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Capitale du sud tome 1 sur 3
EAN : 9782253103523
576 pages
Le Livre de Poche (28/09/2022)
  Existe en édition audio
4.23/5   859 notes
Résumé :
Enfermée derrière deux murailles immenses, la cité est une mégalopole surpeuplée, constituée de multiples duchés. Commis d’épicerie sur le port, Nox est lié depuis son enfance à la maison de la Caouane, la tortue de mer. Il partage son temps entre livraisons de vins prestigieux et sessions de poésie avec ses amis. Après un coup d’éclat, il hérite d’un livre de poésie qui raconte l’origine de la cité. Très vite, Nox se rend compte que le texte fait écho à sa propre h... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (209) Voir plus Ajouter une critique
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J'aime beaucoup le projet littéraire sous-jacent. Intitulé « La Tour de garde », c'est un cycle composé de deux trilogies : Une trilogie pour la capitale du Sud, que je viens donc de démarrer avec ce tome 1, et une pour celle du Nord, chacune écrite par deux auteurs, respectivement Guillaume Chamanadjian et Claire Duvivier. Une épopée écrite à quatre mains donc dans laquelle les univers sont communs au cycle mais où chaque auteur développe sa propre intrigue urbaine et maitrise son territoire y apportant son ton, ses couleurs, son ambiance. Dans laquelle aussi chaque auteur a son style d'écriture propre.

Comme l'expliquent les auteurs dans une interview qu'il est possible de retrouver sur la toile, « la Capitale du Sud, c'est Gemina. Une ville tentaculaire, inspirée par Sienne et la Florence de la Renaissance. Une cité chaotique aux ruelles protéiformes, divisée en quartiers régis par des ducs, qui s'affrontent sur le terrain politique pour la gloire, l'argent. Gemina, c'est aussi la ville de la poésie, de la gastronomie, du vin. Tandis que La Capitale du Nord c'est Dehaven. Une ville inspirée par l'Amsterdam du Siècle d'or : une cité traversée par des canaux, prospère économiquement, même si sa richesse repose sur l'exploitation de ses colonies. À Dehaven, la science et la raison tiennent une place prépondérante, jusque dans l'agencement des rues et des quartiers ».
Et bien entendu il y a des passerelles entre les deux capitales, entre les deux trilogies, nous voyons dès ce 1er tome par exemple des personnages qui voyagent d'une ville à l'autre, et les menaces qui planent au-dessus des deux villes sont éminemment liées. On pressent dès la lecture de ce premier tome que les capitales vont s'influencer respectivement, chacune gardant cependant sa culture, sa façon de vivre, ses us et ses coutumes et ses mythes fondateurs.

Il ne s'agit nullement de science-fiction, on le comprend du fait de la sensation immédiate de saut dans le passé que le lecteur ressent dès les premières pages, dès le prologue, du fait aussi de l'absence de toute technologie futuriste, mais c'est un livre de pur fantasy dans le sens où notre héros est confronté à un phénomène fantastique inexpliqué : le passage d'un monde à l'autre. Hormis ce point, présent seulement à quelques moments particulièrement épiques, l'essentiel du livre fait la part belle au fonctionnement de la ville, à ses senteurs, ses bruits, ses secrets, sa lumière, ses passages sombres. La richesse du style, les nombreux personnages attachants et intéressants, l'art de la narration, les décors magnifiques, les enjeux subtils et passionnants, sans oublier l'omniprésence de délices culinaires qui maintient en éveil tous nos sens constituent bien le coeur de ce tome.

Le prologue de quelques pages nous happe immédiatement…Nous sommes plongés dans une guerre qui oppose le Duc Serviant au Duc d'Adelphes, la Maison de la Tortue à la Maison du dauphin, la soeur de Serviant ayant été capturée par Adelphes. Mais ce qui nous laisse bouche bée est la découverte faite par le Duc Serviant dans les souterrains de sa demeure : en voulant fuir l'ennemi par ces passages secrets, il découvre horrifié, deux enfants sales, immergés dans leurs déjections, un frère et une soeur aux yeux blancs à force d'être enfermés. Surnommés les Suceurs d'Os, Nox et Daphné, dont les liens familiaux avec Serviant vont se clarifier au cours de l'intrigue, vont devenir les protégés du Duc. Nox, devenu commis d'épicier, désormais adolescent, connait la ville comme sa poche et c'est lui qui va nous servir de guide pour déambuler dans tous les coins de cette ville portuaire, immense cité entourée d'une double muraille, composée de plusieurs clans dirigés par des Ducs ayant chacun un animal pour emblème.
Le principal problème, source de tensions politiques, voire de corruptions, est l'acheminement des marchandises entre le Port et les clans du Nord. Serviant a peut-être trouvé la solution en ayant le projet ambitieux de construire un canal, s'inspirant par là même des canaux de la Capitale du Nord. Ce canal est rejeté par certains clans car il remet en cause leur hégémonie, alors que d'autres y voient un moyen d'obtenir plus facilement les marchandises. Tensions que Serviant, très calculateur, pense pouvoir régler au moyen d'un mariage avec un des clans problématiques…Nox, qui connait bien la ville et les gens, sera missionné par Serviant pour tenter de comprendre les complots, pour convaincre les riverains, pour dénouer les tentatives d'assassinat. Missionné ou manipulé plutôt…


Je ne suis pas une grande adepte des romans de fantasy, j'aime en lire un de temps à autre seulement, et pourtant j'ai lu celui-ci d'une traite. J'ai tout simplement pris un plaisir fou à le lire et ne l'ai pas lâché de tout le week-end. J'imagine tout à fait que l'intrigue soit de facture classique pour ce genre de roman, un féru de littérature de fantasy ne sera pas étonné me semble-t-il par le scénario, mais la façon de plonger dans cette ville grâce à son ambiance terriblement sensorielle m'a littéralement enchantée. La narration de ce livre est très immersive.

Tout d'abord, le chant et la poésie sont omniprésents et constituent une porte d'entrée dans la Cité, une porte entre les deux mondes aussi, celle de la Cité et celle de l'autre monde où il n'y a rien, nommé Nihilo, découvert par hasard par Nox. Chant composé des bruits mêmes de la ville en vagues rythmiques. le poème sur la fondation de la Cité trouvé par Nox, en effet, reproduit d'une curieuse façon ce chant de la Cité, le chant de la ville et ses propres règles rythmiques et lui permettra de comprendre comment entrer dans ce monde inversé.

Les odeurs et les couleurs ensuite, mis en valeur par la chaleur qui s'abat sur Gemina, ne cessent de nous exploser à la figure à chaque détour de ruelles bondées de marchands ambulants et de crieurs de nouvelles, bondées d'une masse grouillante de vie. Vins et mets saturent l'air de leur odeur. Des vins boisés aux nuances subtiles de cerise noire, de sous-bois et de vanille. Epices, herbes aromatiques titillent les narines, mais aussi beignets à la violette et aux amandes, au miel et à l'écorce d'orange, orechies au lard blanc et au fromage de brebis, gâteaux à l'anis, cannelons à la fègue, cuisine du sud imprégnée d'huile d'olive, nous régalent de leurs saveurs lumineuses et roboratives.

« On dit des habitants de la Cité que le sang ne coule pas dans leurs veines, qu'il a été remplacé par le vin. Grands crus de l'Entre-deux-Murs pour les prestigieuses maisons, tout-venant pour le bas peuple. Et entre les deux une foultitude de nuances de rouge et de blanc. – Dis-moi ce que tu bois, je te dirai d'où tu viens et où tu vas – le dicton se vérifie depuis des siècles. Et bien évidemment, pour que l'âme de la Cité puisse parcourir les habitants comme autant de vaisseaux sanguins d'un tout plus vaste, il fallait bien inventer une gastronomie appropriée ».

Il m'est d'avis que Guillaume Chamanadjian est un passionné de jeu d'échec. Un jeu très proche, le jeu de la Tour de garde, est onmiprésent et présenté de façon passionnante dans ce premier tome. Chaque citoyen semble avoir sur lui ses propres pièces dont la matière et la finition en disent long sur qui ils sont. Jeu stratégique qui semble se déployer grandeur nature au sein de la Cité.


Vous l'aurez compris, ce premier tome est particulièrement prometteur pour le projet littéraire dans sa globalité, projet qui, en plus d'être ambitieux, est beau je trouve quand on comprend que le fonctionnement des villes, leurs aspects politique, économiques, sociétal sont véritablement analysés, décortiqués, entremêlés l'un à l'autre. Je me suis prise à imaginer ce projet avec deux autres extensions, celle de l'est et de l'ouest. Quatre trilogies réunissant quatre auteurs différents…Bon en attendant, il y a de quoi faire et le lecteur a le luxe du choix : il peut lire d'abord la trilogie dédiée à Capitale du Sud puis celle du Nord, ou bien dans l'ordre de parution (Les tomes de Capitale du Sud sont publiés chaque mois d'avril depuis avril 2021 tandis que les tomes du Capitale du Nord sont publiés chaque mois d'octobre depuis octobre 2021), donc en alternant Sud et Nord…un projet réjouissant dans lequel j'imagine certains personnages, pour le moment bien ancrés dans l'une des capitales, se rencontrant plus tard…J'opte pour ma part pour l'entrelacement de l'histoire des deux cités en comptant les lire alternativement. Et ce projet de lecture est tout simplement réjouissant !
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Après la révélation Claire Duvivier l'année passée, Aux Forges de Vulcain se lance dans un projet fantasy d'envergure : une double trilogie réalisée par deux auteurs français, Claire Duvivier (encore) et Guillaume Chamanadjian.
C'est ce dernier qui a la tâche ardue d'entamer l'aventure avec le Sang de la Cité, premier volume de la trilogie Capitale du Sud.
Vous l'aurez compris, il s'agit ici d'entrelacer l'histoire de deux cités : Gemina, Capitale du Sud (dont il sera question ici) et Dehaven, Capitale du Nord (dont s'occupera Claire Duvivier en octobre prochain).
Pour son premier roman et cette première incursion dans le cycle de la Tour de Garde, que nous réserve Guillaume Chamanadjian ?

Gemina, cité des Ducs
Tout commence par une guerre. Celle qui oppose le Duc Serviant de la Caouane (que l'on appelle aussi Maison de la Tortue) et celle du Duc Adelphes du Souffleur (aka la Maison du Dauphin). L'enjeu de cette guerre : une femme, en l'occurrence la soeur du Serviant, gardée captive par Adelphes le sus-nommé.
Et si la bataille tourne rapidement à l'avantage de la Tortue, là n'est pas l'intérêt de ce prologue. Sous le Moineau-du-fou, siège du pouvoir du Dauphin, le Duc Serviant et les siens découvrent deux enfants crottés enfermés dans une cellule ténébreuse. Surnommés les Suceurs d'Os, les deux gosses deviennent vite les petits protégés de Serviant, et si Daphné cause bien des problèmes au Duc du fait de son tempérament de feu, c'est bien de Nohamux dit Nox, dont il sera ici principalement question.
C'est Nox qui sert en effet de guide et narrateur à Guillaume Chamanadjian pour ce premier volume. Grâce à lui, nous découvrons Gemina, une immense cité entourée d'une double-muraille et dont la structure politique s'appuie sur une série de clans dirigés par des Ducs. Chacune des maisons adopte un animal-totem comme emblème et l'on retrouve la maison de la Tortue, du Chien, de l'Hirondelle ou encore de la Baleine. Comme dans toutes les cités de cette taille, un rapport de force particulier régit les échanges entre les puissants clans du Massif au centre de la Cité et les ambitieux clans du Port tout au sud.
Le principal problème politique et commercial du moment : l'acheminement des marchandises venant du Port vers les clans du Nord. Un problème auquel le Duc Serviant pense avoir trouvé une réponse par la construction d'un canal. Un projet épineux tant il remet en cause l'hégémonie des clans du Massif.
C'est dans ce contexte que Nox, fils adoptif officieux de la maison de la Tortue, va tenter de démêler les complots et les tentatives d'assassinats.

Le jeu des trônes
Qu'apporte donc de neuf Guillaume Chamanadjian une fois les bases de son récit et de son monde posé ? En réalité… pas grand chose.
Influencé par Robin Hobb et George R.R. Martin, le français nous montre une aventure qui tient à la fois du traditionnel (et largement balisé) parcours initiatique du jeune héros en quête d'un statut social et de l'affrontement entre maisons nobles qui oscille entre complots sanglants et petites manigances entre amis. Et si Nohamux n'a pas la finesse d'écriture d'un Syffe, il n'en reste pas moins un personnage central tout à fait passionnant et attachant dont le rôle sera loin de se limiter à la lutte de pouvoir qui se profile.
De ce côté, l'auteur français place ses pions avec une grande intelligence et ébauche une intrigue solide et plaisante à suivre qui rappelle La Tour de Garde, un jeu d'échecs propre au monde de Gemina et particulièrement populaire parmi ses habitants. La visite des différentes maisons nobles, les relations qui les unissent, les vieilles rivalités ou les nouvelles alliances, tout ce background contribue à donner de la chair à l'univers du Sang de la Cité.
Heureusement, l'histoire ne compte pas simplement sur un énième brassage de poncifs fantasy pour séduire le lecteur et cherche à trouver une identité propre pour le différencier du tout-venant, un peu à la façon du magistral Un Long Voyage mais sur une note nettement plus fantastique cette fois.

Les sens de la Cité
En prenant son temps, Guillaume Chamanadjian sculpte patiemment sa mégalopole en s'appuyant avant tout sur les sens du lecteur (et du narrateur).
C'est par la poésie et la chanson que l'on pénètre dans Gemina, que l'on découvre les premières légendes autour de la découvertes de Nox et de sa soeur, puis l'on suit notre jeune héros à travers une occupation particulièrement inattendue : celle de commis de cuisine d'un artisan en vins et autres mets précieux pour les maisons nobles de la cité. Dès lors, le récit se teinte des couleurs d'un vin intra-muros, des saveurs de gâteaux au miel et de fougasses chaudes et croustillantes, des cris de marchands ambulants et des plaisanteries des débardeurs à pied d'oeuvre. C'est par l'ambiance que tente de se distinguer (avec bonheur) le Sang de la Cité.
La découverte des maisons et des enjeux politiques va de pair avec les saveurs, la poésie et la littérature de ce monde alors que Nox, pris par l'enthousiasme de la jeunesse, découvre par hasard la magie au coeur de la pierre.
Dès lors, le français saupoudre son monde d'éléments surnaturels, des pouvoirs de bâtisseurs du clan de la Recluse à l'envers-monde découvert par accident par Nox.
Il reste alors beaucoup de sous-intrigues en suspens quand les choses s'accélèrent vraiment pour notre suceur d'os. Alors que les retournements de situation pleuvent, on oublie un temps la beauté des légendes et mythes qui s'infiltrent dans la rues de Gemina pour le bruit des armes. Pas pour longtemps, heureusement, car c'est là tout l'intérêt de ce premier opus : faire naître un univers fantasy qui donne envie d'y retourner, et cet objectif-là, Guillaume Chamanadjian, par sa langue élégante et sa plume volubile, l'atteint pleinement.

Le Sang de la Cité n'a rien de révolutionnaire en soi et, finalement, ce n'est pas forcément ce qu'on lui demande. Guillaume Chamanadjan fait dans le classique mais il le fait bien, tout en apportant une touche personnelle et particulièrement sensorielle à cette Cité qui semble prendre vie sous nos yeux. Efficace, addictif et prometteur, ce premier volume atteint son objectif principal avec aisance : ferrer le lecteur pour l'emmener vers le prochain volet imaginé par Claire Duvivier.
Rendez-vous en Octobre donc.
Lien : https://justaword.fr/capital..
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Aujourd'hui nous sommes le 22 novembre 2023 et cela fait exactement dix ans que je suis sur Babelio !
C'est l'occasion pour moi de dire à quel point Babelio revêt de l'importance pour moi. Tous les passionnés de lecture ne me contrediront pas !
Babelio, c'est la bibliothèque rêvée ...Alors,oui, bien sûr, il peut y régner une certaine confusion lorsqu'on y pointe le bout de son nez, mais c'est pour mieux y trouver la perle rare !
C'est l'endroit idéal pour ne jamais être à cours de lectures ! ça en devient même étourdissant !

Ce fut le cas pour cette nouvelle série La Tour de Garde que j'ai découverte au hasard de mes pérégrinations sur ce site magique.
Ils sont deux auteurs. Guillaume Chamanadjian s'est attelé à nous narrer l'histoire de Nox vivant à Gemina, capitale du Sud. Claire Duvivier, elle, s'est attardée dans la Capitale du Nord à Dehaven.
Visiblement, les deux "Capitales" peuvent se lire indépendamment mais il existe des liens inévitables entre les deux alors autant ne pas gâcher son plaisir et s'engouffrer avec délectation dans la série complète de la Tour de Garde.

Ce premier tome m'a ravie et donne vraiment envie de connaître la suite.
Nox, le personnage principal, est attachant et nous entraîne à la découverte de Gémina, une mégapole surpeuplée, où se côtoient, avec plus ou moins d'animosité, une multitude de duchés.
Entre secrets politiques, trahisons, mystères antiques, amitiés et amours qui se nouent, rebondissements retentissants, on ne s'ennuie pas une seconde dans ce roman ! La fin est particulièrement haletante et laisse son lecteur sur sa faim...
Mais avant d'attaquer le second tome, je vais d'abord aller faire un tour du côté de la Capitale du Nord.
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Les éditions Les Forges Vulcains nous proposent encore une fois une petite pépite avec ce premier tome de la Capitale du Sud ! Projet d'écriture à quatre mains avec Claire Duvivier ("La Capitale du Nord"), Guillaume Chamanadjian lance les hostilités en nous proposant ici un travail d'orfèvre avec la ville de Gemina.

Lutte de pouvoir entre grandes familles, magie discrète et légendes obscures seront le sel de ce récit baigné dans une ambiance inspirée par les grandes villes méditerranéennes. Guillaume Chamanadjian arrive parfaitement à instaurer une ambiance particulière et immersive très appréciable accompagnée d'une très jolie plume. Nous suivons principalement le personnage de Nox, jeune livreur d'un marchand au passé obscur. le récit est énigmatique et addictif. Guillaume Chamanadjian charme avec l'ambiance de sa ville tout en proposant une intrigue intelligente. Attention, la fin est très frustrante et laisse beaucoup de questions en suspense ! Vite la suite !
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« Le sang de la cité » est le premier roman se déroulant dans l'univers partagé de « La tour de garde » qui sera exploité de façon complémentaire par deux auteurs : Claire Duvivier (autrice du très remarqué « Un long voyage », dont le prochain ouvrage est prévu pour octobre 2021) et Guillaume Chamanadjian. Tous deux ont pour objectif d'écrire une trilogie consacrée chacune à deux cités majeures : Dehaven dans le cas de Claire Duvivier (« Capitale du Nord ») et Gemina pour Guillaume Chamanadjian (« Capitale du Sud ») qui inaugure donc ici la saga de « La tour de garde ». Nous voilà plongé dans une sorte de cité-état inspirée de la Renaissance italienne dans laquelle plusieurs grandes familles se partagent le pouvoir. Parmi elles, la maison de la Caouane a connu une ascension fulgurante suite à sa victoire sur un clan rival, entièrement annihilé à l'exception de deux enfants à l'origine incertaine, retrouvés enfermés dans une prison souterraine lors de l'assaut final. C'est l'un d'eux qui va nous servir de narrateur pour cette histoire, un adolescent du nom de Nox dont la vie se partage entre le Moineau-du-Fou, chef lieu du camp de la Caouane, et Saint-Vivant, établissement particulièrement renommé chez les gourmets et pour lequel il assure le rôle de commis, livrant vin et sucrerie à tout le gratin de la cité. Son quotidien va toutefois être chamboulé par le projet ambitieux du duc Servaint de construire un canal traversant la cité de part en part afin de faciliter l'acheminement des marchandises. Un projet grandiose qui suscite énormément d'hostilité, notamment de la part des maisons du centre de la cité qui seraient alors privées de leur rôle d'intermédiaire et des bénéfices que cette position engendre. Bien malgré lui, Nox va se retrouver entraîné dans des intrigues politiques qui le dépassent alors que le duc entend le mettre à profit tour à tour en tant que diplomate ou assassin.

Pour un premier tome, on peut dire que « Le sang de la cité » se révèle particulièrement prometteur. le roman met en scène une cité d'inspiration méditerranéenne, à mi-chemin entre de grandes villes italiennes comme Siennes ou Gênes ou d'une cité portuaire comme Marseille. Véritable labyrinthe de ruelles et quartiers impossibles à cartographier précisément, la ville de Gemina séduit immédiatement par la chaleur qui se dégage de ses habitants, ainsi que par les secrets qu'on y devine enfouis. Cette première ballade nous permet de nous familiariser avec l'atmosphère de la ville et ses monuments ou quartiers les plus emblématiques. L'auteur fait énormément appel à nos sens, à commencer par l'ouïe, l'odorat et le goût qu'il parvient efficacement à retranscrire au lecteur qui salivera plus d'une fois à la description des spécialités culinaires locales. le découpage par clan est intéressant et rappelle là encore les cités italiennes de la Renaissance dont l'auteur semble également s'être inspiré pour ses intrigues politiques. Complots, alliances et trahisons sont en effet au coeur de ce premier tome qui met en scène la confrontation entre plusieurs maisons rivales de Gemina. Par cet aspect, le roman a un petit côté « Gagner la guerre » (la gouaille et le protagoniste retors en moins) tout en s'inspirant pas mal de l'« Assassin royal ». On a en effet avant tout affaire à un récit initiatique au cours duquel on assiste à la transformation de Nox en assassin au service du duc qui l'a recueilli. La formation du héros est toutefois loin d'être l'unique centre d'intérêt du roman qui, comme dans la série de Robin Hobb, s'attache également à décrire le quotidien du personnage, loin des intrigues de cour. On suit ainsi le jeune homme dans ses courses pour livrer tel ou tel met délicat dans la capitale, on le voit également se lier d'amitié avec d'autres jeunes de son âge mais aussi manger, jouer, déambuler dans les rues… Loin d'être anecdotiques ou ennuyantes, ces scènes permettent de mieux cerner le personnage aussi bien que la cité dont on apprend peu à peu les codes et les spécificités.

Le début souffre cela dit de quelques longueurs et de légers problèmes de rythme, problèmes toutefois vite résolus dans la deuxième partie du récit qui se fait bien plus trépidante. La politique prend alors peu à peu le pas sur le quotidien (un peu répétitif) de Nox et permet à l'auteur de surprendre agréablement le lecteur par plusieurs retournements de situation joliment amenés. Parmi les nombreuses qualités dont peut se targuer le roman, on peut également mentionner les personnages, et notamment le protagoniste et narrateur. Un peu lent à la détente parfois mais d'une grande gentillesse et animé par une volonté de bien faire et de ne pas blesser, Nox est un personnage très sympathique qu'on prend énormément de plaisir à suivre dans ses pérégrinations au sein de la cité. L'auteur a l'intelligence de nous épargner le stéréotype de l'ado rebelle qui passerait la moitié du roman a combattre les plans fomentés pour lui par le duc et son entourage pour nous offrir à la place un jeune homme mature, qui a bien conscience de ce qu'il doit à la maison qui l'a recueilli et des obligations qui vont de paire avec son nouveau statut. le récit offre également une belle galerie de second-couteaux qui ne demandent qu'à s'étoffer et qui possèdent des origines sociales variées, du fils d'une petite propriétaire d'un vignoble à la fille d'un duc en passant par la capitaine de la garde de la Caouane ou encore une apprentie artiste-peintre. La conclusion de ce premier tome offre une fin satisfaisante, l'arc narratif développé ici étant d'une certaine manière terminé, mais la curiosité est forte de découvrir ce qui attend la cité dans les prochains volumes.

Pari réussi pour Guillaume Chamanadjian qui inaugure avec talent l'univers de la Tour de Garde qu'on ne peut qu'être ravi de voir s'étoffer sur cinq autres tomes. L'intrigue, bien qu'un peu lente à se mettre en route, est habilement construite et parvient efficacement à maintenir en éveil l'intérêt du lecteur jusqu'à la toute fin. le narrateur, lui, séduit par la sympathie qu'il dégage ainsi que par sa simplicité, de même que par le sentiment communicatif qui l'habite d'être pris dans un engrenage complexe. Une belle découverte, qu'il me tarde de prolonger avec le roman de Claire Duvivier cet automne.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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critiques presse (3)
Liberation
09 septembre 2021
C’est l’annonce d’une mise abyme d’une partie qui se joue à plus grande échelle, et pour lequel le premier tome a posé les contreforts, notamment des personnages, dont la redoutable Daphné, sœur de Nox et monstre au sang froid. La première fin paraît hélas prévisible, mais Nohamux de la Couane donne envie de le suivre.
Lire la critique sur le site : Liberation
Syfantasy
19 juillet 2021
Guillaume Chamanadjian est un auteur à suivre car en une seule phrase il est capable de capter l’attention de son lecteur et de lui faire découvrir sa Cité : complots, vin, bouchées et surtout beauté. Le Sang de la Cité est une ode magnifique à la culture dans un univers de fantasy envoûtant vivant au rythme effréné d’une cité inoubliable.
Lire la critique sur le site : Syfantasy
Elbakin.net
24 mars 2021
"Le Sang de la cité – Capitale du sud" reprend les codes du roman d’apprentissage tout en y ajoutant des recettes bien connues. Laissons à l’auteur le temps pour déployer son histoire. En attendant, le style et la narration font mouche, les ingrédients sont indéniablement de qualité.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (47) Voir plus Ajouter une citation
Il prit une de mes fioles et la remplit du contenu d’une barrique pourvue d’un robinet. Avant de la reboucher, je humai le contenu. Comme attendu, le vin était très boisé. Mais, derrière la fragrance qui dominait, je sentis des nuances plus complexes. Cerise noire, sous-bois et un soupçon de vanille. Il était également possible que le vin ait été rehaussé en sucrosité par l’ajout d’un peu de miel. Je bus une demi-gorgée et notai que la mère du garçon connaissait effectivement son métier. Trop de bois, certes, mais c’était ainsi que le duc Servaint aimait ses vins, par exemple. Ce serait amusant de le lui faire déguster puis de lui dire que le domaine qui l’avait produit était intra-muros, à la lisière même du secteur de la Caouane.
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Une pièce d’argent pour un conte en or.
C’est de cette manière que les histrions et les poètes apostrophent les passants. Il est rare qu’ils obtiennent ainsi plus d’une pièce de cuivre, mais la formulette est pour ainsi dire traditionnelle. Elle existait avant que leur congrégation déambule dans les rues avec un bandeau sur les yeux, avant les maisons. Certains disent avant même la création de la Cité.

Une pièce d’argent pour un conte en or. Des dizaines de milliers de poèmes et chansons commencent ainsi. Des milliers d’entre eux parlent de la ville, quelques dizaines du duc Servaint. Et une petite poignée parmi ceux-là a cru bon de me mentionner.
(incipit)
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Une pièce d’argent pour un conte en or.
C’est de cette manière que les histrions et les poètes apostrophent les passants. Il est rare qu’ils obtiennent ainsi plus d’une pièce de cuivre, mais la formulette est pour ainsi dire traditionnelle. Elle existait avant que leur congrégation déambule dans les rues avec un bandeau sur les yeux, avant les maisons. Certains disent avant même la création de la Cité.
Une pièce d’argent pour un conte en or. Des dizaines de milliers de poèmes et chansons commencent ainsi. Des milliers d’entre eux parlent de la ville, quelques dizaines du duc Servaint. Et une petite poignée parmi ceux-là a cru bon de me mentionner.
Tous débutent dans les ruelles écrasées de soleil, il y a des années de cela. On y fait état de trous de cigales entre les pavés, du présage heureux que les insectes poètes sont censés apporter. Les hommes du Souffleur étaient retranchés au Moineau-du-Fou. Tremblants, les doigts serrés sur leurs sabres aux pommeaux ornés de nageoires. Les habitants du secteur du Port, Pieuvres, Jubartes et Crabes, s’étaient terrés dans leurs masures, entassés les uns sur les autres afin de laisser les rues vides en prévision de la bataille. Derrière la placette des Enfants-Dus, à quelques centaines de mètres, la Caouane formait ses rangs.
Un consensus pour l’attaque avait été arraché au Conseil de la Cité quelques heures auparavant. Des années de tractations pour en arriver là. Et le duc Servaint, enfin assuré que personne ne viendrait au secours des dauphins pour contrecarrer sa vengeance, avait réuni ses hommes à la hâte. Il avait tenu un discours galvanisant en étreignant son sabre à la garde d’argent contre lui. Ses mots avaient touché les âmes, débusqué des haines enfouies, fait se dresser une forêt de lames noircies par les ans. Il y était question de malédictions antiques, d’équilibre des forces, de clans massacrés, ce qui appelait un juste châtiment pour le Souffleur. Il y était question de lui, Servaint, se faisant instrument d’un destin cruel, prêt à mourir pour que le crime qui avait coûté la vie à sa sœur ne demeure pas impuni. Il y était question de meurtre, et plus encore : de l’éradication d’une maison dans son entier.
De l’assaut en lui-même, les chansons vantent la violence des chocs, le courage des assaillants face à la traîtrise des assiégés, l’ingéniosité de Scholas, qui parvint à faire manœuvrer une tourelle d’assaut dans la rue Lice-des-Noyadés, les cris épouvantés de Souffleurs qui couvraient les ordres du duc. Personne ne doute que l’histoire est enjolivée, mais qu’y puis-je ? Les contes sont écrits pour les vainqueurs.
La bataille commença au point du jour, mais ce ne fut qu’au crépuscule que la porte du Moineau céda. Servaint se trouvait en pointe, faisant tournoyer son épée pour exhorter ses hommes épuisés à enjamber les cadavres de leurs camarades afin d’en finir avec cette « engeance maudite » – les termes sont du poète Valère le Caverneux, fameux pour ses strophes hyperboliques. Cinq dauphins se jetèrent sur lui, mus par l’énergie du désespoir. Il dut les combattre seul, en se servant des couloirs étroits de l’escalier pour qu’ils se gênent mutuellement. Il trancha le nez à l’un, les oreilles à l’autre, sa main forte au troisième et la gorge au quatrième. Quant au dernier, il finit proprement embroché comme un poulet, laissant ainsi l’accès libre aux étages.
Pendant ce temps, le duc Adelphes s’était réfugié au troisième étage. Ses soudards les plus fidèles achevaient de préparer un odieux système de poulie visant à répandre de la poix dans tout le reste du bâti afin d’y mettre le feu, tandis qu’eux s’échapperaient par les toits en tuiles. Les victimes se compteraient par centaines, dauphins comme tortues. Le Moineau-du-Fou en porterait à jamais les stigmates. La fumée se verrait depuis le Galevain et même les clans du nord de la ville sauraient qu’on ne défie pas Adelphes impunément. Il leva le bras pour donner l’ordre de la mise à feu, mais, au lieu d’un cri, ce fut un gargouillis qui s’échappa de sa gorge. Ses hommes eurent à peine le temps de voir le pommeau du couteau qui s’était enfoncé dans sa trachée qu’il s’effondra. Ils se jetèrent alors sur la silhouette qui venait de jaillir de la fenêtre après avoir escaladé depuis l’extérieur : Tyssant, le jeune sauveur de la Tortue, qui venait ainsi d’entrer dans l’histoire de son clan.
Il put en occire deux avant d’être à son tour grièvement blessé. Où fut-il touché ? Les chants n’en parlent pas. Même Valère le Caverneux ne fait état que du « sang qui s’échappait à gros bouillons de son être », de la « pâleur de cadavre de ses joues ». Sa mise à mort fut interrompue par l’arrivée de Servaint, qui sauva le garçon à son tour, les liant ainsi par un pacte éternel.
La nuit tombait quand les cris vaincus cessèrent de résonner entre les murs de la Cité. Servaint avait fait transporter Tyssant dans ses quartiers afin qu’il y soit soigné. La Caouane s’apprêtait à se réfugier sous sa carapace, et c’est là que je fis mon apparition.
Les chants diffèrent quant à l’enchaînement des événements. D’après Valère, c’est le duc lui-même qui remarqua la trappe dissimulée sous un tapis. Ursien le Mielleux soutient que c’est Scholas qui, sentant un courant d’air dans les quartiers d’Adelphes, ôta d’un geste la peau de loup, dévoilant ainsi le passage souterrain. Tous deux s’accordent néanmoins sur le fait que c’est maître Servaint de la Caouane qui se saisit d’une torche et fut le premier à descendre l’échelle. Quand il arriva en bas, ce fut pour constater qu’il n’y avait qu’un escalier, descendant toujours plus bas dans les entrailles de la Cité. D’un geste, il balaya les conseils de prudence des quelques hommes qui l’avaient accompagné, rappelant les légendes effroyables au sujet des tréfonds de la ville. Scholas parvint à le convaincre de progresser en deuxième ligne, derrière lui, et ce fut le vieil ingénieur qui, après une lente et angoissante progression souterraine, fut le premier à éclairer une lourde porte en bois.
« Messire Duc, c’estoit là diablerie du fourbe Souffleur ! lança un homme d’après Ursien, démontrant ainsi le peu de maîtrise qu’avait le poète de l’hexamètre dactylique. N’entrez point, je vous conjure ! De hideux démons pulluloient sous nos pieds. »
Mais Servaint ne l’écouta pas et se mit à attaquer la serrure avec son épée, insouciant du bruit qu’il faisait et qui pouvait attirer d’autres mauvais démons en ce lieu. Après maints efforts, il entendit le métal ployer et enfonça la porte. À une, puis deux, puis trois reprises, jusqu’à ce que, dans un vacarme assourdissant, la serrure cède et que le duc s’effondre dans une cellule obscure et malodorante.
L’attaque fut instantanée, si bien qu’il n’eut pas le réflexe de se saisir de son arme tombée au sol. Des griffes lui lacérèrent le visage, des dents mordirent son poignet. Il hurla de douleur, maudit les démons qui étaient parvenus à le blesser alors que le Souffleur ne lui avait même pas infligé une égratignure. Il parvint à se mettre sur le dos pour se défendre des assauts furieux des deux créatures qui l’assaillaient. Suffisamment en tout cas pour que Scholas et un autre homme entrent à leur tour et fassent fuit les monstres en agitant leurs torches.
Bien sûr, Ursien n’entre pas dans les détails. Je tiens ceux-ci de Scholas, qui se précipita pour relever son duc, tandis que les créatures se terraient dans un coin de la cellule, le plus possible à l’abri de la lumière. Et c’est tremblant de colère et d’indignation que Servaint détailla les choses qui se tenaient sous ses yeux. Un garçon et une fille, nus et couverts de leurs propres excréments. Des enfants beuglant de terreur, cachant leurs yeux blanchis par les ténèbres derrière des doigts griffus et terreux.
Le duc se saisit du garçon par le bras. Il le plaqua contre un mur de la cellule et le souleva du sol. La créature se tortilla, se débattit, rua, chercha une prise de ses ongles mais ne trouva que l’épaulette en cuir du duc. Servaint demanda de la lumière, éclaira le visage crotté du gamin en le maintenant de force par les joues. L’espace d’un instant, Scholas crut qu’il allait lui planter son épée dans le corps, mais le duc relâcha soudain son emprise. Il était las.
Des ordres furent donnés. De nouveaux cris retentirent. Les soldats n’eurent aucun mal à maîtriser de si pitoyables créatures, et c’est ainsi que ma sœur et moi émergeâmes pour la première fois à la surface de la Cité.
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Je saisis mon repas et tendis vers elle la pâte à beignets croustillante nappée de lard. « Sais-tu pourquoi cela s’appelle une orechie ? » Elle secoua la tête. « Ça veut dire oreille, dans un patois de la ville. Autrefois les ducs se réunissaient en plein air, lors du carnaval ou du tournoi de la Canopée. On leur servait une abondante quantité de ces choses. Et c’était tellement bon qu’ils pouvaient demeurer sur place à manger et manger encore tout en devisant. C’était à ce moment-là que le petit peuple pouvait laisser traîner ses oreilles et savoir quels nouveaux impôts allaient leur tomber dessus dans l’année. D’où le nom.
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                    CHAPITRE 1



     extrait 2

     La Recluse avait rasé l’ancien poste de garde, qui menaçait de s’effondrer après les événements du Port, j’avais donc de Saint-Vivant une vue directe sur la butte du Moineau-du-Fou, et particulièrement sur le grand escalier. C’est ainsi que je remarquai une silhouette qui descendait les marches, une à une, avec une infinie précaution. Je terminai de sortir les tables de l’échoppe, déployai la toile au-dessus des pâtisseries, me sustentai d’un beignet aux poires et croquai dans une orange juteuse en prenant mon temps.

     Enfin, Scholas apparut. Depuis qu’il avait été blessé, ce jour funeste du mariage de Servaint de la Caouane et Vitia de l’Hirondelle, le vieil ingénieur claudiquait en s’aidant de béquilles. Il avait un temps envisagé de se construire une sorte de siège avec des roues, qui aurait été mû à l’aide d’un engrenage actionné à la main, mais le premier test sur les pavés irréguliers de la Cité avait donné des nausées à son assistant. Au deuxième test s’était posée la question des escaliers. Il y avait eu un accident, beaucoup de rires dans le quartier de la Caouane, mais de troisième test, point. D’ailleurs, il n’y avait plus d’assistant. Et Scholas avait abdiqué, sacrifié la créativité sur l’autel du pragmatisme, et dès lors ses arrivées étaient précédées par les martèlements maladroits de ses cannes et ses jurons bien sentis contre la Recluse qui négligeait de réparer les pavés.
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Vidéo de Guillaume Chamanadjian
Extrait du livre audio « Trois Lucioles » de Guillaume Chamanadjian lu par Maxime Baudouin. Parution numérique le 25 octobre 2023.
https://www.audiolib.fr/livre/trois-lucioles-9791035412647/
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