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sur 9706 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
LE CAS CÉLINE : cela fait un bout de temps que je médite d'écrire un petit billet qui risque fort d'être extrêmement controversé, mal vu ou mal interprété. Mais, comme il n'est pas interdit ni exclu d'être parfois courageuse en ce bas monde, je prends sur moi d'assumer toute la hargne ou le mépris qu'il pourrait susciter.

J'ai déjà presque failli me brouiller avec l'un de mes meilleurs amis à ce propos, un soir de réveillon de Noël, plombant durablement l'ambiance et avec lequel il m'a fallu plusieurs longs mois pour reparler littérature. Sachant que depuis, nous évitons l'un l'autre, soigneusement et tacitement de nous approcher de près ou de loin du cas Céline.

Question : Peut-on être considéré comme le plus grand écrivain français du XXème siècle quand on a, non seulement tenu des propos, mais aussi et surtout, publié des propos fortement injurieux, racistes, xénophobes, homophobes et très accablants d'antisémitisme ?

Cette question n'est pas encore tranchée et nul ne sait aujourd'hui si elle le sera un jour de façon consensuelle. le malaise du ministère de la culture au moment du cinquantenaire de la mort de Céline est là pour l'attester.

(Même si l'état français via la BNF a quand même lâché pas moins de 12 millions en 2001 pour racheter le manuscrit. Je doute qu'il se montrerait aussi large pour sauver de l'oubli les premières culottes de Françoise Sagan ou les chaussettes à D'Ormesson, donc en soi, ça veut quand même dire un peu quelque chose.)

Il nous faut donc nous replier sur des solutions individuelles, locales, idiosyncrasiques et donc fortement teintées de subjectivité pour tâcher, bien modestement, d'y trouver notre propre réponse.

Puisque nous parlons ici du Voyage Au Bout de la Nuit, faut-il boycotter cette oeuvre en raison de ce que l'on sait de son auteur ou lire cette oeuvre comme une émanation indépendante d'une personne certes méprisable mais dont, dans un moment de génie, la plume a su sortir une forme de quintessence littéraire ?

En ce qui me concerne, ni l'un ni l'autre. Une oeuvre n'est jamais complètement indépendante de la main qui lui a donné le jour, mais dans le même temps, on peut saluer la réalisation sans adhérer à d'autres réalisations du même bonhomme.

Je vais risquer un parallèle hasardeux. A-t-on le droit de considérer Napoléon comme le plus grand chef d'état français de tous les temps en dépit de son triste palmarès de boucher en chef et de ré instigateur de l'esclavage ?

En ce qui me concerne, sans problème. Napoléon a fait plus et mieux que n'importe quel roi ou chef d'état en poste avant ou après lui en ce qui concerne la modernisation du pays et l'émancipation du droit ou des citoyens d'humble extraction.

Mais dans le même temps, je lui décerne également le prix du plus grand bourreau de l'histoire de France et je l'affuble du plus abject bonnet de calculateur et de bafoueur des droits de l'homme de son temps.

Considérer l'homme, c'est le considérer dans son entier, dans ses lumières et dans ses côtés sombres. Il n'est ni un dieu, ni un chien. Il est probablement quelque part entre les deux, ayant été capable de monter très haut dans certains domaines et de descendre très bas, bien plus bas que le commun des mortels, dans d'autres. Nul n'est monolithique et les grands hommes moins que d'autres.

Revenons à l'ouvrage qui nous occupe. Pour ma part, je considère qu'il serait dommage (voire dommageable) de ne pas le lire sous le seul prétexte qu'il a été écrit par Céline. Un restant d'épicurisme me pousse à prendre les bonnes choses là où elles sont. Mais dans le même temps, je considère qu'il serait tout aussi dommage et dommageable de faire « comme si » Céline n'avait jamais été ce qu'il a été et je vais argumenter ce dernier point.

D'où provient l'antisémitisme flagrant de Céline ? de plusieurs raisons qu'il serait long et fastidieux d'égrener ici, mais d'une plus particulièrement : son refus de la guerre. On lit très clairement et très distinctement dans le Voyage que Céline a été écoeuré, bouffé, brisé à jamais par les horreurs qu'il a vécues pendant la guerre de 1914. C'est strictement dit dans ce livre et je pense qu'il ne fait pas tellement débat que Céline se place clairement du côté des pacifistes acharnés.

Replaçons-nous dans le contexte historique, social et politique où Céline a écrit son premier pamphlet antisémite. La Révolution russe et le spectre bolchevik où des Juifs (notamment Trotski) ont joué un grand rôle et continuent de croire fermement à l'internationale communiste. Plus proche de nous, Hitler est monté au pouvoir en Allemagne, il a commencé à s'en prendre aux Juifs. Que se passe-t-il en France pendant ce temps et dont Céline est le témoin ?

Les restes de la crise de 1929, celle qui a mis à genoux le monde, toujours pas complètement épongés, avec le lourd fardeau de soupçons sur certains banquiers juifs américains. En France, Léon Blum au pouvoir, un afflux massif de réfugiés juifs fuyant le nazisme, bref, un terreau idéal pour ressortir les bonnes vieilles théories racistes et antisémites — un grand classique dans l'histoire de l'Europe —, qu'on revoit éclore à chaque épidémie de peste ou à chaque période de crise profonde et qui ont le vent en poupe à ce moment-là.

Sans oublier les bruits, réels ou supposés, relatifs aux pressions exercées par des lobbys juifs français pour pousser Paris à entrer en guerre contre Berlin. le but recherché par les lobbys juifs serait, d'après ceux qui pensent comme Céline, évident : virer Hitler et ainsi redonner un peu de souffle à une communauté fortement lynchée outre-Rhin.

(Michel Dreyfus montre assez bien, je trouve, l'opposition, la ligne de fracture qui existait à l'époque entre les antifascistes d'une part, et les pacifistes d'autre part. Les premiers n'excluant pas le recours à la force pour faire plier le fascisme. Voir son article intitulé " le pacifisme, vecteur de l'antisémitisme à gauche dans les années 1930 ", accessible sur le lien suivant :
http://www.cairn.info/zen.php?ID_ARTICLE=AJ_431_0054)

Dans la tête de Céline, en revanche, le spectre de telles manoeuvres souterraines " des Juifs " (appellation vague et générique, commode car fourre-tout, qui mouille tout le monde au nom de quelques-uns) visant à l'entrée en guerre de la France vont concourir pour lui à la pire chose qui soit : LA GUERRE. Toutes ses images de 14-18 lui remontent au cerveau et du coup, son ennemi intime devient LE peuple juif, dans son entier, sans une ombre de nuance. C'est son interprétation de la situation et elle est méprisable.

Donc le pro-pacifisme affiché de Céline dans le Voyage et qui souvent ne rebute personne me semble pourtant une cause essentielle, et peut-être même première, de ses prises de position ultérieures et que tout le monde dénonce.

Alors oui, Céline a écrit certaines des plus abjectes saloperies qui aient jamais été écrites en français sur les Juifs, mais oui également, il a écrit l'un des plus fantastiques bouquins de tous les temps. Céline est tout ça. Ni seulement antisémite, xénophobe et homophobe répugnant, ni seulement écrivain génial, juste un homme, tout simplement, avec ses qualités et ses travers, avec son bon sens, par moments, et ses interprétations inacceptables à d'autres, avec sa plume luminescente, comme ici, et avec ses écrits insoutenables et intolérables, les pamphlets des années 1930, qu'il n'a jamais renié jusqu'à sa mort. Je pense même que c'est par opportunisme et parce que le vent avait tourné qu'il n'a pas produit d'autres de ses torchons infâmes après guerre.

J'en terminerai seulement en affirmant que, oui, cet homme était complexe et très choquant, dangereux, méprisant, provocant, haineux, fielleux, méprisant, imbu de lui-même, abject et grossier par moments, mais oui il était aussi très sensible, ultra lucide, incroyablement raffiné, intelligent, perspicace à d'autres et c'est justement cette complexité et ce tutoiement constant de la limite (parfois en dedans, parfois largement au-delà du supportable) qui rendent son oeuvre, malgré tout, si intéressante.

Au passage, je rappelle aux quelques matheux qui nous entourent qu'on utilise tous les jours le coefficient de Pearson ou les droites de régression (rien que le nom en dit long !), tous ces outils mathématiques et statistiques ayant été mis au point par des notoires antisémites pour " justifier " l'infériorité et la dégénérescence supposée de la " race " juive. Cela n'empêche nullement de considérer ces outils comme de bons outils mathématiques même si les motivations de leurs auteurs ou l'emploi premier qui en fut fait a depuis longtemps été dénoncé et mis au placard.

Et le livre là-dedans ?

Fantastique ! Au creux des cimes, au sommet des abysses, il y a toujours dans mes rêves littéraires quelque chose en moi qui me pousse à quêter, à fouiner, à déterrer pour retrouver une ombre, une parcelle, un pastiche, quoi que ce soit d'approchant, de faiblement comparable à ce verbe, à cette vigueur, à cette écorchure, à cette pourriture, à cette brillance-là.

Je n'ai pas relu "Le voyage" récemment et je puis donc témoigner en toute subjectivité sur le lent travail de ver dans le fruit qu'a accompli cette oeuvre dans mon cerveau, sur ce souvenir impérissable et qui croît au cours du temps. Je ne me rappelle pas avoir jamais relu depuis un quelconque ouvrage (même les autres bouquins de Céline) qui m'ait autant laissé une impression de puissance littéraire et "d'éclatement à la gueule".

Quand bien même vous ne goûteriez rien du scénario, vous détesteriez l'homme et sa réputation hideuse, sulfureuse, vous seriez presque à coup sûr fasciné par l'incomparable style de l'auteur. Ou en fait, non ; tous comptes faits, non. C'est tellement typé que ça ne peut nécessairement pas plaire à tout le monde : seuls les écrits consensuels (et plutôt insipides) conviennent au plus grand nombre. La Vache Qui Rit, presque tout le monde peut en manger, par contre un vieux fromage féroce qui coule, ça n'est pas forcément du goût de tous… et il n'y a pas à s'en étonner.

Céline est grinçant, cinglant, cynique, cruel, déprimant, rebutant mais c'est surtout un faramineux faiseur de phrases, capable de dégager une puissance incalculable des mots.
Comment expliquer Céline ? À la fois mélange de prose violente et de lyrisme morbide, à la fois désabusé et lucide, à la fois horrible et magnifique.

Son style peut être imitable, mais sûrement pas égalable. Il me semble d'ailleurs fort amusant, comme un singulier pied de nez de l'histoire, que le seul auteur francophone contemporain qui puisse être tant soit peu de la carrure de l'antisémite Céline quant au style soit le juif archétypal, le plus juif d'entre tous, le luminescent Albert Cohen.

Louis-Ferdinand Destouches, alias Céline était toujours très discret sur ses influences littéraires, (Crime et Châtiment, Henri Barbusse, quelques chroniques historiques…) mais, au détour d'une ou deux remarques laissées ici ou là, il avoue à demis mots qu'il se situe dans la lignée de Zola, — aussi étonnant que cela puisse paraître quant aux convictions de l'un et de l'autre — probablement pas n'importe quel Zola, celui de la fin de L'Assommoir, dont le style est si particulier, même pour du Zola.

Le style, (peut-être aurait-il mis une majuscule au mot style, tellement il le tenait en haute estime, dans la lignée très franco-française matérialisée fort tôt par Bossuet dans ses sermons, par La Bruyère et ses Caractères ou Buffon dans son célèbre Discours Sur le Style, laquelle lignée qui depuis les germes semés par Rabelais fleurira les Voltaire, les Laclos, les Balzac, les Stendhal, les Hugo, les Dumas, les Flaubert, les Baudelaire, les Zola, les Rostand, et que sais-je encore ?, les Gide, les Proust , les Camus, les Butor, les Gracq ou les Gary) semble être le véritable fil conducteur des romans de Céline.

Le voyage plus que la destination, comme aurait dit Kerouac, et en ce sens, je pense qu'il en est et demeure le plus grand orfèvre français, voire mondial (mais les armes pour juger d'une telle assertion, sont délicates à maîtriser car il faudrait lire toute la littérature en V.O., or j'ai un peu de mal avec le finnois, l'albanais, le japonais et même un peu le swahili !).

En une phrase, le héros Bardamu fait son voyage initiatique "en négatif", celui qui l'amènera dans un trou perdu à exercer la médecine parmi la populace, après avoir essuyé les ricochets de la guerre, la sueur des colonies d'Afrique, les boulons des usines américaines aux cadences infernales, l'amour avorté, bref, la définition même du "voyage au bout de la nuit".

Mais c'est très mauvais, n'est-ce pas, ça ne donne pas vraiment idée de la chose. Alors, le mieux, c'est sûrement de laisser monsieur Céline lui même vous parler de ce qu'il en est. (C'est un extrait de sa lettre d'accompagnement du manuscrit à Gallimard, lequel Gallimard qui, ayant le nez creux, l'a refusé puis s'en est mordu les olives juste aussitôt.)

« En fait ce Voyage au bout de la nuit est un récit romancé, dans une forme assez singulière et dont je ne vois pas beaucoup d'exemples dans la littérature en général. Je ne l'ai pas voulu ainsi. C'est ainsi. Il s'agit d'une manière de symphonie littéraire, émotive plutôt que d'un véritable roman. L'écueil du genre c'est l'ennui. Je ne crois pas que mon machin soit ennuyeux. Au point de vue émotif ce récit est assez voisin de ce qu'on obtient ou devrait obtenir avec de la musique. Cela se tient sans cesse aux confins des émotions et des mots, des représentations pieuses, sauf aux moments d'accents, eux impitoyablement précis.
D'où quantité de diversions qui entrent peu à peu dans le thème et le font chanter finalement comme en composition musicale. Tout cela demeure fort prétentieux et mieux que ridicule si le travail est raté. À vous d'en juger. Pour moi c'est réussi. C'est ainsi que je sens les gens et les choses. Tant pis pour eux.
L'intrigue est à la fois complexe et simplette. Elle appartient aussi au genre Opéra. (Ce n'est pas une référence !) C'est de la grande fresque du populisme lyrique, du communisme avec une âme, coquin donc, vivant.
Le récit commence Place Clichy, au début de la guerre, et finit quinze ans plus tard à la fête de Clichy. 700 pages de voyages à travers le monde, les hommes et la nuit, et l'amour, l'amour surtout que je traque, abîme, et qui ressort de là, pénible, dégonflé, vaincu... du crime, du délire, du dostoïevskysme, il y a de tout dans mon machin, pour s'instruire et pour s'amuser.
Les faits.
Robinson mon ami, vaguement ouvrier, part à la guerre, (je pense la guerre à sa place) il se défile des batailles on ne sait trop comment... Il passe en Afrique Tropicale... puis en Amérique... descriptions... descriptions... sensations... Partout, toujours il n'est pas à son aise (romantisme, mal du XXIè siècle ) Il revient en France, vaseux... Il en a marre de voyager, d'être exploité partout et de crever d'inhibitions et de faim. C'est un prolétaire moderne. Il va se décider à estourbir une vieille dame pour une fois pour toutes posséder un petit capital, c'est-à-dire un début de liberté. Il la rate la vieille dame une première fois. Il se blesse. Il s'aveugle temporairement. Comme la famille de la vieille dame était de mèche, on les envoie ensemble dans le midi pour éteindre l'affaire. C'est même la vieille qui le soigne à présent. Ils font dans le midi ensemble un drôle de commerce. Ils montrent des momies dans une cave (Ça rapporte). Robinson recommence à voir clair. Il se fiance aussi avec une jeune fille de Toulouse. Il va tomber dans la vie régulière. Pour que la vie soye tout à fait régulière il faut encore un petit capital. Alors cette fois encore l'idée lui revient de buter la vieille dame. Et cette fois il ne la rate pas. Elle est bien morte. Ils vont donc hériter lui et sa future femme. C'est le bonheur bourgeois qui s'annonce. Mais quelque chose le retient de s'installer dans le bonheur bourgeois, dans l'amour et la sécurité matérielle. Quelque chose ! Ah ! Ah ! C'est tout le roman ce quelque chose ! Attention ! Il fuit sa fiancée et le bonheur. Elle le relance. Elle lui fait des scènes, scènes sur scènes. Des scènes de jalousie. Elle est la femme de toujours devant un homme nouveau... Elle le tue... »

Il me reste encore à vous donner un extrait de l'oeuvre elle-même qui, selon moi, en est très représentatif et que voici :

« J'avais beau me retourner et me retourner encore sur le petit plumard je ne pouvais accrocher le plus petit bout de sommeil. Même à se masturber dans ces cas-là on n'éprouve ni réconfort, ni distraction. Alors c'est le vrai désespoir.
Ce qui est pire c'est qu'on se demande comment le lendemain on trouvera assez de forces pour continuer à faire ce qu'on a fait la veille et depuis déjà tellement trop longtemps, où on trouvera la force pour ces démarches imbéciles, ces mille projets qui n'aboutissent à rien, ces tentatives pour sortir de l'accablante nécessité, tentatives qui toujours avortent, et toutes pour aller se convaincre que le destin est insurmontable, qu'il faut retomber au bas de la muraille, chaque soir, sous l'angoisse du lendemain, toujours plus précaire, plus sordide.
C'est l'âge aussi qui vient peut-être, le traître, et nous menace du pire. On n'a plus beaucoup de musique en soi pour faire danser la vie, voilà. Toute la jeunesse est allée mourir déjà au bout du monde dans le silence de vérité. Et où aller dehors, je vous le demande, dès qu'on n'a plus en soi la somme suffisante de délire ? La vérité, c'est une agonie qui n'en finit pas. La vérité de ce monde c'est la mort. Il faut choisir, mourir ou mentir. Je n'ai jamais pu me tuer moi. »

Ce coup-là, tout est dit, je crois. Aussi lisez, savourez, délectez-vous de notre plus grand roman français du XXème, malgré ou en raison de toutes les noirceurs de son auteur, de tout ce qu'on en a dit ou médit, (je pense d'ailleurs que rien de ce qui entache vraiment Céline ne transparaît directement dans ce livre).

En somme, d'après moi, il ne faut surtout pas jeter le bébé avec l'eau du bain : il y a bien un Céline putride, absolument suffocant et insoutenable ; on le trouve dans ses pamphlets des années 1930. Mais il existe aussi cet autre Céline, et il serait dommage de tout mettre à la poubelle dans le même sac, sans l'ombre d'une nuance, notamment ses écrits romanesques antérieurs, qui sont d'un tout autre niveau et d'un tout autre intérêt.

Et plutôt que de dire : « C'est un facho ! C'est de la merde ! Je ne me salirai jamais les doigts avec ses livres ! etc. » comme je l'entends très souvent, (On accuse même parfois ouvertement ceux qui apprécient Voyage au bout de la Nuit d'être des sympathisants d'extrême droite.) ne serait-il possible de présenter Céline pour ce qu'il est, c'est-à-dire une sorte de Janus moderne, un genre de Dr Jekyll ayant vraiment exercé la médecine et dont les pamphlets seraient sa face Mr Hyde ?

Mais bien évidemment, aujourd'hui plus que jamais, vous aurez compris que ce que j'exprime ici n'est que mon avis, un tout petit avis noyé sous la foule des centaines d'autres, une goutte d'eau dans l'océan, autant dire, pas grand-chose.

P.S. : je n'ai mentionné que l'une des raisons de l'antisémitisme profond et installé de longue date chez Céline, car il me semble que c'est cette raison qui l'a poussé à écrire ses fameux pamphlets "Bagatelles pour un massacre" et "L'école des cadavres".

Mais rien n'est jamais aussi simple, il semble également que depuis sa plus tendre enfance, dans le foyer familial, on cultivait l'antisémitisme et aussi, surtout devrais-je dire, la brûlure, la blessure à ses yeux que fut la réception de Mort À Crédit, par le monde littéraire, de la critique et de l'édition, où des personnalités éminentes juives prenaient une large part a contribué décisivement à forger le contentieux de Céline avec LE peuple juif.

Sa conception de la "dégénérescence orchestré
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Ouvrez-le à n'importe quelle page, et lisez-en un passage à haute voix...
Céline ne mâche pas ses mots, il les mastique jusqu'à en extraire le suc.
Ca claque, ça grouille, ça pète, ça chie, ça pleure, car "l'existence, ça vous tord et ça vous écrase la face"

Il y a un avant et un après avoir lu ce livre.
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La grande fatigue de l'existence n'est peut-être en somme que cet énorme mal qu'on se donne pour demeurer vingt ans, quarante ans, davantage, raisonnable, pour ne pas être simplement, profondément soi-même, c'est-à-dire immonde, atroce, absurde. Cauchemar d'avoir à présenter toujours comme un petit idéal universel, sur-homme du matin au soir, le sous-homme claudicant qu'on nous a donné.
p418

Je me dois de trouver une place sur mon île déserte
Aujourd'hui, c'est vendredi....
J'ai l'honneur et la joie d'accueillir cette découverte
Robinson, et Ferdinand Bardamu , le Voyage au bout de la nuit...
Certes, beaucoup de divagations ou propos du psychisme
Mais avec nostalgie, ce livre quitte ma liste "pas lu", je rajouterai étiquette "paludisme"....
Cette petite musique de nuit retentira longtemps encore dans ma nuit,
Aussi bien illusoire de vouloir critiquer ce chef d'oeuvre de Monsieur Céline
Une seule tentative de POLEMIQUE et c'est MOTS ARTS qu'on assassine.....
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Immense coup de coeur ! On a tellement dit du mal de Céline que j'ai longtemps renâclé à le lire, et puis j'ai voulu me faire moi-même ma propre idée. Haineux, Céline ? Certes, mais pas dans "Voyage au bout de la nuit", où il démonte au contraire un par un les mécanismes qui conduisent à la haine, et ce avec une lucidité impitoyable. (Le problème du personnage, c'est qu'à force de faire de la provocation, et une provocation odieuse j'en conviens, il a fini par tomber dans les travers qu'il dénonce). Pas d'illusions sur la nature humaine, pas de fioritures, pas de complaisances sur une pseudo-fraternité, mais des tentatives pour prendre du recul face à ce qui détruit l'être humain et tenter d'apprendre à vivre malgré cela ou plutôt avec. Il y a chez cet écorché vif un mélange contradictoire entre désespoir et désir de vivre envers et contre tout que je trouve magnifique et qui pourrait aider la plupart d'entre nous. Car ce n'est pas de se voiler les yeux qui fait avancer, mais de regarder les choses en face et d'en rire si on le peut. Ainsi que le disait Pascal, l'homme est plus grand que ce qui l'écrase parce qu'il est doué de conscience. Je pense que le regard de Céline sur la vie m'accompagnera longtemps, comme celui d'un ami qui aura eu le courage de dire tout haut ce que je pensais tout bas, sauf en ce qui concerne son racisme évidemment et ses prises de position en faveur du nazisme. Oui "Voyage au bout de la nuit" est un très grand livre.
Et tant pis pour le "politiquement correct" ! C'est la vérité qui nous aide, pas le mensonge.
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170 critiques et je viens de lire celle de Nastasia-B...j'aurais pas dû...c'est mort, plié, foutu...je n'ai plus rien dans le citron...ratatiné mon cortex, vitrifié, mon cogito, effondré, mon ergo sum!

Et pourtant Céline c'est toute une histoire, pour moi, une saga, que l'épopée de Gilgamesh à côté, c'est la comtesse de Ségur!

ça a commencé comme ça... c'est Frasva qui m'en a parlé d'abord, Frasva, un pote, un carabin, pas comme moi, un dentiste - un de ces arracheurs de dents qui t'enlèvent les molaires en te parlant de leurs voyages au bout du monde...

Tiens justement, c'est du Voyage qu'on a parlé, Frasva et moi, du Voyage au bout de la nuit, - c'était à tenter, à entreprendre, fallait plus attendre, je serais bientôt atteinte par la limite d'âge, qu'il disait le Frasva, toujours galant homme, tu vas pas attendre la ménopause, Michfred, t'auras le ciboulot tout ramolli, tu pourras rien capter, tes circuits seront niqués, y aura un truc qui fera masse...

Moi, je renâclais sérieux : pas envie du tout de le lire, ton facho, que je lui disais, c'est du dégueulis, de la nausée pire que celle du Jean-Sol Partre, ton Céline, je le sais, il a cassé du juif au pire moment: quand on les envoyait au four, tu crois pas que c'est d'une vraie ordure, ça? d'un gros salopard? d'un foutu crevard?

Il a suivi Pétain et Laval à Sigmaringen, avec le Vigan: encore une preuve de son innocence, ça, Sigmaringen, ses eaux, ses hôtels, ses montagnes, sa bande de nazillons en goguette...Tu me dis qu'il y avait aussi sa femme Lucette, la contorsionniste, et le chat Bébert... belle troupe d'égarés...ça ne vous rachète pas une moralité pour autant... tu dis qu'il était médecin des pauvres? que c'était un humaniste, ton Mengele de banlieue? Foutaises, moi, des gars comme ça, c'est douze balles, plus une, et le peloton, sans barguigner! Oui, j'suis contre la peine de mort, mais pas pour lui, bordel, 3 pamphlets antisémites, c'est plus du hasard, c'est de la nécessité, du voulu, du concentré... va pas me raconter des histoires!

Bon, d'accord, je vais l'écouter ton Céline, si c'est toi qui m'offres le disque...pas mal, son accordéon, on dirait du Bruant, du Vian, en plus vachard, mais y a de l'idée...Et maintenant Michel Simon qui lit une page : "ça a commencé comme ça..." tiens, j'ai déjà entendu ça quelque part...

Trop tard, j'ai tout écouté, tout, et puis j'ai lu, tout, une fois, deux fois, trois fois...subjuguée par le verbe, la Michfred, complètement emberlificotée dans ses contradictions, engluée dans ses principes et conquise par les mots de l'autre, là, qui parlait si bien de la guerre, de la colonisation, de la misère qu'on n'aurait jamais cru que c'était le même qui déblatérait si vilainement sur les Juifs dans les autres torchons....la porte du club des céliniens s'était refermée sur moi...on était faits, comme des rats!
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Ferdinand Bardamu déverse sa bile contre les hommes. Désabusé et cynique, il voue aux gémonies les soldats et leurs chefs, qu'ils tuent ou qu'ils meurent, prisonniers de la Grande Guerre, dégueulasse, absurde et révoltante. Les colons, petits blancs avides de pouvoir, brutaux et vénaux qui s'en vont suer, trafiquer, torturer, souffrir ou mourir en Afrique. L'Amérique où, isolé et pauvre dans une foule sans regard, son désespoir et son angoisse ne sont que plus grands, et son dégoût aussi d'une société consumériste qui salement déshumanise. Sans omettre les gens qui se vengent des services qui leur rend quand toujours fuyant de retour en France il consulte à l'oeil (Bardamu est devenu médecin comme Céline qui soignât les pauvres).

Un Voyage au bout de la nuit éprouvant, qu'il faut entreprendre, parce qu'il est unique et que Louis Ferdinand Céline est un immense écrivain. Sans arrière-pensée, car son antisémitisme qui fait débat est hors sujet dans ce chef-d'oeuvre absolu où, magistral, Céline assène le tragique de la destinée humaine avec, nécessairement, l'humour comme seule échappatoire à la bêtise des hommes.

« Courage, Ferdinand, que je me répétais à moi-même, pour me soutenir, tu finiras sûrement par le trouver le truc qui leur fait si peur à eux tous, à tous ces salauds-là autant qu'ils sont et qui doit être au bout de la nuit. C'est pour ça qu'ils n'y vont pas eux au bout de la nuit ! »
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Mes premiéres lectures des livres de Céline ont débuté durant les années 1990 . Jai lu ,en premier "Mort à Crédit " et le deuxiéme "Guignol s Band ". Ce n ' est que plus tard , dix ans à peu prés , que j 'ai lu le chef-d 'oeuvre de cet auteur :"Voyage au bout de la nuit ".
Céline , certes , est un écrivain contreversé . On a pratiqué l ' ostracisme envers lui . On l ' avait banni . On l avait considéré comme un pestiféré . Pour certains cercles connus où ses ennemis sont embusqués dans tous les rouages de la haute société , Céline sent "le soufre "!
Céline lui-même l ' affirme en disant : " C ' est pour le voyage qu ' on me cherche ! "
Les passions se sont déchainées dès la parution de la réedition du livre et continuent contre un livre , un homme antisémite , anticommuniste ,maiiiis et surtout antibourgeois et anti-"populo" ,anti-les autres et anti-lui même ! Céline apparaît comme un cas inclassable d ' insoumission à toute sorte d ' autorité ou de catéchisme .
Le roman se présente comme une sorte de saga s ' étalant sur trois continents ; l ' Europe , l ' Afrique et l ' Amérique . Chaque changement de lieu laisse espérer une vie meilleure mais le trajet n ' est qu ' une longue et inéluctable chute ,parce que les hommes sont tous des assassins .
La guerre , cet" abattoir " international en folie "suscite un héroïsme imbécile et d ' indécents discours patriotards , prononcés par des gens bien tranquillement embusqués à l ' arrière . Je voudrais ajouter une chose sur Céline , LUI il a exprimé ses idées , ses convictions et il est CONTRE LA GUERRE car il a remarqué , comme les autres gens , ce sont les modestes gens qui servent de chaire à CANON ! alors LISEZ LE LIVRE ET faites vous une idée personnelle .



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Que dire, qu'écrire de ce livre et de son auteur qui n'ait été mille fois dit, écrit, débattu, contredit, ressassé ?
Pas grand chose à ajouter, c'est vrai, simplement un avis, un sentiment personnel, celui d'un modeste lecteur qui découvrit en autodidacte (c'est à dire sans guide académique à opinion prédigérée !) un roman monumental, révolutionnaire, bouleversant...
J'ai eu la chance, de me procurer l'édition grand format illustrée de main de maitre par Tardi, un plus inestimable...
Vous n'aimez pas Céline, ne le comprenez pas ?
Peut-être même qu'il vous dégoûte un peu ?
Tant mieux, laissez moi seul avec sa petite musique !
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Par où commencer? Je n'avais jusqu'ici jamais lu un autre auteur que Shakespeare où l'on puisse ouvrir le livre au hasard et tomber sur une citation incroyable, intemporelle, criante de vérité sur la nature humaine.

J'ai voulu lire Céline pour comprendre le statut culte de ce roman rattrapant plus ou moins ses écarts par la suite... Et j'ai compris. C'est un portrait hallucinant de lucidité sur l'espèce humaine, quoique son pessimisme extrême en fait une lecture lente, car difficile pschologiquement, bien plus que tous les polars les plus sanglants.

Céline a absolument tout compris, et on s'émerveille de retrouver certains de nos propres dégoûts, de nos propres réactions instinctives vis-à-vis de la barbarie et de l'absurdité humaine. C'est réellement 500 pages sur l'absurdité humaine, individuelle et collective. Personnellement, à la lecture de Voyage au bout de la nuit, je me suis senti enfin compris, tout particulièrement durant la guerre et à New York. Face à l'horreur, on se réfugie dans l'égoïsme, la lâcheté, le confort, par instinct de survie.

Car oui, le roman est célèbre pour sa représentation de la guerre de 14-18, mais cela ne représente que 50 pages et puis on passe à bien d'autres choses toutes aussi aberrantes. Bardamu a pour politique la fuite dès qu'il se trouve trop consterné et surtout menacé par ceux qui l'entourent, et voyage à travers le globe. On voit très bien les influences de Shakespeare et Rabelais dans la gestion du temps et des lieux, et c'est un régal que de suivre cette errance lestée de toute contrainte réaliste. La fin est très triste. Et pourtant, j'étais plongé dans la tête de Bardamu, je ne voulais plus entendre parler de Robinson. Mais le drame retombe dans toute son ampleur chez le lecteur.

Il FAUT avoir lu ce roman dans sa vie, comme il faut avoir lu Shakespeare. Ces deux auteurs portaient un regard vrai sur l'humain. Si vous vous sentez marginal, misérable, pour quelque raison que ce soit, lisez ce chef d'oeuvre de la littérature, magnifiquement écrit, avec en moyenne une maxime sidérante par page. le personnage principal est une sorte de méga Dr House (je pense d'ailleurs que celui-ci a été pas mal influencé par Céline, il faudrait qu'un jour la question soit posée), inadapté où qu'il aille, assassinant de son regard et de son acuité la bêtise des civilisations et leur vacuité... Anti-patriotique (son raisonnement est particulièrement jouissif, surtout quand on le partage), anti-nationaliste, anti-colonialiste, anti-capitaliste... Et pour un auteur futur collabo nazi, il dépeint le peuple un peu comme Hugo a pu le faire...

J'espère avoir donné envie de lire cet objet IMMANQUABLE de la littérature!! Il a influencé nombre d'écrivains, surtout dans le polar, de par le langage châtié et les jeux stylistiques (régal, qu'il développera apparemment par la suite), et quels que soient ses écarts, c'était un génie. Lisez Voyage au bout de la nuit!!!
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« Les miennes d'idées elles vadrouillent plutôt dans ma tête avec plein d'espaces entre, c'est comme des petites bougies pas fières et clignoteuses à trembler toute la vie au milieu d'un abominable univers bien horrible. »

Cette phrase résume assez bien ce long voyage au pays des désillusions je trouve. C'est Ferdinand Bardamu, le personnage principal de ce roman qui parle. Et Ferdinand Céline carabin aussi, lui ressemble à s'y méprendre. Nous suivons les petites bougies en France, en Afrique puis aux Etats-Unis. La guerre, les colonies, le capitalisme, le blabla, la propagande, la médiocrité, la solitude, la compréhension des êtres et des choses. Nous sommes au pays des hommes. Au pays des hommes avec sous les yeux une langue écrite aussi vivante et animée qu'un échange verbal mais qui aurait été travaillée, dosée et si justement posée qu'aucun interlocuteur n'aurait prit le parti de l'interrompre.

Bardamu avance, avance encore : « J'ai fini par m'endormir sur la question, dans ma nuit à moi, ce cercueil, tellement j'étais fatigué de marcher et de ne trouver rien. » Céline ça claque, ça vit, ça tremble. Une explosion de ressentis, des sentiments remontés d'on ne sait où, de qu'elle profondeur, de quelles vérités qu'on aurait laissées filer.

« J'en avais pour mon compte à force d'en prendre et d'en laisser des rêves, la conscience en courants d'air toute fissurée de mille lézardes et détraquée de façon répugnante ». Et ça cogne encore…..

Il bouscule et traite avec vigueur de la pauvreté, de la résilience, de la force, de la lâcheté, du crime, du mensonge, de l'avarice, de la vie et de la mort. On remet le voyage en route et tout ce que l'homme pense, fait, dit ou ne dit pas est soigneusement, harmonieusement, subtilement orchestré. Un plan vigoureusement arrangé avec une histoire, une vraie histoire qui enrobe le tout pour séduire le lecteur. Les personnages sont passés au scanner. Corps et âmes, coeurs, tripes, cerveaux, regards tout y passe.

Ils s'appellent Henrouille, Martrodin, Ormanon, Parapine, Bioduret. Ils sont commandant, trouffions, hôtelier, médecins, prêtre, prostituées, traines-savates, aventuriers ou presque rien, juste eux-mêmes. Ils sont là, proches de nous et nous livrent leur arrogance, leurs vérités, leur petite musique .Nous sommes pieds et poings liés.

Lorsque le mal a fait saigner et que le désespoir s'annonce Céline arrose tout ça d'une description de la nature belle à tomber. Il calme le jeu. Il oppose l'homme capable de provoquer bien des tourments à une nature lénifiante et sans reproches. Sous sa plume avertie le vent tout souriant, se penche à travers mille feuilles en rafales douces, le ciel parade tout giclé d'un bout à l'autre d'écarlate en délire et le vert éclate au milieu des arbres et monte du sol en trainées tremblantes jusqu'aux premières étoiles. le gris reprend tout l'horizon et toutes les couleurs retombent en lambeaux, avachies sur la forêt comme des oripeaux.

Pendant le voyage nous sommes sans arrêt ballottés sur un chemin assez torturé, ballottés entre le style et l'émotion. Les choses s'animent et les gens s'enveniment. Oui les choses ont du caractère : New-York est une ville bâtie en raideur, les pelouses sont teigneuses, les litres grelottent sous les tables, tandis qu'un bateau va tranquillement d'une crainte à l'autre. C'est de l'art brut à porter sur les fonds baptismaux.

Un style incroyable. Un style qui loin d'être ampoulé a du corps, comme un grand vin. Des phrases légères parce qu'elles vont joliment à l'essentiel. Les hommes placés sur plusieurs continents dans une seule histoire il ne fallait pas traîner! Un bain d'humanité vif, nerveux, vibrant, marqué au fer d'une manière originale et savoureuse. Au fil de cette longue aventure on rencontre une femme ou un homme au coin d'un chapitre on peut les avoir croisés la semaine dernière, là, dans un village voisin. Céline les a bien écrits. On les reconnait tout de suite.

Une révolution, ce livre. le langage de l'oralité parsemé ça et là de tics de langage sans jamais une seule note de vulgarité. le travail de la fulgurance, sans concession, sans faux-semblant. Il faut l'entendre Fabrice Lucchini déclamer quelques passages du voyage, se donnant entièrement au texte, appuyant sur le plein, protégeant le délié.


(Le mot « Bla bla a été invienté par Céline. Il est entré dans notre langue à tous.)

Céline a commis des fautes graves et c'est un autre sujet. Loin de le comprendre et de l'excuser je n'en parle pas. D'autres le font abondamment. Comme l'a très bien dit Nastasia B dans son billet. Il y a l'homme et il y a l'oeuvre. Si on ouvre la première page de ce monument Impossible d'arrêter le voyage.
Ce billet, je le répète, ne concerne que ce Voyage au bout de la nuit, qui aurait pu s'intituler Voyage au bout de la vie. Céline se situe t-il entre génie et folie?

C'est pour moi une oeuvre magistrale qui a donné un coup de vent frais à la littérature, faisant fi des codes souvent un peu "serrés" de cette époque. Ce texte frénétique, original, semble couler tout seul. Est-ce dû à son apparence naturelle ?
Céline le disait et je le crois volontiers, c'est le fruit d'un travail extrêmement fourni. Il avait beaucoup de choses à dire et il les a très bien dites. Un savant dosage entre talent, labeur, observation et intelligence. Un style incroyable….Un cheval au galop.

J'ai été un peu trop longue, mais moi aussi j'avais des choses à dire, des émotions à partager. J'ai dû me remettre d'une surprise totale. Une magnifique surprise.

C'est la fin. « Il appelait vers lui toutes les péniches du fleuve toutes, et la ville entière, et le ciel et la campagne, et nous, tout qu'il emmenait, la Seine aussi, tout qu'on n'en parle plus. »
C'est la fin de ce billet pour moi aussi. J'ai tout emmené de ce livre et je voudrais tout garder en mémoire. Et Qu'on n'en parle plus.
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