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Critique de sylviedoc


Imaginez une gamine d'environ 5 ans, en surpoids, vêtue d'un Perfecto, solidement campée les poings sur les hanches, et qui vous dit en pleine face : "Y a un problème ?" parce que vous l'avez regardée avec un peu trop de curiosité. Prenez maintenant cette même petite fille, appelons-la Fifi, ou Bouboule (mais c'est affectueux), et placez-là entre ses trois soeurs aînées : Dalida, Maryline et Alyson, et ses trois petits frères : Jésus, J.R. et Grégo. Rajoutez derrière cette tribu le père, Sid-Ahmed, d'origine kabyle et dont la fâcheuse habitude d'être "au mauvais endroit au mauvais moment" lui vaut d'être régulièrement embastillé. Et la mère Natacha, juive polonaise rescapée d'un camp alors qu'elle était toute petite, ce qui lui a laissé pas mal de séquelles, au point de séjourner assez souvent en HP. Mais la famille ne serait pas complète sans Zaza, la grand-mère à l'accent kabyle inénarrable qui trouve que son pays "ci li pli bo pays di monde" et qui fait "li miyour couscous di monde" pour tous ceux qui viennent passer un moment "Au Bout du Monde", ce troquet où viennent se réunir tous les paumés, les déjantés de Belleville. Et n'oublions pas l'oncle, qui est un peu l'élément stabilisateur de cette famille "dysfonctionnelle", celui qui trouve toujours une solution et qui comprend la "sychologie" de tout un chacun.
Dysfonctionnelle, cette smala ? Aux yeux des juges et des institutions, "Le Bout du Monde" n'est certainement pas l'endroit adéquat pour élever des enfants dans de bonnes conditions ! On y boit beaucoup, les horaires sont élastiques, les enfants viennent faire la fête avec les clients et tout cela finit en général par une chorale braillant "Que je t'aiiimeuh" à la fermeture. Et quand en plus les parents sont "absents" pour les raisons énoncées plus haut, il arrive que les enfants soient placés en famille d'accueil, où les choses ne se passent parfois pas très bien.
Le roman s'ouvre justement sur une énième sortie de prison du père, et c'est Fidèle (alias Fifi, alias Bouboule), la narratrice alors âgée de 22 ans qui vient le chercher. le dernier petit frère, Grégo, a été placé pendant la détention de Sid-Ahmed, ce qui fait ressurgir des souvenirs. Et on remonte le temps jusqu'à la rencontre entre la blonde Natacha et le jeune propriétaire de bar kabyle, en 1976. Fifi nous présente sa fratrie, nous fait partager ses premiers souvenirs, sa naissance au Liban en pleine guerre avec Israël, son arrivée triomphale à Paris trois ans plus tard, l'école où elle se révélera surdouée et dotée d'une extraordinaire mémoire photographique, d'où découlera son affectation dans un lycée des beaux quartiers où se produira LA rencontre qui va bouleverser sa vie.

Toute l'histoire est centrée sur Fifi et sa famille, avec les habitués du bar qui gravitent autour, et dont certains sont de sacrés personnages aussi. Mais des "éléments extérieurs" vont venir jouer un rôle très important dans sa vie, notamment Sarah, et plus tard Vincent, issus de milieux bien différents.
Les épisodes loufoques se succèdent, on sourit beaucoup pendant la lecture, du moins cela a été mon cas, et on est ému aussi à certains moments, je pense notamment à l'anniversaire de la mère, ou à la complicité entre Fifi et Grégo.
Je me suis beaucoup attachée à la plupart des personnages, qui attirent la sympathie, mais deux d'entre eux m'ont révulsés, une des soeurs, et la mère de Sarah, vous comprendrez pourquoi si vous lisez. de nombreux thèmes sont abordés, les religions et leurs difficultés à cohabiter parfois, les troubles post-traumatiques (la mère), la délinquance, les familles d'accueil avec parfois la maltraitance, l'homosexualité, la tolérance, la contestation... des problématiques qui peuvent sembler lourdes, mais traitées ici dans un esprit joyeux et ouvert, ça change par rapport à d'autres romans sur ces sujets !
L'écriture est vive, rythmée, on est vraiment plongé dans l'ambiance et la vie de cette tribu, c'est transgressif et ça fait du bien. Je n'avais pas encore lu de roman d'Axl Cendres, mais "Coeur battant", son dernier, est au CDI et j'ai bien l'intention de l'emprunter. Malheureusement elle n'en écrira plus, elle est partie bien trop vite, à 37 ans.
La demie-étoile en moins ? Elle est due à certaines invraisemblances, par exemple l'âge de la mère dont j'ai calculé qu'elle aurait eu son dernier enfant à près de 50 ans ? Mais ce sont des broutilles, par rapport au plaisir que j'ai retiré de cette lecture, que je peux bien sûr que conseiller, même si certain(e)s vont me maudire !
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