauvais signe, très mauvais signe, il y a dans tout Espagnol un matamore qui sommeille, c'est une sorte de formule magique de repentir qui nous est parvenue à travers des siècles d'absurde oisiveté, oui, l'héroïsme est un mauvais signe, mon neveu, l'héroïsme gratuit est aussi contagieux que la vérole et une fois l'épidémie déclarée personne n'y échappe, les militaires se sont soulevés contre le gouvernement, c'est vrai, mais les ouvriers aussi, chacun invoque ses victimes et crie vengeance, c'est le conte de la bonne futaille qui finira par inonder de sang notre pays...
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Il n'y a que dans les fêtes foraines où l'on sache d'avance (une personne au moins, affirme-t-on) l'issue du combat, le résultat d'une lutte est en général aussi incertain que le tirage à pile ou face, au début tous pensent qu'ils vont gagner puis on s'aperçoit que tout le monde perd, plus ou moins selon le cas, mais tout le monde perd, la foi, l'espérance, la charité, la liberté, la décence, l'illusion et la vie...
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Les meilleurs stimulants du crime sont la nuit, le désir d'aventure, le messianisme, la honte qu'on remarque ta peur, la discipline servant de masque aux penchants les plus confus et le besoin de trop parler, ensuite, lorsque le coup est tiré et que le corps s'effondre, il est trop tard pour se repentir et faire marche arrière, il faut continuer, continuer sans tourner la tête, personne ne te permettrait de t'arrêter ni de te retourner, personne, ni tes amis ni tes ennemis, ni ceux de ta victime, quelques secondes durant, ne voyant pas d'autre issue, tu penses te supprimer, et puis tu t'en abstiens, ou tu le fais longtemps après si tes ennemis (ou tes amis) ne t'ont pas liquidé auparavant, tu ne peux désormais ni dormir ni oublier, tu as la bouche toujours sèche, tu es aveugle ou tu crains de le devenir, et tu sursautes en entendant le hurlement d'un chien ou la vrille patiente d'un charançon dans le bois de ton lit.
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Virtudes réveille son mari, Victoriano, oui, j'ai l'impression que la sarabande commence, quelle sarabande ? Comment, mais l'enfant, pardi ! Victoriano saute du lit, zut ! plus d'électricité, attends que j'aille appeler ta mère et la sage-femme...le téléphone ne fonctionne pas, on n'entend pas la moindre tonalité...Attends-moi, je vais les chercher, elles seront là dans une minute, tu verras, mais tu y vas dans cette tenue ? Aucune importance, il ne fait pas froid ! Victoriano dévale l'escalier et sort en courant dans la rue, au coin de la rue Torija on lui crie halte ! Halte toi-même, ducon, je n'ai pas le temps de plaisanter ! Halte ! Courez-lui après, c'est un fasciste ! Victoriano va leur dire allez vous faire foutre avec vos fascistes, moi je vais chercher une sage-femme pour mon épouse ! Il commence allez vous faire foutre et n'a pas le temps d'en dire plus long car deux coups de feu claquent l'un après l'autre, et il s'écroule en avant, frappé d'une balle dans le dos qui l'a probablement atteint au coeur et tué net, des gens s'attroupent auprès du cadavre, qui est-ce ? Un fasciste qui s'échappait de la caserne, allons donc ! Vous croyez que les fascistes s'échappent en pyjama ? Allez donc savoir, ils s'échappent comme ils peuvent ! Oui, vous avez peut-être raison !
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Oui, l'homme va à son travail pour la même raison qu'il supporte une femme jusqu'à sa mort, le même con domestique, les mêmes larmes domestiques, les mêmes reproches domestiques, acerbes et violents, les mêmes bruits, le rôt, le soupir, la vaisselle, les mêmes odeurs d'haleine et de sueur, l'inertie, de même que l'habitude, est trop tyrannique, elles se ressemblent presque et on ne saurait les distinguer, toutes deux débordent de menaces à l'encontre de ceux qui oseraient briser leur emprise.
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