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Critique de Apoapo


Ce livre précieux est à la fois une analyse et un plaidoyer. En prenant comme angle d'attaque les migrants et comme interlocutrices une bénévole d'association (Jane) et une réalisatrice de documentaires (Hind), dans un court mais très dense ouvrage au style poétique autant qu'enlevé, il affronte les principaux thèmes de la mondialisation néo-libérale, requalifiée de « barbarie » – côté analyse – et prône une réinvention inclusive, hospitalière, ouverte, solidaire et vitaliste de la politique des Nations désuètes, frileuses et apeurées – côté plaidoyer. Pour cela, il convoque et cite certains concepts-clefs d'Édouard Glissant, qui ont la particularité de former par assonance des couples d'opposés avec mots bateau propres à ladite barbarie : mondialisation vs. mondialité, relationnel vs. Relation, et quelques autres partagés avec des spécialistes (Michel Agier), des philosophes (Deleuze, Morin) et des écrivains (Pasolini, et alii [cit. in extenso, p. 128]).
Le concept de Relation de Glissant, le plus propre à s'adapter au contexte migratoire, est donc particulièrement développé. Cependant le côté plaidoyer de l'ouvrage auquel il s'applique, semble plus « poétique » et plus utopique, voire plus irréaliste que l'analyse : l'indiquent entre autres choses l'intitulé du chapitre « Le Droit aux poétiques » - (alors que certains spécialistes reconnaissent le surgissement timide d'un véritable et juridique droit international relatif aux migrations, cf. Claire Rodier) – et le très réussi ch. conclusif, « Déclaration des poètes », qui, en 16 articles, sonne comme un texte de loi édicté par « les poètes », dans un vocabulaire imagé et métaphorique qui leur est propre. Nécessairement, pourra-t-on rétorquer, du fait qu'il requiert la mobilisation d'un changement d'imaginaire politique. Forcément, puisque les auteurs convoqués, et Glissant le premiers, sont d'abord des poètes... Évidemment, vu que Chamoiseau l'est aussi. Pourtant, aurions-nous oublié comment le poète devient intellectuel engagé, lorsque sa conscience le lui impose, et quels sont les horizons actuels de l'engagement ? Pourrions-nous, peut-être par méfiance envers certaines méprises de la génération précédente d'intellectuels engagés, refuser, avec leur appellation, leur fonction sociale tout entière, et faire comme si la haute responsabilité morale de dénonciation politique qui leur incombe fût dorénavant déléguée aux « poètes » et à leurs « poétiques »... ?
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