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sur 480 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
La guerre d'espagne, opposa pendant près de 3 ans entre 1936 et 1939 des combattants républicains et des miliciens phalangistes qui se vouaient une haine farouche et féroce, légitimant toutes les exactions, emprisonnements, meurtres, viols, exécutions sommaires individuelles ou collectives... Nombreux sont les romans, les livres d'histoire qui prirent cette guerre comme fil conducteur.
Javier Cercas, écrivain peu connu auparavant se met en scène dans "Les soldats de Salamine" pour nous faire partager une histoire allant à contre-courant de cette violence.
En 1994, alors que sa carrière d'écrivain n'a connu aucun succès et que ses problèmes personnels s'accumulent, il entend parler pour la première fois d'un fait troublant : Rafael Sánchez Mazas, écrivain phalangiste, ami personnel de Primo de la Rivera, allait être fusillé le 30 janvier 1939, avec une cinquantaine d'autres personnes, quelques jours avant la fin de la guerre à proximité du sanctuaire du Cordell, en Catalogne espagnole. Il réussit à s'échapper. Recherché immédiatement par les combattants républicains, il fut sauvé par l'un d'eux qui le vit, et mentit à ses amis en ne les prévenant pas, lui laissant ainsi la vie sauve. Rafael Sánchez Mazas n'était pas un anonyme : "Il n'est pas exagéré d'affirmer que Sánchez Mazas fut le premier fasciste d'Espagne, et il n'est pas moins exact de dire qu'il fut le théoricien le plus influent de cette idéologie"...il deviendra par la suite ministre sans portefeuille de Franco
Alerté par ce fait troublant, Javier Cercas décidera quelques années plus tard d'écrire "Les soldats de Salamine", longue quête de la vérité. Qui était ce soldat au grand coeur qui avait ce dirigeant phalangiste au bout de son fusil et qui n'a rien fait : ce "milicien était resté à le regarder quelques secondes et ensuite, sans le quitter des yeux, il avait crié : «Par ici il n'y a personne !», puis il avait fait demi tour et il était parti." ?
Récit réel, roman, enquête historique...Journalisme ou création littéraire...Le livre difficilement classable mélange les genres et le lecteur ne sait plus trop où se trouve le réel et où se trouve la fiction. Qu'importe le plaisir est là!
Javier Cercas journaliste, personnage principal du livre se confond avec Javier Cercas écrivain...Tous deux vont partir à la recherche des témoins...le fils de Rafael Sánchez Mazas, des soldats et des familles qui l'ont hébergé et recueilli après son "exécution"..retour sur cette période encore plus troublée de la fin de la guerre d'Espagne alors que les combattants républicains cherchaient à fuir en France. Une rencontre avec Roberto Bolaño écrivain chilien lui donnera des indices.
"Les soldats de Salamine" est aussi un livre donnant une âme et un coeur à Rafael Sánchez Mazas, écrivain idéologue de la phalange, qui n'avait pas de sang sur les mains, écrivain qu'il défend et que le lecteur ne peut haïr : "Dans des articles anonymes ou signés par lui-même [....], il diffusa des idées et un mode de vie qui, avec le temps et sans que nul pût en douter [....] seraient adoptés comme idéologie révolutionnaire de choc face aux urgences de la guerre, puis réduits au rang d'ornements idéologiques par le grassouillet militaire de pacotille efféminé, incompétent, roué et conservateur qui les usurpa pour les transformer en apparat de plus en plus putride et vidé de sens, puis les livrer à une poignée de rustres pour qu'ils puissent pendant quarante années de pesanteur justifier son régime de merde." ...un idéologue qui voulait sans doute comme les combattants grecs de Salamine au 4ème siècle avant JC, sauver son peuple de la barbarie...les combattants républicains se battaient aussi pour ce même idéal...On se bat toujours contre ses barbares.
Et c'est enfin le livre nous permettant d'assister à la construction de l'ouvrage, aux hésitations de l'auteur, aux relectures et corrections de son travail.
Petit livre (230 pages) complexe, déroutant parfois. Découvertes d'un fait inconnu de l'Histoire, d'un auteur.. et au bout de tout ça...des heures d'une belle lecture .

Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Cercas se défend d'écrire un roman, genre où il n'excelle guère à son estime, et prétend se contenter de nous offrir un récit, le récit de l'exécution de phalangistes par des républicains au moment où Franco prend le dessus, exécution durant laquelle un des chefs de la phalange s'enfuit, est retrouvé par un soldat républicain et, sur un regard qu'ils échangent, le républicain le laisse sauf et libre. Cercas va partir à la recherche des témoins directs ou indirects de cet épisode de la guerre d'Espagne.

Et si ce n'est un roman, c'est de la grande littérature qu'il nous offre là. A ne pas rater pour ceux qui aiment la littérature espagnole. A coup sûr, un très bon livre.

PS : Je devrais changer ma critique puisque dans L'Imposteur, Cercas reconnaît avoir menti lui aussi et que ce qu'il avait présenté comme un récit dans "Les Soldats de Salamine" est pure fiction... Comme je note les livres selon mon plaisir à les avoir lus, je ne vais pas changer ma notation, mais quelque part, quelle déception. Certes, n'est-ce pas le propre de tout roman d'emmener le lecteur par la main, mais le mensonge, le fait de présenter son oeuvre non comme un roman mais comme un récit, reste-t-il du ressort romanesque ?
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Javier Cercas, écrivain en manque de succès ou journaliste en manque de reconnaissance ?

C'est la question que l'auteur se pose tout au long de ses « Soldats de Salamine ». Suite à une petite chronique pour son journal, il entend parler d'une anecdote anodine vieille de plus de 60 ans.

Nous sommes à la fin de la guerre civile espagnole. L'écrivain Rafael Sánchez Mazas, un des fondateurs de la Phalange, réchappe du peloton d'exécution. Un soldat le découvre terré derrière des buissons et pointe son fusil sur lui. Il le regarde longuement dans les yeux et crie à ses supérieurs : « Par ici, il n'y a personne ! ».

Frustré après avoir écrit 2 romans passés sous un anonymat quasi absolu, Javier Cercas se pose beaucoup de questions sur son avenir professionnel, ses désirs, ses ambitions. Il se dit qu'il n'est pas fait pour être romancier. Il a d'ailleurs abandonné tout espoir et idée de ré-écrire, un jour. Il a fallu donc beaucoup d'insistance de son entourage, de ses rencontres pour le persuader de faire de cette histoire un roman. Et non pas un roman fictif, basé sur l'imagination d'un auteur, mais un roman de faits réels.

Nous suivons donc le parcours de Javier Cercas dans l'acheminement de son roman, son travail de documentation, la recherche de témoins d'époque, la confrontation de ces témoignages et l'étude de la véracité. Un long travail laborieux, parsemé de joie mais aussi beaucoup de doutes... Javier Cercas va s'appliquer à nous décrire Rafael Sánchez Mazas, autour de cette exécution manquée, le plus objectivement possible, ses qualités littéraires, ses implications dans la Phalange et dans l'Histoire Espagnole...

Description de la guerre civile, vision des nationalistes, des phalangistes et des franquistes, pour une sombre histoire de l'Espagne. Une histoire dans l'Histoire où à tous les coups, l'Espagne est perdante...

Et les doutes de l'auteur, ses interrogations sur l'intérêt de renouer avec cette époque, sur les difficultés à terminer son roman, un roman « bancal » à qui il manque une fin... Et s'il tentait de retrouver ce soldat, celui qui a épargné la vie d'un chef de la Phalange ? Un pari fou, une tentative désespérée pour coller au plus près de la réalité ? Mais quelle fin à son roman, cela pourrait provoquer ?...
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Ce livre a pour intention de restituer le plus complètement et le plus objectivement possible la personne que fut Rafaël Sanchez Mazas, initiateur de la Phalange. Partant d'un fait avéré, à savoir l' exécution ratée de Sanchez Mazas à la fin de la guerre civile espagnole, suivie d'une anecdote rapportée par plusieurs personnes qui en ont entendu le récit direct par l'intéressé, Cercas trace un portrait aussi exact que possible de cet homme qui fut politicien, militant et écrivain.

Pourquoi un républicain chargé d'arrêter les nationalistes en fuite, a-t-il affirmé « Par ici il n'y a personne » à ses camarades, tout en pointant son arme sur un Rafaël Sanchez Mazas ? Etrange rencontre, regard intense échangé avec cet homme.

Puis, une nouvelle rencontre avec des républicains déserteurs, étrange pacte de réciprocité en cas de besoin : les adversaires politiques sont jeunes, ardents, courageux. On imagine mal cette considération réciproque, ce sens partagé de l'honneur et du courage. La guerre se termine, les nationalistes vont la gagner, Franco n'est pas encore au pouvoir. Sanchez Mazas pourra-t-il « se souvenir » de sa dette envers les jeunes républicains, ses « Amis de la forêt » qui l'ont aidé alors qu'il était en guenilles, affamé, en fuite ? Il va devenir célèbre, ministre de Franco, vite limogé car peu actif, devenir millionnaire après un héritage, vivre dans un grand confort et écrire quelques bons poèmes et bons textes en prose, sans toutefois atteindre à la gloire littéraire.

Nous découvrons cet homme, « vieja camisa » (vieille chemise, c-à-d un des plus anciens phalangistes par opposition à ceux qui ont rallié la Phalange tardivement pour se refaire une réputation, sous Franco), avec son idéal bourgeois: monarchie, famille, religion, patrie. Mais pas convaincu par le franquisme, encore moins par ce personnage « grassouillet, général d'opérette et efféminé » qu'était le Caudillo.
Il meurt en 1966 d'un emphysème pulmonaire, laissant derrière lui peu d'argent, peu de biens, une oeuvre de qualité mais succincte. Il se voulait condotierre, féru de chevalerie, pétri d'honneur et d'orgueil. Il se sera montré versatile, peu assidu au travail d'écriture, confit dans des convictions d'un autre âge, d'un autre monde. Une sorte d'aristocrate décadent.
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Les soldats de Salamine est une oeuvre qui échappe à la classification. Dans ce récit-document autobiographique mettant en scène des personnages réels, Javier Cercas se présente comme un journaliste médiocre, dont les velléités d'écrivain semblaient être mortes avant terme jusqu'à ce qu'il se prenne curieusement d'une passion pour la destinée mouvementée de l'écrivain phalangiste Rafael Sanchez Mazas. Ce dernier échappa au peloton d'exécution de masse organisé en toute hâte par les troupes républicaines en perdition, grâce au silence d'un milicien républicain . Lors de ses pérégrinations pour passer en zone contrôlée par les troupes nationalistes, il recevra l'aide providentielle d'humbles paysans et d'autres fugitifs, déserteurs de l'armée républicaine ennemie.


Dans la première partie, agrémentée d'extraits d'articles de presse, d'annotations furtives sur un carnet rongé par les ans, Cercas nous explique le cheminement de cette forme d'enquête aboutissant à la deuxième partie du livre, c'est à dire le récit a la troisième personne du singulier de la vie de Rafael Sanchez Mazas, poète courtois et raffiné mais confidentiel, chroniqueur de talent et prosateur exalté, fasciste de la première heure et théoricien de la Phalange; et la reconstitution de ses pérégrinations, miraculé et fugitif, luttant pour sa survie. le troisième volet est un retour à la réalité vécu par l'écrivain enquêteur que sa profession de journaliste amène à interviewer Roberto Bolano, éminent écrivain Chilien contemporain. Bolano lui conte alors une histoire sur une de ses connaissances, rencontrée durant sa vie vagabonde faite de petits boulots, qui fut vétéran de la guerre civile et de la légion étrangère, récit qui ouvre des perspectives inattendues, promettant de lui permettre, enfin, de finir son livre laissé inachevé, en souffrance.


Débutée dans une narration mâtinée d'auto dérision et d'humour complice, les Soldats de Salamine s'achève en une note résolument mélancolique. Ce récit oeuvre pour la réconciliation, mais à mon sens surtout, pour le souvenir des soldats qui sauvent toujours au dernier moment la civilisation, pour reprendre l'idée d'Oswald Spengler citée par Cercas, sacrifice qu'on a toujours tôt fait d'evincer de notre mémoires, et qui condamne ainsi les braves à une seconde mort, l'oubli. Une oeuvre intelligente, intéressante par sa structure, par la réflexion qu'elle apporte sur la création littéraire et par sa charge émotionnelle.
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Ce livre a la réputation d'avoir eu un grand succès en Espagne. Mais pour ceux qui ne connaissent pas les protagonistes de la guerre civile espagnole, il présente moins d'intérêt. Et j'ai eu un peu de peine à faire la différence entre le personnage du journaliste qui enquête sur Rafael Sanchez Mazas et Javier Cercas.
Mazas est l'un des fondateurs de la Phalange. En 1938 il a fait partie d'un groupe destiné à être fusillé, mais il a réussi à s'échapper. Et le soldat qui l'a découvert dans un fourré, l'a regardé et s'est détourné. le journaliste voudrait retrouver ce soldat et comprendre ce geste.
Cercas fait revivre bien des personnages qui sont morts dans cette guerre ou dans le seconde guerre mondiale sans que l'on ait retenu leurs noms.
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"Les Soldats de Salamine" est un très beau livre, difficile à classer. Les rapports entre histoire, roman, fiction, mémoire se complètent sans s'opposer et favorisent le propos du récit que je trouve bien structuré.

En abordant un des très nombreux aspects de la Guerre d'Espagne (juillet 1936 - avril 1939) avec la vie de Rafael Sánchez Mazas (écrivain, journaliste, fondateur de la Phalange, mouvement politique d'extrême droite créé avant la Guerre d'Espagne), Javier Cercas opère une belle réflexion sur la mémoire et de sa transmission. Mémoire historique, officielle mais aussi mémoire individuelle, enfouie, oubliée, meurtrie.
Le fil de cet ouvrage rend compte de tout le travail nécessaire d'appropriation de ces mémoires qui se confondent et du processus de création littéraire susceptible de faire émerger, non toute la réalité, mais un récit qui soit capable de s'en approcher le plus possible. J'ai beaucoup aimé.

Un conseil : pour bien s'imprégner du livre, je pense que quelques connaissances sur la Guerre d'Espagne sont requises.
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Passée la surprise de ne pas avoir un roman sous les yeux, mais un récit journalistique, j'ai pu apprécier de découvrir un évènement particulier ayant eu lieu lors de la guerre civile espagnole, dont je ne connaissais hélas pas grand-chose.
Nous suivons donc Rafael Sanchez Mazas, phalangiste (donc plutôt du côté des franquistes), dont le destin bascula dans une forêt.
C'est grâce au travail d'un journaliste-écrivain que nous devons la mise en lumière de ces faits. Ces derniers ne sont en fait réellement abordés que dans la seconde partie du récit. le début étant consacré à la genèse de ce travail, et au long cheminement du journaliste. Cette partie, bien que nécessaire, reste, à mes yeux la plus fastidieuse, et la plus poussive.
Mon intérêt ne s'est véritablement épanoui que dans la troisième partie du livre, lorsque le journaliste s'attache à retrouver un membre du camp adverse, Miralles le Républicain, et à lui donner la parole. le récit prend soudain une autre forme, acquiert autre légitimité qui jusque-là lui faisait quelque peu défaut.
Il faut également souligner la qualité de la traduction, donnant ainsi un récit historique une dimension assez romanesque, et permettant une lecture agréable.

Lien : http://leblogdemimipinson.bl..
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Les Soldats de Salamine, Javier Cercas. Après tous les articles et, les passionnantes critiques et analyses de multiples Babeliotes, je n'ai que peu de choses à rajouter. C'est un livre qui m'a marquée. La guerre civile, fût un drame pour ceux qui l'ont connue, elle a déchiré des familles et un pays entier. le long regard qui a sauvé la vie du fugitif est une pièce clé du récit, un long instant littéraire.
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C'est la sortie de la BD, succès annoncé de la rentrée qui m'a décidée à commencer par le commencement ... lire le roman éponyme avant la découverte de la BD.
Salamine ?
Une île dans une baie bien abritée, près d'Athènes. Il y eut une bataille dite "La bataille navale de Salamine", elle s'est déroulée dans les détroits en 480 av. J.-C. Elle a opposé les Grecs et les Perses pendant une des guerres médiques.
"La victoire a été pour une très grande partie due au travail des rameurs (c'est-à-dire des citoyens les plus pauvres jusque-là écartés des fonctions politiques). Devenant une des parties les plus importantes de l'armée athénienne, ils vont demander une plus grande participation à la vie politique de leur cité. C'est une étape décisive vers la démocratisation de la vie politique d'Athènes."
L'auteur décrivait son roman comme étant à mi chemin entre un récit réel et une manipulation romanesque. Nous sommes donc prévenus.
Nous nous retrouvons plongés dans les méandres de la guerre civile espagnole, à suivre la genèse et sommes les témoins de la descente en fascisme de certains hommes ... après où sont les bons et où sont les mauvais ... pas si simple que ça de faire le tri !
Une chose est sûre ... je cours chercher la BD.
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