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02 novembre 2011
Grégoire Chamayou met en perspective différentes périodes, de chasse à l'homme, dans la longue histoire de la violence des dominants.

L'auteur nous rappelle, dans un premier chapitre « La chasse aux boeufs bipèdes » que la chasse à l'homme « ne fabrique pas son objet mais l'obtient par prélèvement sur une extériorité. » Technique de pouvoir, la chasse ne figure cependant pas parmi les arts politiques à part entière dans la cité grecque.

L'auteur aborde son sujet par son véritable coeur « L'histoire des chasses à l'homme se fera donc par celles des techniques de traque et de capture mais aussi par celle des procédés d'exclusion, des lignes de démarcation tracée au sein de la communauté humaine afin d'y définir les hommes chassables »

Une rupture est introduite avec le christianisme. La « chasse pastorale » se déploie au nom de la protection du troupeau. C'est l'objet d'un chapitre « Brebis galeuses et hommes loups. »

Puis l'auteur analysera successivement « La chasse aux indiens », « La chasse aux peaux noires », « La chasse aux pauvres », « Les chasses policières », « La chasses aux étrangers » (en fait, chasse aux travailleurs étrangers), « La chasse aux Juifs » et « La chasse aux hommes illégaux ».

Dans ce dernier chapitre l'auteur rejoint les analyses des auteurs de Douce France. Rafles Rétentions Expulsion (Sous la direction d'Olivier le Cour Grandmaison, Editions Seuil-RESF, Paris 2009). « Si l'apatride est exclu du régime de la protection légale, ce n'est pas pour avoir commis une infraction : au contraire, il est lui-même cette infraction, du seul fait de son existence, par sa seule présence sur le territoire de l'État-nation. » L'exclusion légale des travailleurs sans papiers permet leur inclusion dans des conditions salariales d'extrême vulnérabilité et concoure à la dérégulation de l'ensemble du rapport salarial.

Dans le chapitre sur « La dialectique du chasseur et du chassé », Grégoire Chamayou souligne « la chasse suppose une forme d'empathie avec la proie : pour traquer efficacement, il faut se mettre à sa place. Or cette opération mentale impliquait de nier la distance sociale absolue que le rapport de chasse visait précisément à réinstaurer entre les maîtres et leurs esclaves »

L'auteur pense les contradictions de la civilisation, du contemporain « En posant l'extériorité de la barbarie à la civilisation sur le mode d'un évolutionnisme horloger, on s'empêche en fait de saisir ce que la barbarie peut avoir de contemporain, la façon dont elle peut continuer d'habiter la »civilisation » même comme sa condition cachée. » Et en tire des conclusions en terme d'émancipation « Sortir de l'ornière passe par réactivation de catégories non-judiciaires de l'identification politique, par la reconnaissance d'une subjectivité active parce que déjà engagée dans un processus d'auto-émancipation. »

Il conviendrait aussi de prendre en compte les rapports sociaux de sexe (de genre) pour mieux comprendre ces politiques de chasses qui ne se limitent pas aux hommes.

Lectures complémentaires possibles : Nathan Wachtel : La logique des bûchers (Éditions du Seuil, Paris 2009) ; Olivier le Cour Grandmaison : Coloniser Exterminer. Sur la guerre et l'Etat colonial.( Fayard, Paris 2005)
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