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Sophie Benech (Traducteur)
EAN : 9782909589008
54 pages
Interférences (11/08/2003)
4.09/5   47 notes
Résumé :
Certains aiment les livres comme on aime des personnes : ils les rencontrent, s'en éprennent, s'en déprennent, les caressent, les rejettent, les oublient, les traquent, les retrouvent, les possèdent et les perdent. Si la vie les empêche de les collectionner et de les enfermer dans la prison d'une bibliothèque, ils vont leur rendre visite ailleurs et parfois les enlèvent. Ils les rêvent. Nous connaissions déjà Chalamov l'écrivain des camps, le poète de la Sibérie. Vo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Les bibliothèques, les livres, les pages, les mots...l'encre, les feuilles de papier, les reliures, et les lieux jusqu'aux plus improbables où Valmar Chalamov a trouvé des livres, sans jamais les posséder, mais en parvenant parfois temporairement, luxe suprême, à pouvoir en disposer librement.

Il faut dire bien sûr que cet écrivain russe, né en 1907, a passé en tout une vingtaine d'années dans les camps, à Vichéra d'abord pour opposition à Staline, puis surtout dans les mines d'or de Kolyma, goulag de Sibérie, pour " activité contre-révolutionnaire trotskiste " ( son oeuvre principale " Les récits de Kolyma " en témoigne ).

Pas de livres en vue, bonheur quand quelques bribes de journaux vous tombent sous les yeux par hasard. Il faut survivre avant tout et la lecture est un luxe inaccessible évidemment. Puis, l'incompréhension glaçante quand un jour "je regardais les lignes et je ne comprenais rien ". le dénuement, la perte de soi-même au point d'avoir " désappris " à lire. Inconcevable !

Je n'en dévoilerai pas davantage. Il faut lire ses quelques pages, une cinquantaine, ses mots justes, son témoignage d'une vie de lecture si éloignée de la notre, mais où j'ai retrouvé les invariants du plaisir infini de lire.

Un bel hymne à la lecture assurément.
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Un tout petit livre... qui attend depuis des lustres... sur mes rayonnages...il aura fallu un einième déménagement... pour revisiter les textes honorés, lus, et ceux, qui par des injustes hasards sont restés en attente.
J'ai extirpé d'un des cartons, hier soir... ce texte, qui comme au moment de l'achat m'a interpellée par son titre et la couverture très expressive , habitée de rayonnages de livres . En deux heures...j'ai réparé mon manquement, et suis enthousiaste à l'extrême, à tel point que je vais me précipiter pour découvrir le reste de ses écrits dont la Correspondance de Chalamov à Pasternak…
Quelques éléments de son parcours tumultueux et éprouvant de dissident au régime : Il naît en 1907 à Vologda. Il a dix ans l'année de la révolution. Ne pouvant faire d'études supérieures dans sa ville natale en raison de ses origines (il est fils de prêtre), il part pour Moscou en 1923 et réussit l'examen d'entrée à la faculté de droit de l'université de la capitale. Il travaille dans une tannerie pour payer ses études.
Arrêté une première fois en 1929 pour avoir participé au mouvement d'opposition contre Staline, il est envoyé à Vichéria, filiale du « camp à destination spéciale » des Solovki. Libéré en 1931, il revient à Moscou où il travaille comme journaliste et publie quelques récits, jusqu ‘à sa seconde arrestation en 1937 pour « activité contre-révolutionnaire trotskiste » Cette fois, il part pour dix-sept ans. Ce n'est qu'en 1956, après le XXe congrès dénonçant le culte de Staline, qu'il est enfin réhabilité et revient vivre à Moscou… Il mourra en 1982 dans un asile psychiatrique, n'ayant réussi à publier dans son pays que quelques recueils de poèmes. Son oeuvre majeure, les Récits de la Kolyma » n'est parue en Russie qu'à la fin des années 80.

J'ai pris le temps de retranscrire ses éléments biographiques… car il rend ce texte de Chalamov où celui-ci parle de ses amis les livres… d'autant plus poignant et vital.
A travers ses emprisonnements successifs, qui l'ont privé de la liberté, tan d'années Chalamov trouva quelques petites lueurs d'espérance… fournies par les livres qui se sont trouvés sur son chemin, pour l'aider à tenir, à survivre. Des trésors lus… en prison, grâce à l'indifférence du personnel face aux condamnés, mais aussi grâce à des personnes plus bienveillantes, dont un certain Karaïev, ingénieur de l'exploitation de tourbe, où se trouva relégué un long moment l'auteur. Karaïev, avec les subventions reçues pour l'achat de livres, se déplaçait lui-même à Moscou (cinq heures de trajet de la tourbière à la capitale…)
« Karaïev se rendait en personne chez les bouquinistes de la capitale en compagnie de la bibliothécaire..Il emballait et expédiait lui-même ses précieuses trouvailles dans ce coin perdu de la région de Kalinine. C'est seulement après son départ que la bibliothèque était retombée dans les sentiers battus…(p.47)
le manque de censure dans certaines prisons, par indifférence des autorités envers les détenus permit aussi à Chalamov, quelques belles trouvailles : »Il est possible que les autorités soient conscientes du caractère éminemment fugace de la lecture en prison, peut-être est-ce pour cela qu'elles ne préoccupent guère du contenu criminel des bibliothèques de prison » (p.23)
Il n'en reste pas moins que l'écrivain décrit aussi douloureusement l'absence de lectures, mais aussi plus dramatiquement, l'absence de force, d'envie de lire dans des conditions journalières inhumaines, abrutissantes : « Puis il y eut la mine, l'abattage de l'or, quatre années terribles durant lesquelles chaque jour, chaque heure qui passait nous apprenait combien fragile est le vernis dont la civilisation revêt l'être humain (…) Nous avions oublié les livres. Il n'y avait pas de place pour eux dans nos pensées, ni dans notre lexique d'une vingtaine de mots- « lever », « travail », « repas », « pic », « pelle », « escorte », « répartiteur », « gardien », etc. le mot « livre » nous semblait inconnu, peut-être même n'avait –il jamais existé, mais il contenait, de même que le mot « journal » quelque chose d'infiniment important qui nous était inaccessible. (p.24-25)
Un court texte, d'une rare densité, qui nous dit de multiples façons, notre bonheur et notre chance de pouvoir LIRE en toute liberté, dans une nation démocratique. Aller fouiner en librairie, en bibliothèque, comme des choses si évidentes que nous les pensons évidentes et éternelles…
J'achève le ressenti de ce coup de coeur par les mots très significatifs de l'écrivain russe : « Les livres sont des êtres vivants. Ils peuvent nous décevoir, nous distraire. Il y a dans la vie de tout homme cultivé un livre qui a joué un grand rôle dans son destin. (…)Les livres sont ce que nous avons de meilleur en cette vie, ils sont notre immortalité. » (p.53-54)
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Varlam Chalamov (1907-1982) est un auteur que je découvre avec ce court récit sur sa relation avec les livres et la lecture. C'est plus facile que de commencer avec « Les récits de la Kolyma » qui ne font pas moins de 1700 pages ! La version abrégée de 192 pages ne doit pas valoir grand chose.

« Les livres sont ce que nous avons de meilleur en cette vie, ils sont notre immortalité. »

Avoir une bibliothèque à soi, avec des livres que l'on a choisi d'y mettre est un luxe quelque part. Les Grandes Purges des années 30 ont privé Chalamov de ce plaisir. Déporté dans la Kolyma (région au-dessus du cercle polaire arctique) il y passera de très longues années.

J'ai noté quelques auteurs au passage, comme Alexandre Grine (1880-1932) que Chalamov aimait pour sa « poésie touchante, pour la valeur de ce que chaque être humain peut trouver dans ses pages... » Je vais essayer de trouver son roman « L'écuyère des vagues ». Mais avant j'ai un Nikolaï Leskov (1831-1895) qui m'attend dans ma pàl.



Pour aller plus loin :
https://www.franceculture.fr/emissions/series/soljenitsynechalamov



Challenge ABC 2021/2022
Challenge littérature slave orientale
Lien : https://www.babelio.com/grou..
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Dans ce court récit, Varlam Chalamov nous montre comment des livres peuvent être un enjeu de pouvoir et de liberté - dans des temps et lieux comme l'incarcération en Russie.
Il s'inspire bien sûr de ses années de "forçat", où il était par définition privé de droits, à quoi s'est ajouté un autre droit dont on l'a privé : celui de s'enrichir et de penser librement. Il explique très simplement et très clairement comment les livres qui atterrissent dans les bibliothèques - ou entre les mains des détenus - dépendent entièrement de la culture (ou plus souvent, de l'inculture...) des bibliothécaires qui imposent ce qui peut ou doit être lu.

Ce constat et bien sûr terrifiant pour toute personne de notre société moderne avec une addiction à la lecture ! Une fois passé cet épisode affreux, l'auteur fait aussi un bel éloge de la littérature qui fait renaître à l'état d'être humain dans les conditions les plus "extrêmes".

Un bel hommage rendu à la lecture, à la force et aux pouvoirs des livres et à l'intemporalité de certains récits.
Une découverte émouvante qui a l'originalité de montrer ce qu'était le totalitarisme stalinien à travers l'usage des livres.
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Chalamov, connu pour ses Récits de la Kolyma qui retracent ses expériences au goulag, narre les différentes bibliothèques qui ont jalonné sa vie mouvementée, comment dans chaque situation il a eu accès aux livres et à la littérature, comment certains ouvrages l'ont marqué à vie, comment la prison lui a volé une part de son évasion littéraire...

Vu le sujet et les avis dithyrambiques qu'on peut trouver partout sur cet ouvrage, je m'attendais à une poésie, un ode à la littérature plus qu'à un parcours personnel brisé par le régime stalinien. Bien que son accès aux livres vu les circonstances épouvantables dans lesquelles l'auteur a pu se retrouver est incroyable et mérite récit, je n'ai pas ressenti un réel coup de poing à cette lecture. le récit en lui-même est assez froid et manque de beaucoup de détails, ne va pas assez en profondeur quand souvent une phrase ouvre à une multitude d'explications. Là où beaucoup ont été bouleversés, je suis restée presque de marbre à cause du témoignage peu prolixe, d'allers et retours dans les évènements sur l'axe du temps souvent sans pause... Certaines anecdotes néanmoins placent bien le contexte ; c'est finalement tout l'aspect historique de l'organisation des camps, du contrôle du régime ou du rapport/accès aux livres qui est presque plus intéressant que les "bibliothèques" en soi.
Outre ces horribles circonstances de détention et de privation de liberté intellectuelle, on a le sentiment aussi de lire ce que beaucoup auraient pu écrire. Car presque tout le monde a une histoire, des bibliothèques, une vie de lecture et un rapport aux livres.
Suis-je passée à côté ? Possible. le relirai-je ? Pas forcément.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
J'ai toujours acheté des livres, ne fût-ce que quelques-uns, ne fût-ce qu'un par mois ou tous les deux mois. Quand je me suis marié, j'ai cru que j'allais pouvoir en rassembler un certain nombre - mes livres à moi, que je pourrais annoter, dont je pourrais corner les pages, des livres que je pourrais serrer, froisser, dont je pourrais caresser la reliure en écoutant ce bruissement plus doux encore que celui des feuilles d'arbres dans une forêt - celui des pages d'un livre.
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Stéphan Zweig dit que les livres sont "un monde disparate et dangereux". Nul ne contestera la justesse de cette définition. J'ajouterai que les livres, c'est aussi un monde qui ne nous trahit jamais. Notre âge nous dicte nos goûts, il limite et focalise notre perception. Selon les différentes époques de notre vie, nous cherchons et nous trouvons des choses différentes dans le même roman. Je sais très précisément ce que je cherchais dans -Mont-Oriol - de Maupassant à dix ans, à quinze, à vingt, à quarante et à cinquante ans. (p.52)
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La lecture en prison a ses particularités : là-bas, on ne retient rien. Toute l'attention, toute la force de l'esprit sont concentrées sur les interrogatoires, sur l'instruction de "l'affaire", sur l'adaptation psychologique à la prison, à son mode de vie, à ses habitudes et à ses maîtres. (...)
La lecture pouvait seulement distraire et encore, très peu, vraiment à peine, et pas suffisamment pour apaiser l'âme agitée du prévenu.
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Pour comprendre l'importance que Chalamov accordait aux livres et en l'occurrence aux bibliothèques, il faut remonter à son enfance. Né en 1907 à Vologda (ville importante et place forte au temps des Romanov).

Dans ses souvenirs Chalamov n'a eu, petit enfant, que deux livres : un de conte, un autre de l'alphabet de Tolstoï. A l'école primaire, il n'y avait pas de livres, simplement des manuels jusqu'en 1918 date de l'ouverture de la première bibliothèque ouvrière. Les ouvrages qui 'y trouvaient avaient été réquisitionnés chez des propriétaires terriens.

Il a 10 ans l'année de la Révolution. Ne pouvant faire d'études supérieures en raison de ses origines (fils de pope). Il part pour Moscou en 1923 et réussit l'examen d'entrée de la Faculté de Droit de la capitale. Afin de payer ses études, il travaille dans une tannerie.

Arrêté une première fois en 1929 pour avoir diffusé "Le Testament de Lénine" , il est envoyé en Sibérie. Libéré en 1931, il revient à moscou et travaille comme journaliste jusqu'à sa seconde arrestation lors des grandes purges de 1937, pour activités contre révolutionnaire trotskiste. Condamné à 17 ans de travaux forcés dans les mines d'or de la Kolyma.

Pendant ces années terribles d'incarcération ou les prisonniers subissaient les pires exactions tant du côté des gardiens que des prisonniers de droit commun vis à vis des prisonniers politiques. Il n'avait aucun moyen de s'évader, même par la pensée, livres, papier et crayons étant interdit. Seuls la faim et le froid l'obsédaient au point qu'il avait perdu son ancienne faculté de lire, le déshumanisant peu à peu.

Libéré en 1951, il reste encore 2 ans en relégation en Extrême Orient. C'est durant cette période, dans un village de travailleurs libres où il résida, et où il y avait un bibliothèque conséquente de deux mille titres regroupés et conservés avec soin par un vieil érudit qu'il reprit contact avec les livres, qu'il renoua avec cette passion inextinguible.

Ce livre est le récit de cette traversée du "désert". De la bêtise et de la cruauté humaine portées aux nues par un régime totalitaire.

En 1953, après la mort de Staline il est autorisé à quitter la Kolyma mais reste interdit de séjour à Moscou. Ce n'est qu'en 1956 après le XXème congrès dénonçant le culte de Staline qu'il est réhabilité et revient à moscou.

Il meurt en 1982 dans un asile psychiatrique....
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Les livres sont ce que nous avons de meilleur en cette vie, ils sont notre immortalité.
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Videos de Varlam Chalamov (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Varlam Chalamov
Dans ses "Récits de la Kolyma", un recueil de nouvelles écrites après sa libération, l'écrivain russe Varlam Chalamov témoigne de l'enfer des goulags staliniens, auquel il a survécu après une vingtaine d'années de pénitence. L'histoire de Varlam Chalamov a été source d'inspiration pour Gisèle Bienne et Michaël Prazan, invités de Nicolas Herbeaux pour transmettre ce témoignage marquant et essentiel.
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