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Evaluer un travail écrit n'est pas chose facile et encore moins une science exacte : un jour, un enseignant, à qui l'on reprochait une trop grande sévérité dans sa notation, attribua 16,64 à une copie qui ne le méritait pas. Intriguée, l'administration interrogea notre pédagogue qui répondit : ben, 16,64, c'est une Kronembourg et, franchement, ça vaut pas plus … Je vous affabule pas, les copains, c'est véridique ! C'est du vécu !
Les Bagatelles de Céline, d'après moi, ça vaut moins que ça. Je les décore avec munificence d'une demie étoile, c'est-à-dire 2 sur 20, mais c'est juste pour pas laisser croire que j'aurais oublié d'évaluer la chose. Je pense qu'une Kronembourg, même si c'est pas terrible, ça se boit quand même, et quand on a soif, ça peut même faire du bien, mais Bagatelles pour un massacre, c'est imbuvable (j'ai abandonné après 50 pages) et ça fait mal. Autrement dit, et pour aller droit au but, la chose n'est même pas commercialisable. Voilà, c'est dit.

Mais pourquoi diantre perds-je mon temps (et vous fais-je gaspiller le vôtre !) en vous badigeonnant de mes avis houblonnesques sur un bidule pas même avouable ? Je vais sûrement être un peu long et je vous prie de bien vouloir m'en excuser, mais voyez-vous l'auteur du machin me tient à coeur et la question de la réédition de ses pamphlets n'est pas anodine. Elle va encore agiter et partager le petit microcosme littéraire, depuis que la veuve de l'écrivain, détentrice des droits d'auteur, est décédée en novembre 2019.

N'en déplaise aux absolutistes des deux bords, il y a bien plusieurs Céline, tout comme nos histoires individuelles et collectives comportent des époques. Ce livre appartient au Céline infréquentable et pamphlétaire des années 1937 – 1941, faisant suite au fracassant et malchanceux Céline du début (Voyage au bout de la nuit et Mort à crédit, 1932-1936), avant le Céline reclus et pestiféré d'après-guerre (1944-1969). Céline y déverse sur plus de 300 pages toute une logorrhée antisémite accusant les Juifs de tous les maux, notamment celui de préparer une nouvelle guerre avec l'Allemagne. Par son milieu familial, petit bourgeois de droite, l'auteur avait « biberonné » à l'antisémitisme ambient des années 1930, encore tout empreintes de l'affaire Dreyfus, de l'opposition violente au Front Populaire dirigé par Léon Blum, un Juif (1936-1938) et du refus de la guerre qui revenait, quelques années seulement après le traumatisme de l'hécatombe 14-18. Il est important de le rappeler, ça n'excuse rien, évidemment, et ça aide à comprendre l'ambiance de l'époque. Rappelons aussi que ces pamphlets ont connu d'importants tirages à leur sortie.

Je vous épargne le « pitch » et les citations, vous les trouverez ailleurs, elles sont le plus souvent détestables, même s'il est possible d'extraire quelques bons mots et traits d'esprit.

Mais ne croyez pas que je roule pour les anti-Céliniens, pas du tout. J'ai même publié quelques avis élogieux sur cet auteur et je n'aime pas hurler avec les loups, prêts à jeter le bébé avec l'eau du bain. A les entendre, il faut tout rejeter puisque c'est le même homme qui a écrit romans et pamphlets. Les anti-Céliniens sont incapables d'admettre qu'un être humain puisse être grand et minable à la fois et qu'il soit capable du meilleur comme du pire. Ils sont légions, pourtant, les écrivains célèbres ayant commis bassesses et ignominies !

Ce dangereux esprit d'amalgame, qui diabolise l'auteur, aide aussi les idolâtres à sacraliser l'écrivain : il ne serait pas possible de faire la moindre distinction entre ses écrits, le génie de Céline se trouvant aussi dans ses pamphlets. Selon eux, il faudrait republier ces textes, même hautement contestables.

Ce total manque de discernement dans les périodes et les écrits, de la part des contempteurs comme des admirateurs, ne m'apparaît pas très intelligent. Il faut pourtant faire preuve de discernement car Céline n'est pas le monstre absolu qu'on nous rabâche et il est grand dans ses romans, quand il parle de lui, des Français, de la banlieue, de la nature humaine en général, de l'homme et de toutes les illusions dont il se berce au cours de son existence : il atteint l'universel. Il est drôle et tragique en même temps, il met le doigt là où ça nous fait mal, en nous renvoyant une image de nous-même déplaisante. Mais il parle vrai. Il « ne nous la joue pas » … Il est un authentique écrivain, avec un style révolutionnaire.

Mais le pamphlet, lui, est un sous-genre littéraire et Céline se change en pseudo-intellectuel : tout n'est alors que diatribes, répétitions, insultes. Les « bons mots » et les saillies peuvent parfois faire sourire mais ils sont au service d'un message criminel et condamnable. Bref, du sous Céline et c'est un comble, car il détestait et vilipendait les auteurs à « messaâge et manifesteu », comme il disait ! C'était un écorché vif, un émotionnel et sûrement pas un homme à idées. Ce rôle n'était pas pour lui.

Alors, les pamphlets peuvent très bien rester où ils sont, oubliés du grand public, et ne servir que de matériau aux historiens. Ils ont existé, ils ont eu un écho pendant les terribles années de l'Occupation mais ils n'ont rien à nous apporter. Ils ne peuvent que desservir le Céline écrivain.

Les Céliniens pur jus crieront à la censure, mais sacraliser une oeuvre pour aller jusqu'à admettre l'inadmissible, non merci. L'intérêt de republier de tels brûlots ne fait pas sens. Dans l'oeuvre de Céline, les pamphlets antisémites sont à part et doivent le rester. A part, c'est-à-dire en dehors. Comme des méfaits commis en parallèle à ses autres écrits, dont certains occupent une place de premier ordre dans la littérature française du XXe siècle.

En définitive, il n'est pas si difficile que ça de faire la part des choses avec Céline : presque tout est préférable à la lecture de ses pamphlets, même une bière bas de gamme !
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Il n'y a pas le Céline du Voyage, celui de Bagatelle et celui de la Trilogie.

Il y a un seul Céline qui est viscéralement raciste ce qui était non seulement commun à l'époque mais en plus exacerbé par ses connaissances de médecin.
Céline est raciste envers tout le monde, tout ce qui met en péril son monde de la banlieue parisienne, celui "des gens du bout de la semaine".
Il n'y a qu'a voir comment il traite ses meilleurs amis dans Féérie. de boiteux Gen Paul devient un tron-cul-de-jatte-chariot.

Mais ce Céline est aussi profondément humain; il aidera et soignera toujours son prochain quelle que soit son origine. Céline est lâche et il trés courageux, il est ignoble et humain.

Car Céline est avant tout un prophète, un prophète qui a des visions terribles qui déforment, amplifient. Et Céline a un style, terrible de légèreté.

"J'en raconterai de telles qu'ils reviendront après pour me tuer des quatre coins du monde". Avec Bagatelle il accomplie sa propre prophétie, il ira meme jusqu'a traverser l'allemagne en ruine pour aller au bout de son oeuvre.

Il est facile de condamner maintenant du fond de notre petit confort bourgeois. Ceux qui n'ont pas connu la Guerre de 14 et les tranchées ne peuvent juger l'homme, d'autres ont été Stalinien sans l'excuse d'avoir vécu l'horreur de 14... Et pourtant ils sont politiquement corrects.
Mais la grande différence c'est surtout que Céline est un génie, il n'y a rien a juger chez un génie.

Bagatelle, bien qu'inégal, contient des pages du meilleur Céline.
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Après avoir dévoré "Voyage au bout de la nuit" et "Mort à crédit", j'ai eu envie de m'intéresser un peu aux pamphlets de Céline si vivement critiqués. On reconnaît l'auteur dès les premières pages, avec son style et sa ponctuation si caractéristiques.

Après une courte intro où Céline présente deux pièces de ballet qu'il aurait écrites, on rentre tout de suite dans le vif du sujet : les Juifs. L'idée est assez simple : tous les maux que connait le monde en général, et la France en particulier, sont dûs aux juifs. Les arts sont dominés par eux, les critiques sont aux ordres des juifs qui dictent ce qu'aimera le peuple ; les juifs possèdent la plupart du capital et se soudent pour éliminer de la course ceux qui ne sont pas de leur "race". La presse, la politique, la médecine, sont aux mains des juifs. le communisme en URSS ? organisé par les juifs pour prendre le contrôle de la région tout en cachant leurs manigances derrière un chef charismatique. La seconde guerre mondiale qui s'annonce ? Les juifs, déçus d'avoir été expulsé des places financières de Berlin, qui poussent les autres peuples à aller se faire tuer à leur place pour les récupérer.

Tout ce qu'ils sont sensés avoir produit est régulièrement qualifié de "merde juive". Les juifs "enculent" les Aryens, et les "cocufient" pendant qu'ils meurent à la guerre pour eux. Si Céline tempère légèrement ses propos ("J'ai rien de spécial contre les Juifs en tant que juifs, je veux dire simplement truands comme tout le monde, bipèdes à la quête de leur soupe... Ils me gênent pas du tout. Un Juif ça vaut peut-être un Breton, sur le tas, à égalité, un Auvergnat, un franc-canaque, un "enfant de Marie"... C'est possible... Mais c'est contre le racisme juif que je me révolte, que je suis méchant, que je bouille, ça jusqu'au tréfonds de mon benouze !..."), il se contredit bien vite quelques pages plus loin ("Donc, tous les Juifs en première ligne! pas de billevesées, pas d'estouffades! et pendant toute la durée de la guerre! Aucun privilège admis. Les blessés juifs ne seront jamais évacués de la zone des armées... Ils crèveront s'il le faut dans la zone des armées... Ils féconderont la zone des armées. Il faut se méfier toujours des Juifs, même quand ils sont morts.").

Cette partie occupe à peu près le tiers du livre. L'auteur aborde ensuite des problèmes de société. L'alcoolisme, par exemple, que l'état laisse proliférer sans broncher, qui abrutit la France. Un parallèle est fait aussi entre la consommation croissante d'alcool et la diminution des fréquentation des bibliothèques et de l'espérance de vie. On aborde aussi l'appauvrissement de la culture (littérature, cinéma,...) et la soumission progressive de la France aux divertissements américains. Les juifs refont leur apparition régulièrement et sont accusés d'être la cause ou les complices de tous ces maux.

Céline parle aussi de l'URSS, de la pauvreté des gens (difficulté pour se vêtir et manger décemment), du mode de vie misérable : il décrit notamment une scène que je n'oublierai pas de sitôt dans un hôpital soviétique où un gynécologue examine une dizaine de patientes avec des instruments du siècle précédent, sans gants, et sans se laver les mains une seule fois.

Au final, qu'en penser ? Il me semble que ce genre d'ouvrage doit être lu au moins une fois pour prendre un peu mieux conscience du climat de l'époque. J'ai l'habitude de discours racistes plus retors, qui essaient d'argumenter leurs propos, et pas aux grands cris de haine de plusieurs centaines de page comme c'est le cas ici.
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Bagatelles pour un massacre conduit une charge d'une grande violence contre les juifs. le style accusatoire, agressif, elliptique qui forme l'oeuvre de Céline, donne ici à son antisémitisme une allure de réquisitoire implacable et d'appel au peuple à agir contre les juifs.

La logique de l'auteur est la suivante : le juif est par nature belliciste (« pousse-au-crime » et « mégalomani[aque] conquérant[] »). Ses desseins : anéantir le peuple chrétien (et/ou « aryen ») au moyen des deux complots ; le judéo-bolchévisme et le judéo-capitalisme (Marx contre Rothschild). de cet affrontement, selon Céline, une guerre mondiale éclatera et verra triompher les juifs contre les aryens, espèce déclinante. Il justifie la possibilité d'un tel complot par l'existence d'une élite mondiale (notamment franc-maçonne) travaillant à « l'impérialisme » et « l'hégémonie juive » (Protocoles des Sages de Sion). A ce titre Céline accuse les juifs d'être racistes.

Céline a beau s'excuser par avance : « J'ai rien de spécial contre les Juifs en tant que juifs, je veux dire simplement truands comme tout le monde, bipèdes à la quête de leur soupe... Ils me gênent pas du tout. (...) Mais c'est contre le racisme juif que je me révolte, que je suis méchant, que je bouille, ça jusqu'au tréfonds de mon benouze !... ». Ça ne tient pas à l'épreuve des pages.

Car au rebord de cette accusation de belliciste, une autre face de l'antisémitisme de Céline se dévoile ; une attaque viscérale, ontologique. le juif fossoyeur de la culture, le juif arrogants, dominateurs, despote, le juif dans le délire de persécution, de martyr, maître-chanteur qui « vaporise toute objection possible », le juif-envahisseur, juif-rôdeur « autour du pot-au-feu » de l'aryen, ou encore le juif laid, physiquement repoussant, le juif nègre, etc. L'attaque menée par Céline contre les juifs est multiple, profonde, totale.

On s'étonnera de voir Céline-géopoliticien ne faire aucune mention du diktat imposé à l'Allemagne, de la misère sociale du peuple allemand de 37, de la remilitarisation de la Rhénanie en 36 ou encore des velléités pangermanistes d'Hitler. Céline prédit une guerre des européens... sans les européens.

Bien péniblement, au milieu de ce galimatias, filtrent quelques épisodes qui rendent la lecture possible : l'écriture des ballets, les assemblées générales de la S.D.N., les hôpitaux en URSS, la critique littéraire et les écrivains contemporains, sa visite de Leningrad. Un épisode en particulier fait sourire : Céline attribue la crise du livre en France (les français sont ceux qui dépensent le moins pour les livres) aux records de consommation d'alcool en France (davantage que tous nos voisins). Céline fait ici un paralogisme sans conséquence, il agite sa marotte sur dix pages, et c'est divertissant de le suivre.

Dommage qu'il n'en soit pas resté à bricoler avec ses bouts de ficelles, et que son antisémitisme viscéral ait trouvé à se déverser lorsqu'il s'est penché sur les problèmes du monde, ou comment un homme farouchement opposé à la guerre a pu faire le lit d'un idéal de destruction humaine.
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Un livre que j'ai lu en ayant une vague idée quand même de ce qu'il était - étant un inconditionnel d'une partie de l'oeuvre de Celine - pour me faire ma propre opinion sur l'antisémitisme dont il a été accusé, et voir si cela pouvait être soumis à interprétation ? le constat implacable, c'est que ce pamphlet, car c'en est un sans l'ombre d'un doute, est réellement une incitation à la haine raciale, un amalgame honteux, un mélange de faits, de réalités, noyé dans un tissus d'idées préconçues, de raccourcis, de conclusions hâtives probablement dressé dans une volonté de propagande contre les juifs qui ne sont pas vraiment différenciés des non-blancs. Une lecture difficile, vraiment pénible et désagréable que je ne conseille à personne, pas même à ceux qui comme moi ne pouvaient pas imaginer que Celine soit allé aussi loin dans cette voie détestable de la haine.
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Titre : Céline , plus grand acteur du XXème siècle


Attention ce ne sont que mes interprétations de ces textes dont l'Ecole des cadavres , j'y crois vraiment ,  même complêtement , et en vrai , je suis même sûr à 100% ;  mais vous avez le droit de ne pas penser comme moi , car  Bablio étant un réseau social  démocratique , chacun a le droit à son opinion subjective et donc à l'erreur potentielle ;  donc si jamais j'ai tort  ( ce que je ne pense pas du tout d'ailleurs ) , le droit à l'erreur s'appliquerait aussi à cette critique.
J'ai lu des choses hallucinantes de stupidité sur les pamphlets de Céline , nottamment " comment un homme comme lui , d'une telle qualité , a-t-il pu tomber dans le panneau de la bêtise raciste et antisémite ? " et je pense que même quand les gens ont lus les pamphlets , ils ne les ont pas lu vraiment , dans le sens où ils ne les ont pas compris ; lire un grand livre , c'est à dire le comprendre , n'est pas accordé à tout le monde : et c'est en partie normal en revanche que les gens ne comprennent pas les pamphlets , ni leur démarche , et je vais essayer d'expliquer pourquoi.

Cette critique concerne l'Ecole des cadavres en premier lieu , mais peut se rattacher à d'autres pamphlets pour les situer dans leur unité complète , car j'avais lu les trois en pdf à la suite et parfois les extraits des uns et des autres se mélangaient et je me rapellais plus dans lequel se trouvait l'extrait auquel je pensais ,  et maintenant j'ai les textes  originaux des pamphlets ( dont un fac similé en revanche ) , en papier d'époque , donc je recommence ma lecture des pamphlets en version papier ce qui est une expérience de lecture sensiblement différente. Il me manque juste le texte papier de méa-culpa que je n'oublie pas du tout et auquel je repense en réalité très souvent et qui aura un fort écho dans les autres pamphlets.

Voici donc ma " critique " en question :

Céline est antisémite , tout le monde le dit , le crie , l'hurle : de gauche à droite , des antisémites aux intellectuels d'origine juive, des marginaux aux milieux universitaires , tout le monde s'accorde pour dire que Céline était un antisémite féroce.
Céline a écrit avec les pamphlets bagatelles pour un massacre , l'école des cadavres, et les beaux draps , une oeuvre voltairement cryptée , et scellée de mystère ; il le dit lui même " je m'occulte ".

Ce qui frappe à la lecture des pamphlets c'est d'abord leur côté hilarant , bouffons, burlesques et à mon avis sylistiquement et artistiquement géniaux.
Drieu la Rochelle dira de Céline que c'est un Léon Bloy sans dieu, ce qui est vrai , et c'est incroyable d'ailleurs de se dire qu'un athée à tellement de choses à dire qu'on en oublierait presque qu'il ne croit pas en dieu.
André Gide à fait une critique des pamphlets de Céline que je trouve excellente.
Il y dit que l'oeuvre est démesurée et délirante , volontairement provocatrice et humouristique , et que Céline ne croit pas à ce qu'il écrit et s'il y croyait, il serait un fou criminel.
Maurice Bardèche, un écrivain ouvertement fasciste et ami de Brasillach, dirà que Céline a déshonoré l'antisémitisme qui était le sien et son " combat " , comme l'a rappelé d'ailleurs Bernard-Henri-Lévy sur le plateau d'apostrophes de manière excellente : à savoir un antisémitisme classique , respectable , bourgeois, pseudo- rationaliste et qui se donne des manières de respectabilité et d'élégance : car maurice Bardèche était en effet aussi connu pour ses analyses et préfaces des romans De Balzac et de Flaubert , et d'une prose classique qui aurait pu faire de lui un académicien respecté s'il n'avait pas eu les opinions politiques qu'il avait eu.
Alors pourquoi Bardèche dit ça ; et pourquoi Bernard-Henri-Levy lui fout une route analytique monumentale ?
Tout simplement car Bardèche se rends compte que Céline tourne les antisémites en ridicule dans le pamphlets , en fait des caisses et des caisses et délire complètement , IL TOURNE L'ANTISÉMITISME EN DERISION ,  mais et c'est ici mon avis , s'il s'était contenté d'être ouvertement hostile aux antisémites , il aurait eu moins d'impact, serait apparu comme bien pensant , voir même le complice politique de tout un monde bourgeois , de gauche et abject d'hypocrisie , bref un monde qu'il ne partageait pas , en partie depuis méa-culpa et sa connaissance de la nullité de la S.D.N ; et qu'il n'avait jamais aimé , et qu'il satirise d'ailleurs dans les pamphlets à merveille en les éreintant violemment.
Céline est au sommet de son art , et on croirait du molière dans la satire du délire antisémite et raciste , et qui se montre comme tel dans les pamphlets.
Alors on me dirà " et les articles de Je suis partout ? " , et son exil à Sigmaringen ? , et le fait qu'il parle en son nom propre ?
C'est là que je trouve que l'affaire devient intéressante à mon avis ; car Céline était l'ami de l'acteur le vigan ( quai des brumes , goupi mains rouges , la banderas  ).
Céline, à mon avis ,décide donc de jouer un numéro d'acteur à son tour, son numéro d'acteur à lui , le numéro de l'antisémite raciste complêtement fêlé , et va mouiller et ridiculiser les antisémites de Je Suis Partout en les mouillant avec " son " racisme et antisémitisme délirant , les humiliant d'autant plus facilement qu'ils le croient sincère dans ses délires.

Céline veut se sacrifier pour la cause , mais à sa manière , en la rendant la plus réaliste et crédible possible , c'est à dire en faisant croire que lui même l'écrivain génial du siècle , l'auteur du bouleversant Voyage au bout de la nuit, y croit lui même , qu'il y adhère corps et âme le fou ! ,  car il est aussi masochiste , révélateur d'apocalypse , et christique.
Bardèche s'en rends compte du piège de l'acteur Céline et en vexé victime de la farce molièresque ne lui pardonne pas ; mais ne peut pas le dire car sinon il devrait admettre que lui , et ses amis fascistes ont été dupes ,  et il ne peut pas dire ce que Céline a fait , leur a fait , sans se faire cramer et ridiculiser encore plus ; donc il le dit à moitié et hypocritement car il est sincèrement antisémite Bardèche , en plus , contrairement à celui qui se foutait de leur gueule.

La démarche psychologique masochiste et sacrificielle de Céline était en gestation dans mort à Crédit d'ailleurs :

" Je pourrais moi dire toute ma haine. Je sais. Je le ferai plus tard s'ils ne reviennent pas. J'aime mieux raconter des histoires. J'en raconterai de telles qu'ils reviendront, exprès, pour me tuer, des quatre coins du monde. Alors ce sera fini et je serai bien content.“

Serait-ce le jeu d'acteur de Céline,  inspiré de le Vigan,  et son rôle de révélateur de l'antisémitisme et du racisme comme passion viscérale du genre humain qu'à découvert Robert brahmi un cardiologue juif qui connaissait très bien Céline et d'ont Céline disait à tous à propos de lui  " c'est le seul qui a compris mes pamphlets ! " dans le années 50 ;  comme le révélera Marc Edouard Nabe dans les rushes du documentaire du procès Céline diffusé sur Arte , qu'il a réussi par récupérer dans une super histoire racontée dans le monumental volume 2 de sa somme sur complotisme , " les Porcs " .
Xar Céline savait en observant le Vigan , que le " jeu d'acteur " d'un acteur , ne lui enlève rien quand il " joue " ;  il peut même y croire un peu pour être plus crédible car Céline ,dans les pamphlets ,donne libre cours à son imagination débordante. Si Céline a envie d'être méchant, il est méchant , s'il a envie d'être sadique, il est sadique ,  si il y croit un peu , sur certains points, il l'intègre dans le feu bouillant de son faux délire très bien maîtrisé, sur la forme comme sur le fonds : quand Céline s'oppose aux juifs qui veulent la guerre contre l'Allemagne , il y croit , et c'est un désaccord politique légitime à l'époque , et une prise de position dans le cadre de la guerre qui a du sens et est digne d'un vrai débat , alors comme il y croit , pourquoi ne pas le happer dans un délire plus vaste pour crédibiliser son délire qu'il sait comme tel puisqu'il est au sommet de son art littéraire et que cet art est très bien maîtrisé , intentionnel et conscient ?
Ce qui me fait dire aussi tout ça , c'est le personnage du " pote " Gutman dans Bagatelles.
Non seulement Gutman a le bon rôle, mais c'est un vrai personnage. Par exemple il apparaît comme gentil avec ferdinand, calme et rationnel , il se soucie de lui ,  il est super gentil avec ferdinand , le calme même dans son délire et s'en prends plein le gueule par un type qui apparaît comme abject , jaloux , frustré et méchant de ne pas pouvoir réaliser une pièce de théâtre irréalisable, et ça semble triste pour Gutman , tragique , et même on se dit pauvre Gutman il mérite pas ça ce ferdiand quel cinglé , quel malade mental , quel salaud ! Car Il est vraiment méchant alors que Gutman a tout fait pour encourager ce fou furieux !
La structure de Bagatelles d'ailleurs est romanesque et quand Philippe Muray dans son essai sur Céline dit qu'il n'y a pas de personnages juifs chez Céline car Céline ne peut pas " humaniser " un juif , c'est vraiment un pauvre con ce Philippe Muray ! Car Gutman est un grand personnage juif et un grand personnage Célinien , dans Bagatelles, qui est un quasi roman de Céline ( c'est en fait à 90 % le monologue de Ferdiand ).

Céline ne dira à personne qu'il joue un rôle, pour être le plus efficace possible dans sa démarche satirique ; par exemple , Lucien Rebatet racontera dans le cahier de l'Herne de Dominique de Roux qui est consacré que Céline , que à l'institut d'études des questions juives je crois , Céline ira écouter ces conférences de propagande délirante antisémite , bien chiantes je pense en plus ! : et bien caché au fonds de la salle criera -"  un juif ! Là ! un juif dans la salle  ! " Et il créera une énorme bagarre dans la salle ; il dira aux Allemands nazis etc en Allemagne " vous allez perdre ! Hitler lui même est juif ! ".
C'était un immense humouriste ; d'autant plus immense et drôle que son génie et son " rôle " le faisait passer pour fou !
Alors que tout est génialement chorégraphique dans ses pamphlets, nottamment les beaux-draps et sa fin bouleversante,  comme une svelte danseuse en même temps qu'un clown apocalyptique dans son écriture maîtrisée magnifiquement.

Céline voulait surpasser le Vigan , car lui il jouerait si bien , en ferait tellement , que personne , ou presque , ne s'apercevrait qu'il jouait pour de faux !

J'ai l'impression que Céline se disait  :

" Je vais faire croire que je suis con et suis fou et comme vous êtes cons et fous , vous les antisémites racistes, et les humains en général , vous ne reconnaîtrez même pas votre propre folie , le miroir que je vous tends , et votre propre connerie , et croirez que c'est moi qui suis con et fou.
Vous n'avez rien compris à mes livres, ni à ma vie , ni à mon combat , et ce sera ainsi votre punition de ne rien comprendre , car moi qui suis médecin , je peux vous guérir mais vous ne voulez pas guérir ! , et ainsi , en vous défaussant sur moi ,  vous ne guerirez jamais !
Vous ne guérirez jamais , et je vous déteste , et  je vous hais , et c'est ainsi que ça se déroulera , car c'est ainsi que je le souhaite ; je suis un christ à l'envers que ma volonté soit faite ! "

Pour moi Celine , contraiment à ce que disent pratiquement tous les podcasts de pseudos intellos faussement raffinés du genre "france-cul-turesques " ( que j'écoute quand même pour bien rigoler et réfléchir à l'envers ) , n'est pas du tout en rupture avec le mouvement de lumières mais au contraire le parachève , dans une boule de lumière qui éblouit intentionnellement et délibérément les cons qu'il doit aveugler - à vie ? - car Céline , en raffiné , pratique la chasse aux cons.
" et c'est ainsi qu'Allah est grand ! " comme dirait Vialatte.
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Suite à son voyage en URSS (afin de découvrir sur le terrain ce qu'était vraiment le communisme), Céline s'est découvert, avec le succès de la publication de « Mea culpa », un talent formidable de pamphlétaire et il en usera jusqu'à l'usure, tant qu'il y aura des lecteurs pour acheter ce genre de publication.

Comme de nombreuses personnes en 1937, Céline a la certitude que les juifs veulent pousser la France à déclarer la guerre à l'Allemagne, alors donc c'est afin d'éviter un nouveau bain de sang, comme en 1914, qu'il se décidera à rédiger son premier pamphlet officiel.

Il s'agit avant tout d'un patchwork disparate de textes traitant de diverses sujets.
Il commencera par narrer comment il essaya sans succès de placer trois textes pour des ballets et en imputant (forcément) la faute aux juifs, il racontera lorsqu'il travaillait à la SDN en compagnie de Yubelblat, sa visite dans un hôpital des maladies vénériennes en URSS, l'alcoolisme en France, ses confrères écrivains etc...

Les pages où il crache véhémentement sa haine anti-juive sont les moins intéressantes du livre et sont tellement caricaturales qu'on en vient à se poser des questions. Est-il en train de singer les antisémites ? Est-il sincère ? Ou est-ce tout simplement fait dans un but purement vénal ?Le doute subsiste quant à ses véritables motivations, il existe tellement d'ambiguïtés et d'ambivalences sur le personnage !

Quand on lit ces passages-ci, où il invective avec fureur et fracas tous les juifs, il me fait penser à un vieux sénile, gâteux, éructant des insanités antisémites. Chez Céline, l'antisémitisme est pathologique, viscérale, délirant, c'est en fin de compte l'ivresse dionysiaque dont parlait Nietzsche. il porte en bandoulière cette cause qui lui fera énormément de tort lorsque la guerre prendra fin même s'il jouera au persécuté jusqu'au bout, la mauvaise foi étant chez lui presque une seconde nature.

Mais ce qui est dommage, c'est qu'il avait le matériel nécessaire pour écrire un tout autre livre. En omettant toutes les parties scandaleuses, on se retrouve avec quelque chose de vraiment très intéressant.
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Livre absolument détestable et tout aussi grave, sans le moindre intérêt.
Enfin, il faut attendre les quelques dizaines de dernières pages pour que la magie opère lorsque Céline parle de la danse et des danseuses.
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Ce livre est à la fois remarquable et abject. Remarquable car il contient probablement les plus belles lignes de littérature française du XXe siècle, comme la description de Saint-Pétersbourg. Les commentaires sur le communisme et sur l'alcoolisme sont extraordinaires, et toujours d'actualité. À côté de ça, il y a bien sûr la haine antisémite complètement abjecte et qui est vraiment difficilement lisible.
Que retenir de tout cela : c'est toujours difficile de critiquer quelqu'un qui a vécu à une époque autre que la nôtre, une époque où tout le monde était antisémite une époque que l'on ne comprendra jamais. Céline était antisémite, mais à côté de cela, son oeuvre l'a montré, c'était quelqu'un de très humain qui n'aurait jamais fait de mal à une mouche.
D'une façon générale, si on devait appliquer une quelconque morale restrictive aux artistes, je pense qu'il ne resterait pas grand monde.
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pamphlet antisémite totalement abject......
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