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EAN : 9782848769592
284 pages
Philippe Rey (18/08/2022)
2.88/5   44 notes
Résumé :
Kigali, 2018. Depuis sa rupture avec Vincent, Erika vit sur un fil. Elle décide alors de se faire hara-kiri par l'écriture, d'adresser à sa sœur des lettres pour " exorciser de son corps " un amour-dévastation qui l'habite encore. Elle raconte son histoire, mais également celles des êtres fragiles auxquels elle est attachée, qui eux aussi tentent de vivre. Avec James, frère second hand, Manzi, le séduisant karatéka, Mzee Idelphonse, Maman Colonel, Tonton Damas, les ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Erika écrit à Lawrensa, sa soeur, depuis Kigali. Ces lettres, ce journal, couvrent toute l'année 2018. Ainsi pleurent nos hommes, roman écrit par Dominique Selis, autrice belgo-rwandaise, est fondamentalement original. de par sa forme d'abord avec des phrases percutantes ou parfois un seul mot aussi.
Cela m'a dérouté au début et, souvent, j'ai eu du mal à m'y retrouver, d'autant plus que l'autrice a inséré beaucoup de mots et d'expressions en kinya, la langue majoritaire du Rwanda. C'est souvent traduit en bas de page et un glossaire permet de s'y retrouver, à la fin.
Dans son premier roman, Dominique Selis a bien fait de donner la parole à beaucoup de personnages constituant l'entourage d'Erika qui retranscrit dialogues et réflexions. le tout est très animé et plonge, du début à la fin, dans tout ce que ressent cette fille de médecin, faisant donc partie d'un milieu aisé puisqu'elle parle de temps en temps du personnel travaillant au service de ses amies alors que bières, whisky et cigarettes ne sont pas comptées.
D'emblée, je suis frappé par l'expression employée par Erika alors qu'elle veut quitter le Rwanda. Elle qualifie le pays de « cimetière à ciel ouvert ». Enfin et surtout, Erika est une grande amoureuse. Elle se consume d'amour pour Vincent qui a tout donné pour éviter le pire mais a perdu les siens et préfère travailler en Turquie.
Erika est revenue au pays des Mille Collines, vingt ans plus tard et cela lui permet de constater que le Rwanda est en pleine reconstruction mais que le génocide est impossible à effacer malgré tous les efforts déployés.
Si certains génocideurs, violeurs atroces, ont été condamnés à perpétuité, d'autres ont échappé à la justice ou ont subi des condamnations ridicules au vu des actes commis. Cela traverse tout le roman, d'autant plus que les quatre tantes, les Tatas d'Erika : Gaudénia, Dévoté, Ansila et Daphrosa, ont subi d'incroyables violences, en public, devant leurs voisins, sans que personne n'intervienne. C'est Félix, un ancien domestique de la famille, qui raconte.
Tout au long de ces lignes ressort les incroyables préjugés, les mortelles certitudes des Hutus envers les Tutsis. Ces derniers sont déshumanisés, qualifiés de parasites, de cafards, de serpents et tout peut arriver, même le plus inimaginable.
La plupart du temps, les bourreaux s'approprient les biens des sacrifiés, sans le moindre scrupule. le plus incroyable c'est que dans ce pays, comme dans d'autres, les rencontres, les amours se nouaient sans trop tenir compte de l'origine ethnique, souvent pas évidente. Qu'importe, une fois l'infernal engrenage enclenché, rien ne l'arrête et la Belgique et la France dont la présence est forte là-bas, ont une responsabilité dans ce qui s'est passé au Rwanda entre 1990 et 1994.
C'est tout cela qui transparaît dans les confidences d'Erika à sa soeur qu'elle appelle aussi, affectueusement, Lo. Erika aime, a besoin d'amour, s'accroche à Vincent, baise avec Manzi, le beau karatéka. Elle se rend au bord du lac Kivu, « le Tout beau » où ses souvenirs d'enfance ressurgissent mais le souvenir des Tatas, de sa Gaudé, sont impossibles à effacer. Cela la motive pour débusquer encore des génocideurs assez malins pour avoir fait oublier leurs crimes.
Ainsi pleurent les hommes, ce sont certains hommes rwandais qui ont du mal à vivre car ils n'ont pas pu répondre à ce qu'on attendait d'eux : se protéger, protéger les gens et les femmes en particulier de ce génocide.
Dominique Selis a écrit un roman fort, très fort, tout en étant hors normes. Il faut de pareilles oeuvres pour ne pas effacer le passé et redonner vie à celles et à ceux qui sont tombés sous les coups d'ennemis sanguinaires qui étaient pourtant leurs « amis », leurs voisins, leurs copains d'enfance…

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Erika est effondrée. Son histoire d'amour passionnelle avec Vincent s'est achevée. Elle exorcise son chagrin en écrivant chaque jour une lettre à sa soeur, lui confiant la profondeur de son désarroi et les méandres de cette liaison vouée à l'échec. Car tous deux portent en eux les stigmates de blessures éternelles, condamnés à vivre avec leurs souvenirs des années du génocide et de la perte de leurs plus proches parents, dans des conditions inhumaines. Erika et Vincent sont rwandais, et s'ils vivent dans un pays qui a manifesté la volonté d'enterrer le passé, chacun reste marqué par cette période innommable.

Quelques scènes d'horreur sont rapportées, mais ne constituent pas l'essentiel du récit, même si en filigrane les massacres sont bien présents dans les esprits. Récit nécessaire pour éviter l'oubli, comme pour la Shoah.

J'ai cependant eu beaucoup de mal avec ce roman, écrit dans un style flamboyant, poétique certes mais parfois peu compréhensible, d'autant que s'y ajoutent de nombreuses expressions locales, parfois traduites, parfois non, et on découvre à la dernière page qu'il existe un lexique (ce qui ne résout que partiellement cet écueil car s'y référer implique une coupure dans la lecture déjà complexe )

Virtuosité d'une écriture qui met à distance l'intrigue, et risque fort de décourager le lecteur.

284 pages Philippe Rey 18 Août 2022

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Je suis heureuse d'avoir découvert ce roman grâce à la Masse Critique car j'y ai découvert une écriture différente, particulière, très personnelle et une manière d'aborder le génocide rwandais différente de mes autres lectures.
Je pensais que la lecture serait rapide. Erreur, c'est si dense, si plein d'émotions, de questionnements que l'on doit vraiment prendre son temps pour entrer dans le roman et le saisir.
Ainsi pleurent les hommes du Rwanda. En se défilant d'un amour trop intense de peur de le perdre lui aussi, en multipliant les conquêtes sans leur donner trop d'intérêt, en tentant d'oublier ces images de mère, soeurs ou tantes violées et violemment tuées pendant le génocide, souvent par des voisins, des amis ou même des membres de la famille.
Ce roman parle de ce qu'on ne peut pas oublier, le massacre et de ceux et celles qui n'ont jamais été inquiétés et fréquentent les mêmes bars que les proches des victimes. Mais il parle d'amour aussi et de ces êtres blessés à vif qui doivent malgré tout vivre leur vie.
C'est un très beau premier roman, un peu alambiqué parfois mais dont l'émotion est intacte.
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Ce livre est comme un long cri d'une écorchée vive, celle d'Erika, qui à travers des lettres adressée à sa soeur, revient sur sa rupture avec Vincent et sur ce passé qui ne passe pas, le génocide des tutsis survenus à Kigali au Rwanda en 1994.
Dès les premières pages on est frappé par la puissance de la plume de Dominique Celis, une plume à la fois crue et poétique.
Peut-on s'aimer quand on est hanté par le souvenir des disparus, par les atrocités qui ont touché propre et famille ?
Face à une société qui clame la réconciliation comme si on pouvait passer un coup d'éponge rapide sur le passé, comment faire le deuil ou continuer à vivre dans un pays où soudain les voisins se sont transformés en ennemis ?
En se noyant peut-être ? Dans l'alcool, la cigarette, le sexe présent tout au long du roman.
En exorcisant un récit qu'il est convenu de taire dans un pays où on n'exprime pas ses sentiments ?
L'écriture est certes assez virtuose, la parole scandée comme pour mieux exprimer colère et désir, c'est une idée assez forte, toutefois à la lecture du roman de Dominique Célis, on a ressenti pas mal d'incompréhensions, liées peut-être aux expressions locales ou aux personnages sans doute trop nombreux et pas assez fouillés.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Malgré des défauts de premier roman, ce livre faussement épistolaire est porté par une plume presque viscérale quand il s'agit de dire les maux du coeur – passion contrariée racontée longtemps après, et cicatrices à vif du génocide rwandais. Se regrettent la construction temporelle un peu anarchique et le manque de sympathie que l'on éprouve pour Erika et ses amis sans avoir vécu leur vie (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2022/08/31/ainsi-pleurent-nos-hommes-dominique-celis/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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critiques presse (1)
LeFigaro
08 septembre 2022
L’écrivaine a choisi de faire corps avec sa narratrice, Érika, de la laisser exprimer sans retenue ce que le retour au Rwanda fait émerger en elle.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Je t'ai écoutée.
Sur près de cent vingt pages, police douze, caractère Times New Roman, je me suis adressée à lui.
Extraite de moi, cette chose.
Provisoirement, appelons-là une dévastation
Ecrire me dépeçait. au sens strict, je me faisais hara-kiri.
J'ai arrêté.
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Diane, elle s’habille en jean taille basse et hauts talons. Pour contempler en permanence, justifie-t-elle, son ventre flasque, ses poignées d’amour et ses cuisses grasses. « Erika, c’est la marque de mes enfants. Ils les ont tuées, ils m’ont tuée, ils nous ont tués. Mon corps a survécu, avec la preuve de l’existence de mes petites.
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J’essaye d’interpréter la victoire rampante du génocide.
Cette chose sans lieu, qui a eu lieu,
Arrimée, telle une inscription, indiscernable,
Dans les corps-objets, profanés.
J’essaye d’interpréter la victoire rampante du génocide derrière la survie.
Je veux dire, derrière l’apparence d’avoir refait corps avec son histoire,
Je veux dire, de s’être extrait du passé décomposé.
Derrière la survie,
Je veux dire, derrière la réhabilitation dans un linceul social cousu de relations, d’amis, d’un travail et d’activités.
Je veux dire, derrière tout ça,
Sans issue,
L’incapacité à se lier.
Derrière la survie, derrière, ânonnent-ils, la résilience, providence des sans-ressources,
Derrière la réconciliation dont le pays se gargarise,
Derrière la reconstruction du pays qu’ils ont mis un sac,
Il y a un prix. À payer,
Caché, cash.
(Pages 62–63)
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Erika, connais-tu ce proverbe pour signifier la colère ? Il la compare à isombe , les feuilles de manioc. Pour en obtenir une poignée, tu le sais, il faut en bouillir une importante quantité dans un grand volume d’eau. […] Telle est la colère, Erika. Elle te détruit. Elle ne détruit que toi. Elle n’altère en rien le contenant ou le récipient. La colère ne modifie rien. Elle ronge. Tu vois, c’est une douleur terrible de ne pas pardonner.
(Page 174)
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Aimer. C’est mourir.
Trop, risquer.
De perdre. D’être dépossédé de.
De ne pas être à la hauteur. De ne plus l’être.
Aimer, Lawurensiya, interroge Maman. C’est mourir.
C’est être, à jamais,
Impuissantés,
Des nôtres pas sauvés.
Aimer, Lawurensiya, souviens-toi du père. C’est inguérissable.
Alors. Vincent . Il a choisi de renoncer.
(P. 98-99)
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Videos de Dominique Celis (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Dominique Celis
Du Rwanda à la République du Congo, comment aimer, vivre et mourir dans des pays qui portent en eux les blessures du passé et les fractures sociales ?
Une rencontre entre Dominique Celis ("Ainsi pleurent nos hommes", Philippe Rey) et Alain Mabanckou ("Le commerce des allongés", Seuil), animée par Valérie Marin La Meslée, à l'Hôtel de Ville le 11 septembre 2022.
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