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EAN : 9782354480387
97 pages
Editions Isolato (22/04/2015)
4.73/5   11 notes
Résumé :
Au printemps 2011, je suis parti en Islande. J'ignorais ce qui m'attendait là-bas. Comme Martin Buber, je pourrais écrire aujourd'hui : Tous les voyages ont des destinations secrètes dont le voyageur n'a pas conscience. Car, dès mon premier regard par le hublot de l'avion, j'ai été tout à coup emporté... ailleurs. C'est là, durant un mois, que j'ai marché, vécu et écrit les pages de ce carnet : dans une région islandaise de l'ailleurs, au nord-ouest de l'ailleurs, l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Voyage au nord de l'Islande dans la solitude et le silence, «pour rompre avec d'anciennes formes».

Dans ce livre sous titré «Carnet islandais d'un voyage intérieur», et paru en 2014 aux éditions Isolato, Pierre Cendors raconte, avec une langue poétique somptueuse, un voyage entrepris au printemps 2011, une confrontation avec les paysages élémentaires du grand nord islandais pour donner corps à un projet romanesque encore vague.

«Depuis mon retour du Septentrion, je me répète souvent ces paroles de Magnús Morland, les rares dont je me souvienne :
Je ne viens pas en Islande pour voir, au pied d'un glacier, un désert de lave, des geysers ou un volcan, car alors je perdrais l'écho de ce qui m'appelle ici. Je ne viens pas non plus contempler les aurores boréales. Je viens pour rejoindre l'autre côté d'une vision qui m'habite depuis de longues années, une vision dont je ne sais presque rien, sinon que le paysage archaïque, aux reliefs ruiniformes, de cette île qui a surgi de l'Atlantique Nord, il y a de cela 25 millions d'années, lui ressemble.»

Le voyage démarre à Hornstrandir, «un territoire dont le règne sauvage, à cette latitude et si éloigné de l'affairisme amnésique de nos sociétés, n'a rien d'un simulacre.» Pour cet écrivain marcheur, la solitude et la matière brute doivent nourrir la page blanche, dialogue intérieur face au vide entre le mouvement des pas et celui de l'imagination.

Prenant des accents d'une profondeur mystiques, Pierre Cendors dit l'éloignement du monde, le détachement d'une société utilitaire qui mutile, pour entrer dans la beauté puissante et muette et le temps distendu de ce paysage minéral, et renouveler ainsi la pensée et la forme.

«L'homme n'est peut-être qu'un épisode de l'évolution. À quelques kilomètres de Reykjavík, des rangées pimpantes de résidences-casernes, aussi déplacées dans ces étendues désertiques qu'une femme fardée, parfumée, permanentée au milieu du Sahara, soulignent brutalement l'évidence : la civilisation, toute civilisation, est une divinité clandestine déchue.»

Voyage au milieu de nulle part et au coeur de la matière, ce face-à-face avec le vide prend une direction inattendue, devant cette «nature affranchie de toute mainmise» humaine, ces distances et ces durées si vastes qu'elles font disparaître le but et imposent le silence, puis avec le choc de la découverte des toiles du peintre islandais Georg Gudni.

«Hvarfnúpur.
Laekjarfjall.
Látrafjall
Sphinx ruiniformes dont seuls demeurent le train arrière et les puissantes pattes antérieures, scellées à leur socle d'immobilité.
Straumnessfjall.
Skálafell.
Montagnes-enclumes sillonnées de crevées où s'agrège la dernière neige, où ruisselle l'eau de fonte. Montagnes, tours et corniches larvaires aux torsions calcinées, aux cernes de refroidissement moulurés et réguliers.
Pierres sombres, lugubres dévaloirs à avalanches face auxquels, sous la poitrine du promeneur, un vertige s'écoeure en silence.
Falaise-cargos dont l'étrave noirâtre partage la baie mouvante et agglomère les nuées sifflantes dans ses hauteurs démâtées.»

Dédié à Georg Gudni, «L'invisible dehors» est un récit d'une beauté intense, tendu vers une forme d'absolu, plus tellurique que céleste, qui évoque les fulgurances d'Emmanuel Ruben et son évocation de l'oeuvre du peintre danois Per Kirkeby dans «Icecolor».

«On écrit pour donner voix à ce qui, autrement, demeurerait muet, enseveli sous le piétinement des paroles. On écrit pour quitter l'insomnie des conversations, ces longs repas du langage.»

Retrouvez cette note de lecture, et toutes celles de Charybde 2 et 7 sur leur blog ici :
https://charybde2.wordpress.com/2015/07/05/note-de-lecture-linvisible-dehors-pierre-cendors/

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Les promontoires de l'esprit.
Poète lucide, exigeant et courageux, « l'intelligence tremble à l'approche de l'être nu » comme l'écrit Kenneth White, Pierre Cendors s'avance seul vers la péninsule d'Hornstrandir située au nord de l'Islande, des terres basaltiques âpres désertées des hommes, hantées par les renards polaires, que la falaise aiguë du Hornbjarg plongeant dans l'Arctique pourrait condenser. La voyance, cette acuité du regard allant au-delà des apparences et des préjugés, des visées utilitaires, affouillant jusqu'à l'os du paysage, Pierre Cendors la met en pratique, décrivant sa marche physique et sa démarche mentale : « Puis j'entrai dans la montagne », son arrivée au seuil d'un no man's land blanc hors du temps. La voyance et la vision se rejoignent et se confondent, amenant à une extase et une plénitude chamaniques : « Une immensité froide, ample lumière d'aube où rien ne meurt, rien ne vit… ». Il y a du Rimbaud parfaitement assimilé dans les écrits fervents de Pierre Cendors mais aussi, en filigrane, toute une littérature liée au nomadisme intellectuel chère à Kenneth White mais l'auteur, dans son « Carnet islandais », fait oeuvre personnelle à part entière. Son écriture exigeante et pourtant lisible, compréhensible car ancrée dans une réalité tangible est porteuse d'un feu intérieur qui se réfracte dans l'esprit du lecteur, confortant fraternellement ses propres visions. Le carnet islandais dépasse la simple relation de voyage. Magnus Morland, pseudonyme et auteur fictif (hétéronyme), parcourt le livre, l’émaillant de commentaires. Le voyage résonne ainsi en écho dans les profondeurs de l’imaginaire et sonne avec justesse, sans pesanteur aucune. Le concept de « paysage-racine » esquissé est d’une justesse troublante comme si chacun portait déjà en soi un paysage « natal » qui révèlerait, à des « points de jonction géographique », « l’invisible dehors ». L’absence donnant corps à la vision, le livre est dédié à l’artiste islandais Georg Gudni (1961-2011) qui a su peindre des paysages archétypaux « ouverts sur l’infini ».
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Donner un avis sur L'invisible dehors, c'est presque immanquablement parler de soi. Ce carnet de voyage d'écrivain est l'infusoir d'un autre roman de Pierre Cendors, Archives du vent. Frisant avec la forme du recueil poétique, Pierre Cendors y exprime son rapport aux paysages d'Islande, au vide, à la marche, au processus créatif, à l'art, son rapport à lui-même indirectement. Il invite ainsi le lecteur au même retranchement intérieur, pour mieux finalement extérioriser ce qui doit l'être - en l'occurrence ces carnets de voyage et le roman Archives du vent.
En bref, un retour sur soi déclencheur d'ouverture au monde... Rien de moins !
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Journal de voyage et d'écriture, prélude ou spin off des Archives du vent joliment publié par les bien nommées éditions Isolato au printemps 2015, L'Invisible dehors, carnets islandais d'un voyage intérieur, raconte l'expédition menée par Pierre Cendors dans le cadre des Archives. Or, sitôt parvenu à destination, le voilà qui cesse d'écrire, oublie ce pour quoi il est venu...La suite ici : http://ericdarsan.blogspot.fr/2015/10/archives-du-vent-linvisible-dehors.html
Lien : http://ericdarsan.blogspot.f..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
[incipit]
Depuis mon retour du Septentrion, Je me répète souvent ces paroles de Magnùs Morland, les rares dont je me souvienne :

Je ne viens pas en Islande pour voir, au pied d’un glacier, un désert de lave, des geysers ou un volcan, car alors je perdrai l’écho de ce qui m’appelle ici. Je ne viens pas non plus contempler les aurores boréales. Je viens pour rejoindre l’autre côté d’une vision qui m’habite depuis de longues années, une vision dont je ne sais presque rien, sinon que le paysage archaïque, aux reliefs ruiniformes, de cette île qui a surgit de l’Atlantique Nord, il y a de cela 25 millions d’années, lui ressemble.

Ces paroles, de retour de mon voyage, je pourrais me les approprier et les offrir en réponse aux interrogations de mes amis, mais au lieu de cela je me tais et embarrassé par l’insistance de mon propre silence, je me corrige d’une formule : je n’ai pas encore fait le tour de ce voyage ou encore : J’ai approché là-bas quelque chose que je ne connaissais pas, que je recherchais depuis longtemps, qui dépasse ce que je pouvais en imaginer… Je ne sais pas encore en parler… formules qui, pour être vraies, n’en constituent pas moins de piètres échappatoires. A mes intimes seulement, je raconte ce rêve que je fis, un mois après mon retour […].
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Il existe pour chacun dans le monde quelques points de jonction géographique, de sites extatiques, d’aires de vision où, dans un vallon, une lande rocailleuse, une boulaie sauvage, une largeur fluviale, affleure l’invisible dehors. (p. 72)
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J’appelle cette résurgence sauvage d’un paysage originel, archaïque, archétypal, qui libère l’homme de ce qui l’enferme, redéploie ses énergies captives et les cosmise à nouveau : l’invisible dehors. (p. 72)
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Ne recherche pas qui tu es : tu t'en éloigneras
Reste ouvert. Cela ouvre à tout.
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Dans le même mouvement, prendre de la distance et gagner en proximité. (p. 47)
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Vidéo de Pierre Cendors
Extrait de l'intervention de Pierre Cendors au Café littéraire" de Bollène pour son roman "ENGELAND " (Editions Finitude) le 13 mai 2011.
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