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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un tout petit livre... qui attend depuis des lustres... sur mes rayonnages...il aura fallu un einième déménagement... pour revisiter les textes honorés, lus, et ceux, qui par des injustes hasards sont restés en attente.
J'ai extirpé d'un des cartons, hier soir... ce texte, qui comme au moment de l'achat m'a interpellée par son titre et la couverture très expressive , habitée de rayonnages de livres . En deux heures...j'ai réparé mon manquement, et suis enthousiaste à l'extrême, à tel point que je vais me précipiter pour découvrir le reste de ses écrits dont la Correspondance de Chalamov à Pasternak…
Quelques éléments de son parcours tumultueux et éprouvant de dissident au régime : Il naît en 1907 à Vologda. Il a dix ans l'année de la révolution. Ne pouvant faire d'études supérieures dans sa ville natale en raison de ses origines (il est fils de prêtre), il part pour Moscou en 1923 et réussit l'examen d'entrée à la faculté de droit de l'université de la capitale. Il travaille dans une tannerie pour payer ses études.
Arrêté une première fois en 1929 pour avoir participé au mouvement d'opposition contre Staline, il est envoyé à Vichéria, filiale du « camp à destination spéciale » des Solovki. Libéré en 1931, il revient à Moscou où il travaille comme journaliste et publie quelques récits, jusqu ‘à sa seconde arrestation en 1937 pour « activité contre-révolutionnaire trotskiste » Cette fois, il part pour dix-sept ans. Ce n'est qu'en 1956, après le XXe congrès dénonçant le culte de Staline, qu'il est enfin réhabilité et revient vivre à Moscou… Il mourra en 1982 dans un asile psychiatrique, n'ayant réussi à publier dans son pays que quelques recueils de poèmes. Son oeuvre majeure, les Récits de la Kolyma » n'est parue en Russie qu'à la fin des années 80.

J'ai pris le temps de retranscrire ses éléments biographiques… car il rend ce texte de Chalamov où celui-ci parle de ses amis les livres… d'autant plus poignant et vital.
A travers ses emprisonnements successifs, qui l'ont privé de la liberté, tan d'années Chalamov trouva quelques petites lueurs d'espérance… fournies par les livres qui se sont trouvés sur son chemin, pour l'aider à tenir, à survivre. Des trésors lus… en prison, grâce à l'indifférence du personnel face aux condamnés, mais aussi grâce à des personnes plus bienveillantes, dont un certain Karaïev, ingénieur de l'exploitation de tourbe, où se trouva relégué un long moment l'auteur. Karaïev, avec les subventions reçues pour l'achat de livres, se déplaçait lui-même à Moscou (cinq heures de trajet de la tourbière à la capitale…)
« Karaïev se rendait en personne chez les bouquinistes de la capitale en compagnie de la bibliothécaire..Il emballait et expédiait lui-même ses précieuses trouvailles dans ce coin perdu de la région de Kalinine. C'est seulement après son départ que la bibliothèque était retombée dans les sentiers battus…(p.47)
le manque de censure dans certaines prisons, par indifférence des autorités envers les détenus permit aussi à Chalamov, quelques belles trouvailles : »Il est possible que les autorités soient conscientes du caractère éminemment fugace de la lecture en prison, peut-être est-ce pour cela qu'elles ne préoccupent guère du contenu criminel des bibliothèques de prison » (p.23)
Il n'en reste pas moins que l'écrivain décrit aussi douloureusement l'absence de lectures, mais aussi plus dramatiquement, l'absence de force, d'envie de lire dans des conditions journalières inhumaines, abrutissantes : « Puis il y eut la mine, l'abattage de l'or, quatre années terribles durant lesquelles chaque jour, chaque heure qui passait nous apprenait combien fragile est le vernis dont la civilisation revêt l'être humain (…) Nous avions oublié les livres. Il n'y avait pas de place pour eux dans nos pensées, ni dans notre lexique d'une vingtaine de mots- « lever », « travail », « repas », « pic », « pelle », « escorte », « répartiteur », « gardien », etc. le mot « livre » nous semblait inconnu, peut-être même n'avait –il jamais existé, mais il contenait, de même que le mot « journal » quelque chose d'infiniment important qui nous était inaccessible. (p.24-25)
Un court texte, d'une rare densité, qui nous dit de multiples façons, notre bonheur et notre chance de pouvoir LIRE en toute liberté, dans une nation démocratique. Aller fouiner en librairie, en bibliothèque, comme des choses si évidentes que nous les pensons évidentes et éternelles…
J'achève le ressenti de ce coup de coeur par les mots très significatifs de l'écrivain russe : « Les livres sont des êtres vivants. Ils peuvent nous décevoir, nous distraire. Il y a dans la vie de tout homme cultivé un livre qui a joué un grand rôle dans son destin. (…)Les livres sont ce que nous avons de meilleur en cette vie, ils sont notre immortalité. » (p.53-54)
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Ce tout petit volume dit en quelques cinquante pages l'amour des livres, la passion pour la lecture et la souffrance d'en être privé.
Varlam Chalamov c'est l'homme des Récits de la Kolyma, l'homme qui a résisté à deux condamnations à la déportation et qui a passé 17 ans de sa vie au Goulag.
Le livre s'ouvre sur un aveu « Je ne me rappelle pas avoir appris à lire et j'ai l'audace de croire que j'ai toujous su. »
Le ton est donné, et l'auteur nous fait faire le tour des bibliothèques qu'il a fréquenté, les bibliothécaires qu'il a croisé « Maroussia Pétrovna, les joues rouges comme ce n'est pas possible (..) distribuait des livres aux reliures dorées couverts de givre ».
C'est là qu'il va faire connaissance avec les héros d'Alexandre Dumas et que s'allumera chez lui le goût de la littérature.
Il aura toujours du mal à lire et travailler dans les bibliothèques « Lire en présence d'autrui m'a toujours été désagréable, j'ai presque honte (..) n'est-ce pas troublant ? Comme si la lecture était un vice secret. »

« J'ai toujours acheté des livres » dit-il mais tous furent détruits lors de son arrestation et il confie « Je regrette de n'avoir jamais possédé ma propre bibliothèque » on se sent un peu honteux d'avoir à côté de soi un pile de livres qui nous attendent et Chalamov nous invite à être attentif à la qualité de nos lectures « Nous lisons des milliers de pages imprimées qui ne méritent pas tout ce temps perdu » venant de lui cet mise en garde est de grande valeur.
En déportation il a presque perdu le goût et la faculté de lire et les pages consacrées à cet épisode sont poignantes, heureusement grâce à une femme médecin il va revenir à la lecture « ma protectrice prescrivit de différer ma sortie et m'apporta un livre (..) je lus ce livre avec attention, et je retrouvai le plaisir de lire, d'être captivé par un livre, de pénétrer sans un regard en arrière dans le monde d'un auteur »

C'est un livre magnifique qui, je n'ai pas honte de le dire, m'a fait monter les larmes aux yeux à plusieurs reprises. Il va trouver place à côté de Gardiens des livres du même éditeur. Vous pouvez aller lire le billet de Frédérique ou de Cuné sur ce livre

Faites une place à ce livre dans votre bibliothèque car comme le dit Varlam Chalamov “les livres, c'est un monde qui ne nous trahit jamais”
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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