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Critique de bina


Le roman de Patrick Chamoiseau est constitué de deux sortes de narration : 4 extraits d'un journal d'un capitaine de bateau européen, naviguant vers les Amériques, et trois grands passages, longs monologues de Robinson Crusoé.
Chacune de ces parties à un rôle à jouer dans l'histoire.

Les extraits de journaux permettent de dater et de contextualiser le récit de Robinson et de voir les différences entre les deux versions de l'histoire, et surtout peu à peu de comprendre l'état d'esprit du solitaire.

La solitude…ce que vit ce naufragé ( ?), mais on se rend compte que son esprit est très peuplé !!! Intéressons nous à ses propos.
Il n'y a aucune majuscule, même pas pour le premier mot, comme si nous prenions le livre en cours de propos. L'absence de point est caractéristique de cette logorrhée. L'auteur explique l'usage du point virgule comme un signe d'instabilité mentale. Ce monologue s'ouvre sur une adresse à un ‘'seigneur'', et dans un premier temps, on pense à Dieu. le dernier extrait du journal nous fournit la réponse. Il se raconte au capitaine venu le récupérer, et le récit couvre donc les 20 ans, estime-t-il, de son séjour dans l'île.

Cependant, on note une évolution de son comportement et de son état d'esprit. On le pense lucide, se donnant des repères pour ne pas perdre la tête, s'exprimant pour rester un ‘' homme-vrai''. le rôle du verbe. du moins, croit-il parler et écrire normalement, mais on se rend compte qu'il sombre dans l'animalité et dans la folie. Cette folie qui s'exprime par sa fixation sur une empreinte dont on doute nous-même de l'existence. Lorsqu'on comprend qu'il a des hallucinations, on se demande si tout ce qu'il nous a raconté est réel : l'organisation qu'il a donnée à l'île, les structures qu'il s'est imposé….On obtient une variation entre île de rêve, rêvée pour survivre ? et île monstrueuse, carcérale.

Malgré ces doutes sur son état mental, on le voit renaitre. Après la panique à la vue de l'empreinte, succède une chasse à l'homme, puis une prise de conscience. La conscience de son humanité. Il recherche alors l'inconnu pour l'accueillir. Il semble retrouver son côté humain, physique et mental, mais c'est encore un autre aspect de sa personnalité qui émerge. Sa vraie renaissance aura lieu sur le navire du capitaine venu le récupérer, lorsqu'il entendra les cris des esclaves…

La boucle est bouclée, à quand un nouveau Robinson sur les trente ans passés dans l'île par le nouveau naufragé ?

Les récits sont constitués de multiples descriptions, et habituellement, c'est le genre de chose qui finit par me lasser, mais ici leur richesse est intéressante. Cela ne se lit pas rapidement comme d'autres histoires, on se plonge avec plaisir dans les paysages et dans l'esprit de Crusoé. On étudie son rapport aux autres, à la solitude, et à l'île, personnage à part entière. Un récit et une écriture contemporaine pour une nouvelle robinsonnade, un régal.


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